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6   L’enquête de terrain et les sources orales et écrites 39

6.3   Les sources écrites : présentation et critique 44

Pour mener à bien cette recherche, j’ai eu recours à des documents d’archives. J’ai pris soin de les soumettre à une critique interne et externe et à croiser les informations.

Aux Archives nationales du Canada, j’ai consulté des documents appartenant au fonds du ministère du Nord canadien et des Ressources nationales et du subséquent ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, notamment le fonds « Administrator of the Arctic ». Ces archives sont le produit d’administrateurs fédéraux et reflètent de ce fait les préoccupations du gouvernement fédéral en termes de politique nordique et de gestion des populations inuit. Elles relèvent les différents « problèmes » rencontrés par le gouvernement fédéral dans le développement d’une administration nordique. En regardant de plus près ces « problèmes », j’ai bien souvent pu mettre le doigt sur des résistances de la part des Inuit au développement administratif.

Les archives de la Direction générale du Nouveau-Québec (DGNQ), organisme chargé d’assurer la responsabilité du gouvernement provincial québécois sur sa région arctique de 1963 à 1978, sont de même nature. Y sont conservés des documents rédigés par les agents locaux relatant souvent des problèmes administratifs et des courriers et des rapports internes concernant l’organisation de la DGNQ et ses politiques nordiques.

Les archives de l’Institut culturel Avataq, organisme qui a la mission de conserver la mémoire et les traditions des Inuit du Nunavik, sont parfois difficilement accessibles. Les archives de l’association Inuit tunngavingat nunaminni (ITN) et de

45   nombreux enregistrements audio de réunions politiques organisées au cours des années 1970 et 1980 y sont conservés, mais je n’ai pas pu y avoir accès puisque la documentation n’a pas encore été traitée par le service d’archives. C’est fort dommage car je pense que ces archives sont un véritable trésor culturel pour mieux comprendre l’histoire politique des Inuit du Nunavik.

À la Fédération des coopératives du Nouveau-Québec (FCNQ), j’ai exploré la bibliothèque générale qui rassemble principalement de la littérature institutionnelle qui ne présentait pas véritablement d’intérêt pour cette recherche. En revanche, les minutes des assemblées générales de la FCNQ et du comité exécutif n’y sont pas disponibles. J’ai eu la chance de pouvoir les consulter chez Peter Murdoch qui les a conservées. Mais notons qu’elles sont aussi disponibles aux Archives nationales du Canada au sein du fonds du Conseil des Arts.

Aux archives des oblats de Marie-Immaculée, j’ai consulté les documents relatifs à la mission d’Ivujivik, notamment le Codex historicus des années 1940 à 1961, ainsi que des correspondances entre le missionnaire et ses supérieurs ou avec d’autres acteurs travaillant dans le Nord. Ces documents révèlent certaines tensions intéressantes à l’époque entre les missionnaires et les commerçants.

J’ai eu la chance de pouvoir faire parvenir à l’Université Laval, par prêts entre bibliothèques, quelques bobines de la Compagnie de la baie d’Hudson. Celles-ci rassemblaient les journaux du poste de Wolstenholme, proche d’Ivujivik, que j’ai consulté pour les années 1909-1920.

Les archives des différents organismes et institutions inuit du Nunavik sont souvent très lacunaires, dispersées et en fait non classées. Lorsque j’ai demandé à avoir accès aux archives des conseils municipaux ou des coopératives, on m’a souvent répondu qu’elles avaient malheureusement disparu ou été perdues au cours de déménagements ou d’incendies33. Mais de nombreux Inuit ne comprenaient pas

toujours ce que je cherchais, le mot « archives » (en français ou en anglais) n’étant pas toujours connu, ou bien la personne ne savait pas où ces vieux papiers se

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trouvaient, ou ne souhaitait tout simplement pas les chercher. En insistant un peu à Ivujivik, j’ai découvert que les archives du conseil communautaire consistaient en quelques cahiers de compte (bingo, vente de pierre pour sculpter, paye du personnel, etc.), ce qui ne présentait que peu d’intérêt pour mon travail. À l’Administration régionale Kativik, il n’existe aucun service d’archives. Chaque département a la responsabilité de ses archives et la nature de leur conservation dépend bien souvent de l’intérêt que les personnes du service leur attribuait.

Une autre source écrite que j’ai exploitée dans le cadre de cette thèse est internet, et notamment Facebook. Les interventions de mes « amis Facebook » inuit sur leur page personnelle étaient parfois riches d’enseignements, mais deux forums de discussion ont particulièrement retenu mon attention : « Your voice on Nunavik issues » et « Nunavik and the Nunavik Regional Governement ». Le premier est un groupe ouvert qui comprend 1354 membres originaires principalement du Nunavik, Inuit et non-Inuit, intéressés à ce qui se passe dans la région34. Les discussions

concernent des sujets politiques, sociaux ou culturels et reflètent des points de vue très variés. Média très populaire au Nunavik, cette page Facebook rassemble des contributions de tout type de personnes, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, mais également de tout type de milieux sociaux. Le deuxième forum qui m’a intéressé a été créé le 21 février 2011 par un groupe de personnes originaires d’Inukjuak souhaitant offrir un espace de discussion à l’approche du référendum du 27 avril 201135. Les sujets abordés dans ce groupe de discussion de 908 membres36

sont principalement politiques et concernent les questions d’autonomie politique et de gouvernance. La mission première de ce groupe est d’attirer les jeunes ou les personnes moins intéressées par les sujets politiques à poser des questions, à discuter et à donner leur avis. Ce forum se réclame d’être aujourd’hui un véritable lieu de transmission des savoirs37 qu’il serait d’ailleurs intéressant d’étudier. Je garde

34 Chiffre relevé le 21 août 2012.

35 Référendum proposant aux résidants du Nunavik l’acceptation de l’Accord final visant à la création

d’un gouvernement régional au Nunavik.

36 Chiffre relevé le 21 août 2012.

37 Déclaration de Johnny Kasudluak, publiée sur le site internet Qanuuk, consulté le 26 novembre

47   anonymes toutes les interventions publiées sur Facebook qui sont reproduites dans ce travail.