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DEVANT LE TEMPS

PASSION ET SACRIFICES

I. Robert Bresson : âme pour âme

1. Les Anges du péché : un échange surnaturel

On ne meurt pas pour soi, mais les uns pour les autres, ou même les uns à la place des autres.

Georges Bernanos

C’est sous l’Occupation, au sortir de dix-huit mois de captivité en Allemagne, que Robert Bresson écrivit le scénario des Anges du péché à partir d’une idée du Père Bruckberger qui venait lui-même de passer cinq mois en prison entre la vie et la mort.

Crédité à l’égal de Jean Giraudoux, auteur des dialogues qui participèrent au succès du film385, le Dominicain suggéra à Bresson la lecture de l’ouvrage du Père Lelong : Les Dominicaines en prison. Dans le texte qui précède Les Anges, Bresson précise : « Ce film s’inspire de la vie d’une congrégation dominicaine fondée en 1867 par le Père Lataste. » Nommée par son initiateur « Béthanie » (du nom de la ville où Marie-Madeleine répandit un parfum de grand prix sur les pieds du Christ), la congrégation dont Bresson s’inspira avait la mission suivante :

« Son but spécial est la réhabilitation des libérées de justice et le relèvement moral des personnes qui, ayant failli, ont perdu l’honneur sans perdre la liberté. La congrégation donne à toutes celles que le repentir et l’amour de Dieu ont sincèrement converties les moyens de persévérer et de croître dans la vertu, et à celles d’entre-elles qui auraient la vocation religieuse la possibilité d’arriver, par degrés successifs, à en faire profession.386 »

385 Consulter la critique enthousiaste de Sacha Guitry dans le Panorama du 22 juillet 1943, reprise dans Robert Bresson, Éloge : « Ah ! L’admirable film. Il l’est d’un bout à l’autre — sans une faute de goût — sans une faute de français. (…) C’est bien mieux que du cinéma. », op. cit., p. 13.

386 Constitution citée par Jean Sémolué, op. cit., p. 35.

Si le livre du Père Lelong relate la libération d’une détenue que les religieuses vont chercher au sortir de prison, les scénaristes ont construit une intrigue dont la dimension est à la fois policière et documentaire, ce que confirme l’avertissement initial

— « Les auteurs ont la responsabilité de l’intrigue qu’ils ont imaginée, mais se sont efforcés par des images et des détails pris à la réalité de respecter l’atmosphère qui règne dans ces couvents et l’esprit qui anime leur mission ». Pour ce qui est de l’aspect documentaire, nous sommes encore loin de la rigueur obsessionnelle d’Un condamné, bien que la stricte observation de la vie religieuse participe de l’intrigue387. Pour ce qui est de l’histoire, c’est un véritable polar — il faudrait longuement décrire la scène d’exposition du film où les Dominicaines semblent opérer un acte délictueux — dont l’enjeu n’est rien moins que le salut des âmes. Car ci-gît le génie de Bresson : ne pas traiter les affaires spirituelles sur un mode hagiographique ou sulpicien, comme ce fut généralement le cas dans le cinéma français contemporain, mais, proche en cela de Bernanos dont le père Bruckberger était familier388, traiter le spirituel comme l’ultime aventure… quitte à en faire un film policier !

De fait, comme ultérieurement dans le Journal, Un condamné, Pickpocket ou encore L’Argent, le spectateur est soumis a une forte tension et à un véritable suspense

— c’est à un film d’action que nous avons affaire — qui ne connaîtra de véritable répit qu’à son terme. Mais revenons à l’intrigue visible et lisible du film. Michel Estève l’a parfaitement résumée. Elle se développe en trois parties : « la rencontre : de la séquence initiale au meurtre ; l’affrontement : du meurtre au renvoi d’Anne-Marie ; l’acceptation du destin : du renvoi d’Anne-Marie à sa mort389 ». Précisons : Anne-Marie, une jeune fille de bonne famille, rentre dans les ordres avec le secret espoir d’une mission singulière. Peu après sa prise d’habit, elle apprend l’existence d’une prisonnière particulièrement récalcitrante qu’elle rencontre lors d’une visite à la prison. C’est là qu’elle entend les hurlements de Thérèse, emmurée dans sa révolte, cris qu’elle prend pour un appel à l’aide. Lors de la distribution aux religieuses des devises qu’elles devront suivre pendant une année, Anne-Marie reçoit des mains de la providence la sentence suivante : « Si tu as entendu le mot par lequel Dieu te lie à un autre, tes oreilles sont désormais inutiles. Tous les autres mots ne sont plus que l’écho de celui-là. »

Son destin est désormais scellé à celui de Thérèse.

387 La critique et les commentaires ultérieurs ont beaucoup insisté sur cet aspect documentaire.

Cependant l’ensemble du film est tourné en studio, avec des éclairages sophistiqués qui renvoient plus à l’expressionnisme de Dreyer qu’au « réalisme » ultérieur des films de Bresson. Comme le note justement Arnaud, c’est « Bresson avant Bresson » ! Lire sa très belle critique dans les Cahiers du Cinéma, n° 394, avril 1987, pp. 53-55.

388 Voir le texte de Roland Barthes dans Robert Bresson, Éloges : « ce Père est l’auteur d’une étude sur le Thomisme de Claudel, Maritain, Bernanos, intitulée Ligne de faîte », op. cit., p. 16.

389 Michel Estève, op. cit., p. 17.

Le jour de sa libération, Thérèse tue l’homme auquel elle doit d’avoir été enfermée pendant deux années, puis va trouver asile au couvent de Béthanie.

L’empressement d’Anne-Marie l’exaspère au point qu’elle la monte contre les autres sœurs et particulièrement contre Mère Saint-Jean. Refusant la pénitence publique qui résulte de ses divers éclats, Anne-Marie est renvoyée du couvent. La nuit, elle revient prier sur la tombe du Père Lataste, jusqu’au jour où un orage la terrasse. Une fois ramenée au couvent, et suite à la décision de la prieure qui devine le « le jeu qui se joue entre elles », Thérèse la veille. Après un ultime affrontement, celle-ci s’enfuit, mais Anne-Marie la rattrape, avant de s’effondrer. Ses heures sont comptées. Alors qu’on annonce l’arrivée de la police qui a retrouvé la trace de Thérèse, cette dernière prononce les vœux pour Anne-Marie qui agonise, revêtue de l’habit des Dominicaines. Un double salut, une double rédemption a lieu, selon un véritable chiasme, un « échange », selon l’un des titres très claudéliens écartés par respect pour l’écrivain, qu’il va s’agir ici de préciser.

D’un côté nous avons l’exaltation et le prosélytisme d’une jeune novice. Mais c’est cette détermination même, voire cet entêtement au-delà du raisonnable, qui lui permettra d’obtenir, avec l’aide de Dieu qu’elle implore souvent, le salut final de Thérèse. D’un autre côté, nous avons cette prisonnière murée dans sa colère (on pense à la Comtesse du Journal), mue par son irrépressible désir de vengeance. C’est elle qui pousse Anne-Marie à la révolte, ou du moins attise sa soif de justice, mais lui fait aussi entrevoir un complot ourdi contre elle. Elle a un côté démoniaque, mais Anne-Marie est loin d’être sans défaut. Rien en tout cas d’une figure angélique. Comme le résume Roland Barthes non sans humour :

« Renée Faure [l’interprète d’Anne-Marie] a de la vocation, mais de l’orgueil ; elle est ardente, mais indiscrète ; elle est très gaie, mais un peu arrogante ; elle est aimée de certaines sœurs et jalousée de certaines autres ; et c’est avec ce caractère électrique qu’elle entreprend de sauver une âme perdue : Jany Holt [l’interprète de Thérèse] a les yeux noirs et haineux, le front buté, la bouche amère ; au sortir d’une peine de prison, elle vient de descendre son homme qui l’avait vendue (…) ; et, par calcul, elle se réfugie au couvent. C’est le loup dans la bergerie, et c’est Belzébuth pour cet ange imparfait qu’est Renée Faure.390 »

A priori, rien de très christique dans ce portrait peu flatteur, mais juste, d’une femme passionnée, humaine, trop humaine. Et pourtant, Dieu se sert de ce que nous jugerions maladresse, empressement, voire entêtement. N’a-t-il pas choisi ce qu’il y a de fou dans ce monde pour confondre ce qui est sage ? Comme l’a très justement noté

390 Critique publiée initialement dans Existences, 1943. Reprise dans Robert Bresson, Éloges, op. cit., pp.

15-16.

Henri Agel, l’un des tenants de la critique spiritualiste particulièrement sensible à cette inversion :

« Il y a une vérité divine, à la lumière de laquelle les qualités et les défauts changent de signification. Et ce qui, dans l’ordre humain, est un signe de discorde et de scandale — l’obstination intraitable, la monomanie d’une petite fille têtue — pourrait soudain se révéler comme la source d’une grande action spirituelle.391 »

Le salut de Thérèse lui demandera un sacrifice plénier, bien au-delà de ses forces humaines. De fait, et nous rejoignons là la Passion du Christ, Anne-Marie ira d’échec en échec : loin de convertir Thérèse par l’amour, elle en fait une véritable ennemie qui complote à sa perte, elle est renvoyée du couvent pour insoumission à la règle, elle meurt alors que Thérèse est conduite en prison.

D’un autre côté, les victoires de Thérèse, ce véritable Belzébuth selon Barthes, ne sont qu’apparentes. Jamais elle ne se défera de la prédilection d’Anne-Marie et, alors qu’elle croit triompher — elle a échappé à la justice des hommes et croit s’être débarrassée d’Anne-Marie —, cette dernière revient transformée, mûrie et donc sanctifiée par l’épreuve, alors que la police a retrouvé sa trace. En prononçant les vœux de l’agonisante, elle découvre la foi, l’intensité de l’amour de Dieu, qui comme le disait Thérèse d’Avila, ne peut rien sans les hommes. Durant la toute dernière demi-heure du film, Anne-Marie vit une véritable agonie christique, à laquelle ne manque ni la prière à Gethsémani — la prière sur la tombe du Père Lataste —, ni la couronne d’épine — les ronces que les sœurs mettent dans la haie pour décourager le rôdeur nocturne —, ni les chutes fatales lors de la montée au Golgotha, à l’occasion de la poursuite de Thérèse qui tente de s’échapper du couvent. C’est le parcours même du Curé de campagne que nous entrevoyons. Tous deux illustrent les paroles du Christ annonçant le mystère de la Croix : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul : si au contraire, il meurt, il porte du fruit en abondance. » (Jn 12, 24)

Dans une page magnifique, Henri Agel décrit ainsi la scène finale du film :

« nous assistons à une véritable transfusion de sang spirituelle. Anne-Marie, au moment de prononcer ses vœux, ne peut plus parler. C’est Thérèse qui les prononce, et par une sorte d’identification mystérieuse (…) passent en elle la force et la foi de la mourante.

Et voici que ce miracle si simple — il ne s’agit que de donner sa vie pour ceux qu’on aime — se réalise sous nos yeux : au moment où Anne-marie tombe morte, Thérèse se lève et, sans hésitation, va se livrer à la police, symbole de résignation, de son consentement à assumer sa faute, non sur un plan social (…) mais dans l’ordre spirituel.

391 Il est intéressant à noter combien la sainteté se situe par-delà le bien et le mal. Le cinéma et le sacré, op. cit., p. 31.

Elle cesse de se fermer dans un refus intraitable. Elle s’ouvre au repentir, à Dieu, à la fallu prendre ! », ou au dernier plan de L’Argent dans lequel Yvon se rend à la police, grâce au sacrifice de la petite dame aux cheveux gris.

Bien sûr, l’on pense au Bernanos du Journal, mais aussi au Dialogue des Carmélites, écrit peu avant sa mort en 1948, d’après un scénario du Père Bruckberger.

Là aussi s’opère un « échange » mystérieux : la douloureuse agonie de la Mère Prieure y prépare le sacrifice ultime de sœur Blanche de l’Agonie du Christ qui rejoint in extremis ses compagnes sur l’échafaud393. Voici un court extrait des dernières paroles de la Prieure :

« Vous êtes la dernière venue, et pour ce fait la plus chère à mon cœur. Oui, de toutes mes filles, la plus chère, comme l’enfant de ma vieillesse, et aussi la plus hasardée, la plus menacée. Pour détourner cette menace, j’aurais bien donnée ma pauvre vie, oh ! certes, je l’eusse donnée… Je ne puis donner maintenant que ma mort, une très pauvre mort…394 »

Quelques pages plus loin, c’est une novice qui donne à sœur Blanche la clé de cet échange mystique, de cette transsubstantiation, de cet « âme pour âme », où l’une souffre pour le salut de l’autre, dans un mouvement qui n’est pas sans rappeler ni celui de la Passion, ni celui de la communion des saints : « On ne meurt pas pour soi, mais les uns pour les autres, ou même les uns à la place des autres395 ».

C’est aussi le témoignage de Thérèse de Lisieux qui impressionna tant Bernanos. Peu de temps avant son entrée au Carmel, elle pria pour la conversion de Pranzini, un condamné à mort qui avait égorgé deux femmes et une petite fille396. Pour l’obtenir du « Bon Dieu », elle offrit non ses propres œuvres, « de moi-même je ne pouvais rien », mais « tous les mérites de Notre Seigneur397 ». En montant sur

392 Idem, p. 32.

393 Comme le petit curé de campagne, Blanche, en choisissant son nom de religieuse, s’est placée selon Bernanos « sous le signe de la Très Sainte Agonie ». Cf. Dialogues des Carmélites, Seuil, Paris, 1996, p. 44. Pour une mise en perspective du texte, lire de Michel Estève Le Christ, les symboles christiques et l’incarnation dans l’œuvre de Bernanos, service de reproduction des thèses, Université de Lille III, 1982, pp. 427-445.

394 Idem, pp. 46-47.

395 Idem, p. 57.

396 Nous retrouvons cet épisode au tout début du film qu’Alain Cavalier a consacré à Thérèse en 1986.

397 Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face : Œuvres complètes, Cerf et Desclée De Brouwer, Paris, 1996, p. 143.

l’échafaud, le condamné prit des mains du prêtre le crucifix et le baisa. Thérèse y vit le signe que ses prières pour les pécheurs n’étaient pas vaines et parle d’un « véritable échange d’amour » : « aux âmes, je donnais le sang de Jésus, à Jésus, j’offrais ces mêmes âmes rafraîchies par sa rosée divine…398 » Par l’amour, nous assistons ainsi à une double libération. Anne-Marie naît au ciel et Thérèse, parce que libérée intérieurement, peut se rendre à la Police. Il y a eu transfusion de grâce. Anne-Marie est

« martyre » de la foi : au sens étymologique du terme, elle est témoin. Malgré ses actes, souvent excessifs, ou à cause de ses actes. « Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimé. Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande » nous dit le Christ dans l’Évangile (Jn 15, 12-14). Et ce, jusqu’au don plénier de la Croix, de sa vie pour ses amis399.

Il faudrait décrire plan par plan la scène finale, bercée par le Salve Regina des Dominicaines. Dans une séquence aux images superbement composées par une savante dialectique de noirs et de blancs, ultime confrontation entre le Bien et le Mal, Anne-Marie s’affaisse sur son lit de mort alors que Thérèse prononce les derniers mots de sa profession de foi. Lentement, comme dans une liturgie de gestes et de corps noblement ordonnée, elle va baiser les pieds de la morte, telle Marie-Madeleine qui embrasse les pieds du Christ à la descente de la croix, esquisse un sourire, et fend la communauté des religieuses agenouillées en prière pour rejoindre les policiers. On pense à une toile de Philippe de Champaigne400, le peintre des jansénistes, revue et corrigée par les ombres et les lumières du cinéma de Dreyer. Mais comme nous le signalions précédemment, nous sommes chez « Bresson avant Bresson ». Le film contient trop de beauté, le jeu des acteurs est encore trop théâtral et les dialogues sont trop abondants et littéraires.

Aussi Bresson lui-même reniera cette œuvre. Nous ne le suivrons pas si loin, séduits par tant d’élégance et de raffinement.

398 Ibidem, p. 144. Des années plus tard, dans l’Offrande à l’Amour Miséricordieux, elle écrira, montrant par là quelle était sa vocation : « Trinité Bienheureuse, je désire vous Aimer et vous faire Aimer, travailler à la glorification de la sainte Église en sauvant les âmes qui sont sur la terre et [en] délivrant celles qui souffrent dans le purgatoire. (…) Puisque vous m’avez aimée jusqu’à me donner votre Fils unique pour être mon Sauveur et mon Époux, les trésors infinis de ses mérites sont à moi, je vous les offre avec bonheur, vous suppliant de ne me regarder qu’à travers la Face de Jésus et dans son Cœur brûlant d’Amour. » Ibid., p. 962.

399 L’holocauste d’Anne-Marie est un sacrifice d’expiation et de réparation. Mais soulignons bien qu’Anne-Marie n’a pas cherché la souffrance et la mort. Elle n’est portée que par son amour et sa piété.

400 Cf. en particulier l’Ex-voto, une huile sur toile datée de 1662 et conservée au Musée du Louvre, qui figure l’instant même de la guérison de sa fille et porte l’inscription suivante : « La soeur Catherine Suzanne de Champaigne après une fièvre de quatorze mois qui avait effrayé les médecins par son caractère tenace et l’importance de ses symptômes alors que presque la moitié de son corps était paralysée que la nature était déjà épuisée et que les médecins l’avaient abandonnée s’étant jointe en prière avec la Mère Catherine Agnès en un instant de temps ayant recouvré une parfaite santé s’offre à nouveau. »

Les Anges du péché

Ex-voto de Philippe de Champaigne

Pour nous, il s’agit enfin de reconnaître la matrice des sacrifices ultérieurs qui ponctueront l’œuvre du cinéaste français, de celui du curé de campagne à celui de la petite dame aux cheveux gris, en passant par celui de l’âne Balthazar. Petit à petit, nous quitterons un monde explicitement religieux pour rejoindre le nôtre, profondément laïcisé, qui porte cependant toujours le sceau de ces rencontres et de ces échanges mystérieux. C’est par eux que passe la grâce, que la conversion est encore possible.

Même si le nom de Dieu n’est plus prononcé, ce dernier est toujours à l’œuvre. La fuite du lieutenant Fontaine serait-elle possible sans le sacrifice involontaire d’Orsini, ou l’aide inattendue de Jost, le prisonnier de la dernière heure ? Le salut de Lancelot serait-il possible sans le sacrifice de son ami Gauvain ? La reddition d’Yvon serait-elle imaginable sans le martyre sanglant de la dame aux cheveux gris ? Le retour à Dieu de Dufréty, le prêtre défroqué de Bernanos, se ferait-il sans l’agonie du curé d’Ambricourt ?

Nous allons donc retrouver sur l’heure la figure christique par excellence de l’œuvre de Bresson : celle du Journal d’un curé de campagne et essayer d’éclairer un tant soit peu le mystère de sa compassion et de sa passion.