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Le vecteur polarisation et les charges liées

différence de potentiel seule la partie dans le vide donnera une contribution, par conséquent le∆V sera inférieur et la capacité sera plus grande.

Puisque il n’y a pas de charges électriques libres dans le diélectrique et celui-ci est électriquement neutre, à chacune des charges doit correspondre une charge de signe opposé, elles doivent donc se présenter en couple. Autrement dit, les charges présentes à l’intérieur d’un diélectrique doivent se présenter sous forme dedipôle.

À son temps Faraday proposa, et finalement cela est une hypothèse raisonnable, que le diélec-trique soit formé par un matériau isolant dans lequel sont immergés beaucoup de petites sphères conductrices.3Évidemment de nos jours nous avons une vision différente et la question de l’origine réelle de ces dipôles, dont un indice a déjà été donné dans §1.5, sera approfondi dans le paragraphe

§3.5.

Il est important de souligner que ce qui est important ici est seulement le fait qu’il doit y avoir des dipôles dans le diélectrique qui sont “induits” par le champ électrique externe. Nous suivrons pour le moment un chemin plus historique, supposons donc que ces dipôles existent et voyons comment les équations écrites dans le vide en résultent modifiées.

Ensuite, nous allons expliquer l’origine de ces dipôles dans les matériaux isolants.

3.2 Le vecteur polarisation et les charges liées

Nous supposons donc que dans la matière soumise à un champ électrique, des dipôles de charge élémentaireqet longueur~rsont générés. Le moment dipolaire élémentaire est alors donné par :

~ p=q~r

Si nous avons N atomes ou molécules par unité de volume, alors le vecteur polarisation(densité volumique de moment dipolaire électrique) est donné par :

P~ =N q~r

et donc le volume dV a un moment dipolaire P d~ V. En général, P~ varie d’un point à l’autre du matériau, mais il s’avère que4 il est proportionnel au champ électrique appliqué et orienté selon le champ électrostatique. La constante de proportionnalité, comme nous le verrons, dépend du matériau isolant.

Nous savons qu’à l’intérieur d’un diélectrique les charges ne sont pas libres de se déplacer comme dans un conducteur, cependant la présence de dipôles peut être formalisée par la présence de charges superficielles et volumiques que nous indiquerons avecσpet̺p.

vecteur polarisation uniforme vecteur polarisation non uniforme

σp<0 ̺p= 0 σp>0σp<0 ̺p6= 0 σp>0 E~

~r

Comme le montre le diagramme, il sera nécessaire de distinguer les deux cas où la polarisation est constante dans le matériau et lorsqu’elle ne l’est pas.

Considérons le cas où la polarisation est constante. Dans ce cas, il est évident que le dépha-sage entre les charges positives et négatives induites par le champ externe produit une densité de charge̺p = 0à l’intérieur du volume, car chaque charge positive des dipôles est compensée par une charge négative égale.5 Le bloc entier de diélectrique peut alors être considéré comme une

3. Sphères parce que l’induction ne doit pas dépendre de la direction du champ dans le diélectrique.

4. Sous certaines hypothèses qui seront spécifiées dans §3.5.

5. Cela est dû au fait que le nombre de dipôles par unité de volume reste constant dans le diélectrique.

distribution positive et négative décalées de~r, la longueur du dipôle induit.

−σp

p

SoitS la surface du diélectrique, alors la charge sur cette surface est donnée parN Sq|~r|(S|~r| re-présente le volume occupé par les charges électriques). En conséquence, la densité superficielle est donnée par :

σp= Q

S =N Sq|~r| S =N qr

mais ceci est exactement le vecteur polarisation. En gardant à l’esprit que le vecteur déplacement du dipôle~r est parallèle au champ, qui est par définition parallèle au vecteur de polarisation, il s’ensuit :

σp=P~ ·nˆ (3.1)

oùnˆest la normale à la surface.

Considérons maintenant le cas où la polarisation n’est pas constante à l’intérieur du diélectrique.

Imaginons une surfaceSà l’intérieur du diélectrique, lorsque nous appliquons un champ électrique les charges vont se déplacer et certaines d’entre elles traverseront la surfaceS. La quantité de charge qui traverse cette surface est donnée par le flux deP~ sur la surfaceSet si la polarisation n’est pas constante, le nombre de charges entrant d’un côté ne sera pas nécessairement le même des charges sortant de l’autre côté.6 La variation de la charge liéeQp à l’intérieur de cette surface peut donc être écrite comme l’inverse du flux du vecteur polarisation :

∆Qp=− Z

S

P~ ·nˆ

en même temps, cette charge nette peut être interprétée comme étant due à une densité volumique

̺P :

∆Qp = Z

V

̺pdV

d’où : Z

V

̺pdV =− Z

S

P~ ·nˆ =− Z

V

∇ ·~ P d~ V où nous avons utilisé le théorème flux-divergence. Il s’ensuit :

̺p=−∇ ·~ P~ (3.2)

Une façon plus formelle de trouver les densités de charges liées.

Nous allons maintenant obtenir ces relations d’une façon plus formelle.

Pour ce faire, nous calculerons le potentiel en un point~r= (x, y, z)à partir d’un diélectrique occupant un volumeVet ayant un vecteur polarisationP(x, y, z). De la relation (1.13), la contri-bution apportée par un moment dipolaire équivalent àP dV~ est donnée par :

dV(x, y, z) = 1 4πε0

~r·P dV~

r3 → V(x, y, z) = 1 4πε0

Z

V

~r·P~(~r)dV r3 grâce à la (1.14) cette équation peut s’écrire :

V(x, y, z) = 1 4πε0

Z

V

P~·∇~ 1

r

dV

6. Ce qui se passe nécessairement si la polarisation est constante, donc̺P= 0dans ce cas.

3.2 - Le vecteur polarisation et les charges liées 45

et en appliquant le théorème flux-divergence :

V(x, y, z) = 1

oùSest la surface enfermant le volumeV. De cette relation il s’ensuit facilement les (3.1) et (3.2).

3.2.1 Le champ électrique à l’intérieur des diélectriques

A l’intérieur d’un diélectrique, il est plus approprié de parler du champ électrique localEl. Chaque atome ou molécule est affecté par le champ externeE, mais aussi par le champ de toutes~ les autres molécules ou atomes qui l’entourent. Ce champ varie en réalité énormément d’un point à un autre et d’un moment à l’autre car il dépend de la position relative de notre molécule par rapport aux charges positives et négatives des autres et change constamment aussi du fait du mouvement des électrons, qui ne sont pas dans des positions fixes. Dans ce contexte, cependant, nous considé-rons toujours des volumes contenant un grand nombre de molécules et sur des intervalles de temps certainement supérieurs à celui de révolution des électrons. Par conséquent, au niveau macrosco-pique nous pouvons parler d’une sorte de champ moyen que nous appellerons alorschamp local, destiné à prendre en compte des volumes infinitésimaux mais toujours importants par rapport aux dimensions atomiques.

Rappelons maintenant la figure en haut de la page 42 et appliquons le théorème flux-divergence à la surface pointillée. On sait que le champ électrique est donné par la densité de chargetotale divisée parε0, donc :

E=σ−σp

ε0

=σ−P ε0

cette équation ne nous donne d’information que si nous connaissons la forme de P, cependant~ nous supposons que le moment dipolaire est proportionnel au champ électriqueP~ = N α ~E, où N est le nombre de dipôles par unité de volume etαprend le nom depolarisabilité du matériau.

Cette relation de proportionnalité est généralement écrite sous une forme mettant en évidence la constante diélectrique du vide :

P~ =χε0E~l≃χε0E~

oùχprend le nom desusceptibilité électriqueet l’approximation est valable pour les gaz, où le champ électrique externe coïncide pratiquement avec le champ local.7 Le champ électrique peut alors s’écrire :

Rappelons-nous que nous sommes partis de l’observation que la capacité d’un condensateur avec diélectrique augmentait d’un facteurεr. Cette variation était due au fait que la différence de poten-tiel était plus petite, ce que nous avons compris à son tour comme étant lié au fait que le champ élec-trique dans le diélecélec-trique est réduit par rapport au champ libre. Maintenant, nous avons trouvé ce facteur de réduction à1 +χ, donc nous pouvons déduire la relation :

εr= 1 +χ

7. Ceci est dû à la faible interaction des molécules entre eux.

Concernant les liquides, en ce cas les interactions entre les molécules ne sont pas négligeables.

Cependant, si nous faisons les hypothèses :

1. champ électrique des molécules purement dipolaires, 2. répartition uniforme des dipôles,

3. moment de dipôle le long du champ externe,

4. le moment de dipôle de toutes les molécules est le mêmes

alors nous pouvons raisonner comme suit. Dans un liquide, l’espace occupé par un atome ou une molécule entouré par les autres peut être considéré comme étant approximativement sphérique. Le champ local qui affecte notre molécule est donc donné par le champ présent à l’intérieur d’un trou dans le diélectrique.8Pour le champ local, vous pouvez écrire :

E=El+Esphère → El=E−Esphère

oùElest le champ local produit par toutes les molécules sauf celle considérée etEsphèreest le champ électrique à l’intérieur de la sphère diélectrique occupée par notre molécule. Le champ totalEest évidemment donné par la somme des deux. Le champ interne d’une sphère polarisée peut être calculé en exploitant le fait qu’une sphère polarisée peut être approximée par une superposition de deux sphères de charge opposée légèrement décalées :

−̺ ̺ r

r+

A l’intérieur de la sphère, le champ électrique peut être calculé par la seconde de (1.12) en utilisant la densité de charge de polarisation. En un point générique à l’intérieur de la sphère identifiée par les deux vecteurs~r+et~rle champ généré par les deux distributions de charge est donné par :

E~+= ̺ 3ε0

~r+ E~=− ̺ 3ε0

~r

d’où le champ totale à l’intérieur de la sphère : E~++E~= ̺

0(~r+−~r)

comme on peut le voir de la figure,~r+−~rcorrespond à la distance entre les deux centres de charge et donc à la longueur du dipôle, par conséquent :

E~++E~ = ̺ 3ε0

(~r+−~r) =− ̺ 3ε0

d~r≡ − P~ 3ε0

donc le champ locale peut s’écrire :

E~l=E~ + P~ 3ε0

Le vecteur polarisation s’écrit :

P~ =n~p0=N α ~El=N α E~ + P~ 3ε0

!

8. Parce que le champ local est produit par toutes les moléculessauf celle en considération. Si nous enlevons notre molécule, le champ local en ce point sera le champ à l’intérieur d’un “trou” du diélectrique.

3.3 - Les équations de l’électrostatique en présence de diélectriques 47 de cette relation s’ensuit immédiatement :

χ= N α

Cette relation est appeléerelation de Clausius-Mossotti9 et permet d’exprimer une quantité micro-scopique (la polarisabilité) en termes de quantités macromicro-scopiques mesurables (la constante diélec-trique relative).

La polarisation des corps solides est une question beaucoup plus complexe et nous ne l’aborde-rons pas dans ses détails analytiques dans ce contexte. Nous nous limitel’aborde-rons à noter que les solides peuvent présenter un large éventail de comportements différents :

— Certaines structures non isotropes peuvent présenter un alignement des dipôles même sans la présence d’un champ électrique externe. Dans ce cas, nous parlons depolarisation perma-nente.

— Généralement, dans les structures cristallines présentant des dipôles alignés, le champ pro-duit est annulé par des charges externes (par exemple présentes dans l’air) qui se déposent progressivement sur la surface. Lorsque à la suite de contraintes mécaniques la configuration des dipôles est modifiée – même légèrement – le champ devient temporairement visible (car son annulation prend beaucoup de temps). Dans ce cas, nous parlons depiézoélectricité. Si le changement de configuration du dipôle se produit à la suite de variations de température, on parle de pyroélectricité.

— Si le matériel dispose de dipôles internes permanents et ceux-ci sont emballé dans un réseau de Bravais permettant aux dipôles de tourner librement (par exemple, un réseau cubique), alors même un champ externe faible peut provoquer un changement dans la plupart des di-pôles, produisant un grand effet macroscopique. Ceci sont appelé matériauxferroélectriques.

3.3 Les équations de l’électrostatique en présence de diélectriques

Le point de départ pour discuter des équations de l’électrostatique en présence de diélectriques seront la (1.8) et la (1.9), que nous rapportons ici pour plus de commodité :

9. Pour être précis, c’est l’une des formes dans lesquelles la relation de Clausius-Mossotti peut être écrite.