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III. Accueillir sans être accueillant, vers une intégration partielle dans le quartier des

III.2. L’héritage culturel

La culture d’origine influence fortement la présence des familles étrangères ou

françaises d’origine étrangère dans les structures locales du quartier tel que le club sportif. Nous traiterons ainsi de l’influence de la culture dans l’accompagnement éducatif parental

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III.2.1. La culture d’origine et l’implication dans un lieu sportif : le club de football des 3Cités

Tout d’abord, la présence des parents d’enfants issus du quartier des 3Cités et d’origine africaine pour la majorité d’entre eux, est une problématique dans le club de

football. En effet, la plupart des enfants arrive seule, sans être accompagnée par leurs parents.

Les acteurs de terrain expliquent l’absence des parents pour plusieurs raisons.

L’intégration dans le milieu sportif a souvent visé la catégorie jeune, en particulier les

jeunes immigrés habitant dans des zones « défavorisés ». Selon Gasparini (2004, p. 105) « l’intégration par le sport indique le processus par lequel un individu (notamment un jeune) intègre une communauté territoriale (pays, région, ville, quartier …) en participant aux activités sociales (notamment le sport associatif) reconnues par cette communauté ». De ce fait, la structure sportive telle que le club sportif aux 3Cités, est-elle considérée comme un

lieu favorisant l’intégration de toutes catégories de populations (parents, enfants et jeunes) résidant dans le quartier ? Paradoxalement, la population issue de l’immigration ne constitue-

t-elle pas elle même un frein à cette intégration ? Quelles formes de handicaps sont alors développées ?

Nous tenterons ainsi de proposer une analyse détaillée, expliquant les variables qui empêchent un club sportif, implanté dans une zone « sensible », d’effectuer un rôle

d’accompagnement, éducatif et social, auprès les habitants du quartier des 3Cités.

III.2.1.a. La notion de communauté couvre les habitudes de la vie quotidienne.

Pour le comité de direction du club de football, l’accompagnement est lié à un aspect

culturel : « dans le club, ce sont les parents d’origine française qui accompagnent leurs

enfants, en particulier les joueuses qui appartiennent à une population blanche […]. Dans les familles africaines, l’accompagnement d’enfant appartient à tout le monde. L’adulte qui voit un enfant, il s’en occupe. Il n’y a qu’en France où les parents s’occupent des activités et du

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déplacement de leurs enfants.»60. La population étrangère vit en communauté. Nous avons

observé cette réalité dans les familles issues des pays d’Afrique qui passent aux CSC en fin de journée pour chercher les enfants après l’aide aux devoirs. Une personne de même origine culturelle, voisine du même immeuble, de l’immeuble d’en face ou d’à côté, est autorisée à

venir chercher, en même temps, ses enfants et ceux des autres. D’un côté, l’enfant est sous la

responsabilité des CSC qui doivent s’assurer qu’il est bien arrivé chez ses parents. De l’autre, il tout à fait envisageable de s’adapter aux habitudes des familles de la communauté, et ainsi

de dépasser parfois les méthodes traditionnelles de fonctionnement normal d’un centre. De

plus, cette notion de communauté permet à n’importe quel adulte d’intervenir dans la vie des

enfants : « une des mamans me dit : si tu vois mon enfant faire des bêtises tu lui fous une

grosse claque. C’est-à-dire, qu’elle pense qu’on se doit de le gronder même si cet enfant n’est pas le nôtre. Alors que chez nous, c’est l’enfant le roi, il a tout pouvoir et il n’y a que les

parents qui ont le droit de lui dire quelque chose. »61. En conséquence, la vie d’un enfant

appartient à celui qui va l’aider à grandir quelle que soit sa place : frère, parents, animateur,

éducateur, enseignant, entraineur, dirigeants, autrement dit : l’élever et l’éduquer en collectivité.

III.2.1.b. Maturité et autonomie

« C’est une question de maturité, les enfants issus d’origine étrangère sont autonomes beaucoup plutôt que les nôtres. Nous avons une culture qui couve les enfants. »62. L’enfant est

traité comme quelqu’un qui peut s’occuper de ses affaires tout seul et de celles de ses parents, ces derniers n’ayant pas toujours les compétences intellectuelles ni les moyens nécessaires pour pouvoir communiquer avec les autres. À l’école, les enseignants communiquent d’abord

avec les enfants si leurs parents ne parlent pas ou ne comprennent pas la langue française. Cela est une solution immédiate mais pas à long terme. Si nous considérons les parents en deuxième place après leurs enfants, cela ne les aide pas à reprendre leur rôle.

60

Entretien, président du club de football du quartier des 3Cités.

61

Entretien, habitante dans le quartier des 3Cités, membre du conseil d’administration du CSC, du conseil de

classe au collège du quartier (Ronsard), et du conseil de l’école primaire (Tony Lainé). 62

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L’enfant peut être amené à assumer une responsabilité qui n’est pas forcement donnée aux enfants de son âge, d’origine française63

. Celle-ci lui permet de se déplacer dans le quartier et parfois même dans la ville sans être accompagné par sa famille. De plus, le rapprochement

des structures (sportives, éducatives, etc.) facilite le déplacement des enfants d’origine étrangère. Nous avons remarqué que les parents laissent leurs enfants dès l’âge de dix ans (et

même parfois avant) prendre le bus seuls pour aller à la piscine, patinoire, et même pour

suivre leurs entraînements, si le club est à l’extérieur du quartier. Cette réalité ne peut pas fonctionner si la famille n’habite pas dans la ville intra muros. Dans ce cas, et quelle que soit l’origine des enfants, les parents sont obligés de les amener au club : « une grande partie de

nos joueuses vient des villages autour de Poitiers. Il nous semble évident qu’elles soient accompagnées par leurs parents. C’est une question de sécurité. Les parents ne peuvent pas

les laisser partir toutes seules »64.