• Aucun résultat trouvé

L’éducation envisagée comme capacité d’adaptation et d’innovation des économies

Avec I h l’investissement brut en « capital humain », d un taux de dépréciation du capital et n le

3.2.3 L’éducation envisagée comme capacité d’adaptation et d’innovation des économies

La littérature sur la croissance ne permet pas de mettre en lumière un rôle évident de l’éducation dans l’économie. L’éducation ne serait pas un facteur de production comme les autres. L’hypothèse sur l’accumulation du « capital humain » apparaît très forte et les mécanismes sont probablement plus complexes que ceux du capital physique (Cohen, 1996 ; Dessus, 1998). La présence de l’éducation au

sein de la fonction de production néo-classique ne permet pas d’aboutir à des conclusions convaincantes.

L’évaluation empirique s’est donc reportée sur les fonctions d’adaptation et d’innovation de l’investissement dans le « capital humain ». L’objectif n’est plus de rendre dépendant le niveau du PIB de celui de l’éducation, ni de faire dépendre la croissance du PIB de celle l’éducation, mais de considérer positivement le lien entre le niveau d’éducation et la croissance du PIB. Le raisonnement consiste à montrer que plus la disponibilité du « capital humain » est élevée en quantité et en qualité, meilleur est le potentiel d’adaptation aux nouvelles technologies. L’idée n’est pas nouvelle, puisqu’un article fondateur de Nelson et Phelps (1966) concevait la croissance comme poussée par le stock de

« capital humain », dont dépend la capacité d’innovation d’un pays. Le taux de croissance serait

fonction du taux d’innovation technologique et du taux de diffusion des innovations existantes (Aghion et Howitt, 1992).

Au sein d’un système fixe, où le niveau technologique est peu évolutif ou stoppé, l’impact de l’éducation serait difficilement saisissable. Autrement dit, l’éducation ne peut déterminer une échelle de production au niveau d’une technologie déterminée. Le « capital humain » généré par l’éducation faciliterait de façon significative des capacités d’adaptation ou de changement des individus, et cela dans des contextes économiques spécifiques, en particulier évolutifs. Cette approche a été mise en lumière dès la constitution de la théorie du capital humain, notamment par Schultz (1975). Pour l’auteur, le « capital humain » sert essentiellement la capacité d’un pays à s’adapter à des

« déséquilibres », en suscitant le changement de comportement des individus face à de nouvelles

contraintes d’ordre technologique. La valorisation de l’éducation dans l’économie se réaliserait conjointement au progrès technologique, mais elle serait contraignante dans une économie en stagnation. Les propositions de Schultz, de Nelson et Phelps, possèdent deux conséquences importantes : la première consiste à considérer que les fonctions de production estimées sont mal spécifiées, d’où des résultats peu significatifs ; la seconde – issue de Rosenzweig (1996) – souligne qu’aucune raison n’est justifiée pour la stabilité et la positivité du rendement éducatif.

Certaines circonstances seraient favorables à la rentabilité du « capital humain ». Dessus (1998) estime un paramètre associé au « capital humain » différent entre chaque pays dans son modèle. L’auteur admet davantage l’hypothèse d’hétérogénéité du « capital humain » entre les pays, ce qui revient à définir les critères de différenciation des sources de divergence. Benhabib et Spiegel (1994), en reprenant un modèle développé par Nelson et Phelps (1966), soulignent l’apport du « capital

humain » pour importer et adapter les technologies. Le stock de « capital humain » employé dans les

activités de recherche pourrait, à un moment donné, comme le décrit le modèle de Romer (1990), spécifier le taux de croissance du progrès technique. Benhabib et Spiegel parviennent à la conclusion que le « capital humain » a un effet sur la croissance dans certains pays seulement : l’éducation contribuerait au rattrapage technologique pour les pays les plus pauvres et améliorerait l’innovation des plus riches. L’intérêt de l’analyse porte sur les canaux de valorisation du « capital humain » et donc a le bénéfice d’expliquer sa sensibilité à l’hétérogénéité des contextes pays. Mais si l’hypothèse

d’un effet de l’éducation sur la croissance semble davantage vérifiée – hypothèse conditionnée par le décryptage nécessaire des conditions de valorisation du « capital humain » dans les pays – les résultats très disparates ne sont pas généralisables, et demeurent profondément associés à des économies particulières.

Le manque de précision des données dans les pays en développement ne fait qu’altérer les résultats. L’enrichissement de l’analyse par des études nationales est donc fortement recommandé pour apprécier l’hypothèse du lien entre l’effort éducatif et la capacité d’adaptation des économies et des hommes aux nouvelles technologies. Foster et Rosenzweig (1996) ont comparé dans les districts indiens la vitesse à laquelle s’est introduit le progrès technologique, les résultats montrent que le rendement de l’éducation est plus rentable lorsque l’introduction du progrès technologique est accélérée. Des individus éduqués peuvent mieux assimiler les nouvelles technologies en développant des « trajectoires d’apprentissage » adaptées au changement technologique (Foster et Rosenzweig, 1996). À propos des études empiriques menées en Inde dans le cadre de la « révolution verte », les auteurs ont effectivement montré une corrélation de l’effort en éducation, avec l’existence d’un progrès technique rapide dans la période la plus intense de la « révolution verte ». Mais les agriculteurs qui n’ont pas bénéficié de l’effort d’éducation pour des raisons sociales, et ne disposant pas d’un capital matériel et technologique initial suffisamment important, ont été exclus des variétés à haut rendement. Un système prévoyant une plus grande utilisation d’intrants a favorisé naturellement les exploitants qui avaient accès aux capitaux, aux techniques et aux infrastructures scolaires et de formation. De nombreuses études ont fait également état de la persistance d’inégalité entre hommes et femmes pendant la « révolution verte ». La nouvelle technologie et les nouvelles structures économiques ont modifié le rôle traditionnel des femmes au sein des systèmes agricoles. Les efforts déployés pour introduire les nouvelles technologies n’ont souvent pas tenu compte du droit des femmes à tirer avantage des progrès technologiques, et ont réduit leur pouvoir, notamment en raison du manque d’éducation (Shiva, 1988 ; Serageldin, 1996).

3.3 L’analyse empirique de la relation éducation/croissance à Cuba : la mesure du « capital

Outline

Documents relatifs