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La faible importance des populations amazoniennes pour l’Etat équatorien Les « ressources stratégiques » telles que définies dans la constitution de 2008 renvoient à

La régulation, fruit des rapports de force entre les acteurs et les enjeux qu’ils portent

Chapitre 1 Le cycle de vie du problème environnemental pétrolier en Equateur : une approche par la vulnérabilité globale pétrolier en Equateur : une approche par la vulnérabilité globale

1.1 Contexte : la place des populations amazoniennes dans la gouvernance des activités pétrolières

1.1.2 La faible importance des populations amazoniennes pour l’Etat équatorien Les « ressources stratégiques » telles que définies dans la constitution de 2008 renvoient à

« l’énergie sous toutes ses formes, les télécommunications, les ressources naturelles non renouvelables, le transport et le raffinage d’hydrocarbures, la biodiversité et le patrimoine génétique, le spectre radioélectrique, l’eau, et les autres déterminés par la loi » (Art. 313). Leur gestion est une compétence exclusive de l’Etat central. Or, le pétrole représente pour l’Etat équatorien LA ressource stratégique par excellence. Les règles qui encadrent son exploitation sont définies par le gouvernement central, dans des négociations se déroulant souvent en « portes closes » avec les entreprises pétrolières (Kimerling, 2006).

Depuis les années 1970, les gouvernements successifs se contentent globalement de sécuriser les activités des entreprises chargées de l’extraction de pétrole en Amazonie, d’en contrôler le transport à travers les Andes jusqu’à la côte où il est exporté ou raffiné puis distribué pour la consommation interne. Puis la rente est rapatriée à Quito, la capitale du pays, et redistribuée. Ainsi, pour le gouvernement central, le pétrole représente, avant tout, une rente dont dépend une grande partie de son budget, et potentiellement un problème, dans le cas où cette rente se trouverait menacée. Or, la population totale de la région amazonienne ne représente que 5% de la population nationale (2% pour la seule RAE pétrolière : voir tableau 1), ce qui limite son poids électoral à l’échelle nationale. Du point de vue des prises de décisions, la RAE se constitue ainsi comme un territoire périphérique, une « colonie interne »4 (Jarrin et al., 2016) d’où sont extraites des ressources naturelles au profit de l’Etat central et d’entreprises nationales ou étrangères, sans que sa population ne parvienne à peser sur les décisions prises.

4 Jarrin et al. (2016) proposent une définition en 8 point de la colonie interne de RAE, comme « une région de production de richesses qui bénéficient à d’autres régions qui la dominent politiquement (…) 1) ses villes et villages n’énergisent pas les populations rurales riveraines ; 2) la vie rurale est improductive, provoquant une immigration vers les villes amazoniennes ; 3) les villes amazoniennes manquent de qualité de logement, confort, santé et éducation ; 4) elles souffrent d’une croissance démographique importante ; 5) elles maintiennent leur économie grâce au secteur des services (principalement pétrole) ; 6) son destin se trouve influencé par des faceurs externes (par exemple la demande internationale de pétrole) ; 7) ses peuples indigènes sont dépendants des biens et services du pouvoir colonisateur ; 8) une part importante de sa population demeure sur le territoire de manière temporelle et par intervalles (par exemple emplois pétroliers) » (« una región de producción de

riqueza que beneficia a otras regiones de dominio politico (…) 1) sus ciudades y pueblos no energizan a poblaciones rurales aledañas; 2) la vida rural es dura e improductiva, promoviendo una inmigración hacia las ciudades amazónicas; 3) las ciudades amazónicas carecen de la calidad en vivienda, amenidades, salud y educación; 4) sufren un elevado crecimiento poblacional; 5) mantienen su economía gracias al sector de servicios (petroleros en su mayoría) con mano de obra no calificada; 6) su destino está influenciado por factores exógenos (por ejemplo demanda internacional de crudo); 7) sus pueblos indígenas son dependientes de los bienes y servicios del poder colonizador y; 8) una parte importante de su población productiva permanece en el territorio de forma temporal y por intervalos (por ejemplo trabajadores petroleros) », p. 28).

Napo Sucumbíos (6)

Orellana (6) Pastaza Morona Santiago Zamora Chichinpe Total Oriente (1) Equateur 1962 24 253 (5) - - 13 693 (5) 25 503 (5) 11 464 (5) 25 582 4 564 080 (5) 1974 62186 (5) (15 843) (3) (11 472) (3) 23 465 (5) 53 325 (5) 34 493 (5) 55 142 6 521 710 (5) 1977 82 700 (2) 1982 73 701 (5) (41 549) (3) (27 756) (3) 31 779 (5) 70 217 (5) 46 691 (5) 115 110 8 138 974 (5) 1990 56 863 (5) 76 952 (3) (47 090) (3) 42 236 (5) 95 421 (5) 66 167 (5) 9 697 979 (5) 1992 371 110 2001 79 139 (5) 129 995 (3) 86 493 (3) 61 779 (5) 115 412 (5) 76 601 (5) 12 156 608 (5) 2010 (4) 103 697 (4) 176 472 (4) 136 396 (4) 83 933 (4) 147 940 (4) 91 376 (4) 14 930 000

Tableau 1 Evolution de la population amazonienne depuis 1962 d’après différentes sources

(1) Wasserstrom, 2013 ; adapté de Barral, 1983 et Ruiz, 2000 (2) Barral, 1983

(3) OSA, 2003 : total des habitants des différents cantons composant les futures provinces (4) INEC, 2010

(5) INEC, 2001, fascicules provinciaux

(6) La province Napo intègre Sucumbíos jusqu’en 1989 et Orellana jusqu’en 1998, quand les chiffres sont entre parenthèses ils font partie du total de Napo.

Jusqu’en 1990, les chiffres des différentes sources ne coïncident pas entre eux. Le recensement de la population amazonienne reste fractionnaire, notamment en raison de l’étendue des territoires (voir tableau 1) et de l’afflux de population venues coloniser la région suite à l’ouverture de routes pétrolières. Les deux principales provinces pétrolières, Sucumbíos et Orellana, connaissent la plus forte croissance démographique parmi les provinces Equatoriennes, mais restent, en raison de conditions précaires d’installation, largement invisibles pour les institutions.

Figure 1 Régions, provinces et capitales provinciales de l'Equateur (https://provinciasecuador.com/mapa- politico-del-ecuador/)

Les impacts et les risques générés par les activités pétrolières prennent leurs formes concrètes sur les sites exploités, notamment sous la forme d’une pollution environnementale chronique et ponctuelle qui engendre la perte de cultures, d’animaux d’élevage, la pollution de cours d’eau, de l’air ambiant, et le développement de maladies par les humains. Si les pratiques évoluent à partir des années 1990, différentes sources de pollution chronique font l’objet de dénonciations, comme le rejet continu d’eaux polluées dans l’environnement, le stockage non sécurisé de résidus d’exploitation, le brûlage à l’air libre des gaz associés au pétrole lors de l’extraction, l’entretien des routes avec une couche de pétrole mélangée à de la terre qui se diffuse dans l’environnement.

Parallèlement, les nombreuses fuites non ou mal nettoyées font que des sources de pollution ponctuelles se convertissent en source de pollution chronique. Les populations qui vivent à proximité d’infrastructures pétrolières subissent ainsi les impacts environnementaux de l’exploitation et du transport d’hydrocarbures et autres produits pétroliers et sont exposées continuellement aux aléas que comportent ces activités (Maldonado et Narvaez, 2005, Beristain et al., 2009), historiquement dérégulées par l’Etat du point de vue social et environnemental jusqu’au début des années 1990 (Kimerling, 1991 ; Narvaez, 2000 ; Fontaine, 2005 ; Juteau-Martineau et al., 2014).

L’attention des pouvoirs publics n’est alors accordée aux populations de cette région que dans la mesure où elles parviennent à représenter un problème pour l’extraction des ressources, en particulier pétrolières. Notre hypothèse centrale est alors de dire que c’est sur le terrain, sur les sites exploités, que se définissent des règles pour la prise en compte des impacts et des risques liés à l’exploitation pétrolière, à travers les interactions entre les entreprises pétrolières, les populations riveraines et l’environnement.

1.1.3 Les canaux de participation des populations amazoniennes à la régulation

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