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EVACUATIONS MASSIVES

2.2 L' ESTIMATION DES TAUX D ' AUTO EVACUATION ET D ' AUTO

2.2.3 Les taux et les facteurs de l'auto-hébergement

2.2.3.2 De l'hébergement de court terme aux solutions de moyen et de long terme

Or, l'utilisation des lieux d'hébergement collectif varie dans le temps. De fait, les populations évacuent généralement en deux temps : d'abord dans des lieux d'hébergement d'urgence et de proximité (zones de rassemblement, centres d'évacuation, guichets d'accueil) (proximate destination), puis vers leur destination finale (ultimate destination) (Lim et al., 2013). Quarantelli (1982a) fait quant à lui la distinction, depuis largement usitée, entre quatre formes successives d’hébergement et de relogements : l’hébergement d’urgence (emergency sheltering), l’hébergement temporaire (temporary sheltering), le relogement temporaire (temporary housing) et le relogement définitif (permanent housing). Le CEPRI (2014) fait une distinction similaire, entre l'hébergement de courte durée, celui de moyen terme, et enfin l'hébergement de long terme. Cette distinction est d'autant plus pertinente pour les événements de cinétique lente : l'hébergement de court terme (pour quelques nuits au plus) fait référence aux lieux d'hébergement d'urgence, pour reprendre l’expression de Quarantelli (emergency sheltering) ; les communes font face assez couramment aux problématiques de l'hébergement d'urgence et ont les moyens d'ouvrir rapidement des gymnases pour une ou deux nuits. L'hébergement de moyen terme (temporary sheltering dans la terminologie de Quarantelli) recouvre des solutions plus durables (équipements publics aménagés, logements dans des

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hôtels) ; cet hébergement doit pouvoir durer plusieurs semaines, le temps que le danger soit définitivement passé (dans le cas d'une crue de plaine, le temps que l'inondation se termine et que les rues et logements se ressuient). L'hébergement de long terme ne concerne que les ménages dont le logement d'origine a été durablement endommagé et nécessite donc une reconstruction qui peut s'étaler sur plusieurs mois, a minima, sinon plusieurs années. Plutôt que d’hébergement, il est préférable de parler de solutions de relogement, compte tenu de leur caractère de longue durée (temporary housing).

Il apparaît que les lieux d'hébergement collectif sont plus adaptés aux besoins de courte durée (proximate destination) : ces lieux servent souvent de point intermédiaire, de lieu d'accueil des populations en transit. Ils permettent aux populations de trouver un refuge dans l'urgence, avant de chercher une solution plus durable, au sein de la famille ou chez des amis. Ils peuvent aussi permettre aux populations de se faire recenser par les autorités le cas échéant, afin que ces dernières puissent connaître leurs besoins (Mileti et al., 1992). De ce fait, au-delà d’un ou de deux jours en centre d’hébergement collectif, les populations trouvent dans leur grande majorité le moyen de trouver par elles-mêmes une solution de relogement, de telle sorte que le taux d'hébergement collectif diminue avec le temps. Le CEPRI (2014) donne un exemple tiré des conclusions de l'Office Fédéral de la Protection des Populations en Suisse, qui estime que 34% des habitants ont besoin d'avoir leur hébergement pris en charge par la collectivité le jour de leur évacuation, mais qu'ils sont seulement 10% à en avoir besoin le jour qui suit.

En ce qui concerne l'hébergement en collectivité, diverses solutions peuvent être envisagées par les pouvoirs publics, selon la durée de l'évacuation (CEPRI, 2014) :

- A court terme, les équipements publics de type salle polyvalente (salle des fêtes), gymnase et les établissements scolaires peuvent servir pendant quelques nuitées, comme hébergement d'urgence. Ces équipements ne sont cependant pas prévus ni équipés pour héberger des populations et plusieurs principes sont à respecter : un espace minimum disponible par personne (4 à 10 m² selon les estimations), un accès à des sanitaires et des douches, des couchettes pour dormir.

- A moyen terme, les hébergements doivent pouvoir subvenir aux besoins de la population accueillie pendant plusieurs semaines. Les équipements publics, à l'instar des gymnases, doivent donc être équipés de façon ad hoc, en développant les équipements sanitaires (avec des toilettes et des douches mobiles qui viennent s'ajouter à des infrastructures existantes certainement saturées après quelques jours de vie commune), en assurant la collecte des déchets, en développant des bornes Wifi, en faisant appel à la restauration collective professionnelle, en renforçant enfin l'intimité au sein des ménages (par des cloisons en cartons par exemple). Outre ces équipements publics, les autorités peuvent aussi mobiliser l'offre commerciale en hôtellerie (chambres d'hôtels, gîtes, chambres d'hôtes), voire des hébergements de plein air (de type mobil-homes, tentes de l'armée). Ces hébergements de moyen terme doivent pouvoir être compatibles avec la continuité de la vie socioéconomique des territoires sinistrés : de ce fait, il faut limiter au maximum la distance entre le lieu d'hébergement et le logement, afin de permettre aux personnes de continuer à travailler, afin de limiter leur déracinement, et de favoriser ensuite leur retour au logement. Ces hébergements doivent enfin comprendre un espace en extérieur à même d'accueillir les véhicules des populations évacuées. - A long terme, sur plusieurs mois, les gymnases et autres équipements publics n'apparaissent plus adaptés : l’hébergement en collectivité laisse alors place au relogement des ménages au

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sein des appartements et maisons vacants du parc immobilier, ou bien au sein de mobil-homes. Dans certains cas d’évacuations massives de longue durée, l’hébergement en collectivité peut néanmoins perdurer sous de nouvelles formes : il s’agit alors de créer dans de grands espaces ouverts (stades, parcs, espaces agricoles) des "camps" comprenant des logements préfabriqués. Ces camps doivent se situer au plus près de l'agglomération afin de faciliter leur connexion aux réseaux d'assainissement, d'eau, d'électricité, et aussi d'assurer la proximité des services publics (transport en commun, poste, éducation) et privés (commerces).

Notons ici que, dans le cadre de ce chapitre, ce sont les besoins en hébergement de court et de moyen terme qui sont étudiés, courant donc de quelques jours à quelques semaines, et qui sont regroupés sous le vocable générique d’hébergement d’urgence. De la même façon, dans la mesure où seuls sont analysés les besoins de prise en charge par la collectivité, les expressions d’« hébergements en collectivité », d’« hébergement collectif », d’« hébergement d’urgence » sont utilisées indistinctement pour désigner largo sensu la prise en charge logistique et/ou financière, par la collectivité, de ces hébergements de court et de moyen terme.

2.2.3.3 L'identification des variables prédictives de l'utilisation des lieux d'hébergement

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