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FABIENNE HOHL

B. Les faits et moyens de preuve dans la procédure ordinaire, suivie de l'appel

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IMMUfABILITÈ DE L'OBJET DU LIl1GE

B. Les faits et moyens de preuve dans la procédure ordinaire, suivie de l'appel

1. Les litiges soumis à la procédure ordinaire, suivie de l'appel

La procédure ordinaire s'applique lorsque la loi ne prévoit pas de procédure spéciale, soit essentiellement aux affaires patrimoniales de plus de Sfr 20'000 (art. 191 ss et 237 lit. g a contrario).

Elle est suivie de l'appel lorsque la différence entre le dernier état des conclu-sions et le dispositif du jugement est de Sfr 10'000 au moins (art. 290 al. 2) er du recours limité au droit lorsque cette différence est inférieure à Sfr 10'000 (art. 310 lit. a).

2.

Les différents systèmes envisageables

a) Le! différenlJ lempJ /imileJ en première inJlance

Dans les procédures soumises à la maxime des débats' (procès soumis à l'autonomie des parties), le principe de la simultanéité des moyens d'attaque et de défense - appelé aussi maxime éventuelle - impose aux parties de pré-senter tous leurs allégués de fait et leurs moyens de preuve en une seule fois et à un moment donné de la procédure'. Les cantons déterminent librement ce moment.

Les différents temps limites sont:

le premier échange des écritures;

le second échange des écritures;

le début de l'administration des preuves ou le débat préliminaire: le de-mandeur et le défendeur doivent jnvoquer leurs moyens dans leurs écritu-res, mais ils peuvent encore, dans Je cadre du fondement du procès (même complexe de faits), compléter les faits et les mOj'ens de preuve jusqu'à ce stade du procès.

6 HOHL (op. tit. in nme 3), N 751 ss.

HOHL (op. til. in note 3), N 806 ss.

b) La production tartÜ'" de faits el mO)'ens de preu", nO/lveaux

Le principe de la simultanéité est assorti d'atténuations. Passé le temps limite, l'allégation de faits et de moyens de preuve est encore possible, mais elle est soumise à des conditions. Généralement: .

i) les vrais moyens nouveaux ou nova, qui ne pouvaient pas être invoqués plus tôt puisqu'ils ne s'étaient pas encore produits, sont toujours admissi-bles;

ü) les faux moyens nouveaux ou pseudo-nova ne peuvent plus êue invoqués, sauf:

si leur production n'était pas possible auparavant, par exemple parce qu'ils n'étaient pas connus de la partie;

si leur présentation tardive est excusable;

si les faits ressortent des preuves administrées.

La partie qui entend alléguer de nouveaux faits et de nouvelles preuves doit normalement agir immédiatement, c'est-à-dire dès leur découverte ou dès que l'empéchement excusable a cessé. Il s'agit en effet d'empêcher que celui qui entend invoquer des éléments nouveaux ne s'en prévale quand bon lui semble et ne retarde abusivement l'issue du procès8.

c) La «réforme;)

Dans les cantons de Vaud et de Neuchâtel', la <<réforme» permet à une partie d'annuler, jusqu'à un certain stade de la procédure et contre paiement des dépens frustraires, les actes du procès pour les remplacer par d'autres, dans la mesure où elle ne modifie pas l'objet du procès lui-même. Par exemple, si le défendeur a oublié d'invoquer la prescription dans sa réponse, il peut se ré-former pour l'inuodwre au procès 10.

S Artèt du TC GE, in SJ 1987 p. 191 et arrêt du TF, in SJ 1989 p. 278; HOHL (op. cit. in note 3), N 821.

J-F. POUDRET/J. HAWY/D. TAPPY, Code de procédure civile vaudois, 3ème édition, Lau-sanne, 2002, .rt. 153/ N 1.

10 Art. 153 ss CPC VD; 194 ss CPC NE.

IMMUTABIUTÊ DE COBjET DU LITIGE

d) En appel

L'admission des nova et pseudo-nova peut être réglée différemment:

les nova et pseudo-nova sont admis sans restrictions;

les nova et pseudo-nova sont admis à certaines conditions;

seuls les nouveaux moyens de preuve sont r.ecevables;

les nova et pseudo-nova sont exclus.

Si les pseudo-nova ne peuvent pas être invoqués dans la procédure d'appel parce que la loi de procédure ne les y autorise pas, c'est par la révision que la modification du jugement non conforme pourra être obtenue. Les vrais nova donneront généralement lieu à une nouvelle action.

3. L'avant-projet de PCS

a) Les dispoIitions légales

i) En première instance

Ait. 214 Fùpkqu"tdupüque

1 Le tribunal donne aux parties l'occasion de riplùjlier et de dupliquer; la renonriation à répli-quer emporte déchéance du droit de dllfJh'quer.

2 Le tribuna! peut ordonner que la riph'que et la duplique aient lieu oraJemmt aux débats prin-cipaux. ..

Ait. 215 Faits et moyens de preullt nONlItt11iX

1 Lu faitI et mf!Yem de preuve nouveaux Iont recevables en riplique el en duplique. 2 Des faits et des moyefu de preuve nouveaJIX ne sont admis ultérieurement que:

a. s'ifs sont invoqués immédialement et ne pouvoienll'être antérieurement en dépit de fa diligence requise; ou

b, s'ils doivent être produits en vertu du droit d'inlerptiler du juge

(sie durch Ausübung des gerichllichen Fragerecht.; veranlasst worden sind).

(Variante:

c, s'il s'agit de faits nouveaNx dont la pre/Jve par h"lre peut être apportée ù1JtlJédiatemenl.)

Ait. 220 Fùpüqu, ,t dupüqu,

Lorsque le tribunal a ordonné une réplique et une dHplique orales, il donne l'occasion aux parties d'en Jaire usage en début dJalldience,

ü) En procédure d'appel

Art 297 Faits et moy'en! de preuve nouveaux

1 L'art. 215, al. 2 el 3, s'applique par analogie à l'allégation de faits et mf!Jem de preuve nOJ/·

IM(1UX,

b) Commentaire

En procédure ordinaire, le temps limite est donc fixé à la fin de l'échange des écritures, qui comprend réplique et duplique puisque l'art. 214 al. 1 donne un droit à un deuxième échange d'écritures. L'allégation des faits et moyens de preuve est donc encore possible sans limitation dans la réplique et la dupli-que (art. 215 al. 1). Ultérieurement, des faits et moyens de preuve nouveaux ne peuvent être invoqués qu'à deux conditions: lorsqu'ils n'ont pas pu être invoqués avant malgré la diligence requise et qu'ils sont invoqués immédia-tement et lorsqu'ils résultent des preuves administrées à la suite de l'interpellation du juge. Dans cette deuxième hypothèse, une allégation for-melle ne me semble pas nécessaire, le juge devant simplement prendre ces.

faits en considération,

Les allégués de fait et les offres de preuves qui sont produits tardivement sont périmés; le juge ne peut pas les prendre en considération et, s'ils étaient déterminants pour le succès de l'action, le juge devra la rejeter".

En appel, la cause se poursuit: le temps limite de la première instance de-meure et seuls les faits nouveaux qui remplissent les conditions de l'art. 215 al. 2 - comme pour l'allégation en première instance - peuvent être invOGués.

L'art. 297 al. 1 renvoie simplement à l'art. 215 al. 2. La partie déchue du droit d'alléguer des faits en prem.îère instance ne peut donc pas corriger son erreur en instance de recourst2. Elle ne pourra pas non plus le faire par l'introduction d'une nouvelle action; l'autorité de la chose jugée s'étend à tous les faits qui font partie du complexe de faits qui est à la base du litige\3.

Le système de l'allégation en une fois (principe de concentration, Eventual-maxime) et le système strict fixant le temps limite au premier échange

11 ATF 101 la 102 con,id. 3 = JdT 1977 1111: arrêt du TF, in SJ 1989 p. 278: artêt du TC FR, in Extraits 1985 p. 47.

" Voir ATF 119 III 108 con,id. 3a = JdT 1996 II 172: 116 II 738 con,id. 2b.

13 Voir ntJ>ra I.A.l.

IMMlffABII.JTE DE L'OBJET DU UllGE

d'écritures sont abandonnés puisque les parties peuvent encore présenter leurs allégués de fait et leurs moyens de preuve en réplique et en duplique.

Est également abandonné le système plus généreux, par exemple du code de procédure civile fribourgeois et de la loi de procédure civile fédérale, qui permet aux parties de compléter leurs moyens jusqu'au début de l'admi-nistration des preuves (art. 130 al. 2 in inilio CPC FR; art. 19 al. 2 PCf).

Est enfin supprimé le système de la réforme.

Le droit à une réplique et une duplique est de nature à rallonger la procédure.

La possibilité pour le juge d'ordonner une réplique et une duplique orales y remédie, mais pourra occasionner une longue et fastidieuse dictée au procès·

verbal, qui pourrait porter atteinte aux droits de défense de la partie adverse.

On peut toutefois espérer que les avocats n'attendront pas le deuxième échange d'écritures pour produire leurs moyens.

Le défendeur ne peut pas compter sur la possibilité de déposer une duplique, car si le demandeur ne réplique pas, il n'y a pas de duplique.

Les conditions larges de l'allégation de nouveaux moyens favorisent le triomphe de la vérité matérielle.

c. Les faits et moyens de preuve dans la procédure