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Unification de la procédure civile : présentation et critique de l'Avant-projet de Loi fédérale de procédure civile suisse : Journée en l'honneur du Professeur François Perret

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Conference Proceedings

Reference

Unification de la procédure civile : présentation et critique de l'Avant-projet de Loi fédérale de procédure civile suisse : Journée en

l'honneur du Professeur François Perret

TRIGO TRINDADE, Rita (Ed.), JEANDIN, Nicolas (Ed.)

TRIGO TRINDADE, Rita (Ed.), JEANDIN, Nicolas (Ed.). Unification de la procédure civile : présentation et critique de l'Avant-projet de Loi fédérale de procédure civile suisse : Journée en l'honneur du Professeur François Perret . Genève : Schulthess, 2004, 239 p.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:8537

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(2)

Unification

de la procédure civile

Présentation et critique de l'Avant-projet de Loi fédérale de procédure civile suisse

Journée en l'honneur du Professeur François Perret

Ed. Rita Trigo Trindade / Nicolas Jeandin

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Schulthess § 2004

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<C Schulthess Médias Juridiques SA, Genève· Zurich . B~le 2004

ISBt-I 3 7255 4670 3 www.schulthess.com

(4)

Liste des auteurs VII

En guise de préface IX

J. Ummutabilité de l'objet du litige

1) PHIUPPE SCHWEIZER 3

2) F ABlENNE HOHL 29

Il. Preuve et droit à l'information

1) HENRI-ROBERT SCHOPBACH 51

2) LoUIS GAIll.ARD 73

III. Procédures rapides

1) PIERRE-ROBERT GILLIERON 91

2) DOMINIQUE HENCHOZ 109

IV. Exécution forcée des obligations de faire

1) BERNARD BERTOSSA 119

2) JACQUES HALDY 125

V. Arbitrage interne

1) FRANÇOIS PERRET 133

2) JEAN-FRANÇOIS POUDRET 153

VI. Conclusion générale

1) NICOLAS JEANDIN 171

Procédure civile suisse (PCS) 189

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BERNARD BERTOSSA

Professeur, Dr h.c. Université de Genève, anc. Procureur Général, Genève

LoUIS GAI liARD

DES Genève, Avocat, Genève PIERRE-ROBERT Gn.LIÉRON

Professeur honoraire, Université de Lausanne,]uge émérite au Tribunal cantonal vaudois

NICOLAS JEANDlN

Professeur, Université de Genève, Avocat, Genève

FRANÇOIS PERRET

Professeur honoraire, Université de Genève, Avocat, Genève PHlUPPE SCHWEIZER

Dr en droit, Avocat, Neuchâtel, Membres de la commission d'experts char- gée d'éhborer l'avant-projet de Loi fédérale de procédure civile:

FABIENNE HOHL Juge au Tribunal fédéral

DOMlNIQUE HENCHOZ Avocate, Genève

JACQUES HALDY

Professeur, Université de Lausanne, Avocat, Lausanne

HENRJ-ROBERT SCHÜPBACH

Professeur honoraire, Université de Neuchâtel, Membre de la SQUS-

commission d'experts chargée de l'examen du droit de l'arbitrage interne:

JEAN-FRANÇOIS POUDRET

Professeur honoraire, Université de Lausanne

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(8)

(et en amical hommage au professeur François Perret)

Pourquoi cet «en guise»? Parce que la procédure, je dois en faire l'aveu, ne fut jamais mon domaine ou mon plaisir. et si la préface commande les lumières d'un spécialiste, la plume d'un expert, capable d'apprécier et d'exposer les mérites ou les faiblesses de l'ouvrage qu'il présente au public, les lignes qui suivent ne sont pas une préface.

J'ai

néanmoins, il est vrai, participé - j'entends: assisté - au colloque dont ce livre contient les actes; un beau colloque, bien organisé, bien présidé, réunis- sant des orateurs distingués et des intervenants compétents. Quant à la ma- tière du débat, à cet avant-projet de loi de procédure présenté et commenté par d'éminents magistrats, professeurs et avocats, si vous voulez l'avis d'un profane, le texte n'en est pas en tous points réaliste et convaincant

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partie sur l'arbitrage m'a paru la mieux achevée), et il pourrait, je crois, être utile- ment soumis à l'examen critique des praticiens.

Mais ceci n'est que l'avis d'un profane, qui n'a, au surplus, qu'une sympathie résignée pour l'uniformisation des lois et du monde.

j'ai un avis plus autorisé, en revanche, sur l'homme que ce colloque a voulu honorer, et, en guise de préface, ou d'avant-propos, je puis en dire quelques mots.

François Perret est un très ancien et très cher ami. Nés la même année, en 1937, nous nous sommes rencontrés il y a cinquante-cinq ans à Calvin, dès la première année de collège (on dirait aujourd'hui le cycle), et nous avons con- nu depuis lors des destins étrangement parallèles: la maturité latine, la faculté de droit, puis celle des SES, l'école de recrues à Bière, les Etats-Unis (NYU et Wall Street), le brevet d'avocat, la thèse, la charge de cours, le professorat, sans abandonner la pratique, notamment celle de l'arbitrage.

Notre amicale rivalité ne s'est pas limitée au droit. Plus lent sur le chemin du mariage (il vient seulement de fêter, avec Gilberte, de modestes noces de bois), François fut toujours plus rapide que moi sur les pistes de Zermatt, mais avec, à mon avis, un style moins élégant, et s'il me fut indiscutablement très supérieur sur les courts du parc des Eaux-Vives, c'est sans doute uni- quement parce qu'il s'exerça davantage, même à des moments ou en des lieux inattendus: ses anciens étudiants se souviennent qu'il aimait parfois, pendant la pause, saisir une raquette inexistante, et, les genoux légèrement

(9)

EN GUISE DE PREFACE

pliés, frapper des revers et des coups droits contre une balle imaginaire. Ce n'était d'ailleurs, si l'on aborde ce sujet, que la moindre des innocentes ex- centricités qui dessinent sa silhouette et font partie de son charme. Qui aura oublié ses casquettes extravagantes, sa manière inimitable d'expirer à petites bouffées la fumée de sa «clope», tenue (ou le porte-clopes) comme une sar- bacane entre le pouce et l'index, ses lunettes au bout du nez, laissant voir ses yeux malicieux, ou, encore, ses fausses indignatibns et ses fausses colères?

Si vous préférez, même dans une préface qui n'en est pas une, que je sois moins frivole et badin, j'évoquerai, car cela me paraît essentiel, la diversité des compétences et des intérêts professionnels et privés de François Perret.

La Faculté lui a consacré un colloque sur la procédure civile, mais elle aurait pu tout aussi bien, mieux, peut-être, choisir la propriété intellectuelle, qui fut sa première vocation et qu'il enseigna après le départ de celui qui fut son mentor et son ami: Edmond Martin-Achard. Lorsque, au cours d'un collège des professeurs, on s'interrogeait sur la personne de celui qui, dans notre département de droit commercial, pourrait donner tel ou tel nouveau cours, je ne manquais jamais de m'écrier: <<François Perret!» Ce n'était qu'à moitié une plaisanterie, car c'est ainsi qu'il fut convaincu d'enseigner le droit comp- table, qu'il connaissait fort bien. Il était d'ailleurs juste que François enseignât beaucoup, pour compenser - il ne m'en voudra qu'un peu de l'écrire - son désintérêt quasi total (accentué par son horreur des conflits et des intrigues) pour l'admirustration de la Faculté et son mépris gaullien de l'intendance.

Dans sa vie privée, dans ses loisirs, également, François Perret est un homme éclectique. Féru de musique (et l'oreille ouverte - contrairement à moi - aux dodécaphorues sérielles), il est aussi engoué d'histoire. Et comme il a avec l'Italie, où il est né (à Milan, sous le prénom de Francesco), des affirutés par- ticulières, il s'est en priorité intéressé à l'histoire italienne, avant tout celle de l'entre-deux-guerres, au développement du fascisme, à l'étonnant destin du Duce, et, bientôt, plus largement, au temps des passions, dont il connaît tous les détails et tous les acteurs, de Rome à Berlin, en passant par Genève, Ma- drid et Vichy.

Le professeur François Perret a pris sa retraite. Mais il nous reste l'avocat, l'arbitre, le tennisman, l'homme de bonne compagnie, l'ami cultivé, avec (mais, peut-être, en ai-je déjà parlé?) ses casquettes extravagantes, ses clopes, et ses bésicles au bout du nez, laissant voir ses yeux malicieux ...

JACQUES-ANDRÉ REYMOND

(10)

L'immutabilité de l'objet du litige

(11)
(12)

Sommaire

I. Observations préliminaires 4

II. La mutabilité objective en général 5

A. L'objet du litige selon la jurisprudence actuelle 5

B. Les principes ou les mécanismes concernés par la modification de l'objet du

litige en cours d'instance 10

1. La compétence locale 10

2. La compétence matérielle 10

3. Le droit applicable Il

4. La litispendance et l'exception du même nom 11

5. La chose jugée et la forclusion 11

6. La révision et la demande nouvelle 12

C. Les deux systèmes extrêmes 13

1. Les avantages et les inconvénients de l'immutabilté 13 2. Les avantages et les inconvénients de la flexibilité 13

D. La rétroaction 14

III. L'avant-projet de loi fédérale de procédure civile suisse

(procédure civile suisse, PCS) 15

A. Les phases de l'instance en procédure ordinaire 1S

1. La conciliation (art. 191-194) 15

2. L'échange des écritures (art. 210-214) 16

3. Les débats préparatoires (art. 217) 17

4. La décision sur preuves (art. 218-219) 17

5. Les débats principaux (art. 220 à 225) 18

6. La clôture de l'instruction (art. 223. al. 1 in initio) 18

7. Les plaidoi,ies (an. 223-224) 19

8. La clôture des débats 19

9. Le jugement (art. 227ss) 19

10. Les recours (art. 290 ss) 19

B. La création de la litispendance 20

C. Les effets de la litispendance 21

D. La rétroaction 22

E. Les conclusions 23

F. Les faits et les preuves 24

G. Immutabilité et recours 25

H. Procédure simplifiée 27

1. Procédure sommaire 27

]. Arbitrage interne 27

IV. Conclusion 28

(13)

lMMm'ABILITÊ DE L'OBJET DU LITIGE

I. Observations préliminaires

L'unification de la procédure civile implique une simplification substantielle:

dès l'instant où la procédure civile bascule dans la sphère de compétence de la Confédération, on échappe à ces conflits qui ont empoisonné la vie judi- ciaire et universitaire en matière civile quant à la délimitation des compéten- ces respectives de la Confédération et des cantons, issue de l'ancien article 64 al. 3 est. De nombreux litiges procéduraux auraient sans doute été étranglés dans l'oeuf sans cette coexistence des deux niveaux de compétence. Que l'on songe à la jurisprudence relative au fardeau de l'allégation', au fardeau de la preuve2, au régime de l'exception de litispendance3 ou de l'exception de chose jugée4, ou encore à la marge de manœuvre des cantons dans le do- maine de la révisionS, toutes questions ont un rapport plus ou moins étroit avec l'objet du litige et son éventuelle élasticité6•

En revanche l'avant-projet ne résout pas une des difficultés majeures, qui consiste à définir les contours de l'objet du litige. Il est acquis de longue date' que le droit fédéral régit cette question, pour les prétentions relevant du droit civil fédéral. De même, il parait désormais admis que la notion d'objet du litige a des contours identiques dans les différents contextes dans lesquels il joue un rôles. Le concept d'objet du litige n'en reste pas moins encore émi- nemment fuyant. De nombreux ouvrages9 ont été consacrés à cette notion,

2 3 4

ATF 108 Ir.,37.

ATF 114 II 289 pour la preuve, 115 II 305 pour la contre-preuve.

ATF 114 II 183 et les références, à lire en parallèle avec l'ATF cité à la note suivante.

ATF 95 II 639 et POUDRET J.-F., La sanction de l'autorité de la chose jugée en matière de divorce, in: Festschrift zum 70. Geburtstag von Max Guldener, Zurich, 1973, pp. 253 ss.

ATF 109 la 103 et P. SCHWEIZER, Le recours en révision, spécialement en procédure civile neuchâteloise, thèse, Neuchâtel, 1985, pp. 299 ss.

Nul doute cependant que la jurisprudence fédérale sera appelée à se prononcer sur les pratiques cantonales divergentes que ne manqueront pas de susciter des traditions et des habitudes différentes.

Voir par exemple ATF 98 II 158, 105 II 151, 231.

WALTER G., Der Streitgegenstand, in: Recht. Berne, 1990, pp. 33 ss., 38; l'ATF 128 III 284 a récemment tranché une controverse persistante; voir note 32 ùifra.

K.-H. SCHWAB, Der Streitgegenstand im Zivilprozess, Munich/Berlin, 1951; W. J.

HABSCHEID, Der Streitgegenstand im Zivilprozess, Bielefdd, 1956; W. HENCKEL, Partei- lehre und Streitgegenstand, Heidelberg, 1961; O.jAUERNIG, Verhandlungsmaxime, Inqui- sitionsmaxime und Streitgegenstand, Tubingue, 1967; D. HESSELBERGER, Die Lehre vom Streitgegenstand - Geschichtliche Entwicklung und gegenwartigen Stand, Cologne/

Berlin/Munich, 1970; B. RIMMELSPACHER, Materiellrechtlicher Anspruch und Streitgegen-

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mais il Y a trente-sept ans déjà Max Kummer écrivait à propos de ceux qui, comme lui une décennie auparavant dans sa thèse d'habilitationlO, avaient tenté de cerner abstraitement les contours objectifs du litige en procédure civile: (<Aus dieser Zwickmühle ist noch kein Prozessualist überzeugend ausgebrochem,11, ce qui me paraît toujours vrai aujourd'hui.

Dernière remarque préliminaire: une modification de l'objet du litige peut résulter ou s'accompagner d'un ajustement subjectif!2. Il ne sera pas question de cela par la suite, sous réserve d'une brève observation lorsqu'il sera ques- tion de l'effet rétroactif éventuel d'une modification de l'objet du litige.

Il. La mutabilité objective en général

A. L'objet du litige selon la jurisprudence actuelle

Je me limiterai à tenter de résumer ici la conception - telle que je la com-

prends - du Tribunal fédéral en ce qui concerne l'objet du litige, car on ver- rait mal que l'introduction d'un code fédéral de procédure civile le fasse changer d'avis sur ce concept fondamental si le législateur n'en décide pas autrement, ce qui paraît bien improbable s'agissant d'une notion aussi abs- traite, incernable et rebelle à toute définition légale.

L'objet du litige a un sens large et un sens étroit.

standsprobleme im Zivilprozess, G6ttingen, 1970; 0. HAus, Der Streigegenstand im schweizerischen Zivilprozess, Zurich, 1981; voir aussi SCHWANDER v., Jura natif cuna und das Verhaltnis dieses Grundsatzes zum Rechtsgrund des Anspruchs)), in: Festgabe für Wilhelm Sch6nenberger, Fribourg, 1968, pp. 199 ss.; BAUMGARTEL G., Zur Lehre vom Streicgegenstand, in: JuS, Francfort, 1974, pp. 1 ss.; B6HM P., Die Ausrichtung des Streit- gegensundes am Rechtsschutzzie1, in: Festschrift rur Wmfried Kralik, Vienne, 1986, pp.

83 ss.; BEYS K., Zum Problem des Streitgegenstandes im Zivilprozess ( ... ), in: ZZP, K.6ln/Berlin, 1992, pp. 145 ss.

\0 M. KUMMER, Das Klagerecht und die materielle Rechtskraft im schweizerischen Recht, Berne, 1954.

Il ZBJV 1966, p. 16.

12 Le demandeur s'aperçoit en cours de procès qu'il s'en est pris à un ou plusieurs défen- deurs qui n'avaient pas qualité pour défendre ou contre lesquels il n'était pas légitimé; un changement intervient en cours d'instance qui bouleverse les rapports entre demandeur(s) et défendeur(s) et nécessite une correction.

(15)

1

1 IMMtITABIUTÊ DE L'OBJET DU linGE

Au sens large il comprend l'objet au sens étroit (les conclusions, ce qui est demandé) et la cause (ce sur quoi le demandeur fonde ses conclusions).

Sous réserve d'une complication théorique de taille mais pratiquement anec- dotique sur laquelle on reviendra bientôt, l'objet au sens étroit ne me parait pas poser de difficulté majeure13•

C'est la cause qui fait problème.

S'il est certain que la cause ne peut en aucun cas consister dans la simple invocation d'une règle de droit, et qu'elle suppose donc nécessairement l'allégation d'un ensemble de faits, d'un conglomérat, d'un Lebenssachverhalt à mailles plus ou moins fmes, une des questions cardinales est de savoir si la règle ou le principe juridique invoqués par le demandeur14 font partie de la cause. Sur ce point la lecture des arrêts récents du Tribunal fédéral peut sus- citer un doute. Saisi récemment d'un cas de litispendance contestée, il a con- sidéré par exemple que "si elles opposent /es mêmes parties et portent sur le même complexe de faits, une action négatoire et tlne action condamnatoire doivent C ... ) être consi- dérées comme identiques (...))15. Nulle trace du fondement juridique proposé, en tout cas dans le passage cité. Pourtant on peut lire, deux pages plus haut: <de Tribunal fédéral a admis que tel était le cas (qu'il y avait identité de l'objet du litige) lorsque, dans l'un et l'autre procès, les parties soumettent au juge la même prétention en se fondant sur les mêmes causes juridiques et ks mêmes faitS))16,17.

13 Je renoncefà discuter ici la distinction entre les prétentions individualisées et non indivi- dualisées, qui n'a pas lieu d'être en tout cas sur le plan des principes; voir SCHWEIZER P., Du nouveau dans la théorie de l'objet du litige, in: Pliidoyer, St-Gall, 1989, pp. 55-56.

14 Pour ne pas alourdir, on entendra par demandeur celui qui déduit une prétention en ju- stice même s'il est demandeur reconventionnel

15 ATF 128 III 288.

16 ATF 128 III 286.

17 Voir aussi SJ 1996, p. 291, dans un arrêt relatif à un litige de brevets: {JJ y a cho.re jugée lorsque la prétention JitigieuJe est identiqlle à celle qNi a #la fait l'objet d'un jllgemen/ parsé en force. Tel sera le car lorsque la pritention se base sur la même cause juridique el sur le même état de fait», puis: ((la force (en réalité l'autorité) de chose jugée est conceplNellemen/ limitée par l'oo/et du litige. Il faut que la prétention soit la même, étant précisé que la notion de l'identiti des pré/entions doit s'entendre non gram- maticakment, mais d'apris leur contenu. Elk es/ ainsi déterminée par l'ensembk des aspects juridiques qui étaient inclus dans la cause jugée et qui ont été tranchés. LI nouvelle prétention sera donc identique à l'ancienne, malgré une description différente, lorsqu'elle était dijà con/enue dans celle-ci, ou lorsque la pro-- position contraire a fait l'oo/el du jugement, ou encore lorsque la question principale, débattue dans k procès, est déterminante pour trancher des questions pr&ildkieJies du second proets. En revanche, les ques- tions de droit d'une teneur semblable ne seront pas identiques lorsqu'elles n'ont pas la même origine, c'est- à-dire ne reposent par sur les mêmes faits el les mêmes considérations juridiques (ATF 97 II 396 consid

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PHIUPPE ScHWEJZ.ER

Ainsi, à première vue, le fondement juridique de la demande participerait à la définition de la cause, donc entrerait dans l'objet du litige au sens large, avec pour conséquence l'absence d'identité de deux demandes reposant sur des faits identiques ou contraires qui se distingueraient uniquement pa, le fon- dement juridique avancé par le demandeur.

Mais il ne faut pas s'y tromper. Outre qu'aucun des arrêts répertones ne concernait le cas où une partie se serait bornée à obliquer sur un nouveau fondement juridique, une abondante jurisprudence relative au principe jura novit c/lria s'en vient démentir une telle lecture. Pour ne prendre qu'un exem- ple tiré de la mémorable saga Wesdand, «(lès l'instant où une prétention est motivée de manière sHjfoante, le juge (..) est tenu d'appliquer le droit d'office, sans se limiter aux motift avancés par ks par/ies. Par conséquent, il ne statue pas IIltra ou extra petita s'il retient dts moyens de droit qui n'ont pas élé infl(}qués car il ne procède, dans une telle Mothise, qu'à une nOllvel1e qualification des faits de 10 callw)". Partant de cette af- firmation exacte et non contestée, on ne voit pas comment l'objet du litige pourrait être limité aux motifs juridiques invoqués par les parties !jura novit Cllria n'astreignant d'ailleurs même pas les parties à invoquer quelque motif juridique que ce soit)19.

Reste le cas particulier de l'insertion, dans les conclusions, du fondement juridique de la demande. Un arrêt non publié du 30 avril 1992 du Tribunal fédéral, justement critiqué à notre avis par François PerretZO, retient qu'en pareil cas un tribunal" starue ultra petita s'il dévie du cadre juridique proposé ou imposé par le demandeur, car cela équivaut à une délimitation volontaire de l'objet du litige (au sens large). A contrario, il n'en va pas de même si le fondement n'est pas rappelé dans les conclusions22•

4)>> (mise en évidence ajoutée); de même, ATF 123 III 18-19, 423 in inilio; 121 III 477; 119 11 90; 112 II 272.

18 ATF 120 II 175; de mème ATF 92 II 305; 9111 63; 89 II 337; 70 II 215; 64 II 270.

19 Comparer art. 210 al. 3; voir aussi art. 52: «.L.e tribunaloppliqJlt le droit d'office».

20 PERRET F., Les conclusions et leur cause juridique au regard de la règle ne eat judex ultra pecta partium, in: Etudes de droit international en l'honneur de Pierre Lative, Mélanges WVt; Bàle/Fnncfort.sur-1e.Main, 1993, pp. 595 s~; ""'Ira, J..F. POUDRET/5. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Zurich, 2002, p. 790, mais les réticences de ces auteurs à l'égard de l'opinion de François Penet ne tirent pas à conséquence pour notre propos puisqu'elles ne concernent que l'hypothèse spéciale dans laquelle le fondement ju- ridique de la demande est repris dans les conclusions.

21 Arbitral in (a!II mais peu importe.

22 La Cour de cassation civile du canton de Neuchâtel s'est récemment trouvée confrontée à une situation quasi identique et elle a jugé, dans un arrêt du 3 janvier 2003 (CCC

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IMMUTABILITÉ DE l'OBJET DU LrI1GE

En bref j'estime que malgré les formules obiter du Tribunal fédéral qui pour- raient faire croire le contraire, le fondement juridique de la demande ne fait pas partie de sa cause et donc de son objet au sens large, sauf - à tort à mon avis mais c'est l'état de la jurisprudence critiquée par François Perret - lors- qu'il est mentionné dans les conclusions de la demande, ce qui semble être interprété par notre Cour suprême comme une limitation de la demande, comparable à une Tetlklagfi23, avec pour corollaire nécessaire la possibilité pour le demandeur d'exercer une nouveUe action sur sur la base des mêmes faits mais sur un fondement juridique différent.

Réglée cette question de l'intégration à la cause du fondement juridique de la demande, on tombe sur celle des frontières de la «bull." de faits compris dans la cause,. autrement dit de ceux qui seront réputés avoir été jugés.

On l'abordera par deux exem pies opposés.

Dans une affaire jugée le 2 juillet 1973", le Tribunal cantonal neuchâtelois a été confronté à la siruation suivante: un inventeur avait passé un accord avec une société pour l'exploitation de son invention. A l'expiration de leur con- vention, la société avait continué l'exploitation de l'invention pour son compte. Un premier jugement l'a condamnée à rétrocéder l'invention, après quoi l'inventeur a agi en paiement d'un solde de commissÎons et de domma- ges-intérêts, la société ayant selon lui suscité de la part d'un tiers une de- mande d'annulation du brevet à laquelle elle avait acquiescé. Le tribunal dit ceci: (Quand une personne est pn·vée de l'exercice d'un droit, plusieurs sortes de domma- ges sont possibles. Un dommage psychique et corporel, par frustration, n'est pas ,xc/u,

même s'il eIt4plus vraisemblable qu'il s'agisse ici d'lin dommage purement matérie~ mais lequel? Le tribunal l'ignore, le demand,ur '!Yant omis de I~n informer conformément à 10 loi. El/ bref, celui qui demande réparatiol/ d'un dommag' doit alliguer quel il est. Même en interprétant les allégués du d,mandeur de façon ms Iorge (..), l, tribul/al doit constater qu'il "' l'a pas fait. Le solde de sa demal/d, ,st dis lors irrec,vabl",25. En clair cela

2002.142), que le principe jura rlovit cwid trouvait application quel que fût J'endroit (dans le corps du mémoire ou dans ses conclusions) où le demandeur avah invoqué un principe ju- ridique erroné ou une disposition légale inapplicable. seuls les faits allégués et prouvés de- vant servir de fondement au jugement de première instance.

2.3 Dans le même sens, art. 12 al. 4 nCPC françajs: «Tolltquis, il (lejllf!)ne peut {han§'" la dénomi- nation 011 k jondenunl jlln"diqlle lorsqlle les partitS, en t'trtll d'lin acrord expris tl pOlir Its droits donl el- les ont la libre disposition, l'ont Iii par les qllalifications el points de droits auxquels tilts enlmdmf limiter le débab>.

24 RJN 6 1 5 ss.

25 RJN 618.

(18)

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PHIIJPPE SCHWEIZER

signifie que la cause était tellement mal circonscrite, tellement informe, la bulle tellement floue, que le tribunal n'était pas en mesure de se prononcer.

A charge, ou plutôt avec l'avantage, pour le demandeur, de pouvoir renou- veler l'exercice judiciaire de sa prétention sans risquer l'exception de chose

jugée, puisque la cause n'était pas identifiable selon la Cour.

Affaire comparable en droit - et rocambolesque en fait -, jugée par le Tribu- nal fédéral en 1989". Un avocat uranais avait représenté un client dans une procédure d'expropriation à l'issue de laquelle il avait obtenu une indemnité modique. L'avocat présenta un mémoire salé à son client qui refusa de s'en acquitter. Action en paiement, rejet, confirmé jusqu'au Tribunal fédéral qui releva que le jugement cantonal de débouté était mal motivé mais que de toute manière les allégations de l'avocat, insuffisamment détaillées, n'auraient pu lui permettre de l'emporter. Nouvelle demande, nouvelle escalade de la pyraruide, le Tribunal fédéral casse pour des raisons de procédure. A son troisième essai l'avocat se heurte à l'autorité de la chose jugée du jugement initial. Passons sur le thème central de l'arrêt27 pour en venir à ce qui nous intéresse: «Ein Sachurtei/ (ergeht) wenn der Richter nach Massgabe der aufgestellten Behauptungen den gel tend gemach!en Anspruch ais hinreichend individualisiert, jedoch die TatsachenbehOHf'tungen ais ungenügend substanziert erarchtet, cin Prozessurteil dagegen, wenn die vorgetragenen Behauptungen nicht einmal die 1 ndividualisierung des Anspruchs i}Jlassem)28

Cda veut dire que si notre «bulle» est incernable, la demande sera irrecevable faute d'objet décelable, mais que si elle est défInissable, il y aura lieu à rejet définitif, comme dans le cas de cet avocat uranais29.

Ces deux exemples montrent surtout la difficulté qu'il y a à cerner la cause.

Et comme le disait Max Kummer, c'est pratiquement impossible dans l'abstrait. Mais puisqu'il faut avancer, admettons que ce soit possible, de cas en cas, de façon intuitive.

26 ATF 115 11187, note critique SCHWEIZER, Théorie de l'objet du litige, (op .. cit. in note 13).

27 Qui était de savoir si un jugement qualifié de processuel pouvait (et devait) être interprété comme un jugement au fond.

28 ATF 115 II 190.

29 D'où l'erreur à mon avis du Tribunal cantonal neuchâtelois dans la première affaire:

l'inventeur avait indiqué de façon claire sur guel conglomérat de faits il entendait obtenir réparation. C'est à l'intérieur de cette sphère qu'il s'était montré insuffisamment précis.

(19)

"

B.

IMMUTABIUTÊ DE L'OBJET DU LmGE

Les principes ou les mécanismes concernés par la modification de l'objet du litige en cours d'instance

En soi la possibilité ou l'impossibilité de modifier l'objet du litige en cours d'instance est une question d'opportunité, si l'on pose - ce qui ne parait plus contestable vu le droit d'accès à la justice - que la partie éventuellement em- pêchée sans faute de sa part de procéder à une telle modification pourra invoquer dans une procédure distincte les faits (et les preuves) bloqués dans l'instance en cause. Avant d'y venir, passons rapidement en revue les princi- paux aspects procéduraux touchés par la flexibilité de l'objet du litige.

1. La compétence locale

Selon une règle indiscutée, la compétence locale est acquise une fois pour toutes, même si les facteurs qui la fondaient à l'introduction de l'instance se modifient en cours de procès. C'est la règle de la perpetual!o fori, qui permet notamment de parer à des manoeuvres louvoyantes du défendeur.

2. La compétence matérielle

Il devrait <ln principe en aller de même pour la compétence matérielle, par exemple si la valeur de l'objet litigieux est sujette à des fluctuations, Autre est la question de savoir si et à quelles conditions une amplification ou une mo- dification des conclusions ayant pour effet un transfert de compétence ou l'applicabilité d'une procédure différente. Pour la compétence ratione materiae, la tendance semble être acruellement plutôt à l'admission d'un transfert de la cause, selon des modalités variablesJ(),

JO Par exemple arr. 94 al. 3 cpe BE, art. 267 al. 2 cpe VD implicitement, § 144 al. 2 ZPO 50, a<t, 7 CPC NE; "nlra apparemment § 61 al, 1 ZPO ZH, § 89 al, 1 ZPO GL; voir infra N° JII.C et Ill.E.

(20)

3.

Le droit applicable

Il a été jugé en matière internationale que le droit applicable (objectivement applicable) à l'introduction de l'instance le restait même si le rattachement se modifiait en cours de procédure3!.

4. La litispendance et l'exception du même nom

A partir de l'instant où la procédure est engagée, la demande emporte litis- pendance. Il n'est plus possible de la renouvder (ou de déposer une demande contraire:") devant quelque tribunal que ce soit, le même, un autre ou un tribunal arbitral. La première instance introduire bloque ou invalide les sui- vantes. Le problème qui se pose ici est de savoir ce qu'il en est de la priorité temporelle qu'implique la litispendance. Plus précisément, le fait d'élargir une instance «étroite» introduite en premier lieu permet.il de paralyser une ins-

tance parallèle ouverte en second lieu? Autrement dit qu'en est-il quand les deux objets du litige, séparés au départ, se chevauchent parce que l'un d'entre eux prend du volume en cours d'instance? C'est le problème de la rétroaction dont il sera question plus loin.

5. La chose jugée et la forclusion

Par déftnition l'autorité de la chose jugée porte sur ce que le tribunal a tran- ché, mais aussi sur ce qu'il est censé avoir jugé. C'est presgue toujours à pro- pos de ce mot censé que la question se pose.

Lorsque l'état de fait est bloqué à l'introduction de l'instance il n'est déjà pas toujours facile d'identifier les contours de l'objet du litige car il faut prendre en compte tous les faits, allégués ou non. prouvés ou non, qui entrent dans

3! ATF 118 il 86.

32 Dans l'ATF 105 II 233 encore le Tribunal fédéral avait une vision restrictive de l'identité objective (action en constatatiori négative jugée non identique à une action en exécution, sur le méme objet). La C]CE est d'un autre avis (Gubisch Mascrunenfabrik AG c/Giulio

Palumb~ Rec. 1987, p. 4861; The Tatry c/The Macie; Ratai, Rec. 1994, p. 5439), auquel le Tribunal fédéral semble s'être rallié désormais: ATF 121 III 474, 12311119,422, et sur- reut ATF 1281I1 284.

(21)

,1

IMMUTABIUTÉ DE L'OBJET DU IlTIGE

l'objet du litige et qui sont donc touchés par la forclusion des faits non allé- gués ni prouvés33•

Le problème devient encore plus ardu lorsque les frontières du litige sont virtuelles. A la question ql/est~ce que le demandeur aurait pu, ou dû, savoir et pouvoir prouver au stade de Fintroduction de l'instance?, à l'appui de ses conclusions d'origine, il faut substituer la question suivan~e: qu'est-ce qu'elle aurait raùonna- blement pu savoir, alléguer; prouver, et à quoi aurait-elle pu) voire dû, conc/ure34 à la date de la clii/ure de l'instruction3S , 36? Bref, plus l'objet du litige au sens large est élas- tique, plus le champ de la forclusion sera difficile à identifier.

6. La révision et la demande nouvelle

Il faut évidemment distinguer selon que les faits non allégués dans la pre- mière procédure entrent ou non dans l'objet du litige. S'ils y sont inclus et qu'il n'est pas possible de les invoquer en cours d'instance, la seule possibilité de s'en prévaloir éventuellement consiste dans un recours en révision, à moins que ces faits soient survenus après la date déterminante pour l'autorité de la chose jugée37 .

33 Voir ATF.1 5 II 187 précité.

34 On retrouve le problème de la Teilklage.

35 Entendue ici comme celle à compter de laquelle il est interdit à une partie de faire état de nova ou de noviter reperla.

36 Car si j'allègue un dommage de 10'000.- francs sur la base des éléments à ma disposition au moment où j'introduis ma demande, qu'on admettra partiels, le tribunal- surtout celui qui sera saisi ultérieurement d'une demande «additionnelle» - devra décider si dans la première procédure j'avais réclamé la réparation de mon dommage total, ou celle de mon dommage connu à l'époque.

37 ATF 116 II 743, critiqué par J-F. POUDRET, in: Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 déc. 1943, Volume V, Art. 136-171, Berne, 1992, p. 234, note 4.3 ad art. 38 OJ: (<un amt de 1990 affirme !alU ambage que mlie ferait ouverte la voie de la ré- virion en (a! de découverte dt faits importants, le jugement entré en force établiIIant difinitivtment l'état de fait à la baie du litige et nt permettant pa! d'intlOquer, comme cause noutJtlle, de! faits non aU igNé! dan! Je premier procèJ (. .. ). Tel ne !aNrait à notre aviI être k cas que si la loi de procédure applicable ptrmtl

d'invoquer des faits comme motifS de révision sanl quoi une action nouvelle doit Itre pOIIibk». Voir à ce propos ATF 109 la 106, qui souligne la liberté des législateurs cantonaux en matière de révision en procédure civile; comparer ATF 118 II 199, en matière d'arbitrage internatio- nal.

12

(22)

c. Les deux systèmes extrêmes

A une extrémité, l'immutabilité complète. L'objet du litige est cristallisé à la date de l'introduction de l'instance, et la chose jugée est logiquement arrêtée à cette date, avec pour conséquence que les faits survenus en cours d'instance peuvent servir de fondement à une demande nouvelle3S .

A l'autre extrémité, la flexibilité parfaite. Les allégations de fait et les conclu- sions peuvent être adaptées et modifiées jusqu'à fin de cause, l'objet du litige, évolutif, étant fixé au moment du prononcé du jugement, les contours de l'autorité de la chose jugée étant de ce fait arrêtés à cette date.

1. Les avantages et les inconvénients de l'immutabilté

Le cadre du litige étant fixé d'entrée de cause, ce système a pour lui l'avantage d'une simplicité relative car l'objet du litige est défini d'emblée une fois pour toutes et les parties peuvent se concentrer sur radministration des preuves et cibler leur argumentation juridique. L'évolution du procès sera plus prévisible que dans un système flexible, et il sera plus facile de délimiter le champ de la forclusion, donc le domaine respectif du recours en revision et de la demande nouvelle. En particulier, les nOM au sens strict pourront toujours être portés en justice dans une procédure ultérieure, puisque ce système veut que la chose jugée soit arrêtée à la date de l'introduction de l'instance39•

L'inconvénient correspondant est la lourdeur d'un tel système: en situation évolutive, les enjeux peuvent être dépassés avant que la cause soit jugée.

2. Les avantages et les inconvénients de la flexibilité

Les parties peuvent façonner leurs conclusions et leurs allégations au fil de la procédure, dont les contours définitifs ne sont arrêtés qu'à fin de cause.

38 Le demandeur ou Je défendeur d'origine pouvant prendre l'initiative de la nouvelle procé- dure.

39 Autrement dit le couperet de la chose jugée tombe à l'introduction de l'instance, et l'évolution ultérieure de la situation de fait échappe à son emprise.

(23)

IMMUTABIUTÉ DE L'OBJET DU UTIGE

L'avantage consiste dans le fait 'lue le jugement sera réputé pla'luer à la réa- lité au moment de son prononcé, ce qui aura pour effet de trancher à l'issue d'une seule procédure des questions qui, dans un système rigide, donnerait ou pourrait donner lieu à plusieurs instances40• Le défaut correspondant est qu'on ne sait jamais, jusqu'à la fin du procès, sur quoi le jugement portera exactement et quels seront les contours de son autorité41 •

D. La rétroaction

Il faut encore décider si les modifications, adaptations ou ajustements de l'objet du litige sont réputés remonter dans le temps.

La question me semble n'avoir d'intérêt que dans la mesure où est en cause une sauvegarde de délai ou l'application d'une règle de priorité.

Dans de nombreux systèmes et abstraction faite de règles fédérales comme l'art. 139 CO ou l'art. 34 al. 2 LFors, dont les contours ne sont pas (encore) clairs42, une instance viciée peut être réintroduite dans un délai donné, ce qui laissera au demandeur le bénéfice du calendrier: la demande rectifiée sera réputée avoir été introduite à la date de la demande mal formée ou mal adressée, ce qui permettra au demandeur de soulever avec succès l'exception de litispendance s'il est attaqué entre-temps43.

Voir ATF 116 II 743 précité.

41 L'art. 19 du Règlement CCI, dans sa teneur valable depuis le 1er janvier 1998, permet au tribunal arbitral de tenir compte, de cas en cas, de ces préoccupations divergentes: {~pris

/a signature de l'acte dt mission, ou son approbation par la Cour, les partie$ ne peuvent formuler de nou- velles demandes, reconventionne/ks ou non, hor$ de$ limites de l'acte de mission, satif autorisation du tri- bunal arbitral qui tiendra compte de la nature de ces nouvelks demandeI ( ... ), de /'état d'avancement de la procédure et de toutes autres circonstances pertinentes».

42 Art. 34 al. 2 LFors; voir I<EU.ERHALS F./GÜNGERICH A., Die Anpassung der bernischen Zivilprozessordnung an das Bundesgesetz über den Gerichtsstand in Zivilsachen, in:

ZBJV, Berne, 2002, pp. 814 ss., 827-828, et les références. Pour les auteurs cités, qui pa- raissent toutefois minoritaires, l'arr. 34 LFors permet de redresser avec effet rétroactif des vices procéduraux de l'acte introductif d'instance autres que celui qui se rapporte à l'incompétence du tribunal saisi; voir notes 84, 86 infra.

43 Exemples: art. 163 CPC BE; 141 CPC VD; 165 al. 3 CPC NE; contra pour Zurich, H.

STRAULIjG. MESSMER, Kommentar zur Zürcberischen Zivilprozessordnung, 3i:1IIf: édition, Zurich. 1997, notes 19 et 20 ad § 107 ZPO.

(24)

En revanche, un délai de prescription échu ne pourra pas être rattrapé par une amplification de conclusions", pas plus qu'une demande mal dirigée ne pourra être réputée avoir été introduite en temps utile contre le défendeur qui avait qualité pour être actionné en tant que te145•

Quant au point de savoit si une extension de l'objet de litige rétroagit quant à l'emprise de l'exception de litispendance, voite de la chose jugée, il n'est pas réglé dans les lois actuellement en vigueur à ma connaissance. Le bon sens commanderait plutôt une réponse négative, ne serait-ce que parce que l'option inverse ferait la part trop belle à la manœuvre.

III. L'avant-projet de loi fédérale de procédure civile suisse (Procédure civile suisse, PCS)

A. Les phases de l'instance en procédure ordinaire

Les systèmes actuellement en vigueur ne concordant pas sur quelques temps forts de base, on rappellera rapidement quelques options fondamentales du projet quant à la structure de l'instance.

1. La conciliation (art. 191-194)

La conciliation est obligatoite, facultative ou exclue.

Elle est obligatoite en procédure simplifiée, exclue dans les procès d'état civil46, en procédure sommaire et dans diverses contestations prévues par la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite47, facultative en matière patrimo-

.. ATF 122 III 203.

45 Contra, un arrêt de la Cour de cassation civile de Neuchâtd du 19 mai 1999 (CCC 7574), à propos d'une réforme survenue hors délai dans une affaire d'inscription d'hypothèque lé- gale d'entrepreneur, notamment dans le but de corriger la désignation des défendeurs.

46 Art. 193 al. 1 lit. a, de même que dans les procès en annulation de mariage (lit. b) et dans les procès en divorce sur requête commune (lit. c).

47 Art. 193 al. 2.

(25)

il, ~ll

IMl'vIUTABILITÊ DE L'OBJET DU UTIGE

niale", OU lorsque le domicile ou le sIege du défendeur se trouve à l'étranger49, ou encore lorsque la résidence du défendeur est inconnue50•

Dès que la conciliation a échoué le demandeur obtient de l'autorité de conci- liation une autorisation de procéder, qui fait partir un délai de deux mois pour agir".

2. L'échange des écritures (art. 210-214)

Les parties échangent une demande et une réponse} avec indication des preuves offertes et jonction des pièces en possession de la partie qui les in- voque52, Une motivation juridique est facultatives3, ce qui va dans le sens de

48 Art. 192 al. 2 lit. a. Je relèverai simplement un conflit littéral: alors que que l'art. 192 aL 1 de l'avant-projet porte que les parties peuvent convenir par écrit de renoncer à la procé- dure de conciliation, et l'art. 192 al. 2 lit. a que le demandeur peut décider unilatéralement de renoncer à utiliser la procédure de conciliation dans les litiges patrimoniaux, le 3i:mo: ali- néa du même article dispose que le préalable de la conciliation est obligatoire en procé.

dure simplifiée. Or en vertu de l'art. 237 lit. g, la procédure simplifiée s'applique notam·

ment aux affaires dont la valeur litigieuse n'atteint pas 20'000 francs. D'où la question:

dans cette dernière hypothèse, la conciliation est·elle obligatoire ou facultative? Une inter·

prétation systématique donnerait sans doute un avantage au caractère obligatoire de la conciliation dans ce cas, la procédure simplifiée constituant un régime spécial par rapport à la procédure ordinaire. Mais le bon sens voudrait qu'une dispense soit possible en pro·

cédure simplifiée également: on peur traîner un âne jusqu'à la fontaine mais personne ne le forcera~~amais à boire. S'il est clair d'emblée qu'une conciliation n'entre pas en ligne de compte, ce préliminaire inutile ne ferait que compliquer et ralentir une procédure qui est précisément censée être simple et rapide.

49 Art. 192 al. 2 lit. b.

50 Art. 192 al 2 lit. c.

51 Art. 202.

52 Un avantage de ce principe très répandu consiste dans le fait que les parties sont astreintes à jouer cartes sur table, et que leurs avocats notamment sont contraints de méditer sur les preuves à leur disposition au moment de procéder, ce qui pourrait les conduire à renon·

cer, donc à dégorger la justice. Son défaut tient en ce qu'il faut réunir des moyens de preuves parfois non disponibles aisément, pour prouver tous les faits pertinents qu'il in·

combe à la partie en cause de prouver, et dont on ignore s'ils seront contestés. Dans le même sens, STRAULI/MEsSMER, (op. cil. in note 43), 2ème édition, Zurich, 1982, note 2 ad § 106 (comparer en revanche la troisième édition, Zurich, 1997, note 2 ad § 106). Une prise de position allant dans le bon sens avait aussi été exprimée sans succès par l'ordre des avocats neuchâtelois, lors de la procédure de consultation relative au code de procédure actuellement en vigueur, qui a posé cette règle, inconnue auparavant, voir Rapport 88.028 du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'appui d'un projet de code de procédure civile neu- châtelois (CPC), du 11 mai 1988, p. 25.

16

(26)

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!~ l'idée exprimée plus haut, selon laquelle le mande ne fait pas pattie de l'objet du litige.

fondement juridique de la de-

L'avant-projet donne aux parties un droit apparemment inconditionnel à répliquer et à dupliquer, mais le tribunal peut ordonner que les réplique et duplique aient lieu pat oral lors des débats principaux, autrement dit après les débats préparatoires facultatifs et le prononcé des ordonnances de preuves",

3. Les débats préparatoires (art. 217)

Le tribunal55 peut fixer une audience pour «simplifier la procédure ou pour préparer les débats principaux», autrement dit pour dégrossir le litige, Il s'agit d'une sim- ple faculté. Des preuves peuvent être administrées, qui pourront l'être une nouvelle fois par la suite56,

4. La décision sur preuves (art. 218-219)

Il s'agit d'une décision qui précise les faits à prouver et attribue la charge de la preuve, Venant d'un ordre jntidique qui a abandonné le Bew,isin/,r/okut bien avant mon vivant et n'ayant pratiqué que sa procédure rénovée, je ne suis pas en mesure d'émettre une opinion éclairée sur les résultats possibles de cette option mais à lire les motifs qui ont conduit le législateur neucbâte- lois de 1906 à abandonner le système, compatable à celui de l'avant-projet, qui était en vigueur par exemple à Neuchâtel auparavant57, on peut avoir des

53 Art. 210 al. 3.

54 Art. 214.

55 In corpore apparemment, encore que l'art. 114 permette au tribunal de déléguer la conduite des débats préparatoires à l'un de ses membres.

56 Art. 222, ce qui ne va pas dans le sens d'une accélération. Sans doute vise-t-on l'hypothèse où une délégation au sens de la note précédente a été décidée.

S? Bulletin officiel des délibérations du Grand Conseil (BGC), 1905, p. 3~0: «Notre projet suppn'me l'ordonnance de preutlts; si aprù les explùanolU Iur les faitI de la demande et de la réponse, les parties déclarent avoir dei preuve!, le p"ndent se borne à kilt' fixer tks délais à cet eJfot. L'ordonnance de preuves, un legs de l'ancienne procédure coutumw-e allemantk (Beweisinterloht), avait polir but de ripar-

fir la charge de la preuve, c'est-à·dire qu'elle devait risll11ler et groKJm" les faits sur leIquels portait le litige et indiquer à chaque parfie ceux qu'elle avait à prouwr pour triompher dam ses comillsions. MaiJ il s'en faut de beaucoup que l'ortWnnance tk prnllJtS soit restée ala dans la pratique. Depuis longtemps elle fi

complètement dévié de son butj elle eIf devenue une pure formalité par laquelle le prisident se borne à pro-

(27)

IMMUTABILITÊ DE L'OBJET DU UTIGE

hésitations, s'agissant des ordres judiciaires où, en matière de maxime des débats, le tribunal se sent plutôt inspiré par l'esprit anglo-saxon.

Tout comme les débats préparatoires, les ordonnances de preuve sont pré.:.

vues dans une section intitulée «(Priparation des débats princiPaw(», mais il sem- ble logique que le tribunal puisse et même doive rendre des ordonnances de preuves même s'il renonce à ordonner des débats préparatoires.

5. Les débats principaux (art. 220 à 225)

Une réplique et une duplique orales sont possibles à ce srade si le tribunal les ordonne. Or puisqu'en vertu de l'art. 215 al. 1 des faits et moyens de preuve nouveaux sont recevables en réplique et en duplique, il est vraisemblable que dans l'esprit des auteurs du texte, le tribunal devra rendre, le cas échéant, une nouvelle ordonnance de preuves au sens entendu plus haut.

Le tribunal administre les preuves aux débats. Comme indiqué plus haut, des preuves déjà administrées au cours des débats préparatoires peuvent l'être à nouveau lors des débats principaux.

6. La clôture de l'instruction (art. 223. al. 1 in

initio)

Le projet pfévoit qu'au terme de l'instruction le tribunal donne la parole aux parties pour plaidoiries.

nonetr que chaque partie doit prouver kJ numéros de su allégués que "autre n'a pas avoués; chaque nu·

méro d'aUigui elt un fait, peu importe qu'il ne soit que la négation d'un fait; et le juge omomle que ce nu·

méro doit être prouvé par la partie qui en est l'aufellr, sans recherchtr du tout si cette preuve lNi incombe en vertu de la règle ei incumbit probatio qui mcit. Ainsi le demandeur allègue, sous un numéro, que le dé·

fendeur n'a pas Pt!yé; le d4ftndeur nie et répond, sous un autre numiro, qu'il a ptryé; le président ortWnne la preuve des deHx numérm, de l'4firmation et de la négation, parce qu'ils ont tous deux été niés. Il n'est

pas besoin de dire qu'ainsi comprise l'ordonnance n't1fre aucune utilité quelconque pour la marche du pro-

ctS)). Sur le caractère aléatoire de la répartition du fardeau de la preuve en matière de cau- salité, voir notamment SCHWEIZER P., La preuve de la causalité, in: Développements ré- cents du droit de la responsabilité civile, Zurich, 1991> pp. 173 ss, et les références.

(28)

7.

Les plaidoiries (art. 223-224)

Les plaidoiries peuvent être orales ou ecntes. Il est précisé, à propos des plaidoiries orales, que les notes de plaidoiries, «cotes» de plaidoiries à la ma- nière française, peuvent tenir lieu de procès-verbal à certaines conditions 58.

8. La clôture des débats

Le projet ne dit pas quand est prononcée la clôture des débats. Sans doute à la fm de l'audience de plaidoiries ou à l'issue de l'échange des plaidoiries écrites.

9. Le jugement (art. 227ss)

Le tribunal juge. Une motivation écrite est jointe au dispositif sur requête59 et le jugement entre en force notamment lorsque les délais d'appel normal ou simplifié sont expirés60•

10. Les recours (art. 290 ss)

Les auteurs de l'avant-projet ont prévu les recours suivants:

a) Un appel dans les cas normaux (par défaut)61;

b) Un appel simplifié62.

Dans les deux cas il s'agit d'un recours dévolutif parfait63.".

58 Il faut que leur conformité à l'exposé oral soit vérifiée et attestée par la personne qui tient le procès-verbal (art. 223 al. 3).

59 Art. 230 al 3.

60 Art. 234.

61 Art. 290 ss.

62 Art. 299 ss.

63 Art. 297 et 306, pour les fruts et les preuves nouveaux. Mais pas pour les conclusions à première vue, comparer art. 215, 216, 221 d'une part, 297 et 306 d'autre part; voir à ce propos infra, III G.

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