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Chapitre I : Préliminaires : quelques précisions sémantiques

II.4 Bref portrait et itinéraire d’Henri Bouillard

II.4.2 Rencontres et écrits d’Henri Bouillard

II.4.2.2 Ecrits d’Henri Bouillard

Le premier article de Bouillard date de 19423 et le dernier qu’il ait signé, paraît près de quarante ans plus tard, en 19814. Mais le premier écrit décisif qui ouvre sa longue carrière intellectuelle est sa première thèse sur Thomas d’Aquin

1 M., Castro. L’itinéraire théologique d’Henri Bouillard, op. cit., p. 212.

2 J., Doré. « Théologie et philosophie chez Henri Bouillard », op. cit., p. 806.

3 Cf. « Saint Thomas d’Aquin et le semi-pélagianisme. ». BLE, 1942, 43, p. 181-209.

4 Cf. « Transzendenz und Gott des Glaubens ». Christlicher Glaube in moderner Gesellschaft, I.

Freiburg im Br., 1981, p. 87-131, traduit en français : « Transcendance et Dieu de la foi » et repris dans VC, p. 317-354.

soutenue en 1941 mais parue en 1944 sous le titre de : Conversion et grâce chez

saint Thomas d’Aquin1. Cette étude qui pose les jalons d’un renouvellement de la pensée théologique scolastique a été mal reçue alors que son objectif, de ce point de vue, était précisément clair : « nous n’avons dit-il, voulu ni faire œuvre polémique, ni établir une thèse de théologie, mais décrire une pensée, faire œuvre d’histoire doctrinale. »2 Malgré l’incompréhension suscitée par ce premier écrit de Bouillard lequel

,

[

…] en montrant que saint Thomas lui-même a varié au cours de sa vie sur la question [mineure] des dispositions de l’homme à l’accueil de la grâce, […] avalise sa véritable thèse : la relativité des systèmes théologiques, même les plus célèbres, et leur dépendance par rapport à l’état de la culture, religieuse et profane, de leur temps3

;

une thèse qui posant ainsi d’emblée la question du rapport épistémologique entre la philosophie et la théologie, est développée sans relâche dans ses autres écrits parus presque tous chez l’éditeur Aubier. Ce sont :

- Karl Barth. Tome I : Genèse et évolution de la théologie dialectique. Coll. « Théologie » 38. Paris : Aubier-Montaigne, 1957. (KB I)

- Karl Barth. Tome II : Parole de Dieu et existence humaine. Tome 2. Coll. « Théologie » 39. Paris : Aubier-Montaigne, 1957. (KB II)

- Blondel et le christianisme. Paris : Seuil, 19614. (BC)

- Logique de la foi. Esquisses. Dialogues avec la pensée protestante. Approches

philosophiques. Coll. « Théologie » 60. Paris : Aubier-Montaigne, 19645. (LF)

- Connaissance de Dieu. Foi chrétienne et théologie naturelle. Coll. « Foi vivante » 45. Paris : Aubier, 19676. (CD)

- Comprendre ce que l’on croit. Coll. « Intelligence de la foi ». Paris : Aubier- Montaigne, 1971. (CC)

- Fede o paradoso ? Per una critica della ragione teologica. Fossano, 1973.

- Vérité du christianisme. Edition préparée et préfacée par Karl H. Neufeld s.j. Avec un témoignage du P. de Lubac. Coll. « Théologie ». Paris : DDB, 1989. (VC)

1 Cf. CG. Coll. « Théologie » 1. Paris : Aubier, 1944.

2 CG, p. 211.

3 E., Fouilloux. « Henri Bouillard et saint Thomas d’Aquin (1941-1951) », op. cit., p. 180.

4 Traduction allemande : Blondel und das Christentum (trad. M. Seckler). Mainz, 1963, (19672).

Traduction espagnole : Blondel y e cristianismo (trad. R. Vilardel). Coll. « Pensamiento cristiano » 7. Madrid, 1966.

5 Traduction allemande : Logik des Glaubens. Coll. « Quaestio Disputata » 29. Freiburg/Br., 1966.

Traduction anglaise : The logic of faith. Coll. « Logos Books ». New-York, 1967.

6 Traduction anglaise : The knowledge of God (trad. S. D. Femiano). New-York, 1968 (London,

A ces principaux écrits il faut ajouter les nombreux articles de revues, de dictionnaires, les contributions à des ouvrages collectifs, portant, entre autres, sur Barth, Blondel, saint Jean de la Croix, la théologie fondamentale, les notions de religion, de sacré, de révélation1. La plupart de ces articles dont les deux plus récents2 sont rassemblés dans un ouvrage posthume préparé et préfacé par son confrère Karl-Heinz Neufeld3. Nous avons compté soixante-neuf articles dans la présentation de la bibliographie de Bouillard que fait B. Lucchesi4. Il y a enfin une dizaine d’inédits dans la bibliographie de notre jésuite : il s’agit d’articles, de communications et de cours dactylographiés signés, pas toujours datés, mais situables approximativement en fonction des citations5.

L’étude de la pensée bouillardienne requiert, cela va sans dire, la prise en compte exhaustive de sa bibliographie, car ses écrits se complètent en même temps que chacun pour sa part, développe son intuition fondamentale sur la consubstantialité de l’expérience humaine et du surnaturel d’une part et de la nécessité d’une herméneutique théologique qui soit « actuelle » pour être vraie d’autre part. C’est ce que nous essayerons de faire, mais en restant dans le cadre de la dimension de sa pensée que nous étudions à savoir : le paradigme de la relativité historique de la théologie qui requiert une herméneutique théologique. Mais il nous faut pénétrer plus encore le contexte natif de la pensée bouillardienne en revisitant maintenant précisément le néo-thomisme tel qu’il s’est présenté au XXè siècle pour faire un état des lieux de la « crise » qu’a suscité son mouvement de croissance. C’est l’objet du chapitre suivant.

1 M., Castro. L’itinéraire théologique d’Henri Bouillard, op. cit., p. 15.

2 « Philosophie et religion dans l’œuvre d’Éric Weil » et « Transzendenz und Gott des Glaubens »

traduit en français sous le titre « Transcendance et Dieu de la Foi ».

3 VC. Coll. « Théologie ». Paris : DDB, 1989.

4 Cf. B., Lucchesi. Le mystère chrétien à l’épreuve de la raison et de la foi, op. cit., p. 72-76.

Chapitre III : « Crise » du néo-thomisme et la réflexion théologique

catholique du XX

è

siècle : état des lieux

On peut parler, sans forcer le trait, que la vocation théologique d’Henri Bouillard se devine, et, en un certain sens, se fixe dès son premier travail, sa thèse, consacrée à Thomas d’Aquin. Sa voie intellectuelle non moins que spirituelle s’est véritablement ouverte dans sa rencontre avec la pensée de l’Aquinite. Cette rencontre en effet qui lui a fait prendre conscience d’un décalage épistémologique de fond qui entrave en quelque sorte l’accessibilité à la foi dans le schème de pensée de ses contemporains telle que la leur proposait le langage théologique de son contexte. C’est ce que nous désignons par la terminologie de la crise du néo- thomisme qu’a vécue Bouillard et qui a constitué le creuset de sa voie théologique et philosophique.