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Droits de résiliation du constructeur (termination rights) :

Relations verticales et optimisation du matching dans le réseau de distribution : une revue de la littérature

3. Droits de résiliation du constructeur (termination rights) :

Manquements répétés aux objectifs de vente et de service 1.00 Changement de propriétaire de la concession 1.00

Faillite de la concession 1.00

Défaut de paiement au constructeur 1.00

Changement de la Direction 0.83

Désaccord entre le propriétaire et la direction 0.61

Changement de la localisation 0.61

Nomination d’un liquidateur 0.57

Verdict de Justice 0.43

Fausses informations 0.35

Perte de contrôle des lieux 0.09

Concession fermée 0.09

Total des droits de résiliation 7.57

b)- Le matching peut-il faire l’objet de droits supplémentaires pour le constructeur ?

La fonction de matching peut-elle faire l’objet de l’allocation de droits supplémentaires au constructeur dans le contrat de concession ? Le matching pourrait-il faire l’objet d’un droit à prendre des décisions en court de contrat (« completion rights ») ? Le constructeur est là face à deux difficultés :

- La fonction de matching est par essence une optimisation sous incertitude sur la demande. Le constructeur, pas plus que le concessionnaire, ne connaît la distribution des préférences des consommateurs de la zone de chalandise. Il ne peut donc fixer les moyens nécessaires, l’assortiment en stock par exemple, pour permettre la rencontre entre un consommateur et la variante la plus proche de ses préférences. Il peut seulement espérer que le concessionnaire utilisera l’information imparfaite dont il dispose sur sa demande pour essayer d’anticiper les variantes qui seront demandées par les clients.

- Mais il ne peut pas non plus fixer d’objectifs à atteindre. En effet, l’objectif du matching est de minimiser la distance dans l’espace des biens, entre les préférences d’un client et la variante qu’il décide d’acheter. Or, cette distance ne peut faire aisément l’objet d’un indicateur. En effet, le constructeur est là face à une asymétrie d’information : seul le client peut estimer la désutilité qu’il supporte quand il achète une variante qui s’éloigne de ses préférences.

Cette asymétrie d’information contraint également le constructeur dans la mise en place d’un droit de contrôle ex-post sur les résultats du contrat (« monitoring rights »). Arrunada et al. (2001) notent que dans 74% des réseaux analysés, le constructeur s’octroyait le droit d’enquêter auprès des clients après leur passage dans la concession (Tableau 11). Ces enquêtes visent à mesurer la satisfaction des consommateurs sur le service fourni en concession. Or le matching, comme on l’a vu, pose des problèmes dans la création d’un indicateur. Si le concessionnaire compense le mis-matching par une remise par exemple, ou si le consommateur a choisi sa variante en fonction de sa disponibilité, il sera difficile d’estimer les composantes de l’utilité du consommateur, c’est-à-dire de dissocier l’effet matching, de l’effet du prix et de la disponibilité. De manière générale, devant l’asymétrie d’information du constructeur vis-à-vis des actions du concessionnaire et des préférences du consommateur, la distribution de droits de « completion» ou de contrôle, ne protège pas le constructeur du comportement opportuniste du concessionnaire dans la conduite du matching.

1.3

Relation d’agence et matching dans le contrat de concession

La théorie des coûts de transaction prédit que si les performances d’un acteur sont difficiles à mesurer ex-post, le contrat doit prévoir un système d’incitation de cet acteur pour protéger le co- contractant du risque de comportement opportuniste. Lafontaine et Raynaud (2002) montre ainsi que l’incitation et la distribution des droits, c’est-à-dire le mécanisme de « self-enforcement », ne sont pas alternatifs mais complémentaires et jouent sur des problèmes contractuels distincts, notamment en fonction de la possibilité de mesure ex-post. .

Le contrat de franchise (ou de concession) est donc un objet privilégié d’application de la théorie de l’agence, qui s’intéresse à l’intensité optimale d’incitation du distributeur. Nous analyserons ici l’apport de la littérature sur le contrat de franchise à notre problématique du matching : l’ajout dans l’objectif du contrat de franchise de l’optimisation du matching joue-t-il sur l’intensité de l’incitation qui doit être alloué au distributeur ?

La littérature théorique de la franchise (Stiglitz 1974, Rubin 1978, Mathewson et Winter 1985) a montré que le partage du risque et du profit entre le franchiseur et le franchisé, donc de l’intensité de l’incitation des deux parties, doit varier selon les caractéristiques spécifiques de l’agent (le franchisé), du principal (le franchiseur), du point de vente et du marché. Or, comme le font remarquer Lafontaine et Slade (1998), on observe en réalité un contrat identique pour tous les franchisés d’un même réseau de distribution. Le problème du degré d’incitation devient donc une dichotomie entre choix d’internalisation de la fonction de vente ou d’externalisation par la franchise.

Lafontaine et Slade (1998) se proposent donc, par une revue de la littérature théorique et empirique, de tester les prédictions de la théorie de l’agence en termes d’intensité d’incitation à mettre en œuvre, en les comparant aux résultats d’études empiriques qui portent sur la forme de distribution la plus employée dans différents secteurs. Dans ce but, ces auteurs, en s’appuyant sur l’observation empirique que le mode de rémunération présente une part incitative moindre au sein d’une organisation que vis-à-vis d’un agent extérieur66, émettent l’hypothèse structurante que :

- l’allocation de droits résiduels élevés sur le profit, c’est-à-dire une forte intensité d’incitation et une part du risque importante, correspond empiriquement à une tendance forte à la désintégration de la fonction de distribution, notamment par un contrat de franchise ;

- au contraire, une faible intensité incitatrice, et donc une faible part du risque, correspond à une tendance à la prise en charge par la firme productrice de sa fonction de distribution.

a)- Intensité d’incitation du contrat de distribution

Lafontaine et Slade (1998) présentent une revue de la littérature théorique à partir d’un modèle simplifié de la relation d’agence.

Un agent fournit un effort

a

, qui produit un résultat q selon la relation q= f (a,

ε

,Θ), ou

ε

est une variable aléatoire représentant le risque, et Θ un vecteur de paramètres. On fera varier dans la suite cette fonctionf (.) suivant le problème d’incitation à examiner.

66

Cette moindre intensité de l’incitation liée notamment au besoin d’assurance du salarié averse au risque.

Le prix du produit est normalisé à 1. L’agent supporte un coût privé de l’effort égal à

C(a)= a

2

2

. L’agent est averseau risque. Le principal, indifférent au risque rémunère l’agent par un contrat linéaire s(q)=

α

q+ W, dans lequel

α

détermine la part variable de la rémunération, et W est un revenu fixe. Finalement, le revenu total de l’agent est :

yq+ W − a

2

2

α

est le paramètre clé de l’analyse. Quand

α

=0, l’agent est un salarié parfaitement assuré, tandis que quand

α

=1 l’agent s’approprie tout le revenu de son effort et supporte tout le risque. En général on trouve 0 <

α

<1, et

α

représente l’intensité d’incitation de l’agent.

Lafontaine et Slade dégagent neuf facteurs influant sur la fonction q= f (a,

ε

,Θ) et donc sur l’intensité de l’incitation du distributeur à mettre en œuvre, et synthétisent ce que prédit la théorie de leur impact sur

α

. Enfin ces auteurs vérifient si les études empiriques dans divers secteurs de la distribution confirment ces prédictions, c’est-à-dire si la prédiction d’une forte incitation correspond bien à une tendance à l’usage de la franchise, et inversement.

Les prédictions de la théorie sont confirmées dans tous les cas sauf un, et peuvent être résumées dans le tableau ci-dessous (Tableau 12).

Tableau 12 : Influence des paramètres de la fonction d’effort de l’agent sur l’intensité incitative du contrat (Lafontaine et Slade, 1998)

Paramètres de la fonction d’effort de l’agent

q= f (a,

ε

,Θ)

Influence sur l’intensité de l’incitation

α

(et donc sur la tendance à la distribution par franchise dans les

études empiriques )

Risque (variabilité des ventes) (-)

(mais usage de la franchise dans les études empiriques)67 Effort de l’agent (importance de l’effort dans le résultat q) + Taille du point de vente (capital investi important) (-)

Coût de contrôle + ou (-) selon la modélisation du

coût de contrôle Effort du franchiseur (importance de l’effort dans le résultat q) (-) Retombées sur le réseau de distribution

(externalités horizontales, notamment sur l’image de marque)

(-) si valeur très élevée de la marque

Substituabilité avec produits concurrents (concurrence avec d’autres

marques) +

Délégation de la fixation des prix au vendeur (-) si l’agent est très averse au i

67

Ce paramètre de risque (risque commercial mesuré par la variabilité des ventes) est le seul sur lequel les prédictions de la théorie sont contredites par les études empiriques. La théorie prédit en effet une baisse de l’incitation de l’agent averse au risque si le risque s’accroît, tandis que les études empiriques observent l’effet inverse. Lafontaine et Slade (1998) montrent que cette contradiction est liée au fait que la variabilité mesurée empiriquement est largement endogène et liée au fait que la délégation des décisions par franchise permet au distributeur de mieux s’adapter aux variations réelles de la demande.

risque

Tâches multiples (l’agent effectue plusieurs types de tâches) Dépend de la corrélation du risque des activités entre elles b)- L’optimisation du matching et l’intensité d’incitation

Nous ne développerons pas ici l’impact de chacun de ces paramètres, mais insisterons sur deux d’entre eux, l’effort de l’agent et les coûts de contrôle, qui recouvrent les problèmes de contrats incomplets que nous avons cités dans le paragraphe 2.1, l’incertitude et la complexité ex-ante, et la difficulté dans la mesure des performances ex-post. En effet, ce sont sur ces deux paramètres qu’influe, selon nous, l’ajout de l’objectif d’optimisation du matching dans les fonctions du distributeur.

L’effort de l’agent : Il s’agit de l’importance de l’effort de l’agent dans l’obtention du résultat, calculée dans la littérature empirique par l’intensité du travail versus le capital, par différentes mesures de la valeur ajoutée, l’expérience requise, ou certains droits comme la discrétion dans le choix des inputs. La théorie comme les études empiriques prédisent que l’intensité de l’incitation, et donc la tendance à la désintégration via la franchise, est croissante avec ce paramètre.

Dans le cas qui nous intéresse, l’optimisation du matching renforce l’importance de l’effort du concessionnaire sur le résultat de son action. En effet, l’efficacité du matching dépend notamment de l’assortiment stocké par le concessionnaire. Cet effort supplémentaire nécessite d’accroître l’incitation du concessionnaire.

Le coût de contrôle : Si l’idée que le contrôle par le principal est coûteux est à la base de la littérature sur les contrats incitatifs, la théorie prédit des résultats contradictoires d’un modèle à l’autre. Lafontaine et Slade montrent que cette contradiction est liée à deux façons différentes de modéliser les coûts de contrôle :

- Si le coût de contrôle est modélisé comme le coût de transaction lié à l’éloignement du siège, (le coût d’envoi d’un salarié pour mesurer l’effort sur le point de vente par exemple), son accroissement entraîne un accroissement conjoint de l’intensité incitatrice et la tendance à l’usage de la franchise.

- Si le coût de contrôle est modélisé comme la difficulté à se reposer sur les chiffres de vente pour évaluer le résultat de l’effort (résultats collectifs, difficiles à mesurer, importance des activités hors de la vente, etc.), l’accroissement de ce coût de contrôle entraîne une baisse de l’intensité incitatrice et une forte incitation à l’intégration verticale.

Le problème dans le cas du matching consiste en la difficulté à fixer un indicateur pour mesurer l’effort de l’agent, c’est-à-dire de déterminer le résultat q sur lequel reposera l’incitation. On a vu, en effet, que l’asymétrie d’information dont souffre le constructeur, l’empêche de mettre en place un indicateur mesurable de l’efficacité même du matching, c’est-à-dire de la distance dans

l’espace des biens entre les préférences d’un client et la variable qu’il achète. Le constructeur ne peut donc s’appuyer que sur les résultats des ventes, en volume ou en chiffre d’affaires, pour mesurer l’effort de l’agent. L’efficacité du matching a en effet un impact sur le volume de ventes (certains clients peuvent être perdus si la variante de leur choix n’est pas disponible) et sur le taux de remise nécessaire pour emporter la vente. Mais le constructeur ne peut distinguer l’effet du matching dans ces critères et le différencierde l’effet de l’objectif quantitatif et de l’élasticité au prix de la demande, c’est-à-dire des remises nécessaires pour atteindre cet objectif de volume.

Introduire l’optimisation du matching dans les objectifs alloués à un distributeur a donc des effets complexes et contradictoires. La recherche de l’optimisation du matching dans les points de vente augmente l’importance de l’effort de l’agent, c’est-à-dire du concessionnaire, sur les résultats. Les incitations doivent donc être accrues, et la distribution reste désintégrée. Mais le matching est difficile à observer et à contrôler par le constructeur : celui-ci ne peut se fier aux résultats des ventes pour mesurer l’effort du concessionnaire dans l’optimisation du matching. Il est alors inutile de renforcer l’incitation sur les ventes (chiffres d’affaires ou volume de ventes) si elle n’accroît pas l’incitation à l’optimisation du matching. Les résultats de Lafontaine et Slade montrent qu’il y a alors une tendance à l’intégration verticale dans la distribution pour mieux maîtriser l’effort de l’agent par une coordination de type hiérarchique.

Le traitement de la question du matching dans la littérature que nous avons présentée se heurte à la non-mesurabilité des résultats du matching et l’impossibilité du constructeur à fixer les moyens qui doivent être utilisés par le concessionnaire.

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