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3. L’intégration de l’Education Relative à l’Environnement dans l’enseignement scolaire en France : de

3.3. De l’intérêt des partenariats au partenariat école-musée

Malgré la clarification conceptuelle et méthodologique de l’intégration de l’ERE dans le système scolaire que nous venons de décrire, la mise en pratique dans la réalité pose de nombreux problèmes : l’ERE demeure une activité marginale selon Boillot-Grenon (1994).

Plus récemment, les acteurs de l’éducation relative à l’environnement regroupés dans le CFEE (Collectif Français pour l’Education à l’Environnement) estiment lors des assises de l’ERE en 2000 qu’il existe une disparité de situations dans l’Education nationale : « de l’instituteur missionné au professeur détaché, les cas de figure sont multiples et parfois sans commune mesure. (...) Il ressort manifestement (...) que le statut de l’Education à l’Environnement dans les académies dépend souvent des bonnes dispositions des recteurs ou de l’inspecteur d’académie. Il n’y a pas ou peu de culture commune, ni de réponses formalisées au niveau des administrations régionales de l’Education nationale, les supports budgétaires ou les supports de postes pouvant s’établir en fonction d’opportunités ou de secteurs voisins (Mission culturelle, Ecole de la Forêt, réseaux d’école rurales, comités départementaux inter-administration de suivi de l’Education à l’Environnement). L’intervention des missionnés éducation à l’environnement repose souvent sur la personne ou personnalité de l’enseignant, ses contacts, étant très souvent issus de réseaux personnels (collègues motivés, associations).

Le manque de légitimité de la fonction est souvent soulevé en ce qui concerne un champ d’action plus large et notamment en ce qui concerne la formation (...) dans les IUFM » (CFEE, 2000).

Pourtant, malgré les difficultés, l’école se doit d’intégrer l’ERE. D’abord parce que les enjeux environnementaux actuels l’y obligent, ensuite parce que l’ERE est une chance d’ouverture et de développement pour l’éducation en général et l’enseignement scolaire en particulier. Dans ce sens, Sauvé définit une perspective pédagogique de l’ERE, qui contribue au

« développement d’une éducation plus adaptée à la réalité du monde actuel et aux besoins des sociétés contemporaines » (Sauvé, 1997).

Cependant, et comme nous l’avons déjà dit, l’intégration de l’ERE dans le système éducatif, centrée sur la mise en place de projets interdisciplinaires, se confronte à de nombreux obstacles : cloisonnement disciplinaire, manque de temps et de ressources pédagogiques spécifiques, etc. De plus, la formation des enseignants à l’ERE vient s’ajouter aux nombreux objectifs des systèmes de formation initiale et continue. C’est pour toutes ces raisons, que le ministère de l’Education nationale offre la possibilité aux écoles de faire appel à des partenaires extérieurs. Non seulement le partenariat peut permettre de pallier à certaines difficultés du système scolaire, mais il constitue pour l’école une chance d’ouverture sur l’extérieur. En effet, cette notion de partenariat, « assez récente dans le système éducatif, est

apparue au cours des années 80, sur le constat que l'école devrait s'ouvrir vers l'extérieur » (Liaisons, 1999)11.

Il faut préciser que le partenariat ne se limite pas à être une chance pour l’école, comme stratégie d’intégration de l’ERE dans le système scolaire et d’ouverture vers l’extérieur, mais que de manière plus générale, il correspond à l’essence même de l’ERE. Le partenariat apparaît en effet « comme un mode de fonctionnement privilégié en éducation à l’environnement car il est conforme à sa philosophie de partage de connaissances, de confrontation d’idées et de synergie dans l’action » (Bidou, 2001-2002). Pour Sauvé (2001-2002), le partenariat constitue « une condition essentielle de développement et parfois même de survie de cette dimension essentielle de l’éducation fondamentale ». Elle distingue trois arguments pour le travail en partenariat dans le domaine de l’ERE :

• un argument épistémologique : « dans une perspective socio-constructiviste, le partenariat peut mettre à profit la diversité de ces regards sur le monde et de ces pratiques pour la construction d’un savoir plus riche, plus pertinent, plus crédible, plus utile, concernant l’environnement, et plus spécifiquement notre relation à l’environnement » ;

• un argument éthique : « le partenariat incite à la prise en charge collective de cet objet partagé qu’est l’environnement » ;

• un argument stratégique : « d’une part, il permet de faire converger des ressources et de mettre en place des conditions pour un projet commun : ressources financières, support logistique, appui politique, etc. Et d’autre part, il met à profit les différents savoir-faire des partenaires (en matière d’environnement ou de pédagogie) et permet de combiner des éléments méthodologiques provenant de divers champs de compétence, pour optimaliser l’efficacité ou l’efficience de l’action entreprise ».

Le Ministère de l'Education nationale incite donc l'école à faire appel aux partenaires extérieurs, notamment pour l’organisation de projets interdisciplinaires : « les établissements scolaires devront s'ouvrir aux partenaires susceptibles de leur apporter appui et enrichissement » (BO n°3, 01/1993). En effet, l’ERE a trouvé un terrain de développement dans de nombreux lieux d’éducation informelle susceptibles de devenir ces partenaires de l’école : « les blocages du système scolaire ont contraint l’ERE à s’exprimer en dehors de

11 Pour être plus précis, la notion de partenariat est bien plus ancienne et complexe : par exemple, dans le cadre du partenariat école-musée, des références bibliographiques datant des années 1940 traduisent l’amorce d’une réflexion sur la rencontre entre le monde scolaire et le monde muséal (Cohen, Girault, 1999).

l’école dans les lieux d’éducation informels plus libres et selon des pratiques plus ancrées dans le contexte socio-économique et culturel » (Boillot-Grenon, 1996).

Une directive officielle précise les modalités du partenariat : « les établissements scolaires doivent s'ouvrir de plus en plus aux partenaires capables de leur apporter des aides pour la réalisation de leurs projets. Il y a donc lieu d'établir ou de renforcer des relations partenariales efficaces entre les responsables des différents ministères (rectorats, DIREN12, ADEME13, parcs nationaux et autres administrations) ainsi que des organismes et des associations concernées. (...) Les centres permanents d'initiation à l'environnement (CPIE), les clubs Unesco, la fédération des œuvres éducatives et de vacances de l'Education Nationale (FOEVEN) ainsi que d'autres associations en région, mènent depuis plusieurs années des actions importantes en milieu scolaire. Il est souhaitable de les rendre encore plus efficaces notamment par la mise en place de conventions comportant par exemple des actions de formation, de créations d'outils pédagogiques et d'aides aux projets. L'appui des fondations telles que ELF (Antartica), Ushuaïa, au système éducatif ne devra pas être négligé » (BO n°11, 01/1993).

Pour améliorer et faciliter ces projets de partenariat, le ministère de l'Education Nationale a, depuis 1977, mis en place dans les rectorats des services d'action culturelle.

Les moyens d'action de ces services sont divers :

• placer des professeurs relais dans des services pédagogiques ou culturels de musées (Geyssant, 2003), des archives, des centres de ressources, des lieux du patrimoine, des services de la DRAC14, des théâtres, des fermes pédagogiques.... Ces professeurs relais ont pour mission de faciliter l'accueil des enseignants et des scolaires dans ces structures : « ils travaillent à ajuster l'offre pédagogique aux besoins des élèves et à proposer de nouvelles orientations, des thèmes de travail, des méthodes d'approche. (...) Ils sont à la disposition de tous les collègues de l'académie pour collaborer à leurs projets » (Liaisons, 1999) ;

• donner les moyens (financiers, humains, pédagogiques etc.) aux établissements pour participer à des actions nationales telles que "1000 défis pour ma planète" ou encore pour monter des projets d'établissement en partenariat avec des institutions extérieures à l'école.

12 DIREN : Direction Régionale de l’Environnement

13 ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie

14 DRAC : Direction Régionale des Affaires Culturelles

Par ailleurs, différents ouvrages recensent à l’attention des enseignants la liste des partenaires possibles en ERE (Ecole et Nature, 1997 ; Arene, 1999). Parmi eux, les musées de sciences sont des partenaires privilégiés en matière d'éducation à l'environnement. En effet, sans dévaloriser le rôle de l’école, nous pouvons admettre que le musée est un partenaire intéressant : « it is useless to try to attack school or to look for a scapegoat. We must simply admit that today’s teachers do not have the necessary training to tackle environmental problems. The next generation of teachers can neither be effective at the beginning of their carreer even with adequate training, they feel helpless as regards the programmes often considered as imposed on them ; they are overwhelmed by administrative restraints and still are under the shock caused by the recent discovery of their students’ personalities. Other administratives levels must support schools because the matter concerns a change in society, in general, rather than in human development only. Museums and certain spots of scientific literacy can bring the support that education needs » (Larose, Girault, 1996).

Par exemple, voilà ce qui est préconisé dans le Bulletin Officiel (n°11, 03/1993) pour un partenariat école-musée relatif à l’ERE : « les musées d'histoire naturelle ont adopté depuis plusieurs années une politique d'ouverture vers le grand public qu'il faut encourager. Les services éducatifs dont disposent un bon nombre d'entre eux pourront dans certains cas être renforcés. Ils devront privilégier l'éducation à l'environnement tant au niveau de leurs productions (plaquette, valises, expositions, etc.) que de l'accueil des élèves qui devra faire une large place à l'aide aux projets ».

Cette directive décrit plus particulièrement un partenariat mis en place avec la Villette que constituent les Classes Villette Environnement : « la Cité des Sciences et de l'Industrie (CSI) a ouvert un îlot sur ce thème. Il devrait permettre aux élèves et aux enseignants de prendre conscience de l'équilibre dynamique qui existe entre l'homme et son environnement et de la nécessité d'une gestion réfléchie des ressources de la planète. Le séjour à la CSI constitue le temps fort d'un projet qui peut s'étaler sur toute l'année scolaire » (BO, n°11, 03/1993).

Cette première analyse souligne les processus interreliés sur lesquels repose l’intégration de l’ERE dans le système scolaire : mise en place de projets interdisciplinaires et partenariat.

Dans cette perspective, le partenariat école-musée constitue une voie spécifique, que nous allons préciser dans le paragraphe suivant.