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Le BSC a reçu de nombreuses critiques dans la littérature académique mais également par les praticiens, notamment car il a été construit pour satisfaire les attentes des actionnaires Ainsi, il ne mesure uniquement que la performance économique. Or, à l’heure des préoccupations actuelles liées à l’environnement et au social, il conviendrait que l a performance mesurée ne soit pas purement économique.

En effet, l’ « axe financier sert de fil conducteur aux objectifs et aux indicateurs des autres axes du TBP. Chaque indicateur sélectionné doit faire partie d’une chaîne de relations de cause à effet dont le but ultime est d’améliorer la performance financière. Le TBP doit « raconter » la stratégie, en exposant d’abord les objectifs financiers à long terme puis en les reliant à la série d’initiatives à déployer en relation avec les résultats financiers, les clients, les processus internes, les salariés et les systèmes afin de parvenir à la performance économique à long terme visée » (Kaplan et Norton, 2003, p.61). Même si le

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tableau de bord prospectif a permis une meilleure mesure d’une performance multidimensionnelle, il n’en reste pas moins que cette mesure est uniquement économique, et ne peut constituer une fin en soi à l’heure actuelle. Il faut donc arriver à d épasser cette conception pour élaborer un outil capable d’intégrer le développement durable et de mesurer une performance multidimensionnelle. Dans la pratique, l’alignement stratégique s’avère difficile (Gumb et al., 2011 ; Botton et al., 2012). En effet, le Balanced Scorecard ne peut avoir une structure standard. Dans la réalité, les liaisons stéréotypées définies par Kaplan et Norton sont loin de rendre compte des enchaînements critiques pour une stratégie donnée (Lorino, 2001). « Séparer les points de vue du client, de l’innovation et des processus internes peut paraître artificiel, voire acrobatique » (Lorino, 2001, p.12). Lorino ajoute (2001, p.19), « l’apport incontestable de Kaplan et Norton avec le concept de « Balanced Scorecard » a permis de mettre en avant la notion de modèle de causes- effets sous-jacent à la relation entre stratégie et pilotage de la performance, le caractère multicritère de la performance stratégique et les limites d’un pilotage exclusivement focalisé sur la performance financière. Toutefois, il demeure inscrit dans une perspective nominaliste (domination de la mesure sur le pilotage de l’action et de l’apprentissage) et positiviste (possibilités de traduction universelle et scientifique des performances dans un équivalent financier). De ce fait :

il ne traite pas de la question centrale, celle de la construction de la « théorie de la performance », en d’autres termes du modèle causes-effets,

il tente d’identifier une structuration standard et universelle en quatre perspectives, en tournant le dos à la contingence stratégique du pilotage,

il ne prend pas vraiment en compte l’incertitude et les décalages temporels liés à l’apprentissage,

il n’explicite pas la relation du système d’indicateurs avec l’action (organisée en plans d’action ou non) ».

Dans ce sens, il serait judicieux de favoriser la recherche-action et la méthode des cas en vue de développer une approche innovante du Balanced Scorecard, qui s’apparenterait à un jeu de « lego » (Naro et Travaillé, 2011).

Pour pallier à ce problème d’alignement stratégique, une approche pyramidale peut être envisagée. Il s’agit de l’approche de Lynch et Cross en 1995 (figure 7).

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Figure 7 : l’approche pyramidale de Lynch et Cross

Source : tiré de Lynch et Cross, 1995

Ce modèle permet d’assurer le lien entre la vision stratégique de la hiérarchie et la vision du niveau opérationnel. Il doit y avoir une cohérence entre le pilotage de niveau opérationnel et la stratégie. Ce modèle intègre « les objectifs organisationnels dans les mesures de performances opérationnelles » (Botton et al., 2012, p. 45). Il permet de décliner la performance selon un ordre hiérarchique de trois niveaux : « la vision et la stratégie organisationnelle, traduite en objectifs financiers et marketing, le lien entre la performance globale et les unités d’affaires à travers les trois activités et processus opérationnels (satisfaction des clients, la flexibilité et la productivité) ; les quatre activités ayant un impact sur la performance organisationnelle, soit la qualité, la livraison, le temps de cycle et le gaspillage » (Botton et al., 2012), p. 45. Les objectifs sont définis par le sommet hiérarchique et les mesures de performance des unités d’affaires vont remonter vers le sommet de la pyramide. Il y a donc un lien permanent entre le sommet et la base de la pyramide. La direction ne voit pas forcément tout ce qui se déroule aux niveaux opérationnels et ne peut donc pas mettre en place les mesures de performance. Le système de mesure se concentre sur la définition d’indicateurs à un niveau opérationnel (Hudson Smith et Smith, 2007), c’est-à-dire au niveau local. Ainsi, les mesures opérationnelles se développent permettant de dissocier les activités permanentes de celles ayant besoin d’un soutien (Botton et al., 2012), ceci améliorant la répartition des fonctions et des activités en

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interne. Cependant les concepteurs de ce modèle n’ont ni donné d’informations sur l’élaboration des indicateurs, ni fournit de liste d’indicateurs.

D’autres critiques du BSC se ressentent dans la littérature. En effet, certains auteurs réalisent que le BSC est un modèle orienté principalement vers la haute direction. Le lien entre les quatre dimensions de la performance n’est pas bien défini (Neely et al., 2000) et cette approche n’intègre pas la perspective de la concurrence (Neely et al., 1995). Il ne propose de plus que très peu d’indicateurs de performance au niveau opérationnel (Hudson Smith et al., 2001). Or, un bon tableau de bord, est élaboré afin que tous les acteurs puissent comprendre la stratégie et les objectifs qu’ils doivent respecter.

Par ailleurs, la fonction du Balanced Scorecard ne fait pas consensus dans la littérature : s’agit-il d’un système de management global (comme préconisé par Kaplan et Norton) ou s’agit-il d’un simple outil de représentation stratégique partagée, plus ou moins formalisé et mis en place avec des démarches variables ? (Choffel et Meyssonnier, 2005). Le BSC a souvent été adapté pour répondre aux critiques, mais également parce que chaque organisation est différente, et tout particulièrement le secteur public. Nous verrons plus tard que le succès de cet outil a permis de l’adapter pour qu’il prenne en considération les questions environnementales et sociales.