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§ 3 Les mécanismes de contrôle du respect élaborés dans le cadre d’autres AEM

C. La Convention de Bâle

La Convention de Bâle réglemente le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination. Elle donne le droit à toute Partie d’interdire l’importation de ces déchets et oblige les autres Parties à respecter ce droit427. La Convention requiert également que les Parties prennent les mesures appropriées pour réduire la production et les mouvements transfrontières des déchets dangereux428. Les articles 6 et 7 établissent une procédure de consentement préalable en connaissance de cause en application de laquelle la Partie exportatrice doit obtenir le consentement des Parties importatrices ou transitaires avant que le mouvement transfrontière ne soit autorisé.

La Convention de Bâle ne contient pas de disposition spécifique concernant l’élaboration d’un mécanisme de contrôle du respect. La base légale générale qui a permis d’ancrer une telle institution dans le texte de la Convention est l’article 15.5qui charge l’organe suprême de l’AEM d’examiner la mise en œuvre du traité429. D’après Patrick Szell, qui s’exprimait ainsi en 1997, trois raisons pourraient expliquer l’absence d’une base légale plus spécifique. Tout d’abord, ce traité vise avant tout à protéger non pas l’environnement global, mais les intérêts individuels d’une Partie susceptible de souffrir d’un dommage à son environnement en raison d’un mouvement transfrontière de déchets dangereux. Par ailleurs, un tel dommage sera plus vraisemblablement dû à la volonté de nuire ou à l’appât du gain de la part d’une autre Partie, probablement industrialisée, plutôt que le résultat d’une incapacité technique ou financière. Enfin, tant le responsable du dommage que sa victime seront en principe identifiables. Au vu de ces caractéristiques, concluait cet expert, il semblait plus approprié de développer un régime fondé sur la responsabilité de l’auteur du dommage plutôt qu’un mécanisme de contrôle du respect de la Convention430.

426 Voir supra pp. 45-47.

427 Article 4.1 de la Convention de Bâle.

428 Id. article 4.2.

429 Cette caractéristique n’est pas sans incidence légale ou pratique sur l’organe de contrôle. En effet, elle a pour conséquence que cet organe est un organe subsidiaire de la Conférence des Parties. En d’autres termes, il est soumis à l’autorité de l’organe suprême de la Convention et, en particulier, son budget opérationnel doit être approuvé par cet organe. Voir A. SHIBATA, «The Basel compliance mechanism», RECIEL, vol. 12/2 (2003) p. 186.

430 P. SZELL, loc. cit. (note 350), p. 305.

donc loin de l’indépendance octroyée aux deux groupes du Comité de contrôle du Protocole de Kyoto qui détiennent la compétence de prendre des mesures consécutives sans l’accord de la Partie concernée et sans devoir en référer à la Conférence des Parties426.

C. La Convention de Bâle

La Convention de Bâle réglemente le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination. Elle donne le droit à toute Partie d’interdire l’importation de ces déchets et oblige les autres Parties à respecter ce droit427. La Convention requiert également que les Parties prennent les mesures appropriées pour réduire la production et les mouvements transfrontières des déchets dangereux428. Les articles 6 et 7 établissent une procédure de consentement préalable en connaissance de cause en application de laquelle la Partie exportatrice doit obtenir le consentement des Parties importatrices ou transitaires avant que le mouvement transfrontière ne soit autorisé.

La Convention de Bâle ne contient pas de disposition spécifique concernant l’élaboration d’un mécanisme de contrôle du respect. La base légale générale qui a permis d’ancrer une telle institution dans le texte de la Convention est l’article 15.5qui charge l’organe suprême de l’AEM d’examiner la mise en œuvre du traité429. D’après Patrick Szell, qui s’exprimait ainsi en 1997, trois raisons pourraient expliquer l’absence d’une base légale plus spécifique. Tout d’abord, ce traité vise avant tout à protéger non pas l’environnement global, mais les intérêts individuels d’une Partie susceptible de souffrir d’un dommage à son environnement en raison d’un mouvement transfrontière de déchets dangereux. Par ailleurs, un tel dommage sera plus vraisemblablement dû à la volonté de nuire ou à l’appât du gain de la part d’une autre Partie, probablement industrialisée, plutôt que le résultat d’une incapacité technique ou financière. Enfin, tant le responsable du dommage que sa victime seront en principe identifiables. Au vu de ces caractéristiques, concluait cet expert, il semblait plus approprié de développer un régime fondé sur la responsabilité de l’auteur du dommage plutôt qu’un mécanisme de contrôle du respect de la Convention430.

426 Voir supra pp. 45-47.

427 Article 4.1 de la Convention de Bâle.

428 Id. article 4.2.

429 Cette caractéristique n’est pas sans incidence légale ou pratique sur l’organe de contrôle. En effet, elle a pour conséquence que cet organe est un organe subsidiaire de la Conférence des Parties. En d’autres termes, il est soumis à l’autorité de l’organe suprême de la Convention et, en particulier, son budget opérationnel doit être approuvé par cet organe. Voir A. SHIBATA, «The Basel compliance mechanism», RECIEL, vol. 12/2 (2003) p. 186.

430 P. SZELL, loc. cit. (note 350), p. 305.

Quoi qu’il en soit, les Parties à la Convention ont adopté non seulement, en 1999, un Protocole sur la responsabilité et l’indemnisation en cas de dommage résultant de mouvements transfrontières et de l’élimination de déchets dangereux431, mais aussi, en décembre 2002, un «mécanisme visant à favoriser l’exécution et le respect des obligations »432. Les Parties ont ainsi démontré que l’utilité d’une institution de ce genre n’est pas limitée à la fourniture d’une assistance à des Parties ayant des difficultés à respecter des obligations établies dans le but de protéger l’environnement global.

L’objectif du mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle est «d’aider les Parties à respecter les obligations énoncées dans la Convention de Bâle et de faciliter, promouvoir, surveiller et chercher à garantir l’exécution et le respect des obligations » de ce traité433. Le ton est donné : la priorité est à l’assistance et le respect des obligations doit uniquement être «cherché», mais non assuré.

L’organe principal du mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle est un Comité de quinze membres nommés par les Parties et élus par la Conférence des Parties. La composition du Comité doit être basée sur le principe de représentation géographique équitable des cinq groupes régionaux de l’ONU. Les membres exercent leurs fonctions «en toute objectivité et dans l’intérêt bien compris de la Convention». Ils doivent en outre avoir des compétences dans les domaines de la Convention434. Le Comité est donc un organe dont la nature politique n’est pas sans rappeler celle des organes de contrôle du Protocole de Montréal et de la Convention de Genève. Ce que signifie, concrètement, l’obligation d’agir de manière objective et dans l’intérêt de la Convention est bien entendu ouvert à interprétation. Ces exigences constituent cependant un pas vers la mise en place d’un organe plus indépendant, suivant l’exemple des comités de contrôle du Protocole de Kyoto et de la Convention d’Aarhus435.

Les fonctions du Comité sont essentiellement de deux ordres. D’une part, le Comité exerce des compétences concernant le respect de la Convention par les Parties de manière individuelle436. D’autre part, le Comité est chargé d’examiner des questions générales ayant trait à l’exécution et au respect des

431 Entamées en 1993, les négociations du Protocole se sont achevées 6 ans plus tard par son adoption lors de la Cinquième Conférence des Parties (Bâle, Décembre 1999). En mai 2005, le Protocole n’avait que cinq Parties. Il lui en faut vingt pour entrer en vigueur. Pour le texte du Protocole, voir : http://www.basel.int/COP5/docs/Prot-f.PDF.

432 Entamées en 1995 (Décision III/11), les négociations sur le mécanisme se sont achevées 7 ans plus tard lors de la Sixième Conférence des Parties (Décembre 2002). Voir la Décision VI/12, contenue dans le rapport de la Sixième Conférence des Parties, doc. UNEP/CHW.6/40.

433 Id. para. 1.

434 Id. para. 3-8.

435 Pour Shibata, les membres du comité devront être des experts individuels et non pas des représentants des gouvernements. A. SHIBATA loc. cit. (note 429), p. 188.

436 Id. para. 9-20.

Quoi qu’il en soit, les Parties à la Convention ont adopté non seulement, en 1999, un Protocole sur la responsabilité et l’indemnisation en cas de dommage résultant de mouvements transfrontières et de l’élimination de déchets dangereux431, mais aussi, en décembre 2002, un «mécanisme visant à favoriser l’exécution et le respect des obligations »432. Les Parties ont ainsi démontré que l’utilité d’une institution de ce genre n’est pas limitée à la fourniture d’une assistance à des Parties ayant des difficultés à respecter des obligations établies dans le but de protéger l’environnement global.

L’objectif du mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle est «d’aider les Parties à respecter les obligations énoncées dans la Convention de Bâle et de faciliter, promouvoir, surveiller et chercher à garantir l’exécution et le respect des obligations » de ce traité433. Le ton est donné : la priorité est à l’assistance et le respect des obligations doit uniquement être «cherché», mais non assuré.

L’organe principal du mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle est un Comité de quinze membres nommés par les Parties et élus par la Conférence des Parties. La composition du Comité doit être basée sur le principe de représentation géographique équitable des cinq groupes régionaux de l’ONU. Les membres exercent leurs fonctions «en toute objectivité et dans l’intérêt bien compris de la Convention». Ils doivent en outre avoir des compétences dans les domaines de la Convention434. Le Comité est donc un organe dont la nature politique n’est pas sans rappeler celle des organes de contrôle du Protocole de Montréal et de la Convention de Genève. Ce que signifie, concrètement, l’obligation d’agir de manière objective et dans l’intérêt de la Convention est bien entendu ouvert à interprétation. Ces exigences constituent cependant un pas vers la mise en place d’un organe plus indépendant, suivant l’exemple des comités de contrôle du Protocole de Kyoto et de la Convention d’Aarhus435.

Les fonctions du Comité sont essentiellement de deux ordres. D’une part, le Comité exerce des compétences concernant le respect de la Convention par les Parties de manière individuelle436. D’autre part, le Comité est chargé d’examiner des questions générales ayant trait à l’exécution et au respect des

431 Entamées en 1993, les négociations du Protocole se sont achevées 6 ans plus tard par son adoption lors de la Cinquième Conférence des Parties (Bâle, Décembre 1999). En mai 2005, le Protocole n’avait que cinq Parties. Il lui en faut vingt pour entrer en vigueur. Pour le texte du Protocole, voir : http://www.basel.int/COP5/docs/Prot-f.PDF.

432 Entamées en 1995 (Décision III/11), les négociations sur le mécanisme se sont achevées 7 ans plus tard lors de la Sixième Conférence des Parties (Décembre 2002). Voir la Décision VI/12, contenue dans le rapport de la Sixième Conférence des Parties, doc. UNEP/CHW.6/40.

433 Id. para. 1.

434 Id. para. 3-8.

435 Pour Shibata, les membres du comité devront être des experts individuels et non pas des représentants des gouvernements. A. SHIBATA loc. cit. (note 429), p. 188.

436 Id. para. 9-20.

obligations énoncées dans la Convention437. Seul le premier volet de ces compétences, et donc le mécanisme de contrôle du respect individuel de la Convention, nous intéresse ici438.

Les possibilités de saisine du Comité sont similaires à celles du mécanisme de contrôle du Protocole de Montréal et de la Convention de Genève, en particulier en ce qui concerne une saisine de nature préventive lorsqu’une Partie réalise qu’elle ne sera peut-être pas en mesure de respecter ses obligations439. La possibilité d’une saisine d’une Partie contre une autre est cependant plus limitée que dans les mécanismes de contrôle du respect que nous avons déjà passés en revue. En effet, dans le cadre de la Convention de Bâle, la Partie qui saisit le Comité doit être dans une relation particulière avec la Partie dénoncée : elle doit avoir «directement affaire» avec elle au titre de la Convention440, c’est-à-dire être importatrice, exportatrice ou transitaire.

Cette condition mise à la saisine d’une Partie contre une autre est une nouveauté dans le cadre des mécanismes de contrôle du respect des AEM. Elle constitua d’ailleurs une des principales controverses entre les négociateurs441. Cette saisine conditionnelle est sensée souligner les aspects bilatéraux de la Convention de Bâle. Mais cette argumentation structurelle ne semble pas convaincante car toute Partie, et non pas seulement la Partie importatrice, exportatrice ou transitaire, a un intérêt à ce que chaque mouvement transfrontière de déchets dangereux soit en conformité avec le droit international. Il faut donc voir dans cette limitation de la saisine d’une Partie contre une autre un succès politique regrettable des Etats opposés à ce mode de saisine et à une vision réellement multilatérale - ou collective - des mécanismes de contrôle du respect des AEM442.

Lorsqu’il est saisi, le Comité exerce, dans un premier temps, une fonction de facilitation. Il lui appartient d’établir les faits et les «causes profondes du problème et d’aider à le résoudre»443. Dans l’exercice de cette fonction, le Comité peut fournir des conseils, des recommandations «non contraignantes»

et des renseignements. Dans un deuxième temps, le Comité «peut»

recommander à la Conférence des Parties d’envisager d’autres mesures : la fourniture d’un appui supplémentaire dans le cadre de la Convention ou la publication d’une déclaration d’avertissement et la fourniture de conseils

437 Id. para. 21-24.

438 Voir notre définition des «mécanismes de contrôle du respect», supra pp. 3-4.

439 Décision VI/12, para. 9 (doc. UNEP/CHW.6/40).

440 Id. para. 9b).

441 Sur les dessous des négociations relatives à cette question, voir A. SHIBATA, loc. cit. (note 429), pp.

189-190.

442 Voir à cet égard infra p. 102.

443 Décision VI/12, para. 19 (doc. UNEP/CHW.6/40).

obligations énoncées dans la Convention437. Seul le premier volet de ces compétences, et donc le mécanisme de contrôle du respect individuel de la Convention, nous intéresse ici438.

Les possibilités de saisine du Comité sont similaires à celles du mécanisme de contrôle du Protocole de Montréal et de la Convention de Genève, en particulier en ce qui concerne une saisine de nature préventive lorsqu’une Partie réalise qu’elle ne sera peut-être pas en mesure de respecter ses obligations439. La possibilité d’une saisine d’une Partie contre une autre est cependant plus limitée que dans les mécanismes de contrôle du respect que nous avons déjà passés en revue. En effet, dans le cadre de la Convention de Bâle, la Partie qui saisit le Comité doit être dans une relation particulière avec la Partie dénoncée : elle doit avoir «directement affaire» avec elle au titre de la Convention440, c’est-à-dire être importatrice, exportatrice ou transitaire.

Cette condition mise à la saisine d’une Partie contre une autre est une nouveauté dans le cadre des mécanismes de contrôle du respect des AEM. Elle constitua d’ailleurs une des principales controverses entre les négociateurs441. Cette saisine conditionnelle est sensée souligner les aspects bilatéraux de la Convention de Bâle. Mais cette argumentation structurelle ne semble pas convaincante car toute Partie, et non pas seulement la Partie importatrice, exportatrice ou transitaire, a un intérêt à ce que chaque mouvement transfrontière de déchets dangereux soit en conformité avec le droit international. Il faut donc voir dans cette limitation de la saisine d’une Partie contre une autre un succès politique regrettable des Etats opposés à ce mode de saisine et à une vision réellement multilatérale - ou collective - des mécanismes de contrôle du respect des AEM442.

Lorsqu’il est saisi, le Comité exerce, dans un premier temps, une fonction de facilitation. Il lui appartient d’établir les faits et les «causes profondes du problème et d’aider à le résoudre»443. Dans l’exercice de cette fonction, le Comité peut fournir des conseils, des recommandations «non contraignantes»

et des renseignements. Dans un deuxième temps, le Comité «peut»

recommander à la Conférence des Parties d’envisager d’autres mesures : la fourniture d’un appui supplémentaire dans le cadre de la Convention ou la publication d’une déclaration d’avertissement et la fourniture de conseils

437 Id. para. 21-24.

438 Voir notre définition des «mécanismes de contrôle du respect», supra pp. 3-4.

439 Décision VI/12, para. 9 (doc. UNEP/CHW.6/40).

440 Id. para. 9b).

441 Sur les dessous des négociations relatives à cette question, voir A. SHIBATA, loc. cit. (note 429), pp.

189-190.

442 Voir à cet égard infra p. 102.

443 Décision VI/12, para. 19 (doc. UNEP/CHW.6/40).

concernant le respect des obligations à l’avenir444. Ces mesures confirment le fait que le mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle est dénué d’une fonction d’exécution.

Le mécanisme de contrôle du respect de la Convention est, de tous les mécanismes qui ont précédemment été passés en revue, le plus faible. Son intervention la plus forte se limite à donner un avertissement. Même si ce genre de mesure peut être considéré comme une sanction politique, cette dernière reste particulièrement douce pour un Etat peu soucieux de sa bonne réputation. On ne peut que partager la déception exprimée par le représentant des Pays-Bas lors de l’adoption du mécanisme de contrôle du respect de la Convention de Bâle. Celui-ci a indiqué qu’un «mécanisme solide et de plus grande portée serait plus approprié» et que son pays ne considérait pas ce mécanisme comme «un précédent pour les prochains mécanismes de respect dans le cadre d’autres accords environnementaux régionaux ou multilatéraux»445. Cela doit être gardé à l’esprit, sachant qu’au moment de l’adoption de ces mécanismes de contrôle du respect, deux autres institutions de ce type étaient en cours de négociation : dans le cadre du Protocole de Cartagena et dans celui de la Convention de Rotterdam.

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