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Section II : Les autres compétences partagées entre l’arbitre et le juge dans le contrôle de

A. Le contrôle de l’arbitrabilité du litige

En vertu de la Convention de New York de 1958 sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, l’arbitrabilité des litiges peut être remise en question lorsqu’un tribunal national est appelé à reconnaître une convention d’arbitrage, lorsqu’un tribunal est

312 CPC., préc., note 52, art.1485

313 Id., art. 1486. Ces dispositions s'appliquent lorsque le tribunal a été constitué postérieurement au 1er mai 2011. 314 Pierre DUPREY, « Présentation du nouveau décret sur l’arbitrage, L’arbitrage : Principes et pratiques », Les

tenu de donner exécution à une sentence arbitrale ou lorsqu’un tribunal est tenu de statuer sur une demande en annulation de la sentence. Dans ces trois cas, le tribunal national saisi contrôlera l’arbitrabilité au regard de sa lex fori. Rappelons que la compétence des juges étatiques pour intervenir dans un litige soumis à l’arbitrage ne peut être strictement limitée aux mesures ayant un caractère provisoire ou conservatoire315.

En droit de l’arbitrage québécois, il est de principe que les parties décident elles-mêmes de la loi applicable à leur convention d’arbitrage. Dans un tel cas, le juge saisi pour valider la convention d’arbitrage ne peut qu’appliquer la loi choisie par les parties. Les pouvoirs du juge dans le cadre de l’arbitrabilité se situent à trois (3) niveaux à savoir lors du contrôle de la validité de la convention d’arbitrage, lors de la procédure d’homologation et lors du recours contre la sentence arbitrale

Dans le premier niveau, le juge détermine l’arbitrabilité du litige lors du contrôle de la convention d’arbitrage qui permettra de savoir si le litige est susceptible d’être arbitrer ou non. Le juge déterminera l’arbitrabilité du litige au regard de la lex fori, puisque c’est à lui qu’il appartient de donner la force obligatoire à la sentence résultant de cet arbitrage, selon sa propre loi. L’application de la lex fori à la question de l’arbitrabilité est légitime316. Cette

solution ancienne a été consacrée par les différentes conventions nationales et internationales317. L’arbitrabilité ou l’inarbitrabilité du litige peut être soulevée d’office par le juge d’exécution, mais aussi par le défendeur, qui soutiendra que le litige est inarbitrable soit

315 CCI n°14061, 2009, JDI, V.145, 2015, note sous la sentence arbitrale finale rendue dans l’affaire p. 168. 316 Jean-Baptiste RACINE, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, coll. bibliothèque de droit privé,

Paris, LGDJ, 1999.

317 Convention de Genève, préc., note 76, art. 1) b). Cet article dispose que : « d’après la loi où elle est invoquée,

l’objet de la sentence doit être susceptible d’être réglé par voie d’arbitrage » pour obtenir l’exécution de la sentence arbitrale. L’art. V)2) a) de la Convention de New York de 1958 prévoit que : « la reconnaissance et l’exécution d’une sentence arbitrable pourront aussi être refusées si l’autorité compétente du pays où la reconnaissance et l’exécution sont requises constate que d’après la loi de ce pays, l’objet du différend n’est pas susceptible d’être réglé par voie d’arbitrage ». Notons le but de la Convention de New York de 1958 relatif à la reconnaissance et à l’exécution des sentences : L’art. 38 1) b) i) de la Loi type de la CNUDCI déclare également que l’exécution d’une sentence est refusée dans un État : « si le tribunal constate que : l’objet du différend n’est pas susceptible d’être réglé par voie d’arbitrage conformément à la loi du présent État ».

par rapport à l’ordre public, soit parce que l’arbitre n’a pas la compétence pour connaître ce genre de différend. Au Québec, l’article 2639 C.c.Q.318 précité définit les domaines de droit qui sont indisponibles, c’est-à-dire non arbitrable. Le droit québécois de l’arbitrage s’autorise le droit de refuser de donner exequatur à la sentence arbitrable si le litige contrevient à son ordre public319. Retenons qu’il est question de l’ordre public interne. Cependant, il convient de faire ressortir la distinction faite dans l’article V de la convention de New York entre le refus d’exequatur pour violation de l’ordre public et pour cause d’arbitrabilité des litiges. Le refus pour motif de violation de l’ordre public concerne la sentence qui contrevient à l’ordre public du siège de l’exécution, tandis que le refus pour cause d’arbitrabilité du litige se résume dans les termes de l’article 2639 al.1 du C.p.c. Cette distinction suppose-t-elle une différence entre l’ordre public et l’arbitrabilité ? Nous penchons vers l’affirmative. En effet, un refus pour cause d’ordre public et un refus pour cause d’inarbitrabilité ont des effets différents sur l’exécution de la convention d’arbitrage320. Le juge d’exequatur a le droit de contrôler tout ce qui entre dans son ordre juridique. Il vérifie la violation soit des lois polices québécoises, soit des principes fondamentaux québécois, et surtout veille à la protection des droits de défense.

Le second niveau se constate lors de la procédure de demande d’homologation de la convention d’arbitrage dans lequel un choix s’impose au juge : l’application de la loi du for ou la loi de la choisie par les parties321. En droit québécois322, tout comme dans la Loi type323, la Convention de New York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrables étrangères, fait partie intégrante du droit de l’arbitrage. Ainsi, aux termes de l’art. 2639 C.c.Q.

318 B. MOORE et al., préc., note 63, art.2639.

319 Code de procédure civile du Québec : commentaires et annotations..., Montréal, Éditions Yvon Blais, vol. 2,

2015, Art. 646.

320 Desputeaux c. Éditions Chouette (1987) inc., préc., note 23. La doctrine et la jurisprudence de divers pays

étrangers soutiennent qu’une sentence arbitrale contraire à l’ordre public en est une dont le dispositif dans son ensemble, contrevient à une règle particulière. C’est ainsi qu’il faut interpréter ce motif d’annulation d’une sentence codifié à l’art. 646.2 C.p.c. L’intervention du juge dans cette partie se limite à l’appréciation du résultat global de la procédure arbitrale, eu égard à l’ordre public.

321 JEAN ROBERT, L’arbitrage : droit interne, droit international privé, 6e éd. ent. réf., Paris, Dalloz, 1993. 322 C.p.c., préc., note 7, Chap. IX

il est prévu que : « Ne peut être soumis à l’arbitrage, le différend portant sur l’état et la

capacité des personnes, sur les matières familiales ou sur les autres questions qui intéressent l’ordre public. Toutefois, il ne peut être fait obstacle à la convention d’arbitrage au motif que les règles applicables pour trancher le différend présentent un caractère d’ordre public324 ». Cet article traite spécifiquement de la question de l’arbitrabilité soulevée devant le tribunal étatique, mais également des matières non arbitrables.

Pour finir, le troisième niveau se constate lors d’une requête en annulation. Ce type de requête consiste à contester la sentence arbitrale rendue. Cette intervention du juge se fait post- arbitrage. Plusieurs textes législatifs ont été élaborés pour servir de critères de validité. Ainsi, la solution consacrée par l’article 34 (2) (b) (i) de la Loi type de la CNUDCI à cet égard prévoit que la sentence est annulée : « si le tribunal constate que : l’objet du différend n’est

pas susceptible d’être réglé par arbitrage conformément à la loi du présent État ». Pour

trancher ces questions, le tribunal saisi appliquera sa propre loi. Le juge a une compétence permanente, contrairement à celle de l’arbitre. Par ailleurs, le juge peut être amené à contrôler la formalité de la sentence avant d’arriver à contrôler l’objet du litige arbitral. En effet, le contrôle du respect des formalités des sentences transmises au juge n’est guère moins important que celui de l’arbitrabilité.

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