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Contexte politique

Dans le document UNIVERSITE MONTPELLIER I (Page 42-47)

1.2. ETAT DE LA FILIERE : CONTEXTE PERFORMANCES ET ENJEUX

1.2.1. Contexte politique

1.2.1.1. Instruments de politique

Les instruments de politique d’intervention de l'État dans le secteur agricole sont fortement axés sur les prix et les tarifs de taxation. Les différentes politiques macro-économiques adoptées depuis 1960 par le secteur public et qui affectent la filière riz local ont progressivement évolué avant et après la libéralisation du secteur agricole. Avant la libéralisation, les politiques de prix ont été largement utilisées dans l’agriculture comme

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instruments privilégiés d'intervention pour orienter les incitations et façonner le développement économique et social. Le but ultime de ces mesures était de protéger les filières nationales et de chercher des fonds pour le financement des dépenses publiques. Ainsi, on a noté quatre options d’intervention : les barrières tarifaires, les barrières non tarifaires, les prix macro-économiques et les barrières internes.

Les barrières tarifaires étaient des restrictions commerciales en vigueur avant 1993. Elles étaient constituées par des taxes variables (ad valorem) ayant pour objectif de limiter les quantités importées de riz brisé en élevant le prix domestique au-delà du prix international. En 1993, elles concernaient les Droits de Douane (DD) montant de 15% du prix CAF et des Droits fiscaux (DF) d’un montant de 0,30% de la valeur CAF, pour un total de 15,3% du prix CAF (Sidibé, 1993). Sur le plan national, ces restrictions constituaient une taxe implicite au consommateur de riz importé, une subvention implicite aux producteurs de paddy et une source sûre de revenu pour le trésor public.

Les barrières non tarifaires étaient par contre, des restrictions commerciales appelées également quotas. Elles concernaient les restrictions quantitatives imposées sur les quantités maximales de riz tolérées à l’importation. La réglementation en vigueur avant la dissolution de la Caisse de Péréquation et de Stabilisation des Prix (CPSP) accordait un quota de 340 000 tonnes de riz par an dont 240 000 t de riz brisé, 20 000 t de riz entier et 40 000 t de riz intermédiaire (op.cité). La CPSP avait le monopole sur l'importation de riz brisé. Ces restrictions quantitatives constituaient également une taxe implicite au consommateur de riz importé, une subvention implicite aux producteurs de paddy, et une rente supplémentaire aux quotataires.

Les prix macro-économiques concernent la manipulation des agrégats économiques à travers les restrictions imposées sur les taux de change, les taux d'intérêt et les taux d’inflation. Ils ont longtemps été utilisés pour moduler les orientations politiques de l’État sur le secteur agricole.

Par exemple, les taux de change ont des incidences directes sur les incitations à produire ou à importer des différents agents économiques. De par sa volonté d’inciter la consommation intensive de matériels agricoles ou d’engrais, l’État jouait par exemple, sur les taux d’intérêt appliqués à ces inputs. La facilitation des services était assurée par l’État qui était à la fois le banquier, le fournisseur d’intrants et l’encadreur. Dans son rôle d’intermédiation et d’agent de tout le processus, l’État s’appuyait sur ces mécanismes pour favoriser l’ampleur de

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l’utilisation de tels biens ou services. Le taux de l’inflation par contre, permettait de réguler les chocs induits par la montée des prix réels des produits absorbés par l’État dans sa politique d’équilibre social. Ainsi, par le jeu de la Caisse de Péréquation, l’État ne répercutait pas certaine hausse du prix de riz par exemple, auprès des consommateurs.

Les barrières internes concernent les formes d'intervention adoptées par le secteur public pour réglementer les prix pratiqués au niveau des consommateurs de riz, des producteurs de paddy et de grossistes de riz. Au niveau des consommateurs le prix du riz brisé était fixé par l'État, sans subvention de transport (de 1991 à 1993). Les prix pratiqués au niveau des régions devaient uniquement s’expliquer par le coût de transport. Ces prix oscillaient entre 130 et 140 FCFA le kg (ISRA, 1996). Le prix du riz entier est laissé libre avec un plafond qui se situait entre 250 et 300 FCFA le kg (op. cité). Cette politique soutenait les consommateurs de riz brisé tout en contraignant le prix au consommateur du riz local à s'aligner à ce niveau.

L’ensemble de ces instruments a été abandonné avec la libéralisation du secteur. En effet, au cours des années 1980-90, c’est la période des ajustements structurels. L’Etat a reconnu à travers son plan de redressement économique et financier (1981) que sa mainmise sur tous les secteurs entraînait des déficits budgétaires insupportables. Sur le plan des stratégies d’autosuffisance alimentaire, ces politiques se sont traduites par la faillite des organismes publics chargés de gérer la production (Caisse de Péréquation et de Stabilisation des Prix, ONCAD, etc.) et par le développement d’un double marché : un marché administré étroit et un autre plus vaste du secteur privé, mais cloisonné et peu performant. Ces dysfonctionnements ont contribué à la stagnation de l’agriculture vivrière et à la croissance des importations alimentaires (Sidibé, 1992 ; Gaye, 1998). Ainsi, les institutions d’appui au développement et les décideurs ont opté pour la libéralisation du commerce et l’intégration du secteur agricole national comme instrument de stabilisation des marchés locaux de produits alimentaires et de stimulation de la croissance agricole (idem). Pour faire face à la faible productivité agricole, l’Etat du Sénégal a initié des programmes de politique et de réformes sectorielles pour accompagner ces mesures de libéralisation. Ainsi, les instruments d’intervention de l’Etat se sont construits à travers ces programmes élaborés avec plusieurs partenaires au développement.

L’Etat a débuté avec l'élaboration du Programme d’Ajustement Structurel de l’Agriculture (PASA) en 1995. Ce programme a conduit à terme le retrait total de l’État dans la filière avec

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la suppression de toutes les subventions de transport et des prix administrés (juillet 1995), la disparition de la CPSP et la libéralisation totale des importations du riz (février 1996). Le PASA a ainsi permis de parachever le programme de libéralisation complète du secteur agricole entamée en 1984 avec la Nouvelle Politique Agricole y compris pour les produits de base (riz, sucre, farine et huile végétale). Ce désengagement de l’État s’accompagne avec la suppression des monopoles. Devant le souci d’assurer une plus grande sécurité alimentaire face à la croissance démographique, l’Etat se fixe comme objectif de favoriser la compétitivité des produits agricoles sur les marchés intérieur et extérieur tout en préservant l’environnement. Les orientations stratégiques majeures de l’agriculture sont définies dans les principaux documents que sont: la Lettre de Politique de Développement Agricole (LPDA), le Programme des Services Agricoles et d’Appui aux Organisations de Producteurs (PSAOP), le Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP) et la Loi d’Orientation Agricole (LOA) votée en 2005. L’agriculture sénégalaise en perspective devra s’appuyer sur une exploitation familiale modernisée et sur une intervention d’un secteur privé aidé (facilitation à l’accès au crédit, aux équipements et infrastructures cédés..) pour réaliser le passage de systèmes de production extensifs à des systèmes intensifs, diversifiés et durables. Plus tard, on reconnaîtra l’importance du rôle des organisations dans le processus. L’Etat lui transfère certaines responsabilités et l’appuie dans son organisation. Néanmoins, la prise en charge de ces priorités par le secteur privé et les organisations de producteurs, induit des besoins de financement dont la satisfaction dépend fortement d’un environnement institutionnel financier adéquat. Ceci confirme l’importance du financement du secteur agricole dans la réalisation des objectifs de développement de l’Etat à travers ces différentes orientations.

1.2.1.2. Evolution des politiques et leur impact sur le riz

Le développement de l’agriculture irriguée est une priorité pour les pouvoirs publics depuis les grandes périodes de sécheresse. Cette volonté politique s’est traduite par la mise en valeur de la Vallée du Fleuve Sénégal à travers d’importants investissements dont l’objectif principal est la sécurité alimentaire. Cette volonté politique s’est traduite par divers changements allant du développement administré à la libéralisation progressivement des activités du secteur agricole. Ainsi, l’agriculture irriguée de la vallée a connu plusieurs phases d’évolution. La première phase est de 1960 à 1987 avec notamment deux périodes différenciées. De 1960 à 1974, on a assisté à l’introduction de l’agriculture irriguée et en particulier l’initiation des populations à la riziculture irriguée. Ensuite, l’extension contrôlée du système est apparue de 1974 à 1987. Durant cette première phase, les aménagements hydro-agricoles ont été surtout

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réalisés dans le Delta du Fleuve et en submersion contrôlée. L’introduction de la riziculture irriguée dans cette zone s’est faite avec une colonisation des populations (18.000 immigrants).

Ceci correspond à la période de peuplement du Delta qui a conduit une progression rapide des superficies irrigables aux environs de 10 000 ha (Camara, 2002). Dans ce contexte, l'État s’est fortement engagé dans les différentes fonctions productives et marchandes contrôlant l’ensemble de la filière rizicole. A la fin de cette période, la SAED conçoit et développe de nouveaux types de périmètres dits aménagements intermédiaires à côté des grands aménagements (idem, 2002). Ils combinent les avantages des grands périmètres (fiabilité, qualité de la distribution de l’eau, taille des parcelles) et les avantages des PIV (coûts réduits, participation des bénéficiaires à la réalisation, transfert de la gestion). Par la suite, on note l’évolution du développement des périmètres irrigués villageois (PIV) dans la basse et la moyenne vallée (Podor, Matam et Bakel). Les premiers niveaux de rendement moyen du paddy variaient entre 1,2 et 2,2 tonnes par hectare.

La deuxième phase est la phase transitoire avant la libéralisation complète de la filière et couvre la période 1987-1994. Elle coïncide avec la mise en service des barrages entraînant une mutation de l’environnement physique et économique. Elle correspond à la politique du désengagement de l'État, de la libéralisation de l’économie agricole et la responsabilisation des organisations paysannes. Cette nouvelle politique s’accompagne avec des mesures4 dites d’incitation de nouvelles dynamiques. Avec la mise en place de mécanisme de crédit à l’agriculture irriguée, les superficies aménagées et les productions augmentent de manière très rapide et importante de 1988 à 1993.

La dévaluation du franc CFA en janvier 1994 marque un évènement majeur dans l’évolution agricole de façon générale. Cette décision des pays membres de l’Union Economique et Monétaire des pays de l'Afrique de l'Ouest (UEMOA) entraîne du coup un renchérissement des coûts des facteurs de production. Elle provoque en même temps une déstabilisation de l’économie de façon globale jusqu’en 1997. Les effets de la dévaluation se sont manifestés par le renchérissement de 40 % des coûts de production et la baisse des marges des producteurs. Le passage d'une filière fortement encadrée par l'État à une filière libéralisée s'est effectué sans que les acteurs concernés disposent de moyens de concertation, de coordination et d'informations. Il en résulte une baisse des superficies cultivées, des rendements et de la

4 Désengagement de la SAED des fonctions de production, de commercialisation, d’intendance, d’entretien et de maintenance mécanique, de fournisseur d’intrants et de prestations de services mécanisés, de banquier, etc.

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production ainsi qu’un abandon de la plupart des aménagements sommaires réalisés par les privés dans le delta.

De 1997 à nos jours, on constate une évolution positive de la filière avec la professionnalisation des acteurs. La participation des acteurs professionnels aux débats nationaux et le renforcement de leurs capacités de gestion et de négociation prennent de l’ampleur. Ceci permettra aux producteurs de s’organiser autour des filières (tomate, oignon, riz, patate douce, etc.) dont notamment le Comité Interprofessionnel du Riz (CIRIZ). On note aussi l’augmentation notable des rendements du riz. De 3,5 t/ha en 1992 on est en moyenne à 5,5t/ha avec des pointes de 8 t/ha. Cependant, la production évolue en dents de scie et des problèmes notables se sont manifestés au niveau de la filière. On note une réduction des remboursements de crédit, des méventes du riz local et les effets de la concurrence du riz importé. Ces diverses fortunes créent des opportunités et enjeux majeurs sur le développement du riz local. Pour endiguer la crise, l'État initie depuis 1997 au niveau national un programme de relance de l’agriculture basé sur la détaxe du matériel agricole, la baisse du taux d’intérêt du crédit agricole (12,5 à 7,5 %), un moratoire de 5 ans sur les arriérés de paiement des dettes, la baisse de l’apport personnel (20 à 10 %). L’impact de ces réformes sur la filière est fortement questionné. Cette situation a conduit l’Etat à promouvoir davantage la culture du riz en juin 2008 dont l’objectif stratégique est d’atteindre l’autosuffisance alimentaire en riz à l’horizon 2015 (MAE, 2008) avec une accélération du rythme des aménagements.

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