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a- La construction des mesures en faveur de l'atténuation dans les conférences internationales

Quelles politiques territoriales face aux changements climatiques ?

I- a- La construction des mesures en faveur de l'atténuation dans les conférences internationales

La première Conférence mondiale sur le climat s'est tenue à Genève en 1979, issue de l'Organisation Météorologique Mondiale (OMM) créée en 1951 et du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE). La première convention qui a émergé de ces rencontres est la Convention de Vienne pour la protection de la couche d'ozone en 1985. Il est à noter que cette première convention n'est pas liée directement au climat, mais à des questions de pollution, même si les liens e�t�e la di�i�utio� de la �ou�he d’ozo�e et les �volutio�s du �li�at so�t �e�tio���s �o��e o�jets de recherche visant à identifier : « les incidences sur le climat de toute modification de la couche d’ozo�e » (Convention de Vienne, 2009, p14). Ce texte est intéressant à plusieurs titres car il fait apparaitre que le problème climat a été construit dans un premier temps comme une problématique de pollution, �e �ui expli�ue�a e�t�e aut�es la diffi�ult� à i�pose� la th��ati�ue de l’adaptatio�. La Convention de Vienne et le Protocole de Montréal (relatif aux substances qui réduisent la couche d'ozo�e� vo�t fai�e l’o�jet d’u�e �atifi�atio� u�ive�selle e� ����. « Il s’agit des p�e�ie�s t�ait�s da�s l’histoi�e du s�st��e des Natio�s U�ies a�a�t ��alisé cette aspiration (la ratification universelle) » (Convention de Vienne 8ème édition, 2009, p8).

La Convention de Vienne telle qu'elle a été rédigée en 1985 a pour ambition de mettre en lien et de favoriser l'organisation de la recherche à l'échelle internationale afin de développer une coopération entre les pays. Elle traduit la volonté de mieux comprendre les processus physiques et chimiques de la couche d'ozone :

1- Par leurs effets sur les systèmes humains et naturels. 2- Par leurs liens avec le climat.

3- Par les substances et activités pouvant influencer la couche d'ozone.

4- Par l'étude des technologies et des substances pouvant remplacer les plus polluantes.

5- Pa� l’a�al�se des p�o�l��es so�io��o�o�i�ues d��oula�t d'u� a�oi�d�isse�e�t de la �ouche d'ozone.

L'aspect technologique et scientifique est central dans cette convention, ainsi que le transfert des ��sultats. S’e�suiv�o�t des �e��o�t�es a��uelles e�t�e les pa�s �e���es : les Co�f��e��es des Parties. En 1988 le GIEC est constitué. La deuxième conférence sur le climat en 1990 débouchera en 1992 sur la Convention-cadre des Nations Unies sur le climat, qui sera ratifiée en 1994. Nous allons �ous atta�de� su� �ette �o�ve�tio� à la�uelle s’ajoute�a e� ���7 le p�oto�ole de K�oto.

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Première Convention-cadre des Nations Unies sur le climat 1992

"(…� Conscientes que les changements du climat de la planète et leurs effets néfastes sont un sujet de préoccupation pour l'humanité tout entière, préoccupées par le fait que l'activité humaine a augmenté sensiblement les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, que cette augmentation renforce l'effet de serre naturel et qu'il en résultera en moyenne un réchauffement supplémentaire de la surface terrestre et de l'atmosphère, ce dont risquent de souffrir les écosystèmes naturels et l'humanité�…�" (Convention-cadre des Nations Unies sur le climat, 1992, p2). Cette Convention-cadre fait une place importante aux enjeux technologiques, scientifiques et socioéconomiques des changements climatiques. Les avancées technologiques et scientifiques sont o�ga�is�es et st�u�tu��es autou� d’o�ga�is�es de �esu�e et de suivi des ��issio�s de GES pa� chaque État signataire de la Convention des Parties, pour aboutir à une meilleure connaissance du système cli�ati�ue et la �ise e� pla�e des politi�ues d’att��uatio�. La ���atio� d'o�se�vatoi�es nationaux sur les émissions de GES et leur mise en réseau est l'une des priorités scientifiques de ladite Convention.

Extrait n°30

Extrait de la Convention-cadre des Nations Unies sur le climat sur les objectifs des observatoires nationaux sur le changement climatique

Source Rapports et Études : Convention-cadre des Nations Unies sur le Climat, 1992, p15

La recherche scientifique est au centre de cette première Convention, dans son aspect réseau, mais également pour le transfert des nouvelles technologies entre les pays, particulièrement vers les pays en développement. Plusieurs éléments nous semblent essentiels à mettre en avant, la Convention

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reconnaît des problématiques différenciées entre les pays et la spécificité de leur priorité nationale et régionale de développement. La croissance économique est encouragée, les avancées technologiques devraient permettre de limiter les émissions de gaz à effet de serre. « L'objectif ultime de la présente Convention et de tous les instruments juridiques connexes que la Conférence des Parties pourrait adopter est de stabiliser, conformément aux dispositions pertinentes de la Convention, les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Il conviendra d'atteindre ce niveau dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s'adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d'une manière durable » (Convention-cadre, 1992, p5).

Il est question d'atténuation et d'adaptation naturelle des systèmes naturels, le thème de l'adaptatio� �'est p��se�t �u'à la �a�ge, de �a�i��e se�to�ielle Il est �uestio� d’adaptatio� �atu�elle, �a� il �’est pas e�visag� (ho��is pou� les pa�s e� d�veloppe�e�t� de st�at�gie sp��ifi�ue d’adaptatio�, et do�� de pla�ifi�atio�. Les o�je�tifs de la Co�ve�tion-�ad�e pou� l’adaptatio� se résument à un paragraphe : « �…� Préparent, en coopération, l'adaptation à l'impact des changements climatiques et conçoivent et mettent au point des plans appropriés et intégrés pour la gestion des zones côtières, pour les ressources en eau et l'agriculture, et pour la protection et la remise en état des zones frappées par la sécheresse et la désertification, notamment en Afrique, et par les inondations » (Convention-cadre des Nations Unies pour le climat, p1992, p7). Élément essentiel à prendre en considération, même si celui-ci n'est pas directement lié à notre propos, c'est l'émergence du principe de précaution en tant que fondement des futures politiques environnementales. C'est également le renforcement de la Conférence des Parties, comme haute autorité de prise de décision sur les questions climatiques.

Le Protocole de Kyoto 1997

Le Protocole de Kyoto fait suite à la première Convention-cadre, en notifiant notamment des objectifs quantifiables basés sur les émissions des années 1990. Le suivi des émissions de GES est renforcé par la mise au point de méthodologies « agréées par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat et approuvées par la Conférence des Parties à sa troisième session. Lorsque ces méthodologies ne sont pas utilisées, les ajustements appropriés sont opérés suivant les méthodologies arrêtées par la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au présent Protocole à sa première session » (Protocole de Kyoto, 1997, p7), celles-ci pouvant

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permettre une comparaison entre les pays. Le lien avec le développement durable est mis en avant dès le début du P�oto�ole, �appela�t l'i�po�ta��e de la pla�ifi�atio� politi�ue, �ais o� s’ape�çoit �ue le Protocole reste limité aux GES puis�u’il est �e�he��h� u�e « réduction progressive ou suppression graduelle des imperfections du marché, des incitations fiscales, des exonérations d'impôts et à des droits des subventions qui vont à l'encontre de l'objectif de la Convention, dans tous les secteurs émettant des gaz à effet de serre et application d'instruments du marché » (Protocole de Kyoto, 1997, p��. Il �’� a do�� pas de p�ise e� �o�pte glo�ale de l’e�vi�o��e�e�t et des i�pa�ts hu�ai�s sur celui-ci.

C'est une volonté de suivi et de contrôle des émissions qui se dégage de ce texte, dans une optique avant tout d'atténuation, d'archivage des données afin de créer un réel suivi des émissions et de permettre une réévaluation de celles-ci. L'adaptation n'est que très peu présente, puisqu'il est �uestio� de ��dui�e les effets ��fastes des ��issio�s de GES, elle se doit d’�t�e ava�t tout technologique. « Ces programmes devraient concerner notamment les secteurs de l'énergie, des transports et de l'industrie ainsi que l'agriculture, la foresterie et la gestion des déchets. En outre, les technologies d'adaptation et les méthodes visant à améliorer l'aménagement de l'espace permettraient de mieux s'adapter aux changements climatiques » (Protocole de Kyoto, 1997, p10). Le transfert des technologies entre les pays, entre autres à destination des pays en développement est également au centre du protocole entérinant les responsabilités des pays développés.

À partir de ces deux Conventions et Protocole clefs, c'est bien une politique globale en faveur de l'atténuation qui s'est construite avec la reconnaissance des GES d'origine anthropique. En 2006 un rapport économique a souhaité mesurer les effets de la non adaptation et de la non atténuation sur l’��o�o�ie afi� de �o�t�e� l’i�po�ta��e de �e �uestionnement : le rapport Stern.

L'aspect économique : le rapport Stern

Le choix de questionner ce rapport économique est lié à deux éléments :

1- Stern et son équipe ont permis la reconnaissance des impacts des changements climatiques sur l’��o�o�i�ue.

2- De plus à l’��helle i�te��atio�ale �’est u� poi�t i�po�ta�t des dis�ussio�s « Le changement climatique présente un défi unique pour l'économie : il constitue l'échec du marché le plus important et le plus étendu que l'on ait jamais connu. En conséquence, l'analyse économique se doit d'être mondiale, elle doit traiter d'horizons à longue échéance, garder à l'esprit l'économie du risque et de l'incertitude, et examiner la possibilité d'un changement majeur, qui ne saurait être marginal » (Stern Review, 2006, p1).

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Ce rapport met en exergue le fait que si rien n'est accompli pour atténuer les changements climatiques, les effets et les risques seront équivalents à une réduction moyenne de la consommation mondiale par habitant d'au moins 5% pour le présent et pour le futur (Stern Review, 2006). Ce chiffre tiré de modèles économiques complexes ne tient pas compte d'autres éléments importants, tels que les effets directs sur l'environnement et la santé humaine qui pourraient diminuer la consommation mondiale de 5% à 11% (Stern Review, 2006). Les rétroactions du climat ne sont pas prises en compte, ce qui pourrait accentuer les coûts totaux (en prenant en compte les effets non marchands ci-dessus) de 11 à 14%. Et enfin, le dernier élément à intégrer dans les modèles est l'effet différencié du changement climatique sur les territoires, ce qui pourrait engendrer une « réduction d'environ 20% de la consommation par habitant, aujourd'hui et à l'avenir » (Stern Review, 2006, p11).

Le rôle de la politique et de la planification prend une place primordiale dans ce document, c'est bien la décarbonisation1 de l'économie qui est mise en avant, celle-ci pouvant ouvrir de nouveaux marchés. Ce sont des stratégies à très long terme qui sont prônées, notamment par une cohérence internationale (organisation mondiale) et une réduction drastique des émissions de GES de 25% d'ici 2050. Il n'est pas question de remise en question de l'économie ni de la croissance, c'est bien l'utilisation d'énergie propre qui est souhaitée. « La maitrise du changement climatique est la stratégie favorable à la croissance pour le plus long terme et elle peut se faire d'une façon qui n'impose pas de limites aux aspirations de la croissance des pays riches ou pauvres » (Stern Review, 2006, p2). Les nouvelles technologies joueraient donc un rôle central dans l'atténuation des émissions de GES. L'adaptation n'est que très peu présente dans ce rapport, s'appuyant principalement sur les normes et la capacité des individus ou de l'économie à s'adapter aux changements. « En effet, la majeure partie de l'adaptation sera simplement une extension de la pratique de bon développement -par exemple promouvoir le développement global, une meilleure gestion des catastrophes et la réponse en cas d'urgence. L'action d'adaptation devrait être intégrée à la politique du développement et à la planification de tous les niveaux » (Stern Review, 2006, p15). C'est la question énergétique qui est mise au centre, puisque son acheminement et sa production représentent une grande partie des émissions. Trois éléments sont mis en avant pour réduire les émissions selon ce rapport :

1- La fixation du prix du carbone.

2- La politique en matière de technologie.

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3- Le démantèlement des obstacles aux changements de comportement.

À partir de ce point, nous comprenons mieux la question soulevée dans le chapitre II sur les nouveaux scénarios du GIEC, sur la déconnexion des évolutions socioéconomiques des émissions de carbone, puisque ce rapport insiste sur les aspects énergétiques. Ce qui pose pro�l��e à l’��uipe Ste��, �’est l’��o�o�ie �as�e su� les �ati��es p�e�i��es. « Les pays en développement adoptent d'ores et déjà des mesures considérables pour séparer leur croissance économique de la hausse des émissions de GES » (Stern Review, 2006, p30). Ce rapide retour sur le rapport Stern de 2006, qui a fait grand bruit lors de sa sortie, nous permet d'appuyer deux points dans notre argumentaire :

1- L'importance et la croyance dans les nouvelles technologies. 2- La place des politiques de décarbonisation de l'économie.

Ce rapport a été vivement contesté, notamment sur le taux d'actualisation très bas utilisé et sur le traitement égal de toutes les générations.

Le développement technologique est plébiscité comme le meilleur moyen de lutter contre les �ha�ge�e�ts �li�ati�ues et d’a���l��e� la t�a�sitio� ��e�g�ti�ue. Cepe�da�t, �ela �e va pas forcément de soi, il existe un effet rebond, ou le paradoxe de Jevons, qui interroge les liens entre technologies et consommation énergétique : selon l'économiste donnant son nom à ce paradoxe, les nouvelles technologies moins demandeuses en énergie ne garantiront pas une diminution de la consommation, bien au contraire, elles peuvent avoir l'effet inverse (Harribey, 2012). Ce paradoxe est à interroger au regard de l’i�po�ta��e �ue p�e��e�t les di�e�sio�s te�h�ologi�ue et énergétique dans les politiques climatiques actuelles, il est important de les penser ensemble. Elles ne peuvent donc pas être garantes d'une décarbonisation des trajectoires territoriales.

L'adaptation a d'abord été un problème de pollution et d'environnement et non un problème de développement, avant de devenir un problème économique, ce qui a donné la primauté à l'atténuation (Rousset, 2012). Ce sont notamment les difficultés de conceptualisation et d'opérationnalité qui ont retardé l'émergence des politiques d'adaptation à l'échelle internationale. « La question du changement climatique a été initialement construite selon une approche dichotomique, où il s'agissait de choisir entre atténuation et adaptation. Dans ce contexte, l'adaptation est apparue comme une option non seulement controversée, mais également improductive (du point de vue économique) » (Rousset, 2012, p23). Maintenant que l’adaptatio� est plébiscitée, quels sont donc les levie�s pou� la �ise e� pla�e de st�at�gies d’adaptatio� ? L’a�tio� publique prend donc toute sa dimension, puis�ue �’est à elle de pe�se� le lo�g te��e, notamment pa� la pla�ifi�atio� te��ito�iale. Il �e�t�e da�s ses att�i�utio�s d’i�pulse� les d��a�i�ues ���essaires à l’adaptatio� aux �ha�ge�e�ts �li�ati�ues. Da�s le �ad�e des politi�ues �li�ati�ues ap��s l’��helle

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i�te��atio�ale, �’est l’Eu�ope �ui joue u� �ôle i�po�ta�t da�s la �ise e� pla�e du �ad�e i�stitutio��el du climat.

I-c La place de l’Europe dans les politiques climatiques : Le paquet climat-énergie européen

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