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Comme on a pu le voir, le corpus a été pensé et constitué comme un corpus mixte et hétérogène, alliant différents types de données. Au vu de son importance et de l'absolue nécessité de pouvoir le traiter dans le temps imparti, nous avons choisi, pour en assurer la cohérence, la pertinence et la faisabilité, de réfléchir à sa constitution définitive en fonction des hypothèses qui avaient elles-mêmes évolué à travers lui, ainsi que nous l'avons dit plus haut.

Au final, nous pouvons résumer le corpus en fonction des hypothèses de travail que nous avons présentées au chapitre 3 de la façon suivante :

Fig. 4.4 : Constitution du corpus au regard des hypothèses

Hypothèses Documents Entretiens

Le patrimoine européen comme

énoncé performatif Documents réglementaires ; documents statutaires, documents de communication institutionnelle ; documents de communication à destination du public

-La « rencontre » entre institution et

porteurs de projets Documents réglementaires ; documents statutaires ; documents de communication institutionnelle -La vision partagée Documents réglementaires ; documents statutaires ;

documents de communication institutionnelle ; documents de communication à destination du public

Oui

Les médiateurs d'une institution qui ne

sont pas des médiateurs institutionnels Documents de communication institutionnelle ; documents de communication à destination du public Oui Les Itinéraires Culturels comme

dispositifs de médiation de l'européanité du patrimoine

Documents de communication institutionnelle ;

documents de communication à destination du public Oui

L'importance de la traduction dans la construction de l'européanité du patrimoine

Documents de communication institutionnelle ;

documents de communication à destination du public Oui

La mise en scène du patrimoine comme patrimoine européen

Documents de communication institutionnelle ; documents de communication à destination du public

Oui

Les réseaux des porteurs de projets comme premiers publics

Documents de communication à destination du public

-Dans cette synthèse, nous avons différencié plusieurs types de documents :

 les documents réglementaires regroupent les textes à valeur législative ou équivalente du Conseil de l'Europe, de l'Union Européenne et autres (UNESCO par exemple)

 les documents statutaires regroupent les textes administratifs relevant du fonctionnement interne des réseaux des Itinéraires Culturels (statuts, compte-rendus d'Assemblée Générale, etc.)

 les documents de communication institutionnelle regroupent les documents de communication à destination des institutions (collectivités locales et régionales, Etats, Union Européenne/ Conseil de l'Europe) et/ou produits par des institutions (le Conseil de l'Europe en l'occurrence).

 les documents de communication à destination du public sont les autres documents qui ne sont pas à destination des institutions. Ils peuvent s'adresser tout aussi bien à des partenaires potentiels qu'à des 'visiteurs' extérieurs. Les sites Web sont compris dans cette catégorie. Il peut arriver que des documents de communication institutionnelle soient aussi à destination du public. D'une certaine manière, on peut dire que les deux catégories s'interpénètrent. Les langues des documents finalement retenus se limitent au français, à l'anglais, à l'allemand et à l'italien et, dans une moindre mesure, à l'espagnol, au polonais et à l'ukrainien pour la Via Regia, et au slovène, au croate et au hongrois pour l'Itinéraire Saint Martin de Tours. Dans ces deux cas, les documents ont été abordés avec les porteurs de projet, ainsi qu'indiqué plus haut.

Conclusion . Entre pertinence et faisabilité : le deuil de l'exhaustivté

La constitution du corpus a constitué en une recherche d'équilibre : trouver un équilibre entre toutes les données et assurer la pertinence, la cohérence et la faisabilité de l'ensemble au vu de la problématique et des hypothèses. Mais elle a consisté aussi en un certain nombre d'aller-retours, les réflexions sur les unes alimentant les réflexions sur les autres.

Même si l'intention de départ était d'inscrire l'ensemble de la recherche dans une démarche interculturelle, force a été de constater qu'une posture interculturelle ne donne pas une méthodologie interculturelle, si ce n'est à tout moment de prendre en considération l'ensemble des données et, surtout, des discours, d'un point de vue qui ne les enferme pas, c'est-à-dire que « s’inscrire dans cette perspective permet d’analyser non seulement la pluralité des points de vue et des locuteurs, mais également la manière dont ces points de vue se constituent dans des pratiques communicationnelles contextualisées et situées. Dans ce cadre, la culture est envisagée non comme un réservoir de représentations ordonnées et totalisantes qui préexisterait aux pratiques et permettrait soit de les expliquer soit de leur donner leur sens, mais comme un « horizon de possibilité latentes – une cage flexible et invisible dans laquelle exercer sa propre liberté conditionnelle » (Ginzburg 1980, Le fromage et les vers, l’univers d’un meunier du XVIème siècle, Paris Aubier. Cité par Bensa dans La fin de l’exotisme) » (Da Lage, Gaillard, 2015).

de refléter. Cela a constitué une grande partie du travail de réflexion ayant accompagné la constitution du corpus, mais aussi des réflexions plus particulières sur la manière, par exemple, d'appréhender le multilinguisme dans ce type de corpus aux données diverses et variées. L'accès aux contenus, particulièrement important lorsqu'il s'agit de les re-situer dans leurs contextes, se concentrent alors, d'une certaine manière, dans les personnes capables d'expliquer et de donner des clés de compréhension de ces contextes de production de textes – et de discours – où il est beaucoup fait appel à l'implicite et où il s'agit alors, pour le chercheur, d'explorer « l'horizon de possibilités latentes ».

Au vu de la situation particulière de chercheur-acteur, il a aussi fallu apprivoiser la « hantise du biais », comme l'indique J. Le Marec : « dans cet idéal, ce qui est formulé dans des conditions d'enquête est évidemment toujours moins « authentique » que ce qui est vécu sans intention d'en faire état pour autrui. L'intime, le caché, l'implicite, recèleraient plus de « vérité » que ce qui est montré et donc mis en scène. […] Il n'existe en réalité aucun fait social brut qui tirerait sa vérité du fait qu'il advienne sans avoir été mis en forme dans un processus de communication » (Le Marec, 2002). Mais il s'agissait moins d'accéder à un implicite plus authentique que de ne pas le créer en interagissant avec des collègues de travail, et de créer les conditions d'une relation, au moins dans le cadre de l'entretien, d'acteur à chercheur.

Enfin, et cela n'a pas été le moindre des processus, face à l'ampleur des données, il a fallu sélectionner et conditionner le choix de cette sélection. Même dans le cadre de la problématique et des hypothèses envisagées, cela ne réduisait pas le corpus à un ensemble faisable. Cohérent et pertinent, oui ; mais faisable dans le temps de la thèse, non. On a donc finalement opéré le choix, parfois douloureux, de centrer l'analyse sur certains documents qui, somme toute, aux regards des hypothèses, semblaient plus pertinents que d'autres. B. Raoul indique que « l' « expérience de terrain » se construit au carrefour d'un double phénomène, ou plutôt d'une dialectique entre un processus de construction par le chercheur d'une part et une situation d'offre à voir par les acteurs et par la « réalité » d'une situation vivante et vécue d'autre part » (Raoul, 2002). Dans cette dialectique, la « réalité » que nous avons voulu saisir a impliqué des choix, une forme de deuil de l'exhaustivité, tout en respectant, malgré tout, une cohérence d'ensemble et la scientificité nécessaire à la validité de la recherche, c'est-à-dire qu'elle devait aussi assurer la possibilité d'aborder l'ensemble des processus d'appropriation, de médiation et de transmission envisagés sous l'éclairage des hypothèses que nous avons énoncées au chapitre 3 et de permettre une analyse fine, même si elle repose sur un corpus hétérogène, de ces processus telle que nous l'abordons maintenant dans les chapitre 5 à 8.

CHAPITRE 5.

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