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Chapitre 7. Problématiques de travail

7.4 Tâches et compétences

7.4.5 Compétences cognitives

Au cours de l’initiation des élèves à la recherche documentaire et aux principes de la

présentation orale, nous avons essayé de travailler sur le développement de certaines

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compétences cognitives, susceptibles d’améliorer leur rendement et la qualité de leur

réflexion.

Pour cette raison, le projet s’est basé sur la réalisation d’activités intellectuelles variées

cherchant à exercer ainsi une action positive sur les acquisitions cognitives des apprenants. Il

leur a permis de mieux structurer leurs connaissances et de développer une pensée critique.

Cela signifie proposer des activités permettant aux apprenants de travailler en collaboration

dans un cadre propice aux échanges et aux interactions (Pléty, 1996). Il ne s’agit pas

uniquement de développer des compétences sociales mais de favoriser également

l’apprentissage en améliorant le rapport des apprenants au savoir et à son acquisition.

L’apprenant sera amené à construire lui-même son apprentissage et à développer une certaine

stratégie intellectuelle pour le faire.

Pour atteindre cet objectif, il est intéressant de diversifier les itinéraires d’apprentissage et les

méthodes pédagogiques. Il est également intéressant de proposer aux apprenants des activités

attrayantes, ayant un sens et présentant un certain défi intellectuel. Cela leur permet de

s’approprier des connaissances mais surtout des méthodes d’apprentissage transférables et

utilisables dans d’autres situations.

Les professeurs ont parfois l’impression de consacrer trop de temps inutile au travail de

groupe. Pourtant, l’interaction entre les apprenants leur permet de faire émerger le savoir.

Grâce aux discussions et à la confrontation de leurs idées avec leurs pairs, ils s’approprient

mieux les connaissances et développent une capacité « d’ouverture aux apprentissages

successifs » (Pléty, 1998). Il s’agit donc d’une étape très importante de l’apprentissage et de la

construction du savoir. Pléty considère également que c’est l’intelligence et non seulement la

mémoire qui est requise dans la démarche d’appropriation progressive d’une connaissance qui

permet l’acquisition d’un savoir (Pléty, 1998). C’est ainsi qu’au fil des activités, l’intérêt des

apprenants pour le travail de groupe s’est développé alors que le temps consacré aux

différentes activités s’est rétréci : les apprenants ont besoin de moins de temps pour lancer le

travail de groupe, pour se mettre d’accord sur une méthodologie de travail, pour prendre une

décision, pour traiter un litige et trouver un compromis…

La classe expérimentale a profité de l’utilisation de l’ordinateur dans la réalisation de la

présentation orale et de la restitution d’informations. En effet, Bibeau considère l’ordinateur

non seulement comme un outil de travail intellectuel mais également comme « un miroir

cognitif

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» qui incite l’apprenant « à réfléchir sur son fonctionnement cognitif, à verbaliser ses

stratégies, à mieux comprendre son processus d’apprentissage, à objectiver sa démarche »

(Bibeau, 1999, p. 110). L’auteur évoque les « savoirs en miettes » pour qualifier les acquis

variés sur le plan du développement cognitif que les apprenants acquièrent à l’école sans

vraiment les assimiler ni les intégrer. Ces savoirs ne présentent pas de liens apparents entre

eux et sont difficilement transférables comme ils se présentent. Pourtant, l’école doit

permettre à l’élève de donner du sens aux savoirs acquis et de les organiser en un tout

cohérent et compréhensible (Roy, 1996). Les apprenants font preuve d’une concentration

accrue lors de leur travail sur ordinateur que lorsqu’ils travaillent sur des supports plus

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traditionnels (Grégoire et al., 1996). Utiliser l’ordinateur leur a permis de transformer leurs

façons « de travailler, de décider, de penser » (Perrenoud, 1998).

Les compétences cognitives sont présentées comme des « compétences raisonnablement

nécessaires pour s’adapter à la réalisation de tâches diverses dans une grande variété de

situations » (Sternberg & Spear-Swerling, 2006). Les auteurs se basent sur Sternberg (1981)

et Baron et Sternberg (1987) pour lister sept compétences cognitives.

1. Identification du problème

La première partie du travail consiste à identifier le problème à résoudre et à le définir.

Dans notre cas, il s’agit de savoir effectuer une recherche documentaire afin de restituer

les informations sous forme d’une présentation orale assistée ou non par ordinateur. La

qualité de la présentation orale dépend du choix du sujet mais surtout de la manière dont

il est traité. Il s’agit de cerner le sujet à traiter à travers ses grandes lignes mais aussi à

identifier les mots clés permettant d’accéder à la documentation nécessaire afin

d’élaborer la présentation orale.

2. Choix des processus

Pour pouvoir restituer les informations et élaborer la présentation orale, il est impératif

de suivre ou d’élaborer un ensemble de processus appropriés. Les étapes lors d’un

travail de recherche commencent par l'identification des sources d’informations

disponibles au CDI et à trier celles qui sont utiles pour le sujet. Par la suite, il faut

choisir parmi les informations ainsi obtenues celles qui sont les plus pertinentes, les trier

en vue de les utiliser ultérieurement. Il est aussi nécessaire d'évaluer la crédibilité de

l’information ainsi que les diverses sources… Durant tout le travail d’initiation et de

formation, les élèves sont encouragés à réfléchir sur leurs pratiques et à verbaliser les

étapes de sélection de processus employé afin de prendre conscience de leurs propres

pratiques de travail et de sélection de processus : « La sélection des processus est en soi

un processus mental supérieur et, comme l’identification du problème, est une condition

préalable importante pour résoudre correctement un problème » (Sternberg &

Spear-Swerling, 2006).

3. Représentation de l’information

Toujours selon Sternberg et Spear-Swerling, un étudiant effectuant une tâche nécessitant

un acte d’intelligence, doit être capable de « représenter l’information de manière

usuelle, à la fois à l’intérieur (dans sa tête) et à l’extérieur (sur le papier) » (Sternberg &

Spear-Swerling, 2006). En effet, les élèves travaillant sur la recherche documentaire

sont amenés à collecter des informations de ressources diverses et par la suite ils doivent

les organiser d’une façon efficace pour pouvoir les utiliser dans la construction de la

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présentation orale. Selon les auteurs, il est plus pertinent et plus efficace de réunir les

notes en thèmes ou sous-thèmes que par ouvrages consultés.

L’organisation des informations par thème se révèle une activité difficile pour les élèves

et a nécessité également un travail d’entraînement avec un suivi de la part du professeur.

Il est à souligner que les élèves qui ont réussi à effectuer la représentation interne des

informations d’une façon efficace sont ceux qui ont réussi le mieux la restitution des

informations lors de la présentation orale et ont pu répondre aux questions posées par le

public. Ce sont eux également qui sont parvenus à schématiser les informations ainsi

obtenues et ont pu construire aisément un plan de travail. Ces élèves ont eu beaucoup de

facilité à exécuter correctement la tâche dans les délais accordés et ont le plus progressé

dans leur travail.

4. Elaboration d’une stratégie

Adopter une stratégie de travail est aussi important que la sélection d’un processus ou la

représentation de l’information puisqu’elle permet d’établir une chronologie selon

laquelle se déroulent les étapes successives de la réalisation de la tâche. Une mauvaise

conception des successions des étapes amènera inévitablement à une importante perte de

temps et d’énergie et aura comme résultat de décourager l’élève face à l’obtention d’un

résultat médiocre. Il était très difficile pour les élèves de formuler une stratégie de

travail et de la suivre à travers ses étapes successives. Ils ont souvent tendance à brûler

les étapes pour terminer plus vite la tâche à exécuter. Ils pensent qu’une fois la sujet

cerné et les informations trouvées, leur travail est terminé : il suffit de taper ou de copier

les notes prises pour achever la tâche. Cela a occasionné une perte de temps assez

importante et a nécessité souvent des retours en arrière pour apporter des corrections de

base sur la démarche adoptée par le groupe.

5. Allocation des ressources

Pour la première présentation orale, un temps global est accordé pour l’ensemble des

tâches et sous-tâches à exécuter. Les élèves doivent eux-mêmes répartir le temps

correctement afin de terminer la présentation dans les délais. Or, il s’est avéré qu’il

s’agit d’une compétence que les élèves ne maîtrisent pas : tous les groupes ont dépassé

les délais accordés et se sont attardés dans l’exécution des différentes tâches.

Pour pallier cette difficulté, un temps global est accordé à l’exécution des tâches pour

les présentations suivantes mais une répartition du temps minutieuse est exigée avant

même de démarrer l’activité. Un contrôleur de temps est fixé dans chaque groupe, dont

la tâche est de rappeler aux autres le temps restant pour l’exécution de chaque tâche. Les

élèves ont également consacré beaucoup de temps à la recherche de documents et à leur

consultation, ils n’ont pas pu appliquer une méthode efficace pour utiliser les paratextes

des ouvrages documentaires et ils sont perdus dans les documents et noyés dans les

informations. Pour cette raison, le nombre de documents à consulter et de ressources à

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utiliser est également limité surtout pour les documents numériques et la navigation sur

Internet pour pouvoir mieux canaliser leur énergie et leur travail.

6. Maîtrise des processus

Au début de chaque séance, il est demandé aux élèves de présenter succinctement ce

qu’ils ont fait, les étapes déjà réalisées, ce qui reste encore à faire et surtout ce qu’ils

vont faire durant la séance de travail. Ils ont relevé les ressources consultées sur le

cahier du CDI pour ne pas perdre du temps à les rechercher à chaque séance. Au début,

les élèves ont réalisé une sorte de carnet de bord retraçant le chemin accompli. Par la

suite, quand ils ont progressé d’une façon significative dans la tâche, ils ont verbalisé au

début de chaque séance les tâches exécutées et celles en cours d’exécution ainsi que le

temps accordé pour terminer chaque étape.

7. Evaluation des solutions

Le suivi des élèves tout le long de leur travail a permis de les sensibiliser au feedback et

surtout de le traduire en plan d’action afin de pouvoir faire un retour en arrière et

d’apporter eux-mêmes les corrections convenables à leur travail. Au début, le professeur

a eu recours au feedback externe en aidant les élèves à formuler leurs remarques par une

série de questionnement sur les objectifs visés, la démarche suivie et les résultats

obtenus pour qu’ils puissent apporter les modifications qui s’imposent. Petit à petit, les

élèves ont pu ébaucher un feedback interne concernant la qualité du travail qu’ils sont en

train d’exécuter. La tâche n’est pas facile et les élèves ont plus de facilité à déceler les

problèmes rencontrés dans les activités des autres et à les formuler que dans leur propre

travail. Par la suite, ils sont parvenus à discerner leurs propres problèmes et à trouver

comment y remédier. Mais rares sont les groupes qui sont parvenus à appliquer des

corrections importantes. Ils sont devenus conscients des erreurs commises mais ils n’ont

pas pu exploiter cette capacité pour améliorer la qualité de leur travail ou pour modifier

la démarche adoptée.