Chapitre 7. Problématiques de travail
7.1 PowerPoint® au service de la classe : état de débat
7.1.3 Améliorer l’usage de PowerPoint
Il semble que les problèmes liés à PowerPoint® ne se situent pas vraiment au niveau du
logiciel mais proviennent plutôt d’une mauvaise utilisation de cet outil. En effet, les
enseignants qui intègrent l’utilisation du logiciel à leurs pratiques pédagogiques le font
presque exclusivement pour agrémenter leur cours magistral, pour donner l’impression qu’ils
ont renouvelé leurs approches en y intégrant l’usage des technologies : en réalité leurs
pratiques n’ont pas évolué, seul le support a changé. A cela s’ajoute le fait que la plupart
d’entre eux ne maîtrisent même pas les options de base du logiciel, ne sont pas formés à
l’utilisation des technologies d’une façon raisonnée dans leurs pratiques scolaires
quotidiennes.
Lebrun résume bien ce problème : « L’importance de l’information, du support technique et
du soutien pédagogique aux enseignants est une priorité pour que les technologies catalysent
réellement un renouveau pédagogique. Sans cela, les nouvelles technologies permettront au
mieux de reproduire les anciennes pédagogies » (Lebrun, 2004, p. 17). Le logiciel
PowerPoint® ne constitue pas en soi une stratégie pédagogique efficace, il n’est qu’un
simple outil pouvant servir de support à l’enseignement mais sans une approche pédagogique
efficace, cet outil comme n’importe quel autre, est voué à l’échec.
Nous sommes en mesure de nous demander comment optimiser les diaporamas et améliorer
leur efficacité notamment en termes d’apprentissage. Jamet propose de porter une attention
particulière aux problèmes liés à l’intégration des illustrations et au rôle qu’elles jouent dans
la transmission des informations, à la redondance entre le flux oral et le flux écrit, au type de
présentation du texte mais également à l’usage des formes de guidage de l’attention et à la
présence des aides à la structuration des informations en mémoire (Jamet, 2008). Il insiste sur
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le fait que les attitudes des apprenants envers le cours réalisé avec PowerPoint® sont plus
positives au niveau de la compréhension, de la motivation, de la qualité de prise de notes… et
les apprenants éprouvent un sentiment de compétences et de maîtrise plus élevé pour le cours
multimédia. Ce dernier semble donc plus attractif mais reste à montrer sa supériorité en
termes d’efficacité (Jamet, 2008).
Dans une présentation réalisée par PowerPoint®, l’information est multimodale : l’auditoire
doit gérer simultanément le discours oral de l’intervenant mais également les informations
affichées à l’écran. La compréhension de telles informations nécessite le traitement cognitif
et l’intégration d’informations issues de médias divers (message textuel, explication verbale,
illustrations statiques ou dynamiques…) mais présentes aussi dans des modalités sensorielles
auditives et visuelles. L’information est donc multimodale parce que PowerPoint® permet
d’intégrer facilement des illustrations, d’animations ou de vidéos. Tout cela nécessite une
mobilisation cognitive assez importante afin de traiter convenablement et simultanément des
informations provenant de sources diverses (Jamet, 2008).
Jamet souligne également une autre spécificité de cette situation de traitement d’informations
multimodales liée à l’incapacité de l’auditeur de maîtriser le rythme de présentation et le flot
des informations qui dépendent plutôt de l’orateur. D’où l’émergence de difficultés propres à
la modalité orale : lisibilité de l’information, succession rapide d’informations causant un
ralentissement du traitement en cas de difficultés de compréhension, impossibilité de
reconfrontation immédiate à l’information par réécoute… (Jamet, 1998). Le nombre assez
important d’informations multimodales à traiter lors de la projection de diaporamas, ou le
taux relativement rapide de présentation des informations est susceptible d’influencer ces
difficultés et les amplifier énormément (Jamet, 2008)
Sacotte essaie de fournir quelques repères pour éviter les pièges communs liés à l’utilisation
de PowerPoint® et avance quelques conseils pratiques pour améliorer la qualité de la
présentation.
Il propose tout d’abord d’éviter la sur-utilisation d’animation et de transition dont les
utilisateurs sont si friands et dont l’utilisation abusive gêne l’auditoire et constitue un frein
assez important à la compréhension. Il conseille d’avoir plutôt recours à la simplicité et de
mettre l’accent sur le contenu plus que sur le fond ou l’aspect visuel de la présentation. Il
recommande d’éviter la création de diapositives très étoffées et surchargées d’informations.
Il vaut mieux dans ce cas répartir les informations sur plusieurs diapositives au lieu de se
contenter d’une seule. Il donne également des conseils sur l’utilisation des couleurs
contrastées, le choix de police et la taille de caractère afin de faciliter la lecture
d’informations à l’écran. Finalement, il conseille la modération dans l’utilisation des images,
des schémas, des effets sonores, des animations ou des vidéos. Chaque élément de la
présentation doit poursuivre un but précis (Sacotte, 2006).
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Villeneuve en se basant sur les études de divers chercheurs, dresse une liste de
recommandations pour un usage efficace des logiciels de présentation. Il répartit en trois
grandes catégories les éléments à respecter pour réaliser une présentation efficace, favorisant
un meilleur enseignement et un meilleur apprentissage :
1. les conditions pédagogiques ;
2. l’organisation des éléments présents dans la diapositive ;
3. le style et le format des diapositives.
Pour chacun de ces trois aspects, l’auteur dresse un portrait sommaire des éléments à
considérer pour créer une présentation PowerPoint® efficace (Villeneuve, 2004).
Verpoorten et Feyens adoptent la grille d’évaluation élaborée par Villeneuve et l’utilisent
pour étudier et améliorer la qualité de 10 diaporamas utilisés comme support de formation.
Ils remarquent que les recommandations les plus souvent enfreintes font partie des
compétences d’enseignement (définition d’objectifs pédagogiques, écriture
communicationnelle, psychologie éducationnelle…) dont l’amélioration ne relève pas de la
formation à l’utilisation d’un logiciel de présentation. Les auteurs soulignent aussi qu’en
dépit du fait que les recommandations de Villeneuve aient montré leur utilité au sein du
dispositif qu’ils ont étudié, « aucune d’elles n’est explicitement
«validée
», c’est-à-dire
rapportée à des preuves expérimentales ou même à un raisonnement théorique ou, à tout le
moins, à l’un ou l’autre gourou, expert ou
«bonne pratique
»qui s’en ferait l’avocat »
(Verpoorten & Feyens, 2005, p. 54). Donc, le lien entre la qualité d’une présentation
PowerPoint® et l’efficacité pédagogique reste à préciser. Les auteurs conseillent également
de soumettre à l’épreuve du test empirique les critères de qualité qui touchent spécifiquement
la création de diaporamas. Les autres critères d’ordre pédagogique ou organisationnel
peuvent trouver une légitimité théorique chez divers chercheurs surtout chez ceux qui se
réfèrent notamment à la théorie cognitive.
Clark souligne le fait que les medias véhiculent uniquement des informations mais n’aident
pas vraiment l’apprenant à construire ses connaissances. Il est vrai qu’ils exercent une
influence importante sur la rapidité de l’apprentissage mais uniquement si leur utilisation se
base sur une méthode cognitive adéquate et des stratégies de travail que les élèves seuls ne
peuvent pas acquérir : « Media and their attributes have important influences on the cost or
speed of learning but only the use of adequate instructional methods will influence learning.
I define methods as the provision of cognitive processes or strategies that are necessary for
learning but which students can not or will not provide for themselves. I claim that absolutely
any necessary teaching method can be delivered to students by many media or a variety of
mixtures of media attributes - with similar learning results » (Clark, 1994).
Comme nous l’avons déjà souligné, les problèmes rencontrés avec les présentations
PowerPoint® sont plutôt liés à un mauvais usage qu’à un défaut récurrent du logiciel. S’il est
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vrai que les aides visuelles peuvent être utilisées efficacement, pour attirer l’attention sur les
idées principales de la présentation et mettre en valeur une information importante, il est
également possible d’utiliser les mêmes options afin d’embrouiller et de perturber l’auditoire.
Une présentation efficace exige un travail sérieux de préparation, de rédaction et de
réalisation. Elle exige également des compétences multiples, et pas seulement d’ordre
technique. Il est important de la tester afin de faire correspondre la forme avec le fond et de
trouver une cohérence étroite entre les supports visuels, le contenu et les objectifs suivis.
La présentation d’un travail clair et lisible à toutes les étapes de la réalisation du projet
constitue un élément de motivation important pour les apprenants. Cet objectif est atteint
grâce à l’utilisation d’un logiciel de PréAO comme Power Point® et la maîtrise d'un tel
logiciel pourra être réinvestie par les apprenants dans la vie scolaire mais également plus tard
dans la vie professionnelle. Il est possible d’appliquer sur les logiciels de PréAO ce que
Archambault a déjà écrit à propos des logiciels de traitement de texte : « Erreurs, ratures,
ajouts ne sont plus insupportables. La reprise est facile. On échappe à la lourdeur de la
réécriture à la main. Une mauvaise graphie ne s'oppose plus à la lecture par les autres […].
Le statut de l'erreur se transforme : la conservation aisée des états antérieurs permet à l'élève
de voir les effets produits par ses tentatives successives, son travail et les résultats de ses
efforts, et non de voir des échecs ! […] Un texte propre aide à donner une représentation
positive et un modèle de l'écrit. Le statut de l'erreur, que l'on fait disparaître comme par
enchantement, change du tout au tout. L'ordinateur n'est pas perçu comme celui qui juge ou
sanctionne. L'élève se trouve dans d'autres dispositions par rapport au nécessaire effort
scolaire » (Archambault, 2002).
Dans le document
Usages et effets des TIC dans l'enseignement-apprentissage du français langue seconde : Un exemple au Liban
(Page 127-130)