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médecins interviewés

13 Annexe 5 : Jaddo

13.1

Biographie

Cf. Résultats. Définition de sept thèmes d’analyse à partir de la lecture des romans. p. 36.

13.2

Juste après dresseuse d’ours

13.2.1 Résumé et description du type de l’ouvrage

Cf. Résultats. Définition de sept thèmes d’analyse à partir de la lecture des romans. p. 37.

13.2.2 Analyse et commentaires

13.2.2.1 Le décor

Les histoires se succèdent dans le désordre. Jaddo nous parle de sa première année de concours, de ses différents stages durant son externat et son internat : aux urgences, en rhumatologie, en traumatologie, en obstétrique… L’auteure nous fait également partager ses premières expériences en tant que généraliste remplaçante. Toutes les histoires se déroulent dans les services hospitaliers ou en cabinet de ville.

13.2.2.2 Ce que le livre nous apprend sur les patients

Jaddo est confrontée à la souffrance ordinaire de ses patients : « J’ai en face de moi une mère qui se

meurt d’inquiétude parce que son fils de 17 ans se couche à deux heures et passe trop de temps derrière son PC, ou une femme en pleurs que son mari a abandonnée du jour au lendemain » (p. 221)

13.2.2.3 Ce que le livre nous apprend sur le médecin

Le médecin, un être humain comme les autres

Elle nous raconte comment son expérience d’interne en soins palliatifs la déprime au point de la faire craquer au bout d’un moment : « Je sors brutalement de mon corps, et je me vois éclater en sanglots

absurdes, intarissables, comme ça, pour rien. […] La partie qui flotte jette un œil analytique sur la partie qui pleure, et se dit que je ne vais probablement pas si bien que ça. » (p. 150). Jaddo raconte

également son surmenage, confrontée à un défilé de patients tous plus exigeants et râleurs les uns que les autres : « A la fin de mon dernier et dix-septième–déjà-vingt-troisième, j’ai fermé la porte, j’ai fermé

les volets, je me suis assise et j’ai pleuré, sans trop savoir pourquoi. » (p. 212). Elle nous raconte

également sa préférence pour les patients bien portants plutôt que très malades, émotionnellement plus lourds et difficiles à gérer : « Les malades sont nuls. Il puent la souffrance et la peur, ils me vident de

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ils pompent, ils pompent, ils pompent, alors que j’ai si peu d’énergie à moi. […] Je n’ai pas tant d’énergie à donner, je n’ai pas assez de force vitale pour tous, et j’en crève. » (pp. 267-268).

Une médecin qui accuse

L’auteure écrit pour ne pas oublier : « Je reste clouée sur place, en me répétant "N’oublie pas. N’oublie

pas. N’oublie pas" » (p. 32) ; pour ne pas oublier ce qui la scandalisait durant ses années d’externat et

d’internat, pour ne pas s’habituer. Elle dénonce pêle-mêle le manque de tact et d’empathie des soignants, au premier chef les médecins hospitaliers rencontrés au cours de sa formation, ainsi que l’absurdité du système de soins.

Confrontée à des soignants manquant d’empathie alors qu’elle est toute jeune étudiante (indifférents face à une patiente complètement dénudée au bloc opératoire), elle nous décrit son sentiment d’impuissance : « et puis quelque chose me retient, je ne sais pas quoi. Ma connerie sans doute. […]

j’ai peur d’être ridicule » (p. 32)

Jaddo dénonce à maintes reprises les aberrations du système de santé, oubliant les intérêts du patient et de la société. Elle nous parle également de ses peurs, de son impression d’incompétence parfois. Ce livre est un témoignage et une révolte. Jaddo est à bien des égards un médecin en colère, comme Winckler, contre toutes les personnes et toutes les choses qui portent préjudice aux patients, dont elle défend rigoureusement et avec ardeur les droits.

Le poids de la hiérarchie :

Jaddo critique dans l’un de ces récits le fonctionnement très hiérarchisé et pyramidal de l’hôpital : « le

grand chef de service, les chefs de clinique, les internes, les externes ». Les externes n’ont pas le droit

de s’adresser directement au « blouse super blanche », le chef, sans passer par les « blouses

intermédiaires » (pp. 67-69).

L’ambiance très stressante de l’hôpital, notamment lors des staffs (p. 100) L’absurdité du système de soins et de l’administration :

Jaddo dénonce le temps et l’argent perdus faute de communication entre les services. Le manque de lien entre les EHPAD et le service des urgences, par exemple, ralentit au final la prise en charge des pensionnaires (p. 56). Les examens faits au sein de l’hôpital ne sont pas transmis au médecin généraliste, du fait du retard quand ce n’est pas l’absence de courrier de sortie. Ainsi, après une hospitalisation, quand un patient reconsulte en ville son médecin traitant, celui-ci ne connait pas les examens et les bilans réalisés. Tout ceci coûte de l’argent puisque certains examens vont être refaits en ville une seconde fois (p. 324). La prise en charge en est passablement dégradée et ralentie.

Jaddo dénonce des pratiques affairistes et mercantiles. Ainsi, le fait que dans son hôpital il existe pour le service un certain nombre de places d’IRM par semaine qu’il faut utiliser « sinon après on nous les

enlèvera. Alors on cherche parmi nos patients hospitalisés s’il n’y en a pas un qui traîne et qui n’aurait pas encore eu d’IRM » (p. 46).

Elle se révolte également face à la formation médicale qui laisse des pas-tout-à-fait adultes s'exercer sur de vraies gens, et surtout, qui ne se présentent pas, qui n’affichent pas leur qualité de médecins étudiants en formation (p. 87).

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13.2.2.4 Ce que le livre nous apprend sur les relations médecin-patient Manque d’empathie de certains médecins, des soignants en général :

Jaddo dénonce certains médecins et les soignants qui manquent cruellement d’empathie, oubliant que les patients sont des êtres humains, se gargarisant de leur savoir, de leur pouvoir et de leurs aptitudes diagnostiques. Elle décrit une scène où l’interne de chirurgie vient examiner l’abdomen d’une patiente à la recherche d’une tumeur : « soudain, son visage s’illumine […] ça a l’air de lui faire vachement

plaisir. Il sourit, même, maintenant. Triomphant, il me dit : « tenez, sentez, là, palpez… […] Alors ? (Sourire) qu’est-ce que vous sentez ? » (p. 26). Jaddo laisse éclater sa frustration de ne rien pouvoir dire

ou faire, sa révolte devant tant de bêtise : « effroyable, effroyable connard… […] enfoiré d’enfant de

putain» (p. 27).

Jaddo dénonce l’indifférence des médecins au bloc opératoire où une patiente « complètement nue, les

jambes écartées » est totalement ignorée par les médecins « tellement habitués à la nudité qu’ils ne la voient plus » (p. 31).

Pour Jaddo, les pratiques irrespectueuses sont monnaie courante : « Bon, ça y est, elle dort. Les externes,

qui n’a jamais fait de TV ? » (p. 75). Certains patients voient défiler dans leur chambre de nombreux

externes : « Tiens, cet après-midi, tu devrais passer voir le type de la 18. Il a un foie métastatique très

palpable, on sent super bien le bord inférieur et les métas » (p. 75). Les soignants qui rentrent dans les

chambres sans prévenir, et qui s’adressent au patient à la troisième personne : « il est juste intolérable

de voir quelqu'un surgir dans sa chambre sans crier gare, pendant qu'on est tout nu, ou en train de faire pipi, ou en train de se gratter les couilles. […] il est parfaitement insupportable de s'entendre demander si "elle a fait pipi ? » (p. 86).

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