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2.5 R EPRISE BEAUVOIRIENNE 2 : CRITIQUES DES CORPS SITUES

2.5.1 En amérique du nord

En Amérique du nord, les critiques s’organisent essentiellement autour de la catégorie de femme et émanent de deux fronts, à la fois de femmes de couleur, de lesbiennes ou, plus généralement, de femmes reléguées aux marges du mouvement féministe, et par ailleurs des approches poststructuralistes (via des réappropriations féministes de la psychanalyse et de la

135 Pour de plus amples explications sur le séparatisme, voir Alison Jaggar, Feminist Politics…, op. cit.,

p. 293.

déconstruction)137. Le principal problème a trait à la confirmation des catégories de l’oppression que résume bien la formule de la poétesse noire lesbienne Audre Lorde : « On ne détruira pas la maison du maître avec les outils du maître138. » En l’occurrence, la reconduction de la catégorie de femme, qui d’une part valide une différence sexuelle non soumise à la critique, d’autre part s’appuie sur des attributs féminins que le patriarcat valorise traditionnellement, est dénoncée. Si les femmes ne veulent pas être restreintes aux activités identifiées comme typiquement féminines par un monde misogyne, elles doivent être capables de se penser elles-mêmes de manière alternative. Certes, les forces et les valeurs développées par les femmes dans les conditions de l’oppression ne doivent pas être écartées (par exemple, la maternité n’a pas lieu d’être refusée contrairement à ce que prétend Beauvoir), mais ces différentes activités ne sauraient épuiser ce que les femmes doivent pouvoir faire. Or le corps est au cœur des remises en cause successives qui vont viser l’identité et le sujet « femme », car il a longtemps opéré comme leur principal vecteur au titre de leur fondement.

Il faut dire que la stratégie de revalorisation des objets du mépris misogyne finit bien souvent chez les féministes culturelles, comme on l’a vu, par faire de « l’anatomie femelle » le principal constituant de l’identité des femmes, franchissant les limites du nominalisme au profit de présupposés réalistes, puisque la physiologie féminine est alors créditée d’un statut identitaire fondamental. Cela, en soi et sous certaines conditions, ne poserait pas problème : le corps participe de la définition d’un individu. Mais il y a dans ces analyses des débuts de la deuxième vague un paradoxe que souligne Jaggar139. Bien que les féministes radicales défient les conceptions traditionnelles de la politique en incluant dans son champ la reproduction humaine de citoyen-nes dont le caractère corporel est souligné, dans le même temps, leur focalisation sur la reproduction entraîne nombre d’entre elles à percevoir cette dernière comme un processus donné, transhistorique et naturel. Le phénomène de la reproduction balance ainsi entre deux interprétations contradictoires, l’une politique, l’autre naturelle. Et, faute d’une historicisation

137 C’est ainsi que Linda Alcoff présente les termes du débat dont elle dresse un premier bilan en 1988. Voir

Linda Alcoff, « Cultural Feminism versus poststructuralism : the idendity crisis in feminist theory », Signs, vol. 13, n° 3, 1988.

138 Cité par Elsa Dorlin en introduction à son « anthologie du féminisme africain-américain » : Black

Feminism. Anthologie du féminisme africain-américain, 1975-2000, Paris, L’Harmattan, 2008, p. 42.

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achevée du corps reproducteur, c’est encore un corps posé comme extérieur à la sphère de la socialité qui sert de sous-bassement identitaire.

Le terme de genre est introduit dans sa version féministe par Ann Oakley dans Sex, Gender and Society en 1972 dans le monde anglo-saxon140 afin d’échapper justement à de telles impasses naturalistes. En distinguant des traits biologiques, perçus comme innés, de caractéristiques culturelles, considérées comme acquises et regroupées sous le terme de genre, ce dernier permet de rendre compte d’une distorsion entre le sexe naturel et sa traduction sociale (pour preuve les différents modèles de féminité et de masculinité d’une époque à une autre, d’une culture à une autre), de manière à imputer au processus culturel, et non à une détermination naturelle, la hiérarchie entre hommes et femmes. L’argument est le suivant : si certains faits doivent être attribués au sexe, d’autres, en revanche, ne peuvent en dériver. Par exemple, que les femmes soient moins vaillantes en fin de grossesse justifie certes qu’elles interrompent certaines activités, non qu’elles soient moins bien payées que leurs compagnons masculins pour un travail identique ou qu’elles se spécialisent dans les tâches d’entretien. Néanmoins, malgré cet appareillage conceptuel, il est apparu au cours de la décennie 1980 que, de manière plus générale qu’il n’y semblait au premier regard, le corps mobilisé par les féministes dans les années 1970 était très monolithique. Même celles qui n’avaient pas cherché à combattre l’oppression par une revalorisation des corps féminins avaient promu une identité de femme qu’elles tiraient non d’un sexe social assumé en tant que tel, mais d’un sexe perçu comme naturel.

Il a bien fallu se rendre à l’évidence. Par exemple, s’il a pu sembler facile, dans un premier temps, de nouer des liens de solidarité extrêmement forts entre toutes les femmes, y compris à l’international – contrairement aux difficultés rencontrées aujourd’hui dans l’établissement d’un dialogue entre des féministes blanches, laïques et des féministes croyantes de couleur –, c’est bien que la lutte était menée au nom d’une identité établie sur la « base biologique du sexe », aux propriétés réputées universelles. Le concept de patriarcat, qui constitue l’envers de ces liens de sororité apparemment évidents, a été bâti sur les mêmes présupposés. Désignant un phénomène inégalitaire entre deux groupes aux contours jugés naturels, il fut lui aussi conçu comme transculturel et universel. Pour le dire schématiquement, on ne pensait pas

que l’oppression pût être indépendante des contextes historique et socioculturel des sociétés considérées, mais il semblait que la variabilité des formes que l’oppression empruntait s’arrêtait au seuil des traits biologique, anatomique ou morphologique des individus. Par conséquent, on pensait que toutes les femmes partageaient un ensemble de problèmes qui leur étaient nécessairement communs141.

Or, des femmes minoritaires au sein du mouvement américain se sont plaintes de la particularité des problèmes abordés. Elles ont fait valoir que certaines de leurs propres expériences étaient systématiquement invisibilisées, altérisées, et ont montré que l’exclusion qui touchait leurs problématiques provenait, à l’image de la confiscation du discours par les hommes au détriment des femmes, d’une universalisation abusive du sujet du féminisme, envers d’une universalisation touchant la sexuation des corps. La sororité universelle a donc été critiquée pour son particularisme blanc, petit-bourgeois et hétérosexiste. Les femmes de couleurs142 ont exhibé le fait qu’en matière de reproduction, l’oppression spécifique qui s’exerce à leur encontre n’était pas prise en compte : leur autodétermination a été entravée parce qu’on les a soumises à la stérilisation forcée, plutôt que par le truchement de l’obligation reproductive143. Des femmes pauvres ont souligné que faire du corps et de ses capacités reproductives le socle de l’identité des femmes oriente singulièrement les analyses et exclut de l’observation d’autres types de contrôles qui s’exercent sur leurs corps et qui n’ont rien à voir avec la reproduction. « Les femmes ne sont pas seulement exposées au viol ; elles sont également exposées à la pollution et aux risques posés par l’industrialisation. Les femmes ne sont pas seulement emprisonnées dans la maison ; elles

141 Voir Linda Nicholson, « Interpreting Gender », Signs, vol. 20, n°1, oct. 1994, p. 79-105. On notera

comment la simple formulation de ce présupposé révèle les connotations non seulement naturalistes mais en outre péjoratives qui lui sont attachées, faisant du corps des femmes la source « des problèmes de femme ».

142 Pour une introduction en français au champ du féminisme africain-américain, voir Dorlin, Black

Feminism. Anthologie du féminisme africain-américain, 1975-2000, op. cit. et pour une présentation du queer of color états-uniens, voir les Cahiers du CEDREF, n°18, 2011, dir. Paula Bacchetta et Jules Falquet, « Théories

féministes et queers décoloniales », et en particulier leur « Introduction », p. 7-40.

143 Comme le rappelle Jennifer Merchant : « L’expérimentation de la pilule sur des femmes portoricaines

par le gouvernement américain durant les années 1950 afin d’en permettre la commercialisation “sur le continent”, ou encore les programmes de contrôle des naissances lancés dans les États fédérés à partir de 1990 pour “convaincre” les femmes pauvres (pour la plupart noires ou d’origine ethnique) de se faire implanter Norplant (seule méthode contraceptive, avec la stérilisation irréversible, à être remboursée par Medicaid) illustrent pour ces féministes l’instrumentalisation des corps des femmes issues de groupes minoritaires. » Voir Jennifer Merchant, « Féminismes américains et reproductive rights / droits de la procréation », Le Mouvement social, vol. 203, n° 2, 2003, p. 55-87, p. 70.

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sont aussi emprisonnées dans les ateliers d’exploitation, les champs et les usines144. » Des femmes noires ont avancé qu’historiquement, leur corps n’a été ni affaibli ni débilité à des fins de prestige symbolique, mais au contraire endurci et musclé par le travail, dans des conditions d’esclavage145. Des lesbiennes ont fait valoir que la question de l’avortement ne les concernait pas directement146. Ainsi, loin d’être le garant d’une commune situation entre les femmes, il s’avérait à travers ces critiques que le corps, le sexe, et non seulement le genre, étaient conditionnés par leur environnement et contingents. La distinction entre des invariants naturels et des données culturelles variables se révélait une ultime prescription de la domination. En conséquence, il devint clair que soustraire de l’histoire les attributs des physiologies féminines et masculines, comme le faisaient les culturalistes, non seulement perpétuait les conditions de l’oppression, mais en outre excluait de l’identité et de la lutte nombre de femmes qui ne possédaient pas les qualités déterminées. A la lumière de ces multiples remises en causes, il fut largement admis que le corps devait se décliner car, en tant qu’objet social, il fallait le situer et prendre en compte les différents rapports de pouvoir qui le traversent. Dans ces conditions, parler du corps des femmes ne fut plus possible.

En accord avec cette première voie de fracturation du substrat corporel, un deuxième type de critique ira grandissant au cours de la décennie 1980147. Il s’étaiera sur des prémisses poststructuraliste ou posthumaniste, plutôt que sur la théorie marxiste alors en perte de vitesse. Ces approches théoriques se caractérisent par leur adhésion à un paradigme du pouvoir en rupture avec le schéma répressif et déployé dans toutes ses implications par Foucault, quoique déjà à l’œuvre dans la psychanalyse. Dans cette perspective, les inégalités sont certes situées dans l’orbite du social mais elles sont interprétées comme le fruit de rapports productifs déterminés

144 « Women are exposed not only to rape; they are also exposed to pollution and to industrial hazards.

Women are imprisoned not only in the home; they are imprisoned as well in sweat shops, fields and factories. » Jaggar, op. cit., p. 292.

145 Voir par exemple le discours de Sojourner Truth : « Ain’t I a woman ? » (1851), dans Elizabeth C.

Stanton, S. B. Anthony et Matilda J. Gage (éd.), History of Woman Suffrage, vol. 1, Rochester, New York, Charles Mann, 1887, p. 116.

146 On pourrait dire qu’elle ne les concerne ni plus ni moins que les hommes, à ceci près qu’elles ne sont pas

exemptes des conséquences d'un viol et que si la légalisation de l'avortement entraîne un changement de mentalité favorable à l'égard des femmes en général, cela leur bénéficie aussi.

147 Voir Seyla Benhabib, « Feminism and postmodernism : an uneasy alliance », dans Seyla Benhabib,

Judith Butler, Drucilla Cornell, Nancy Fraser, Feminist contentions. A philosophical exchange, New York, Routledge, 1995, p. 17-35.

plutôt que comme processus répressifs tels que l’avancerait une proposition (freudo-)marxiste148. Le mécanisme fondamental du sexisme consiste alors en la production de l’identité « femme » à partir d’un dispositif de savoir et de pouvoir qui force l’individu à se rapporter à lui-même et aux autres de telles et telles manières. La coercition s’exerce dans l’érection d’une identité – elle contribue à son émergence, c’est pourquoi elle est dite productive –, non dans des interdictions qui viseraient un sujet préexistant, dont les prérogatives seraient déboutées. Car il n’y a pas de sujet sans qualification subjective, pas de sujet qui précéderait ses « mises en sujet ». Ainsi le postulat d’un sujet authentique, tapi sous les couches idéologiques et les rapports de force qui en auraient altéré les qualités voire la conscience, est interprété comme une construction propre au discours humaniste. En réalité, le sujet n’est ni le lieu d’intentions propres, ni celui d’attributs naturels. L’erreur du féminisme culturaliste est double : d’une part il reproduit le mécanisme par lequel le sexisme se perpétue en promouvant l’identité « femme », d’autre part son projet de restituer un rapport des femmes à elles-mêmes et aux autres femmes qui ne soit pas médiatisé par l’idéologie sexiste, pourtant à l’origine de l’identité femme, est contradictoire. Mais la critique s’étend au corps et, à rebours des habitudes de pensée, ruine également l’idée d’un noyau naturel défini et délimité par le corps, d’une cohérence physique propre, originelle, antérieure aux rapports de pouvoir. Au contraire, ce sont ces derniers qui établissent des liens entre différents éléments et modèlent des unités physiologiques. Ainsi, les attributs de l’anatomie féminine doivent être lus comme des dispositions corporelles issues de configurations de savoir et de pouvoir particulières, non comme des spécificités données, intrinsèques. Bref, dans cette perspective les corps ne sont pas premiers, ils sont des produits, sous tous leurs aspects. Leurs qualités sont purement contingentes et dépendantes de l’équilibre des forces qui leur est contemporain. C’est d’ailleurs pourquoi vouloir faire de l’anatomie femelle une ressource, comme le suggère Rich, est un non-sens : cela revient à hypostasier des accidents, apparus dans un contexte patriarcal, et finalement à s’appuyer sur un levier qui n’existe pas (le corps des femmes). La seule fin égalitaire qui puisse être visée de manière cohérente dans le cadre de cette matrice conceptuelle consiste à déplacer les lignes de force, de manière à transformer les

148 Voir Michel Foucault, Histoire de la sexualité, tome 1, op. cit., notamment « II. L’hypothèse répressive »,

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processus de constitution subjective et corporelle, pour aboutir à des sujets incarnés (vraisemblablement inédits) entre lesquels des relations réciproques seraient possibles. À l’aune de ces réflexions, la notion de corps apparaît fortement tributaire des discours, des savoirs et des pratiques qui le façonnent, sans que la réalité physiologique que lui attribuent les sciences naturelles ne soit frontalement remise en cause.

Ces deux lignes de critiques majeures, issues des féministes minoritaires d’un côté, du poststructuralisme de l’autre, convergent vers une réfutation radicale de l’essentialisme. Centrée dans un premier temps sur le féminisme culturaliste qui a fait l’objet d’une vindicte féministe extrêmement dure et répandue dans les rangs universitaires – au point où on a même pu se demander si la dénomination « culturaliste » n’avait pas eu pour fin d’épargner les féministes radicales tant les objections ont dépouillé leur cible de toute crédibilité149 –, la critique de l’essentialisme prendra des proportions démesurées. Dans les années 1980, la controverse entre essentialisme et constructivisme s’imposera durablement dans l’ensemble du champ féministe et le fera basculer dans un véritable cul-de-sac théorique focalisé sur la seule et unique question des traces essentialistes à traquer150. En 1989, irritée par l’état d’une critique dominante qu’elle juge mal posée et dont les termes sont rarement examinés, Diana Fuss consacre un ouvrage à cette question, Essentially Speaking. Feminism, Nature and Difference, dans lequel elle montre les impensés et les raccourcis d’un débat mortifère. Or justement, la notion de corps se trouve prise dans le maillage de cette controverse : « La plupart des anti-essentialistes, cependant, hésitent même à parler du corps, par peur de paraître essentialiser151. » Pourtant la critique de l’essentialisme ne dépend pas d’une mise à l’écart des corps. On le sait bien, il n’est nul besoin de substrat biologique pour fonder une identité essentialisée, indépendante des diverses dynamiques sociales qui la coconstituent : on peut lui substituer un socle symbolique. Récemment, les polémiques entourant le « mariage pour tous », à savoir l’élargissement du mariage aux homosexuel-les, l’ont encore montré puisque ses opposant·e·s se sont référé-es, comme leurs prédécesseur-ses lors des débats autour du PACS, à un ordre symbolique a-historique qui

149 Ce fut le cas notamment des écoféministes.

150 Voir Moira Gatens, Imaginary Bodies. Ethics, Power and Corporeality, New York, Routledge, 1996,

p. 3 et note 9 p. 18.

151 « Most anti-essentialists, however, are hesitant to discuss the body at all for fear of sounding

scellerait les modalités de la parenté et de la filiation dans des structures présociales. À ce titre, la répulsion théorique que le corps a provoquée outre-Atlantique dans le cadre des tensions entre essentialisme et constructivisme, et dont les nombreuses références mentionnées dans le chapitre précédent sont l’écho, n’est pas intrinsèque à la controverse. Mais notre tradition philosophique indexe l’opposition entre essentialisme et constructivisme sur celle entre nature et culture, de sorte qu’une résorption maximale des corps dans la sphère du social est souvent identifiée comme la garantie d’une perspective constructiviste. En vertu d’un antinaturalisme qui n’a cessé de s’exacerber au cours de la décennie et au fil des théories, l’analyse de la subordination des femmes s’est peu à peu émancipée de toute référence aux conditions matérielles des corps152 au profit d’explications en termes alternativement relationnels, systémiques, d’infrastructure, structuraux, symboliques, idéologiques, discursifs, performatifs, bref, en des termes « socioculturels » qui conduisent à identifier les corps comme des effets et à détourner le regard de leur épaisseur et de leur consistance.

En résumé, on peut dire que la tentative de fonder une perspective féministe sur une revalorisation du féminin et du corporel a, certes, permis à bien des femmes de lever de nombreux tabous attachés à leur propre perception d’elles-mêmes. Cela les a conduites à explorer leur propre corps, tant pratiquement que réflexivement, dans le cadre de communautés non- mixtes largement promues par ce courant et propices à l’auto-affirmation. La notion d’ « humain générique » a également été sérieusement révisée. Néanmoins, l’attention portée aux corps féminins a fait ressortir des spécificités physiques, psychologiques et comportementales qui ont été interprétées en termes de différences sexuelles naturelles, gommant les différences internes au groupe des femmes et naturalisant une des formes historiques de la féminité. Les dérives essentialistes et naturalistes de la politique identitaire ont conduit de plus en plus de féministes à en faire la critique. Celle que conduit magistralement Butler en 1990 dans Gender Trouble est la plus connue, mais elle est loin d’être isolée153. L’identité « femme » a fait l’objet de

152 Voir Stevi Jackson, « Marxisme et féminisme », op. cit., p. 265-295.

153 Judith Butler, Gender Trouble. Feminism and the subversion of identity, New York, Routledge, 1990.

Voir aussi, par exemple : Teresa de Lauretis, « La technologie du genre », dans T. de Lauretis, Théorie queer et

cultures populaires : de Foucault à Cronenberg, trad. fr. M.-H. Bourcier, Paris, La Dispute, 2007, p. 37-94 (éd.

originale : « The technology of gender », dans Technologies of gender. Essays on theory, film and fiction, Bloomington, Indiana University Press, 1987, p. 1-30).

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déconstructions en tous genres, tant par des féministes issues des minorités que par le biais du poststructuralisme, laissant ouverte la question de savoir comment s’engager dans une politique féministe en l’absence d’une identité de « femme » stable et non excluante. Et la déconstruction du sujet « femme » comprenait celle de leurs corps, au point où leur tangibilité a failli.