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CONCEPT DIMENSIONS COMPOSANTES INDICATEURS

3.1.2 Variables indépendantes : acteurs et stratégies

Le programme politique ne se dessine pas uniquement en réaction à des facteurs contextuels. Ce sont des entrepreneurs politiques qui « mobilisent des ressources et mettent en œuvre des stratégies à propos d‘un enjeu [les retraites] pour lequel ils cherchent à obtenir une prise en considération par l‘autorité politique légitime » (Thoenig, 1989: 22 cité

dans Royer 2006: 60). Avant de développer sur ces stratégies, il convient de faire un tour d‘horizon des acteurs impliqués dans le processus politique.

3.1.2.1 Acteurs

Ici, nous devons nous permettre certains écarts par rapport à la théorie de Kingdon. En effet, le rôle et les ressources des participants décrits dans la théorie des courants multiples ne s‘appliquent pas tel quel au système parlementaire de type Westminster présent au niveau fédéral et provincial. De plus, l‘implication des participants varient selon le sous- champ politique (Considine 1998). Autrement dit, les acteurs ne sont pas donnés, il faut les identifier à partir du sujet à l‘étude. C‘est ce que nous avons tenté de faire en réalisant une synthèse d‘études employant la théorie des courants multiples dans un système parlementaire ou dans un domaine connexe aux retraites, mais aussi en identifiant les acteurs qui ont tenté d‘influencer les politiques publiques de retraite au Canada et au Québec en nous fiant à des documents officiels répertoriés plus haut.

Nous présenterons chacun de ces acteurs, leurs ressources et la nature de leur influence sur le programme politique. Soulignons au passage que nous remplacerons le vocable participant employé par Kingdon par son synonyme acteur car ce dernier est plus utilisé en relations industrielles. Le tableau suivant permet de voir en un coup d‘œil ces acteurs canadiens.

Tableau 7 : Indicateurs de la variable indépendante acteurs pour le thème retraite : Canada et Québec

CONCEPT COMPOSANTES INDICATEURS

Acteurs Parlementaires Premier ministre Ministres responsables Députés et sénateurs

Fonction publique Ressources humaines et développement social Ministère des Finances

PRP

Régie des rentes du Québec

Groupes d‘intérêts Patronat (Conference Board du Canada, FCEI, CPQ) Syndicats (CTC, FTQ, CSN, CSD, CSQ)

Lobby de retraités/personnes âgées (AQRP, AAR, AQDR, FARQ, FADOC, CARP)

OCDE

Chercheurs Chercheurs indépendants Org de prestation

de service

Représentants de l‘industrie bancaire et des assurances (ACARR, Bureau du surintendant des institutions financières, Institut canadien des actuaires) Partis politiques PCC, PLC, NPD, BQ, PLQ, PQ, ADQ

3.1.2.1.1 Parlementaires

Les parlementaires sont les acteurs les plus visibles des politiques publiques car ils décident quelles politiques seront adoptées. En ayant, en quelque sorte, le dernier mot, ces acteurs

influencent certainement le programme politique, mais leur intervention se fait surtout sentir à la fin du processus de mise à l‘agenda et de formulation des politiques.

3.1.2.1.1.1 Premier ministre

Le Premier ministre est le personnage principal du jeu politique canadien, plus son parti détient de sièges à la Chambre des communes, plus sa légitimité est grande. Cette légitimité confère au Premier ministre le pouvoir de déterminer l‘ordre du jour décisionnel et les politiques formulées. La légitimité du Premier ministre incite également les membres de son parti à suivre les lignes directrices émises par celui-ci en matière d‘agenda et de solution. Outre son contrôle direct sur le programme politique décisionnel, le Premier ministre a un accès direct aux fonctionnaires et aux médias lui permettant d‘influencer l‘exécution de ses politiques et l‘opinion publique respectivement. Le Premier ministre a également le pouvoir de nommer les ministres et les secrétaires d‘État dont il sera question plus loin. Enfin, le Premier ministre détient le pouvoir de dissoudre le Parlement et ainsi déclencher des élections (Jackson et Jackson 1994; Malcolmson et Myers 2000; Montpetit 2002). Ce pouvoir peut-être utilisé comme stratégie pour influencer le programme politique, notamment pour éviter de prendre une décision sur un sujet litigieux (Strom et Swindle 2002: 588). La position des Premiers ministres canadiens et québécois se reflète dans leurs discours inauguraux mentionnés plus haut.

3.1.2.1.1.2 Ministres

Les ministres ont plusieurs responsabilités, dont répondre de leur ministère. Le ministre se fait conseiller par les hauts fonctionnaires, mais il est le seul responsable de ses décisions au Parlement. Il a donc un certain pouvoir discrétionnaire sur le programme politique décisionnel sur les matières relevant de son ministère même si ce pouvoir est limité par

l‘obligation d‘agir conformément à la ligne directrice du parti (Jackson et Jackson, 1994 : 290-291; Montpetit, 2002 : 101, 103; Malcolmson et Myers, 2000 : 116). Les positions des ministres sont révélées lors des débats, que ce soit à la Chambre des communes ou à l‘Assemblée nationale, ainsi que dans les projets de loi qu‘ils déposent. Les ministres des Finances peuvent également profiter du discours sur le budget pour énoncer leurs priorités.

3.1.2.1.1.1.1.1 Cas canadien

Le Canada est un pays fédéré. Ce fédéralisme entraîne une séparation des pouvoirs entre les gouvernements du Canada et ceux des provinces et territoires que le compose (Malcolmson et Myers 2000: 72). En matière de retraite, le gouvernement fédéral, via le ministère des

Ressources humaines et du développement social, est responsable des politiques de la

Sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada. Par ailleurs, les lois sur l‘impôt peuvent avoir des impacts sur les régimes d‘entreprise et le régime enregistré d‘épargne-retraite, impliquant, par le fait même, le ministre des finances.

3.1.2.1.1.1.1.2 Cas du Québec

Le système politique de la province de Québec est calqué sur le modèle fédéral. Le

ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale du Québec est responsable de la Régie des

rentes du Québec et peut élaborer des politiques concernant le Régime des rentes du Québec (RRQ 2004: 11). Par ailleurs, le ministre du Revenu est responsable de la perception des cotisations payables au RRQ ainsi que des politiques d‘impôt pouvant avoir des répercussions sur les régimes d‘entreprise et le régime enregistré d‘épargne-retraite (RRQ 2004: 11).

3.1.2.1.1.3 Députés et sénateurs

Bien que les écrits recensés n‘aient pas abordé le rôle des députés et des sénateurs, nous inclurons ces acteurs dans notre analyse. En effet, une analyse préliminaire du programme politique semble indiquer que ces acteurs participent à l‘élaboration des politiques publiques.

3.1.2.1.2 Fonction publique (Bureaucracy)

La fonction publique applique les lois, c‘est l‘intermédiaire entre les parlementaires qui adoptent les politiques et le public qui est encadré par ces politiques. Elle a donc un rôle important à jouer dans l‘élaboration du programme politique (Kingdon, 2003 : 30; Jackson et Jackson, 1994 : 369; Montpetit, 2002 : 102; Malcolmson et Myers, 2000 : 121).

Kingdon a constaté que la fonction publique influence davantage la formulation de politiques que la proéminence des éléments sur l‘ordre du jour. Son influence se fait surtout sentir au moment de la mise en œuvre des politiques car les fonctionnaires, de par leur expérience pratique, sont les mieux placés pour savoir ce qui est faisable et ce qui ne l‘est pas. Kingdon a également noté que la fonction publique est généralement conservatrice et préfère souvent le statu quo (Kingdon 2003). La fonction publique amènerait donc peu de nouvelles idées, mais elle rédigerait des propositions qu‘elle considère applicables (Kingdon 2003).

La fonction publique détient plusieurs ressources selon Kingdon. Les fonctionnaires bénéficient de la longévité. Ils ont donc tendance à retenir davantage des considérations à long terme que les politiciens. Deuxièmement, les fonctionnaires développent une expertise en raison de l‘expérience pratique qu‘ils acquièrent en appliquant quotidiennement les

politiques. Enfin, ils ont des relations privilégiées avec d‘autres acteurs impliqués dans leur sous champ politique car ils traitent avec eux régulièrement (Kingdon, 2003 : 33; Jackson et Jackson, 1994; 532).

3.1.2.1.2.1 Cas canadien

Au niveau fédéral, le Ministère des Ressources humaines et du Développement social (RHDS) est responsable, entre autres, d‘octroyer les prestations de la Sécurité de la vieillesse, du Supplément de revenu garanti, de Survivant et du Régime des pensions du Canada (Gouvernement du Canada, 2006). On peut s‘attendre à ce que ce ministère soit une partie prenante à l‘élaboration du programme politique en matière de retraite. D‘ailleurs, un responsable de RHDSC a témoigné en 2007 devant un comité sénatorial sur les régimes de retraite afin d‘expliquer la position de son ministère.

Le Projet de recherche sur les politiques, mis sur pied par le gouvernement Canadien, a pour but « d‘appuyer le programme politique à moyen terme du gouvernement du Canada » (PRP 2007). Leurs recherches portent sur des thèmes variés dont le vieillissement et la retraite. Le PRP a publié un rapport sur ces sujets et fut invité à témoigner devant deux comités sénatoriaux (2006; 2007).

3.1.2.1.2.2 Cas du Québec

Au niveau provincial, la Régie des rentes du Québec « est chargée de l‘administration du Régime des rentes du Québec et de la surveillance des régimes complémentaires de retraite » (RRQ 2004: 11). En plus de ce mandat, la Régie publie des rapports sur les régimes de retraite au Québec et ailleurs dans le monde (RRQ 2004: 12).

3.1.2.1.3 Groupes d’intérêts

Un groupe d‘intérêts se définit comme un : « organized association which engages in activity relative to governemental decisions » (Salisbury, 1975 : 175 cité dans Jackson et Jackson, 1994 : 516). Cette définition large est à l‘image de la diversité des groupes d‘intérêts dont font partie, entre autres, le patronat, les syndicats, les mouvements sociaux et les organismes supranationaux. Paul Pross a toutefois identifié quatre éléments communs à tous les groupes d‘intérêts :

1. Ils ont une structure formelle assurant la pérennité des groupes (par opposition à une foule de manifestants);

2. Ils ont une capacité à articuler et à agréger des intérêts;

3. Ils tentent d‘influencer les politiques publiques en passant par le système politique; 4. Ils cherchent à influencer les décideurs plutôt que prendre les décisions (par

opposition aux acteurs gouvernementaux) (Pross 1975 cité dans Jackson et Jackson 1994 : 517).

Ces groupes partagent également l‘objectif d‘influencer les politiques, les lois, les règlements et les dépenses dans le sens de leurs intérêts (Jackson et Jackson 1994 : 516; Montpetit 2002 : 94).

3.1.2.1.3.1 Patronat

Le monde des affaires est plutôt actif en matière de lobbying. Un organisme très actif en matière de retraite est la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). Cette fédération a pour principale mission la défense des intérêts des petites et moyennes entreprises. En 2007, la FCEI a publié un mémoire sur l‘accès à la retraite des travailleurs canadiens en fonction de leur secteur (Charron 2007). En 2006, elle a rédigé un mémoire justifiant son opposition au projet de loi 30, Loi modifiant la loi sur les régimes

complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d’administration

le comité sénatorial permanent des banques et du commerce pour mettre en garde contre le vieillissement de la population (FCEI 2007, voir aussi Boivin 2004 : 50).

Le Conference Board du Canada a pour mission de disséminer l‘information sur les tendances économiques, les politiques publiques et la performance organisationnelle aux «chefs à la direction des grandes entreprises, [aux] dirigeants des principales organisations du pays et [aux] représentants des tous les ordres de gouvernement » (Conference Board du Canada (CBC) 2004: 7). Le Conference Board du Canada a témoigné devant le comité sénatorial permanent des banques et du commerce pour exposer la lecture que fait l‘organisme des tendances économiques et démographiques (2006).

Au niveau du Québec, le Conseil du patronat a pour principal mandat d‘élaborer et de diffuser la position du patronat sur un ensemble de questions (Boivin 2004). Cet organisme a publié à l‘automne 2006 un document sur le projet de loi 30 sur la loi modifiant la loi sur

les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement d’administration (CPQ 2006). La Fédération des chambres du commerce du Québec

s‘est également positionnée par rapport au financement des régimes de retraite à prestations déterminées dans son mémoire rédigé en vue de la consultation publique sur la question en 2005 (FCCQ 2005).

3.1.2.1.3.2 Syndicats

Au Canada, le Congrès du travail du Canada (CTC) « réunit les syndicats nationaux et internationaux du Canada, les fédérations provinciales et territoriales du travail et les conseils du travail régionaux » (Congrès du travail du Canada 2005, voir aussi Boivin, 2004 : 68). Le CTC a rédigé plusieurs rapports de recherche examinant la retraite du point de vue des travailleurs (Baldwin 2005) et présentant leur position face au financement des

régimes de retraite d‘entreprise à prestations définies (Baldwin 2004). Toutefois, le CTC n‘a pas participé aux comités sénatoriaux touchant les régimes de retraites ni déposé de mémoire sur le projet de loi 30 (2006; Assemblée nationale du Québec 2006; 2007).

Le Québec compte quatre grandes centrales syndicales. La plus importante quant au nombre de membres est la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) (Boivin 2004). La position de cet organisme est présentée dans leur mémoire sur le financement des régimes de retraite en 2005 (FTQ 2005) et sur le projet de loi 30 en 2006 (FTQ 2006). De plus, la FTQ a mis sur pied le Fonds de solidarité FTQ qui prélève des cotisations à même les salaires de ses membres dans le but de financer des projets entraînant la création d‘emplois. Les cotisations correspondent à un investissement dans un REÉR et bénéficient d‘avantages fiscaux (Boivin 2004).

La Confédération des syndicats nationaux (CSN) est le deuxième syndicat en importance au Québec (Boivin 2004). Elle s‘est prononcée sur les projets de loi 30 et 195 (CSN 2004b; CSN 2006). La CSN a un fond analogue aux Fonds de solidarité FTQ nommé Fondaction (Boivin 2004).

Enfin, la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) et la Centrale des syndicats du

Québec (CSQ) ont énoncé leurs position sur le projet de loi 30 dans un mémoire (CSD

2004; CSQ 2004; CSQ 2006).

3.1.2.1.3.3 Groupes de pression représentant les aînés / retraités

Il sera pertinent d‘inclure dans notre recherche d‘autres lobbyistes défendant les intérêts des retraités, dont l‘Association québécoise des retraités des secteurs publics et parapublics

(AQRP). Cet organisme a commandé une étude en 2006 qui révélait les failles des régimes publics, des régimes d‘entreprise et de l‘épargne privée (Ascah 2006). L‘Alliance des

associations de retraités (Strom et Swindle 2002), l‘Association québécoise de défense des droits des personnes retraités et préretraitées (AQDR) et la Fédération des associations de retraités du Québec (FARQ) conjointement avec le Mouvement des aînés du Québec (FADOC) ont tous déposé un mémoire lors des consultations

particulières sur le projet de loi 30 (Assemblée nationale du Québec 2006). Au niveau fédéral, une représentante de l‘Association du Canada pour les 50 ans et plus (CARP) a témoigné devant un comité sénatorial sur le vieillissement (2007).

3.1.2.1.3.4 Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

L‘Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est un organisme supranational qui agit en tant que gestionnaire des connaissances (knowledge

manager) en effectuant des études comparatives entre les 30 pays démocratiques les plus

développés économiquement. Ces études permettent à l‘OCDE de tirer des conclusions quant aux défis économiques, sociaux et environnementaux qui touchent l‘ensemble de la population mondiale (Dostal 2004). Ces conclusions permettent de trouver « des réponses aux problèmes communs, d‘identifier les bonnes pratiques et de travailler à la coordination des politiques nationales et internationales » (Keese 2006).

Dostal (2004) conclut que cet organisme a grandement influencé le programme politique de la Communauté européenne, notamment au plan de la formulation de politique. L‘influence de l‘Organisation semble également importante en matière de retraite au Canada. Le Projet de recherche en politique qui sera traité plus loin et la Régie des rentes du Québec citent abondamment ses études et ses recommandations dans leurs rapports comme nous l‘avons souligné dans la problématique. En outre, un économiste représentant

de cet organisme supranational a témoigné devant le comité sénatorial permanent des banques et du commerce (2006).

3.1.2.1.4 Chercheurs

Les chercheurs se retrouvent dans les universités et les centres de recherche (think tanks). Ils se distinguent des acteurs « scientifiques » susmentionnés par le fait qu‘ils ne sont pas organisés comme les groupes d‘intérêts. Les chercheurs sont le deuxième acteur non gouvernemental en importance et leur influence est perceptible tout au long du processus politique, car ils servent de référence pour les autres acteurs (Kingdon 2003: 54). Les chercheurs tirent leurs avantages comparatifs de leur expertise dans un domaine particulier (Dostal 2004). En général, un nombre limité de chercheurs connus de toute la communauté politique est souvent invité à présenter leurs recommandations aux politiciens. Ils influenceraient les politiques plus que les agendas (Kingdon 2003: 55) et cette influence serait plus à long terme qu‘à court terme (Kingdon 2003: 56).

Au Canada, on constate que des universitaires ont été invités à témoigner devant les comités sénatoriaux sur la retraite et le vieillissement (2006; 2007).

Soulignons que les groupes d‘intérêts à caractère scientifique, tel l‘OCDE et le PRP, et les chercheurs peuvent se réunir en ce que Haas (1992) nomme des communautés épistémiques (epistemic communities) (Haas, 1992 : 2-3; Kamieniecki, 2000; 178; Dostal, 2004 : 443). Des valeurs et une méthode communes unissent ces différents scientifiques. Les gouvernements sollicitent de plus en plus les communautés épistémiques parce qu‘ils ont besoin de leur expertise pour comprendre des problèmes complexes, tels les changements climatiques ou le chômage, et adopter des politiques efficaces pour résoudre ces problèmes. Ces communautés aident à définir les problèmes et à formuler des politiques. Ces tâches,

font en sorte que les communautés épistémiques influencent grandement les politiques considérées (Haas 1992).

3.1.2.1.5 Organismes de prestation de services non gouvernementaux

Lorsque la responsabilité d‘un service est partagée entre le public et le privé comme c‘est le cas en matière de retraite, il arrive que des organismes de prestations de services non gouvernementaux s‘impliquent dans l‘élaboration du programme politique. Par exemple, les banques, les planificateurs financiers et les compagnies d‘assurances offrent des produits financiers en vue de la retraite, des REÉR et des rentes viagères par exemple (Bakir 2003). À titre d‘exemple, l‘Association canadienne des administrateurs de

régime de retraite (ACARR), l‘Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes inc., l‘Association canadienne des gestionnaires des caisses de retraite –

Chapitre québécois ainsi que l‘Institut canadien des actuaires ont tous déposé un mémoire lors des consultations sur le projet de loi 30 (Assemblée nationale du Québec 2006). Au niveau fédéral, le Bureau du surintendant des institutions financières a présenté sa position devant le comité sénatorial permanent des banques et du commerce (2006).

La théorie de Kingdon prévoit un certain nombre d‘acteurs détenant une influence variable sur le programme politique. Des études subséquentes ont tenté de confirmer les données de Kingdon et d‘appliquer son modèle au système politique canadien. Notre étude empirique vise à permettre une meilleure compréhension du rôle et des stratégies de chacun de ces entrepreneurs en matière de politiques publiques de retraite au Québec et au Canada.

3.1.2.2 Stratégies

Les acteurs ci-dessus intéressés par les politiques publiques de retraite ont l‘un de deux objectifs : faire en sorte que les politiques demeurent les mêmes ou faire en sorte qu‘elles changent. Les premiers seront dans une position défensive; les seconds seront à l‘offensive (Pralle 2003; Dostal 2004). À l‘occasion, tous les acteurs concernés sont favorables au changement, mais pas dans la même direction (Pralle 2006a: 994). Dans ce cas, tous sont à l‘offensive. Ces acteurs voudront que leurs priorités et leurs solutions progressent dans le processus politique. Pour ce faire, ils devront agir en tant qu‘entrepreneurs politiques et faire converger les trois courants identifiés par Kingdon, en réalisant trois tâches : attirer l‘attention des personnes pertinentes, faire converger les problèmes et les solutions et, enfin, convaincre les acteurs politiques appropriés d‘endosser ces problèmes et solutions. À l‘inverse, les acteurs désirant le statu quo chercheront à empêcher les éléments de franchir l‘étape de promulgation de la loi. Ceux-ci devront alors faire en sorte que les trois courants ne convergent pas et ainsi éviter l‘ouverture d‘une fenêtre d‘opportunité aux réformes importantes.

Pour remplir les trois tâches, les acteurs devront user de stratégies. Nous présenterons dans cette section, différentes stratégies que peuvent employer les entrepreneurs politiques pour créer ou éviter un changement dans les politiques publiques de retraite. Nous opérationnaliserons chacune de ces stratégies en fournissant des indicateurs tirés d‘études empiriques employant la théorie des courants multiples.

Il convient de réitérer que l‘opérationnalisation des variables indépendantes de la théorie des courants multiples n‘est pas aisée. Comme l‘explique Kingdon dans l‘épilogue de

Agendas, Alternatives, and Public Policies, les processus qu‘il a modélisés sont fluides, les