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Liste des sigles

Chapitre 1 Problématique de la recherche

1.4 Solutions envisagées par différents acteurs

1.4.4 Augmenter l’offre de travail : réorganiser le marché du travail

1.4.4.1 Incitations au départ à la retraite

Les prestations des différents régimes de retraite et le système d‘imposition seraient des facteurs pris en compte dans la décision du moment de la retraite. Théoriquement, plus les

prestations à la retraite sont élevées, plus le départ à la retraite se fera tôt. Il s‘agit du biais effet-revenu (Keese 2006: 52). « Le deuxième est l‘‘effet de substitution‘ », c‘est-à-dire l‘incidence d‘une année de travail supplémentaire sur les flux de revenus provenant à la fois des salaires et des pensions de retraite et autres prestations » (Keese 2006: 52). Dans ce cas, les heures de travail additionnelles ne se traduisent pas par des revenus en conséquence en raison de la table d‘impôts ou d‘une réduction des prestations de retraite ce qui limite l‘intérêt de travailler davantage. Nous verrons ici comment se traduisent les effets-revenu et de substitution en relatant les obstacles au prolongement de la vie active inhérents aux différents régimes. Plus précisément, ces obstacles sont attribuables aux rigidités des lois encadrant les divers régimes et, dans une moindre mesure, la générosité des prestations. Nous aborderons également les recommandations émises par l‘OCDE et le Projet de recherche sur les politiques (PRP) du gouvernement du Canada et la Régie des rentes du Québec (RRQ) pour abolir ces obstacles.

1.4.4.1.1 Régimes publics

Les prestations de la Sécurité de la vieillesse sont octroyées à partir de l‘âge de 65 ans. Ceci n‘inciterait pas les travailleurs à poursuivre des activités rémunérées au-delà de cet âge puisque les revenus supplémentaires seront récupérés par l‘impôt (PRP 2005: 34).

Par ailleurs, les montants de la Sécurité de la vieillesse sont plutôt faibles avec une prestation mensuelle de base de 491,93 $ et un maximum de 589,91 $ en 2007 (Service Canada 2007). Ces sommes ne seraient pas suffisamment élevées pour inciter les aînés à cesser de travailler. Par contre, la « réduction de 50 % du taux du SRG, combinée à l‘imposition des autres revenus, constitue […] un important facteur de dissuasion pour le maintien des personnes à faible revenu dans la population active » (PRP 2005: 35).

Dans l‘objectif d‘accroître l‘offre de travail, le Projet de recherche sur les politiques du gouvernement du Canada émet les deux recommandations suivantes :

 « Le report de la SV pourrait être autorisé, avec rajustement actuariel vers le haut (p. ex., 8,4 % par année après l‘âge de 65 ans).

 Une exemption de revenus ou un rajustement similaire dans le calcul des prestations pour les travailleurs à faible revenus (y compris les travailleurs autonomes) leur permettant de travailler plus longtemps et de gagner un certain montant (entre 5000 $ et 10 000 $ par exemple) sans que leurs prestations s‘en trouvent modifiées » (PRP 2005: 35)

De telles majorations existent déjà pour le RPC et le RRQ. Ces régimes permettent une retraite anticipée dès 60 ans moyennant « une diminution des prestations de 5 % pour chaque année d‘écart entre l‘âge du départ à la retraite et l‘âge de 65 ans » (RRQ 2003; PRP 2005: 35). À l‘inverse, chaque année de travail supplémentaire est récompensée par une augmentation de 5 %. Il serait possible de pénaliser davantage les départs anticipés et de récompenser le report de la retraite en faisant passer la majoration de 5 % à 8,4 % par année. De telles mesures sont envisagées par le Québec (RRQ 2003: 58) et le PRP et l‘OCDE recommandent de considérer cette option pour le RPC (PRP 2005: 35; OCDE 2006).

Les régimes du deuxième palier comportent d‘autres obstacles au prolongement de la vie active. Le RPC prévoit un délai de carence de plusieurs semaines avant de percevoir des prestations. Ce délai découragerait le retrait progressif. Le PRP recommande donc d‘abolir cette disposition (PRP 2005: 35, voir aussi Gunderson, 1998 cité dans OCDE, 2006: 69).

Le RRQ est plus souple quant au retrait progressif en offrant deux options aux travailleurs âgés de 60 à 64 ans :

« i) s‘entendre avec leur employeur sur une réduction de leur temps de travail d‘au minimum 20 % et demander à percevoir une pension publique anticipée; ou ii) dès lors qu‘ils continuent à gagner au minimum 3 500 $ par an, réduire leur nombre d‘heures de travail en maintenant leurs cotisations au régime de retraite comme si leurs gains n‘avaient pas changé » (RRQ 2003; OCDE 2006: 70).

Enfin, le RPC ne permet pas de cotiser au régime en même temps qu‘on reçoit des prestations (PRP 2005; OCDE 2006). De plus, le régime ne récompense pas le prolongement de la vie active en ne bonifiant pas la rente ceux de qui travaillent au-delà de l‘âge de 70 ans. Éliminer ces deux contraintes pourrait inciter plusieurs aînés à demeurer sur le marché du travail (PRP 2005: 35). Au Royaume-Uni et aux États-Unis, le législateur a déjà modifié les lois et règlements relatifs à l‘impôt afin de ne pas nuire à la prestation de la rente (Disney 2003: 1433).

Une disposition en ce sens est également envisagée pour la Sécurité de la vieillesse. L‘article 15 du projet de loi C-36 « autorise le demandeur qui a touché un revenu imprévu après avoir présenté sa demande ou dont les prestations risquent de le placer dans une tranche de revenu plus élevé à retirer sa demande pour limiter les répercussions fiscales […] » (Young et Prisner 2007: 9).

1.4.4.1.2 Régimes privés

Les RPA et les REÉR sont les principaux outils incitant les individus à épargner pour la retraite. Afin d‘encourager ces régimes, les pouvoirs publics exemptent d‘impôts les cotisations et les placements, seules les prestations sont imposées (OCDE 2006: 73).

Ces régimes pourraient être encore plus utiles pour les pouvoirs publics s‘ils facilitaient la retraite progressive. À l‘instar du RPC, la Loi sur l’impôt sur le revenu17 interdit de percevoir des prestations de ces régimes et d‘y cotiser en même temps. Cette disposition devrait être abolie selon le PRP (PRP 2005; OCDE 2006).

Par ailleurs, la rente issue des RPA à prestations déterminées est généralement fondée sur le salaire des dernières années de travail. Ceci n‘inciterait pas les travailleurs à accepter un emploi à temps partiel, un poste moins bien rémunéré ou à faire une transition progressive vers la retraite. Or, ces options intéressent plusieurs travailleurs âgés, car environ 27 % des retraités auraient préféré continuer à travailler à temps partiel plutôt que quitter la vie active (PRP 2005; OCDE 2006). Compte tenu de cette réalité, il serait plus approprié de tenir compte des meilleures années plutôt que des dernières années dans le calcul de la rente (PRP 2005: 35).

1.4.4.1.3 Régimes officiels et non officiels de préretraite

Les paragraphes précédents ont traité des obstacles au prolongement de la vie active inhérents aux quatre paliers de retraite canadiens. Il faut toutefois considérer l‘influence

d‘autres régimes de protection sociale sur l‘offre de travail. Des programmes de transferts tels l‘indemnisation du revenu par la CSST, le programme de prestations d‘invalidité du RPC et l‘assurance-emploi agissent souvent comme passerelles vers la retraite anticipée et écarte certains prestataires aptes au travail de la vie active (PRP 2005; OCDE 2006).

Une étude de Statistique Canada (Schellenberg, 2004 cité dans PRP 2005: 24, 28) révèle que 26 % des retraités auraient continué à travailler s‘ils avaient été en meilleure santé. Selon le Projet de recherche sur les politiques du gouvernement du Canada et l‘OCDE, il faudrait trouver des moyens pour inciter ces individus à regagner le marché du travail. La réadaptation, des nouvelles technologies, des conditions de travail appropriées et le travail autonome pourraient être mis à profit en vue de cet objectif (PRP 2005; OCDE 2006).

Il est à noter que de telles réformes ont déjà été entreprises ailleurs. La Suède a réduit la générosité de son programme de préretraite. D‘autres pays, dont les Pays-Bas, le Royaume- Uni, la France, la Belgique et l‘Allemagne, ont également sabré les programmes d‘invalidité ou de chômage qui pouvaient se substituer aux régimes de préretraites (Disney, 2003 : 1433; Hinrichs et Kangas, 2003 : 577).

Étonnamment, le gouvernement du Canada a choisi de bonifier les prestations d‘invalidité et d‘offrir une meilleure protection aux travailleurs ayant longtemps cotisé au RPC. Ainsi, le projet de loi C-36 prévoit que « [s]i un cotisant devient invalide et répond à l‘exigence des 25 ans, la période minimale est réduite à trois des six dernières années » (Young et Prisner 2007: 6). Le régime actuel prévoit que « le particulier doit avoir versé des cotisations valides pendant au moins quatre des six dernières années civiles » (Young et

17Loi de l‘impôt sur le revenu (1985, ch. 1 (5e suppl.))

Prisner 2007: 6). En diminuant l‘exigence d‘une année, le gouvernement du Canada cherche à récompenser les personnes ayant travaillé pendant au moins 25 ans.