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3.D.3 Les universités et la scolastique

Dans le document Histoire des sciences (Page 71-73)

À partir de l’an mil, l’Occident voit apparaître quelques écoles, la plupart centrées autour d’un évêché. La plus célèbre est l’école de Chartres, fondée au début du XIe siècle par un disciple de Gerbert d’Aurillac, l’évêque Fulbert. Les membres de cette école croient non seulement à la valeur des auteurs anciens (même païens), mais aussi à la possibilité de progrès. Citons Bernard de Chartres :

Nous sommes comme des nains montés sur les épaules des géants, si bien que nous pouvons voir plus de choses qu’eux et plus loin, non pas que notre vision soit plus perçante et notre taille plus haute, mais parce que nous nous élevons grâce à leur taille de géant.

Le XIIIe siècle voit le développement des universités. Une université est au départ une école relevant d’une cathédrale ou d’un monastère qui reçoit une charte du pape confirmant son autonomie par rapport aux autorités locales. Le mot universitas, en latin médiéval, désigne une communauté, un rassemblement, une union. Les plus anciennes universités d’Europe sont :

1. Bologne (1119), spécialisée en Droit.

2. Paris (Universitas magistorum et scolarium), fondée vers 1170 ; des écoles importantes existaient avant cette date.

3. Oxford (1133), fondée par des étudiants insatisfaits de l’enseignement des écoles de Paris. 4. Cambridge (1209), fondée par des maîtres et des étudiants chassés d’Oxford.

L’université typique compte quatre facultés : les Arts, le Droit, la Médecine et la Théologie. Le jeune homme entre à l’université vers l’âge de 14 ans, pour y faire un baccalauréat ès Arts, suivi s’il le désire d’une maîtrise, qui peut durer de deux à trois ans, suivi enfin d’un doctorat, qui peut être très long (une dizaine d’années en théologie, la faculté où les études sont les plus longues).

Les frictions entre étudiants et citadins étaient nombreuses et les universités finirent par obtenir une cer- taine immunité juridique.5L’université de Paris devint rapidement la plus importante de l’Occident, surtout en matière de théologie où son autorité égalait celle du Pape. Paris était alors divisé en trois parties : la Cité (l’île de la cité, avec la cathédrale et le palais royal), la Ville (la rive droite, secteur des bourgeois) et l’Université (la rive gauche). Cette dernière partie fut surnommée quartier latin, en raison de la langue parlée par les uni- versitaires. Vers 1500, l’Europe compte environ 50 universités. Chacune d’entre elles contribue au prestige de sa ville et de son prince et fournit les lettrés capables d’administrer l’État.

Le curriculum élémentaire L’étudiant (ou escholier) devait premièrement maîtriser les matières de base, divisées en deux groupes : le trivium et le quadrivium. Le trivium, comme son nom l’indique, comportait trois éléments : la grammaire, la logique et la rhétorique. L’étudiant devait donc maîtriser la langue latine (grammaire), ensuite les règles de raisonnement qui mènent à la vérité (logique) et enfin apprendre à s’exprimer de manière rigoureuse et élégante (rhétorique). L’adjectif trivial, qui désigne en français une chose simple et banale, et en anglais une chose évidente et facile, est tiré du mot trivium, en raison du caractère élémentaire de son contenu. Le quadrivium comportait quatre éléments :

1. l’arithmétique : essentiellement, apprendre à compter, éventuellement à l’aide du système arabo- indien.

2. la géométrie : maîtriser le raisonnement mathématique par l’étude d’Euclide (typiquement les trois premiers livres des Éléments), et un peu de géographie.

3. l’astronomie : Se familiariser avec les systèmes astronomiques de l’époque (Eudoxe et peut-être Pto- lémée) dans le but de comprendre le calendrier et de pouvoir déterminer la date de Pâques.

4. la musique, avec un peu de physique (un mélange pythagoricien).

Notons que le quadrivium est de nature essentiellement scientifique, et que l’enseignement de l’époque n’accordait aucune place à la littérature ou à l’histoire, bref, aux sciences humaines. Les médiévaux étaient passablement ignorants des lettres anciennes et de l’histoire, comme en font preuve les anachronismes frap- pants que contiennent les oeuvres d’art de l’époque quand elles cherchent à représenter les scènes de la vie du Christ. Les lettres gréco-latines seront déterrées à la fin du moyen-âge seulement, en Italie : ce sera le début de l’humanisme et de la Renaissance littéraire.

Le terme scolastique désigne l’enseignement conféré dans les universités de l’époque ainsi que la méthode utilisée. En voici une brève description :

Les méthodes d’enseignement et d’exposition en usage dans les écoles, la scolastique, débutent par la lectio, la lecture, terme qui possède alors un sens très technique. L’enseignant, qui peut être un simple bachelier, lit le texte, mais aussi le commente. Dans cette lecture on distingue trois niveaux d’interprétation : selon la littera (lettre), il s’agit d’expliquer simplement les mots et les phrases ; selon le sensus (sens), on doit alors chercher la signification du texte, quitte à le traduire dans un langage plus conforme aux habitudes des enseignés ; enfin, en dégager le sens profond, en acquérir la véritable intelligence par la sententia. Premier stade indispensable de

5. Par exemple, en 1200, le prévôt (chef de police) de Paris fit pendre cinq étudiants à la suite d’une rixe. Le roi Philippe-Auguste désavoua son prévôt et accorda aux universitaires un privilège d’immunité : le prévôt perdait toute autorité sur eux.

D. Le moyen-âge occidental

la scolastique, la lecture donne naissance à la quæstio (question). Elle naît des difficultés ren- contrées dans le texte, puis en vient à servir de cadre, de méthode pour exposer un sujet mis en cause, non qu’on en doute effectivement, mais parce que le procédé permet de mieux déve- lopper une argumentation. Au-delà, la question se transforme en disputatio (dispute), exercice plus rare, au cours duquel le maître, toujours un docteur, lançait le débat par un exposé ; in- tervenaient alors, pour discuter les propositions, les autres maîtres, puis les bacheliers, enfin les étudiants. Le bachelier du maître qui avait exposé devait répondre aux questions, le maître gardait le silence. Dans une seconde séance, le maître «déterminait» lui-même ; il reprenait les arguments, les classait et en tirait ses propres conclusions.6

Dans le document Histoire des sciences (Page 71-73)