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Les dépôts du début de l’Âge du Bronze final de Biederthal (Haut-Rhin, F)

1 Localisation du site

2.4 Typologie et datation des objets manufacturés

2.4.1 Les haches

Le dépôt comprend trois haches, chacune de type dif-férent. La hache à talon massive à lame trapézoïdale, talon large à butée débordante et section circulaire, bords saillants se classe parmi les types les plus mas-sifs des haches à talon continentales (fig. 4.2). Les haches à talon continentales (Rhin moyen) appar-tiennent à une famille souvent assimilée en France de l’Est au type de Haguenau. La plupart des exem-plaires de cette nécropole, plus grêles, ont été regrou-pés sous le type Klingenmünster (Kibbert 1980, p. 267). Avec un poids incomplet de 464 g , la hache de Biederthal, beaucoup plus longue et à lame plus large que les exemplaires de ce type, se rapproche des haches à talon les plus massives de cette famille dont les masses sont comprises entre 445 g et 760 g (types « Rhein-bei-Mainz », « Tünsdorf »). Elles sont représentatives du Bz C à Haguenau, Taubenhü-bel 2/III ; Haguenau, Kirchlach 84/II ; Haguenau, Kurzgeländ 8/V (Schaeffer 1926, fig. 9, 39, 49), à Santenay (Nicolardot et Verger 1998, fig. 9/8), Anzy-le-Duc et se retrouvent dans des dépôts du tout début du Bronze final (Sermizelles 1). La réparti-tion des haches à talon continentales de type large occupe largement la France de l’Est et du Centre-Est. Un seul exemplaire est répertorié en Suisse (David-Elbiali 2000, ill. 50/5).

Avec une longueur de 21,8 cm et un poids de 854 g , la hache à ailerons médians courts de Bieder-thal figure parmi les exemplaires les plus longs et les plus massifs de ce type qui n’excèdent que très rare-ment 22 cm (Millotte et al. 1968) (fig. 4.1). Elle se distingue aussi de bon nombre de modèles rectan-gulaires à bords parallèles caractérisés par une lar-geur de talon (4 cm) inférieure de plus de 1 cm par

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le fragment 50, présente une languette à base échancrée commune à la plupart des modèles de ce type (Primas 1986, Taf. 42-43) (fig. 5.1). La faucille 15 se distingue par une languette à base arrondie martelée et amincie. Selon Primas, ce type connaît une longue durée d’utilisation à partir du début du Bronze final comme à Wangen a.d. Aare (Berne, Suisse) et à Winklsass (Landshut, Allema-gne).

Le type Uioara est représenté par plusieurs varian-tes. Un exemplaire à lame large, caractérisé par une languette à bords parallèles, base équarrie et ergot long appartient à la variante Uioara I-Kuchl (fig. 5.6). La languette est dotée de deux nervures intérieures parallèles rejoignant la troisième nervure qui se poursuit le long du dos de la lame. La faucille 25 se rapporte au type Uioara I-Kindberg. Elle est caractérisée par une languette à bords parallèles et à ergot dotée de quatre nervures rectilignes rejoignant la nervure du dos de la lame. Enfin, le type Uioara 2a (fig. 5.5), qui entre tout à fait dans la définition de cette catégorie, est caractérisé par une languette à ergot développé, bords parallèles et base équarrie, dotée de deux nervures latérales se prolongeant sur la lame et une nervure médiane. Le type Uioara appa-raît à la fin du Bronze moyen (tumulus I de Unter-föhring daté du Bz C2), ainsi que dans les dépôts de Gärmersdorf, Penkhof (Amberg-Sulzbach, Alle-magne), Aesch, Känelacker, et vraisemblablement Kuchl (Salzburge, Allemagne) combinant plusieurs types de la fin du Bronze moyen à quelques objets du début du Bronze final. La représentation du type se poursuit jusque dans les dépôts du Ha A2-B1.

La faucille, dont il ne manque que la pointe de la lame, appartient au type Nenzenheim (fig. 5.3). Elle est caractérisée par une languette perforée à ergot développé, bords parallèles et base équarrie. La ner-vure interne rectiligne rejoint la nerner-vure extérieure qui se poursuit sur le dos de la lame. Une nervure médiane peu accentuée s’interrompt à la perforation. Le type de Nenzenheim est daté à partir des dépôts de Stockheim, Nenzenheim, Winklsass, Henfenfeld (Nürnbergerland, Allemagne), etc., qui indiquent une apparition au Bz D et une continuité au Ha A1.

Enfin, quatre exemplaires appartiennent au type Prestlavlky (fig. 5.2 et 4). Elles sont caractérisées par une languette perforée à bords parallèles sans ergot et une nervure intérieure rectiligne qui rejoint la nervure du dos de la lame. La faucille 4 se distin-gue de la majorité des exemplaires du type par une base de languette arrondie. La présence des faucilles de Nenzenheim dans les dépôts de Stockheim, Hor-gauergreut (Augsburg, Allemagne), Linz (Autriche), Mintraching (Regensburg, Allemagne), Pfeffingen (Balingen, Allemagne), Winklsass indique une appa-rition du type au Bz D et une continuité jusqu’au Ha B1.

2.4.3 Les armes

Deux petits fragments évoquent ici cette catégorie. Nous attribuons avec quelques réserves à une épée

une pointe de lame effilée à nervure centrale convexe formant un bourrelet (fig. 4.4). Ces caractères se retrouvent sur une série d’épées à languette simple ou complexe du Bz C2 et D (types Oggiono-Meien-ried, Ober-Illau, certaines lames d’épées de Rixheim dépourvues de rainures, etc.). Le second fragment à section losangique appartient à un poignard à lame allongée du Bz C ou D (fig. 4.5).

2.4.4 Les épingles

Ce type de parure est représenté par une tête d’épingle évasée tronconique à col renflé côtelé (fig. 5.8) et par une tige coudée lisse, longue de 15,9 cm qui pourrait également appartenir à ce type d’objet. Les épingles longues caractérisées par une tête évasée tronconique à sommet légè-rement convexe, des côtes plus ou moins saillan-tes en deux zones inégales, l’une à la base de la tête, l’autre sur le renflement, appartiennent à plu-sieurs variantes :

– une variante à côtes saillantes tendant à la col-lerette est représentée par les épingles de Spiez, (Beck 1980, Taf. 2/A1), (Beck 1980, Taf. 34/5) et Lemainville (Audouze et Gaucher 1981, p. 67) ; – une variante à cannelures ou rainures séparant

des côtes arrondies se retrouve dans les dépôts d’Arinthod-Vogna (Beck 1980, Taf. 7/A3), Jagst-zell-Dankoltsweiler (Beck 1980, Taf. 2/C5) et dans les sépultures de Haguenau, Schelmen-hofstadt 4 (Schaeffer 1926), Forstbezirk, Wol-fratzhauser Forst (Koschik 1981, Taf. 142/1). Des épingle côtelées de forme proche sont également représentées dans les sépultures du Jura souabe (Pirling et al. 1980, Taf. 49/E1 ; 36/B6).

L’exemplaire de Biederthal se rapproche des épingles de Haguenau, Schelmenhofstadt 4 ; de Fortbezirk ; de Arinthod-Vogna ; de Jagstzell, Dan-koltsweiler et se distingue de la variante de Spiez et Lemainville aux côtes saillantes (David-Elbiali 2000, ill. 84). Ce modèle, dans la tradition des épingles de la fin du Bronze moyen, est associé à Arinthod-Vogna à une épingle à collerettes mobiles représentative de la phase initiale du Bronze final dans le Jura. Le dépôt de Jagstzell qui comprend, entre autres, un manche de rasoir ajouré et une faucille à bouton du type Penkhof II est également attribuable au Bz D. Une évolution chronologique entre les épingles à rainures dans la tradition du Bz C2 et les épingles à côtes saillantes qui se rap-prochent des épingles à collerettes du Bz D n’est pas à exclure. La répartition de ces épingles, tou-tes variantou-tes confondues, apparaît uniforme entre le Jura souabe, le Jura et la Lorraine (Beck 1980, Taf. 63 ; David-Elbiali 2000, carte 48).

2.4.5 Les ceintures

Les plaques de ceintures appartiennent à deux types distincts. Les fragments de plaques de ceinture à bords parallèles, larges de 3,1 cm et 3,9 cm, sont tout à fait comparables aux petits fragments de la sépul-ture 1 du tumulus 1 de Huldstetten, de Mühlbach,

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et du tumulus XI de Kaliste-Bezdekov (Kilian-Dirl-meier 1975, no 384, 385, 386) (fig. 4.6 et 8). Le frag-ment de Huldstetten, en particulier, est très proche de l’exemplaire 6 de Biederthal. Avec une épingle à rouelle, un bracelet côtelé et deux bagues à spirales, il fait partie d’un assortiment funéraire datable du Bz C2. L’exemplaire de Kaliste-Bezdekov provient égale-ment d’un tertre de l’Âge du Bronze moyen. On peut également évoquer certains rapprochements avec la plaque de ceinture à bords parallèles complète de Memmelsdorf (Bavière, Allemagne). Bien que de décors différents, cette dernière présente certains points communs avec les exemplaires de Biederthal : bords hachurés, ligne de bossettes axiale, bande de hachures transversales, perforations (Kilian-Dirl-meier 1975, no 383). Les deux fragments de Bieder-thal, bien qu’incomplets, apportent de nouvelles informations sur la morphologie de ces ornements de ceintures à bords parallèles fragmentés et incom-plets, notamment l’exemplaire 6 qui semblerait se terminer par une languette triangulaire à triple perforations, si on lui attribue le fragment 10 de la figure 5.

Deux fragments peuvent également être clas-sés parmi les plaques de ceinture (fig. 4.7 et 9). Ils appartiennent à un type à ruban plat étroit, large de 1,8 cm et 2,2 cm, décoré sur chaque bord d’une frise hachurée proche du précédent modèle. Le motif central est ici composé d’une frise interrompue de spirales en S à bossette centrale, incisées et guillo-chées. L’attribution de ces deux fragments à un type connu reste incertaine. Nous n’excluons pas qu’ils puissent appartenir d’ailleurs au même objet dans la mesure où l’ornementation des bords des deux fragments est semblable (bandes hachurées et ligne pointillée). Ces fragments, qui évoquent la lan-guette proximale des ceintures longues du type Sie-ding-Szeged à bords convergents (Kilian-Dirlmeier 1975) par leur morphologie (ruban allongé à bords convergents, perforations axiales multiples) et par les composantes de leurs décors (bords hachurés, spirales en S, extrémité non décorée), s’en distin-guent par un ruban plus étroit que les modèles du type et par des bords presque parallèles (Kilian-Dirl-meier 1975, n° 397-412).

2.4.6 L’applique

Une applique en tôle dotée d’une perforation décen-trée, déformée et aplatie, appartient à un modèle conique décoré à sa périphérie de trois cercles concentriques de bossettes et pointillés au repoussé (fig. 5.9). Les appliques coniques en tôle de bronze de grand diamètre, décorées d’un ou de plusieurs cercles concentriques de pointillés au repoussé et dotées de doubles perforations de fixations dia-métralement opposées, appartiennent aux parures féminines de la phase classique de la Culture des Tumulus en Bohème et en Bavière, alors qu’elles ne sont pas représentées en Alsace. Des appliques analogues sont fréquentes en Souabe et en Bavière dans des contextes de la fin du Bz C et du tout

début du Bz D. C’est notamment le cas de la sépul-ture 4 de Onstmettingen, Gokeler (Bade-Würtem-berg, Allemagne) et de la sépulture 1 du tumulus 2 de Schweindorf (Aalen, Allemagne) qui associent ces parures à un mobilier traditionnel de la Culture des Tumulus et à une épingle à collerettes coulées du type Allemagne du Sud-Ouest/Suisse septentrio-nale, considéré par A. Beck comme représentatif de la transition du Bz C au Bz D (Beck 1980). Les asso-ciations funéraires ou en dépôts de ce type d’objet renvoient à des datations de la fin du Bz C et du début du Bz D :

– Onstmettingen, Gokeler sép. 4 (Pirling et al. 1980, Taf. 41). Associé à une épingle à collerettes coulée type Allemagne du Sud-Ouest, pendelo-ques en rouelle, discoïde à pointe, bracelets ruba-nés à côtes (Bz C2/D1) ;

– Oberpfaffenhofen (Koschik 1981, Taf. 105/6) comprenant rouelle, pendeloque discoïde à pointe, bracelet pointu torsadé ;

– Schweindorf tumulus 2/1 comprenant une appli-que coniappli-que à deux cercles de pointillés et double perforations diamétralement opposées, épingle à collerettes coulées nord-orientale, cruche estam-pée, etc. (Beck 1980, Abb. 2) ;

– Gärmersdorf, Penkhof, dépôt (Müller-Karpe 1959, p. 147-148, Taf. 153/3) comprenant une applique conique à une rangée de pointillés repoussés et perforations périphériques. Datation du Bz D, mais plusieurs objets ne contrediraient pas une datation du Bz C (cône, bracelet, épingle, hache bohémienne, lame d’épée) ;

– Aesch, Känelacker, dépôt (Fischer 1997, Taf. 58/368) (Bz D).

2.4.7 Les bracelets

Deux fragments de bracelets sont difficilement attri-buables à un type précis. Le fragment de ruban à cinq côtes longitudinales appartient à la famille des bra-celets côtelés à extrémités rétrécies (fig. 5.11). Seule la côte centrale est ici ornée de hachures. Il est dif-ficile d’attribuer ce fragment à une des nombreuses variantes d’un type largement répandu au Bronze moyen et récent. Un autre fragment, aplati et martelé, appartient à un bracelet à section triangulaire mince décoré de motifs incisés en X alternant avec des grou-pes de trois incisions transversales. Cet exemplaire incomplet se rattache plus vraisemblablement à un type de bracelets qui se développe sous de multiples variantes à partir du Bronze final.

3 Synthèse

3.1 Chronologie

Une première évaluation typochronologique des objets caractéristiques fournit une fourchette de comparaisons comprise entre la fin du Bz C (épin-gle, applique, hache à talon, éléments de ceinture) et la phase initiale du Bronze final (Bz D1) (hache à ailerons médians, faucilles à languette). L’associa-tion de cet ensemble d’objets suggère une certaine

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homogénéité et peut être rapprochée de plusieurs dépôts de cet horizon. Parmi ceux-ci, le dépôt de Aesch-Känelacker distant d’une douzaine de kilomè-tres (Fischer 1997, Taf. 57-58, n° 360 à 369) associe à un lot de lingots plano-convexes la hache à aile-rons médians, des fragments de faucilles, un cône en tôle de bronze et un fragment de jambière ; celui de Gärmersdorf-Penkhof comprend un important lot de fragments de faucille, quelques fragments de haches et d’armes, une épingle, un cône de tôle de bronze et un fragment de bracelet (Stein 1976, Taf. 97-107).

Le dépôt 1 de Biederthal se distingue, par contre, des dépôts de l’horizon de Publy, Cannes-Éclu-ses 1, Villethierry, Stockheim, caractérisés par leur fort taux de fragmentation et l’association d’objets appartenant à la fin du Bronze D (Bz D2) et au Ha A1. Une datation de son enfouissement au tout début du Bronze final peut être retenue suivant ces critères.