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Même si le savoir-faire culinaire fait l’objet d’une transmission générationnelle pour une majorité de Français (62 %), 22% seulement des répondants estiment en avoir bénéficié et 52% des Français considèrent qu’ils font moins bien la cuisine que leurs parents ne le faisaient lorsqu’ils étaient enfants . 68

Qu’à cela ne tienne, la transmission de ce savoir-faire a trouvé une nouvelle voie. De nombreuses initiatives abordent le patrimoine gastronomique sous l’angle du bien manger en encourageant la transmission du savoir-faire culinaire entre générations.

L’intention est de réintroduire les modèles alimentaires des grands-parents dans la vie des plus petits. Car renouer avec le caractère social d’un repas, c’est avant tout une solution efficace pour garantir et pérenniser les acquis des pratiques culinaires.

1.4.1. La montée des évènements, partout et pour toutes les

générations

1.4.1.1. Fêtes, festivals, foires, banquets, pique-niques, de quoi faire son marché ! Pour perpétuer le repas comme vecteur de plaisir, de communication et de partage, la convivialité au service des idées et de la découverte de la cuisine et des produits, les évènements autour de la gastronomie pullulent.

Des milliers d’événements sont référencés chaque année partout en France, pour saluer, valoriser, partager, vivre pleinement la gastronomie française, pour découvrir toutes les étapes, de la terre à l'assiette, connaître tous les produits, les acteurs, les métiers, vivre des expériences inédites. Les fêtes, foires, marchés, festivals consacrés à la gastronomie sont très nombreux et participent fortement à l’animation des territoires. Evènements professionnels ou destinés au grand public comme les foires aux vins ou les salons thématiques, certains d’entre eux ont acquis une notoriété internationale.

Dégustations ou mises en pratique, les événements proposent des satisfaire à tous les goûts :

- Festival Taste of Paris (marché gourmand)

- Festival Omnivore (autour de master class, de démonstrations consacrées à l'avant- garde avec les projets de nouveaux entrepreneurs et des pistes de développement

Fischler, L’Homnivore, Sur les fondamentaux de la biologie et de la philosophie, Éditions Odile Jacob, 2001

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SciDev.Net est la première source mondiale d'informations fiables et faisant autorité, d'opinions et d'analyses sur les

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informations relatives à la science et à la technologie pour le développement mondial. Basée à Londres, la structure dispose d'un réseau mondial d'utilisateurs, de conseillers, de consultants et de journalistes indépendants enregistrés, issus principalement des pays en développement. Source site Web : http://www.scidev.net/afrique-sub-saharienne/nutrition/ actualites/le-b-nin-se-dote-d-un-guide-alimentaire.html

Guide de l’alimentation élaboré en 2002 par un groupe de travail mis en place par l’Agence française de sécurité sanitaire

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des aliments (AFSSA), présenté au Conseil national de l’alimentation et validé par trois comités d’experts, de l’AFSSA, de la Direction générale de la santé et du PNNS. Source site Web : https://www.anses.fr/fr

Enquête Ipsos/Logica Business Consulting réalisée pour Cuisines en Fête, “Les Français et la cuisine“, 2011. Source site

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durable)

- “Goût de France/Good France” (s’inspirant d’Auguste Escoffier qui initiait en 1912 “les Dîners d’Épicure” , reprend cette belle idée avec la volonté d’associer des 69

restaurants aux quatre coins du monde) - Fête de la Gastronomie

- Sirha (Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation, considéré comme un révélateur de tendances)

- Semaine du Goût (événement référent de la transmission et de l’éducation au goût pour le plus grand nombre, qui favorise les rencontres entre professionnels de la terre à l’assiette avec le grand public et les publics cibles partout en France pour sauvegarder la culture des patrimoines culinaires et le bien manger)

- Note à Note (concours organisé par l’AgroParisTech sur les meilleurs recettes de la cuisine moléculaire), etc.

À la longue liste des médiations de l’alimentaire et du repas, nous pouvons ajouter les campagnes gouvernementales et européennes, les livres, blogs et conférences, la radio et la télévision (émissions culinaires, magazines touristiques, fictions...), le cinéma, la publicité, les fêtes et les happenings gastronomiques, la peinture, le patrimoine (musées, expositions, bibliothèques et le patrimoine immatériel)… jusqu’aux jeux vidéos.

Parallèlement, on peut s’interroger sur les formes que prend le discours gastronomique dans les médias et la manière dont ces derniers parlent de nourriture, d’alimentation et de cuisine.

1.4.1.2. La cantine, lieu d’initiation aux goûts et de transmission de la culture alimentaire française

Dans un rapport du Sénat sur la transmission culturelle de l’identité culinaire ,70 nous pouvons lire que “l’une des inquiétudes de la société française est le risque d'un envahissement progressif de notre modèle alimentaire par une “mal bouffe” uniformisée dont les chefs de file traditionnellement cités sont deux marques provenant d'outre- Atlantique”. Pour relativiser ce risque, ce rapport met en avant l’importance du maintien d'une transmission culturelle des liens avec l’alimentation.

La Fondation Nestlé France a initié, en février 2016, le programme “Ré-enchanter la 71

cantine” dans une dizaine de restaurants scolaires, véritable lieu d’éducation et de 72

transmission. Il s’agit de la première étude scientifique sur l’environnement du passer à table, dans les restaurants scolaires.

Pour Claude Fischler, sociologue, directeur du centre Edgar Morin et membre du Comité d’experts de la Fondation Nestlé France, “le point de départ du raisonnement a été de se dire : est-ce que nous n’avons pas trop privilégié l'approche santé nutrition, au détriment des conditions de la prise alimentaire et donc du plaisir ? La question de l’alimentation et du plaisir pris à l’alimentation n’est pas une affaire de goût, mais d’ouverture à l’expérience partagée, à l’échange”.

Nous l’avons compris : les enjeux nutritionnels futurs reposent principalement sur la transmission, la culture et les comportements alimentaires.

Les dîners d’Épicure : le même menu, le même jour, dans plusieurs villes du monde et pour le plus grand nombre de

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convives

Rapport de l'OPECST n° 267 (2003-2004) de Claude Saunier (Sénateur), fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation

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des choix scientifiques et technologiques, déposé le 14 avril 2004. Chapitre “La transmission culturelle de l’identité culinaire”, page 161. Source site Web : https://www.senat.fr/rap/r03-267/r03-267.html

Pour mieux comprendre les comportements alimentaires et leur influence sur la santé et le bien-être, la Fondation Nestlé

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s’est dotée d’un Comité d’experts, pluridisciplinaire, qui va jouer un rôle prépondérant pour identifier les axes de recherches et identifier les chercheurs que la Fondation décidera de soutenir financièrement. Son président est le sociologue et anthropologue Jean-Pierre Poulain, sociologue et anthropologue. Source site Web : https://fondation.nestle.fr/

Depuis 2014, 4 villes pilotes volontaires et depuis janvier 2015, 8 écoles pilotes et près de 500 jeunes mangeurs de 8 à 11

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1.4.2. Des musées aux lieux d’interprétation

1.4.2.1. La gastronomie, une exception culturelle, riche de notre histoire

De la cuisine classique française qui impose ses codes à travers toute l’Europe à la fin du 17e siècle, en passant par le “Versailles de Louis XV” qui consacre le triomphe de la cuisine française au 18e siècle, jusqu’au 19e siècle bourgeois, l’art culinaire français a longtemps régné en maître.

Conférences dans les musées locaux et nationaux, visites de fabriques dans le secteur des arts de la table, parcours pédagogique et de dégustation, les dispositifs sont de plus en plus nombreux pour découvrir l’immense patrimoine culturel lié à la gastronomie et à son histoire. Pierre Leclercq, historien de la gastronomie, a par exemple lancé un cycle de conférences dégustations sur l'alimentation et la gastronomie, au Préhistomuseum à Flémalle en Belgique. Il invite à un voyage dans le temps : de la Préhistoire au Versailles de Louis XV, en passant par la plus vieille cuisine du monde à la Haute Antiquité, l’époque des Mérovingiens, des Carolingiens, des Byzantins et des Arabes, le Moyen Age, la Renaissance, etc.

En suivant l’évolution de la cuisine à travers les âges, nous percevons les grandes métamorphoses culinaires, qui ont façonné les goûts au cours des siècles. Chaque époque a construit l’image de ses tables et de ses mets, reflet de son identité et de ses idéaux : l’art, à travers les siècles, a conservé ces représentations gastronomiques.

1.4.2.2. Entre routes et musées, les multiples explorations gourmandes

Les premiers guides des 15e et 16e font référence à l’alimentation à travers le monde paysager et agricole. Ce n’est qu’à la période révolutionnaire que les guides touristiques conjuguent tourisme et gastronomie, avec l’essor des moyens de transport et du développement des infrastructures et des institutions touristiques. Le tourisme commence alors à s’envisager comme vecteur de développement économique d’un territoire.

Tourisme et gastronomie, la rencontre de deux plaisirs

Conservatoire, fermes ou maisons, les formes des musées gastronomiques et leur thématique sont multiples. Si nous empruntons les routes gastronomiques, nous sommes amenés à découvrir des lieux hors des sentiers battus. Véritables outils de mise en valeur des territoires, elles permettent d’étaler la fréquentation touristique dans l’espace. Un exemple : plus de 215.000 visiteurs ont été accueillis en 2010 sur les Routes du Comté (fermes découvertes, caves d’affinage, musées fromagers et fruitières, etc) .73

En 1921, avec la publication du Tour de France

gastronomique de Curnonsky, tourisme et recherche du bon

restaurant commencent à aller de pair.

En 2010, lorsque le repas gastronomique à la française est inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité, un hommage fut rendu à ce prince des gastronomes qui contribua grandement à la renommée de l'art culinaire.

Les guides sont alors écrits “pour la route” et invitent aux détours. La gastronomie devient un facteur de découverte d’une région : le tourisme gastronomique est né.

Étude Lancéa Développement pour Atout France, avril 2012

Le tourisme gourmand ou gastronomique, qui se définit par la découverte d'une région à travers des expériences gustatives mettant en valeur le patrimoine gastronomique d’un pays, s’associe très bien avec le tourisme culturel puisque la cuisine et ses produits alimentaires sont reliés à l’histoire d’un pays, à ses particularités régionales, aux goûts caractéristiques de chaque région et au savoir-faire de ses artisans.

Mais comment capter l’attention du touriste durant son séjour, stimuler les sens du touriste pour provoquer son déplacement physique ? En prenant en compte la représentation que le consommateur se fait d’une escapade gourmande. Et ces représentations sont nombreuses.

Selon Hersch Jacobs, de l’université de Ryerson (Toronto, Canada) et Florence Smits, de l'Université de Metz, “le tourisme culinaire se distingue du tourisme gastronomique où la qualité, voire l'excellence, priment, car le touriste culinaire ne cherche pas forcément à bien manger, mais à manger vrai, à saisir l'esprit du lieu à travers les aliments consommés et des activités variées” . Le tourisme culinaire est un tourisme de proximité et permet d’aller 74

à la rencontre d’un lieu et des gens qui l’habitent. Par exemple, selon Sandrine Scheffer et Jérôme Piriou de l’Université d’Angers, il apparaît que “si les touristes ne viennent pas (pour la majorité d’entre eux) explicitement en Normandie pour en découvrir la gastronomie, ils viennent avec cette image du bien vivre et du bien manger” . 75

L’alimentation fait partie intégrante de la pratique touristique, de la découverte de l’autre et de l’ailleurs. Goûter les productions locales répond à la quête de ce qui fait l’originalité des régions traversées. Autant de ressources patrimoniales valorisables en raison de leur charge identitaire, de leur réalité économique et d’une demande croissante des touristes/ consommateurs. La gastronomie et les activités qui lui sont liées (produits du terroir et artisanaux, arts de la table, promotion des produits frais et bio, savoir-faire régionaux, festivités) constituent la première source de retombées économiques du tourisme pour les territoires.

1.4.2.3. Les bibliothèques aux fonds gourmands

Au nombre des lieux culturels dédiés aux patrimoines culinaires, les “bibliothèques gourmandes” offrent un éventail des fonds gourmands à travers leurs collections et neuf siècles d’histoire.

Au fil du temps, la littérature gourmande a fait l'objet d'une très grande attention de la part des amateurs de bonne chère comme des bibliophiles et des collectionneurs. De nombreuses bibliothèques possèdent des fonds, souvent régionaux, consacrés à l'art culinaire, à l'œnologie et aux arts de la table.

Ces collections permettent de mieux comprendre les rapports entre l'homme et son alimentation, ce qui rapproche ou sépare l'alimentation de la gastronomie, les représentations du bon et du bien manger, le patrimoine et l'authenticité, le terroir et les identités alimentaires. Il y a autant d'imaginaires que de questions alimentaires et gastronomiques . 76

Jacobs et Smits, “Le tourisme culinaire : un fort marqueur territorial. L’exemple du Canada”, Actes des 6e Rencontres de

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Mâcon Tourismes et territoires, 13-15 sept. 2007 (https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2012-6-page-114.htm) Sandrine Scheffer (maître de conférences en géographie à l'Université d'Angers, responsable du programme PSDR

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LIPROCO liens producteurs consommateurs) et Jérôme Piriou (Enseignant-chercheur, Groupe Sup de Co La Rochelle). Étude “La Gastronomie dans la promotion d’une destination touristique : de l’image aux lieux de pratiques (analyse comparée de la Normandie et de la Bretagne)”. XLVIe colloque ASRDLF, Entre projets locaux de développement et globalisation de l’économie: quels déséquilibres pour les espaces régionaux. Vol. 6. No. 8. 2009.

Sophie Danis “Bibliothèques gourmandes”. Bulletin des bibliothèques de France (BBF),1995, n° 1, p. 83-84.