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CHAPITRE III. STRATEGIE DE MISE EN ŒUVRE ET RESULTATS ATTENDUS DU MDP

III.7. Transactions et évolution des prix des crédits-carbone dans le MDP

La mise en œuvre d’activités de projets du MDP a toujours suivi la loi de l’offre et de la demande, tout en privilégiant les pays et secteurs où les réductions sont les moins chères et les plus faciles à mettre en œuvre. Depuis le développement du marché du MDP, la demande en crédits-carbone a connu une forte augmentation jusqu’en 2007, comme on l’a souligné précédemment (sous-section I.4.6), tandis qu’à partir de l’année 2008 il y a eu une forte contraction généralisée du marché des crédits-carbone issus du MDP (Capoor & Ambrosi, 2009 ; Kossoy & Ambrosi, 2010) , comme le montrent le tableau 15 et la figure 13.

Tableau 15 : Evolution du marché de carbone : volumes et valeurs de 2007 à 2009

Marché 2007 2008 2009 Volume (MtCO2e) Valeur (Millions $) Volume (MtCO2e) Valeur (Millions $) Volume (MtCO2e) Valeur (Millions $)

Transactions basées sur des projets

MDP (marché primaire) 552 7,426 404 6,511 211 2,678

Mise en œuvre conjointe (MOC) 41 499 25 367 26 354

Marché volontaire 42 265 57 419 46 338

Sous total 1 634 8,190 486 7,297 283 3,370

MDP (marché secondaire)

Sous total 2 240 5,451 1,072 26,277 1,055 17,543

Marchés des allocations26

EU ETS 2,061 50,097 3,063 100,526 6,326 118,474 NSW 25 224 31 183 34 117 CCX 23 72 69 309 41 50 RGGI na Na 62 276 805 2,179 AAUs na Na 23 276 155 2,003 Sous total 3 2,109 50,394 3,278 101,492 7,362 122,822

Total, tous les marchés 2,983 64,035 4,836 135,066 8,700 143,735

Source : Adapté de Capoor & Ambrosi, 2009 ; Kossoy & Ambrosi, 2010 (World Bank).

Les raisons qui expliquent cette diminution drastique peuvent être analysées sous deux angles. D’une part, il y a la concurrence entre les crédits-carbone issus des activités de projets du MDP et les crédits-carbone des unités de quantité attribuées (UQA) dont les

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EU ETS: European Union Emission Trading Scheme; NSW: New South Wales Greenhouse Gas Abatement Scheme; CCX: Chicago Climate Exchange; RGGI: Regional Greenhouse Gas Initiative; AAUs: Assigned Amount Units.

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premières transactions significatives ont eu lieu au cours de l’année 2008 (Capoor & Ambrosi, 2009). D’autre part, il y a l'impact de la crise économique et financière mondiale qui a occasionné une réduction de l’activité industrielle, ce qui conduit à ralentir l'urgence des délais réglementaires de conformité pour les pays industrialisés. Compte tenu de ces développements, il semble aussi probable que l’incertitude sur le rôle de crédits-carbone résultant des activités de projets du MDP dans un accord post-2012, qui prend de plus en plus de retard, conduit aussi au ralentissement de la prise d’engagements dans la mise en œuvre d’activités de projets à long terme dans le marché du MDP.

Du côté sectoriel, la figure 14 indique que les secteurs substantiels en termes de réductions d’émissions de GES (essentiellement les secteurs industriels) ont largement dominé les transactions de crédits-carbone, surtout dans les années 2005-2006. Mais par la suite, ils n’ont pas réussi à maintenir leur suprématie sur le marché. Etant devenus rares depuis 2007, les acheteurs ont choisi de s’orienter vers d’autres secteurs qui offrent de meilleures opportunités de marché, en l’occurrence le secteur des énergies renouvelables et le secteur de l’efficacité énergétique qui ont par la suite dominé le marché du carbone depuis 2007.

Figure 13 : Transactions des crédits-carbone de différents mécanismes de projets (MtCO2e)

Source: Capoor & Ambrosi, 2009 (World Bank).

Figure 14 : Transactions annuelles des crédits-carbone par secteur (MtCO2e)

Source: Kossoy & Ambrosi, 2010 (World Bank).

Du côté des pays hôtes, et donc fournisseurs de crédits-carbone, la figure 15 montre que les pays émergents d’Asie et d’Amérique latine constituent de grands acteurs du marché, la Chine restant toujours le leader dans ce marché et ayant toujours conservé la part du lion dans les transactions carbone malgré la contraction progressive du marché, ce qui implique en partie la difficulté de pouvoir trouver des milieux d’affaires aussi favorables dans d’autres pays en la matière. En effet, avec une part de 84 % du marché en 2008, la période 2002-2008 a vu la part de la Chine atteindre 66 % de tous les contrats d'approvisionnement sur le marché du MDP (Capoor & Ambrosi, 2009). La dominance des grands pays émergents dans l’offre des crédits-carbone issus des activités de projets du MDP, quant à elle, reste subordonnée à l’état de leurs économies. A l’image des pays en transition vers l’économie de marché (Russie, Ukraine, Croatie) qui offrent aux investisseurs un bon climat d’affaires dans le domaine de la mise en œuvre conjointe (Fankhauser & Lavric, 2003), ces pays émergents présentent non seulement un potentiel important de réduction de GES (Boyd et

81 al., 2009), mais aussi un bon climat d’investissement en général (Kinda, 2010). Il n’est pas surprenant que des investisseurs préfèrent explorer ces pays qui présentent un risque réduit, avec un retour sur investissement prometteur leur permettant de réaliser des économies d’échelle, par rapport à la situation qui prévaut dans les PMA.

Du côté des acheteurs, la figure 16 montre que les européens dominent toujours le marché avec 80 % des transactions en 2008 (Kossoy & Ambrosi, 2010), et une part importante de près de 40 % de crédits-carbone qui transite sur le marché du Royaume-Uni. Néanmoins, cela ne signifie pas que ce pays est le détenteur de toute cette part de crédits-carbone. En effet, compte tenu du fait que la plupart des acteurs financiers dans le système SCEQE opèrent via le Royaume-Uni, indépendamment de leur nationalité, le pays semble être le grand acheteur, alors qu’en réalité tous ces crédits-carbone finissent par être transmis aux différents utilisateurs finaux dans toute l’Europe (Kossoy & Ambrosi, 2010). En outre, comme on l’a rappelé précédemment (sous-section III.4.4), le Royaume-Uni reste le leader dans l’octroi des lettres de participation aux activités de projets du MDP à différents investisseurs de pays de l’Annexe B. La dominance des pays européens dans les transactions est justifiée en partie par le souci de conformité à leurs engagements. En outre, l’inclusion des crédits-carbone issus du MDP dans le système communautaire d’échange de quotas d’émissions (SCEQE) par la directive 2004/101/CE a aussi augmenté la demande en crédits-carbone pour les opérateurs économiques des pays de l’Europe.

Figure 15 : Transactions annuelles des crédits-carbone par pays hôte (MtCO2e)

Source: Kossoy & Ambrosi, 2010 (World Bank).

Figure 16 : Transactions annuelles des crédits-carbone par acheteur (MtCO2e)

Source: Kossoy & Ambrosi, 2010 (World Bank).

Par ailleurs, cette contraction dans les transactions se répercute inéluctablement sur les prix moyens du carbone. La figure 17, qui montre l’évolution des volumes des transactions et des prix des crédits-carbone, confirme ces tendances. En effet, la forte baisse de la valeur de marché reflète la tendance à la baisse des prix moyens, suivie des mouvements sur le marché secondaire. Le prix moyen des crédits-carbone de tous les contrats signés est passé de 9,1 € en 2010 à 7,9 € en 2011 (Kossoy & Guigon, 2012). Cette situation recommande de stimuler la demande en crédits-carbone sur le marché par des politiques/mesures visant à réformer le processus du MDP (elles sont développées au quatrième chapitre).

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Figure 17 : Evolutions des volumes (MtCO2e) et des prix des crédits-carbone ($/CER) Source: Kossoy & Guigon, 2012 (World Bank).

Cette baisse de prix des crédits-carbone implique une forte augmentation de l’offre en crédits-carbone sur le marché, alors qu’en même temps la demande en crédits-carbone du MDP pour les actifs de conformité (essentiellement pour les pays européens) a également diminué, suite aux différentes raisons susmentionnées. En outre, le rapport sur l’état et les tendances du marché du carbone de la Banque Mondiale (Kossoy & Guigon, 2012) souligne que l’année 2011 a vu une grande quantité de crédits-carbone délivrés par le Conseil Exécutif du MDP, soit un total d’environ 315 MtCO2 contre 130 en 2010 MtCO2.