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CHAPITRE VIII. RESULTATS DES INITIATIVES DE PROMOTION DU MDP EN AFRIQUE

IX.2. Investissement dans le renforcement des capacités

Les faibles résultats enregistrés jusqu’ici peuvent être dus au fait que les actions menées dans le cadre de renforcement de capacités n’ont pas suffisamment tenu compte du niveau des pays hôtes. Elles sont plutôt largement menées au niveau international ou régional. Ainsi, la faible contribution apportée par ces initiatives de renforcement des capacités mérite d’être renforcée en se focalisant plus en amont du problème, c'est-à-dire au niveau des pays hôtes. Pour induire des améliorations dans ce contexte, des actions décidées et/ou réalisées au niveau national/local (pays, secteur ou sous-secteur) restent indispensables. Il est analysé dans cette section les options suivantes : consolidation des Autorités Nationales Désignées, formation des experts nationaux sur les aspects climatiques dont le MDP, partage d’informations et d’expériences acquises dans le domaine du MDP, information et sensibilisation des décideurs locaux et l’établissement d’un Bureau National du MDP dans les pays africains. Cette approche de renforcement des capacités doit couvrir un large éventail de domaines et de décideurs locaux pour tenter de pallier la barrière de faibles/manque de capacités locales en matière du MDP.

IX.2.1. Consolidation des Autorités Nationales Désignées

L’Autorité Nationale Désignée reste le pilier du système du MDP au niveau national (Olivas

et al., 2005). Bien que la plupart des pays d’Afrique aient mis en place les structures en charge du MDP au niveau national (tableau 18), un manque de mesures d’accompagnement subsiste (Ofosu-Ahenkorah, 2007). Avec le cadre de Nairobi qui réitère le renforcement des capacités des Autorités Nationales Désignées, une prise de conscience devient de plus en plus manifeste dans ces pays, surtout avec la mise en place du Forum des Autorités Nationales Désignées. Ainsi, il convient d’effectuer un bon choix de personnes qui doivent faire partie de cette structure nationale et d’identifier leurs secteurs de provenance. Par

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ailleurs, l’Autorité Nationale Désignée a besoin des mécanismes d’accompagnement pour bien assurer ses fonctions. Il s’agit notamment de : un règlement qui régit cette structure afin d’éviter les conflits de compétences, un personnel suffisamment compétent et qualifié, un cahier des charges clairement établi, un budget de fonctionnement ainsi qu’un site Web opérationnel permettant une meilleure communication. Ainsi, chaque pays doit chercher à assurer tous ces besoins pour mieux consolider cette structure nationale en charge du MDP.

En outre, cette structure nationale a besoin de sources de financement à long terme pour son fonctionnement. Ainsi, un pays doit s’efforce à assumer une partie des coûts alloués aux premières activités de son Autorité Nationale Désignée. Par la suite, cette dernière doit établir un système de rémunération pour différents services qu’elle est appelée à offrir (approbation d’activités de projets du MDP), ce qui garantit une forme permanente de financement. Toutefois, il ne faudrait pas que ce système de rémunération entraîne de trop lourdes charges en termes de coûts de transaction, ce qui risque de pénaliser certaines activités de projets potentiellement éligibles. Par ailleurs, dans le cas d’une Autorité Nationale Désignée établie dans un pays où des activités de projets du MDP sont susceptibles de prendre suffisamment de temps pour se développer afin de pouvoir générer des frais pour divers services rendus, le système de rémunération susmentionné devient de plus en plus problématique et l’efficacité de cette structure nationale mise en cause.

Enfin, certains pays ne disposent pas suffisamment de capacités financières pour assurer tous les besoins de leur Autorité Nationale Désignée, d’où la nécessité de soutien stable par une aide extérieure (bilatérale et/ou multilatérale) et au travers de cadres de coopération. C’est spécialement à ce niveau de la consolidation des Autorités Nationales Désignées que l’intervention de l’aide publique au développement (APD) s’avère nécessaire. Pour un bon encadrement de cette structure nationale, les autorités locales (gouvernement) doivent assurer régulièrement des actions de suivi-évaluation de différentes activités de ces structures nationales afin de les rendre de plus en plus opérationnelles et performantes.

IX.2.2. Formation des experts nationaux sur les aspects climatiques dont le MDP

Le manque de (ou les faibles) capacités locales a (ont) été soulevé(es) en tant que barrière à la mise en œuvre d’activités de projets du MDP dans les pays d’Afrique. Or, la prise en compte de la complexité des changements climatiques et les mécanismes connexes, parmi lesquels le MDP, recommande de disposer de ressources humaines bien outillées en la matière, surtout dans les pays africains (PMA) où ce manque de capacités locales se fait de plus en plus sentir (De Gouvello et al., 2008 ; Pfeifer & Stiles, 2008 ; Timilsina et al., 2010). La formation des experts nationaux nécessite le choix judicieux des candidats qui doivent provenir de secteurs diversifiés. Cette formation doit répondre à la nécessité d’une mise en valeur des ressources humaines, contribuant à l’amélioration de la compréhension des aspects relatifs aux changements climatiques dans les communautés. D’après la Commission Economique pour l’Afrique (CEA, 2009), des pays comme la Zambie et le Swaziland

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organisent des formations pour valoriser les capacités dont ils disposent et ont crée un office/comité gouvernemental du MDP pour assurer l’intégration et la prise en compte du mécanisme dans les politiques et les priorités gouvernementales.

Ainsi, les pays africains doivent avoir d’abord cette volonté de renforcer les capacités locales et organiser des études ou stages de perfectionnement pour leurs candidats experts. Ces formations peuvent se dérouler localement, là où les capacités techniques et logistiques le permettent, ou dans d’autres institutions spécialisées à travers le monde. Dans ce contexte, il faut identifier les personnes ressources à porter candidats pour ces formations ainsi que leurs secteurs d’origine. Dans le cas d’une formation locale, l’élaboration des modules de formation reste indispensable. La question qui se pose est celle relative au financement de ces formations. Les pays africains (PMA) ayant des capacités financières limitées, sont obligés d’avoir recours à l’aide de bailleurs de fonds pour un appui technique et/ou financier complémentaire. C’est également à ce niveau que la contribution de l’APD peut être sollicitée. Ces experts nationaux ayant bénéficié de cette formation spécialisée, peuvent également contribuer à améliorer les conditions de travail des populations, surtout dans le secteur de l’agriculture, étant donné la place réservée à ce secteur dans les économies des pays d’Afrique subsaharienne : plus de 30 % du PIB et plus de 60 % de main d’œuvre (Beintema & Stads, 2004 ; World Bank, 2006).

IX.2.3. Partage d’informations et d’expériences acquises dans le domaine du MDP

Le partage d’informations et d’expériences sur le processus du MDP est évoqué au chapitre précédent (section VIII.3). Si cette option est bien exploitée, elle est susceptible d’induire des améliorations dans le processus du marché du MDP en Afrique, en coordination avec d’autres aspects bien sûr. Pour une meilleure exploitation de cette option, tout pays africain doit disposer d’une base de données contenant toutes les informations et données pertinentes sur la situation du MDP dans le pays et d’un site web dédié au MDP. Une fois que la mise en place d’un site Web dédié au MDP est effective, toutes ces informations et données sont désormais libres d’accès à tout public intéressé par le marché du MDP dans le pays (promoteurs, investisseurs, acheteurs, organisations) qui peut les exploiter à des fins utiles. Aussi, pour une meilleure efficacité, une sélection d’informations à partager doit être préalablement effectuée.

En outre, cette option de partage d’informations et d’expériences favorise la coopération Sud-Sud dans la mise en œuvre d’activités de projets du MDP (voir aussi la section IX.6), où des développeurs d’activités de projets de certains pays plus expérimentés (pays émergents) peuvent être intéressés par l’exploitation du marché africain en matière du MDP. Par ailleurs, la mise en service du CDM Bazaar constitue une forte contribution pour le partage d’informations, mais aussi pour l’extension et/ou le renforcement de la visibilité des pays en matière de marché du MDP. Il convient alors que ces pays, essentiellement les PMA, exploitent cette plate-forme à leur disposition pour tenter d’intégrer le marché du MDP.

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IX.2.4. Information et sensibilisation des décideurs locaux

Le manque de connaissances et de sensibilisation sur le processus du MDP est également désigné comme barrière interne à la mise en œuvre d’activités de projets du MDP. Il est donc indispensable d’informer et de sensibiliser les décideurs politiques responsables de la réglementation, de divers secteurs potentiels d’activités de projets du MDP, et du domaine financier sur divers aspects de cette thématique, en particulier ses bénéfices/avantages (opportunités) potentiels : ces derniers sont analysés au douzième chapitre. Ces décideurs locaux influencent d’une manière ou d’une autre le développement des activités de projets du MDP dans leur pays. D’une part, les décideurs politiques informés et sensibilisés peuvent d’initier l’élaboration d’une réglementation favorable aux investissements du MDP. D’autre part, les acteurs du secteur financier, une fois informés et sensibilisés sur la finance carbone, deviennent de moins en moins réticents à fournir des prêts. En effet, cette sensibilisation leur permet d’être plus familiers avec l’évaluation du risque des activités de projets carbone, qu’ils ne le sont actuellement (World Bank, 2010b). En outre, les acteurs de divers secteurs potentiels d’activités de projets du MDP suffisamment informés et sensibilisés peuvent faciliter certaines démarches dans le processus du MDP, notamment l’identification ou l’évaluation du potentiel ou des barrières spécifiques dans chaque secteur.

Ainsi, les modules relatifs à ces activités d’information et de sensibilisation doivent être préalablement bien élaborés mais aussi l’identification des candidats à ces activités doit être bien effectuée. Les séances d’information et de sensibilisation sont organisées sous formes d’ateliers ou de séminaires et animées par du personnel de l’Autorité Nationale Désignée, des membres du Bureau National du MDP et des experts en la matière disposant suffisamment de connaissances sur la thématique. S’il s’avère nécessaire, des experts étrangers peuvent être sollicités pour une contribution complémentaire. On doit cependant veiller à ce que ces ateliers ou séminaires assurent une large couverture de différents décideurs et secteurs impliqués dans ce domaine, ce qui rappelle une bonne identification des candidats susmentionnée.

En outre, ces séances d’information et de sensibilisation nécessitent aussi des moyens techniques et financiers que les pays hôtes ne pourraient couvrir en totalité ni même en partie, d’où encore une fois le recours à l’aide des pays et organismes donateurs. Aussi, il convient d’assurer un suivi régulier de ces programmes d’information et de sensibilisation pour rentabiliser tous les efforts investis et apporter des améliorations chaque fois qu’il sera nécessaire, afin de garantir leur efficacité à moyen et long termes. Certains pays africains, par exemple, dotés de capacités importantes comme l’Afrique du Sud ou l’Egypte, ont mis en place des programmes de sensibilisation au MDP à l’intérieur de leur administration (CEA, 2009), ce qui constitue un bon exemple à suivre.

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IX.2.5. Etablissement d’un Bureau National du MDP41 dans les pays africains

Les capacités institutionnelles nationales constituent un facteur important qui peut favoriser ou freiner la mise en œuvre du MDP dans le pays (CEA, 2009) et, par conséquent, doivent être suffisamment renforcées. Il est aussi indispensable d’établir un Bureau (ou Comité, Conseil) National du MDP, à côté de l’Autorité Nationale Désignée. Ce Bureau National du MDP a pour rôles : de s’assurer que le MDP est globalement intégré dans les politiques et les priorités du gouvernement ; d’informer les autorités administratives, le secteur public et privé sur le MDP et sur ses opportunités ; de sensibiliser les cadres des différentes institutions. D’après la Commission Economique pour l’Afrique (CEA, 2009), certains pays ont consacré d’importantes ressources aux activités du MDP et créé des offices chargés de promouvoir le MDP, qui travaillent de façon indépendante mais en coordination avec l’Autorité Nationale Désignée du MDP.

Ce Bureau National du MDP serait composé d’acteurs des domaines diversifiés (y compris l’administration, le secteur financier, les industriels…) ayant reçu une formation et des informations suffisantes sur ce mécanisme. Ce bureau travaillerait en collaboration avec l’Autorité Nationale Désignée disposant d’informations pertinentes et actualisées sur le MDP au niveau national, régional et international. Il regrouperait notamment des experts nationaux susmentionnés qui peuvent contribuer à l’évaluation du potentiel national d’activités de projets du MDP, et à sensibiliser d’autres acteurs locaux. Le choix des membres de ce Bureau National du MDP doit favoriser la transparence et mettre la priorité sur des compétences.

En outre, pour être plus opérationnel, ce Bureau National a besoin de moyens matériels et financiers, dont le pays ne peut toujours assurer le coût. Pour ce, il faudrait que des personnes ressources proviennent en grande partie de services publics et que le Bureau soit établi au sein d’un ministère public où il pourrait bénéficier de certains avantages relatifs notamment à : l’informatique, la bureautique, la main d’œuvre... afin de limiter les coûts. Mais comme les pays d’Afrique (PMA) restent toujours confrontés à des besoins urgents qui nécessitent aussi des moyens financiers, les pays et organismes donateurs seraient bienvenus pour une contribution en appui technique et financier complémentaire.