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CHAPITRE III. STRATEGIE DE MISE EN ŒUVRE ET RESULTATS ATTENDUS DU MDP

III.9. Forces et faiblesses du Mécanisme pour un Développement Propre

III.9.1. Forces du Mécanisme pour un Développement Propre

Un certain nombre de points positifs (forces) relève de la mise en œuvre d’activités de projets du MDP. Ceux-ci se traduisent d’abord par une contribution à la réduction des émissions de GES dans les pays en développement contribuant à compenser les émissions de GES dans les pays industrialisés, ce qui induit une flexibilité dans la conformité au Protocole de Kyoto pour ces parties de l’Annexe B. Ensuite, les forces du MDP se manifestent par le renforcement des capacités des pays en développement dans le processus des négociations internationales, la contribution à l’innovation technologique et au transfert de technologies et le renforcement de connaissances du potentiel de réduction des émissions de GES. Enfin, le MDP est susceptible de contribuer à la politique mondiale d’adaptation aux changements climatiques et à la promotion des politiques de développement au niveau local.

Contribution à la réduction des émissions de GES dans les pays en développement. Avec la mise en œuvre d’activités de projets dans les pays en développement, le MDP apporte une contribution à la réduction des émissions de GES dans ces pays, ce qui lui confère la capacité de participer à la politique mondiale de lutte contre des changements climatiques. En effet, l’analyse des crédits-carbone attendus des activités de projets du MDP déjà enregistrées (décembre 2011), de même que les crédits-carbone déjà générés à ce jour, montre cette capacité à réduire les émissions de GES dans ces pays en développement. Cette réduction des émissions de GES se monte à plus de 2.144 MtCO2e attendus d’ici 2012, et à 816 MtCO2e déjà délivré (Fenhann, 2012). Ces quantités représentent respectivement 4,3 % et 2,1 % des émissions globales par rapport à 1990 (sous-section III.8.2).

Cet aperçu de chiffres montre que la mise en œuvre d’activités de projets du MDP fait également preuve d’une contribution à la compensation des émissions de GES au niveau global. Elle n’est peut-être pas très importante, mais sans les mécanismes de flexibilité de Kyoto, les émissions auraient continué à augmenter encore plus, jusqu’à atteindre 56 GtCO2e en 2020 (UNEP, 2010), soit une augmentation d’environ 42 % depuis 1990. Ainsi, réduire ces émissions des pourcentages précités vaut mieux que rien et constitue une

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rupture historique, une déconnexion entre croissance économique et émissions de GES qu’on aurait jugé impossible. A cet effet, les émissions de GES de l’Union Européenne (UE-15) ont été réduites de 6,9 % en 2008 par rapport à leurs niveaux de l’année de référence (1990), en même temps que son économie a enregistré une croissance de près de 45 % au cours de la même période (European Commission, 2010).

Contribution à la conformité au Protocole de Kyoto pour les pays de l’Annexe B. L’un des objectifs du MDP (section II.2) est d’aider les pays de l’Annexe B à remplir leurs engagements pris au titre du Protocole de Kyoto. Cela peut passer soit par un financement d’activités de projets qui réduisent des émissions de GES dans les pays en développement, soit par l’achat des crédits-carbone issus de telles activités de projets sur le marché du carbone. Ceci rappelle la contribution du MDP à la compensation des émissions de GES des pays de l’Annexe B (sous-section III.8.2). Dans ce contexte, le rapport de l’Agence Européenne pour l’Environnement (EEA, 2011) sur les progrès accomplis par les pays européens (EU-15) à travers leur objectif pris dans le Protocole de Kyoto (réduction de 8 %) indique que les mécanismes de flexibilité (y compris le MDP) participent (en termes de compensation) ensemble avec d’autres actions domestiques à l’effort dans le respect de cet engagement pour la période 2008-2012. A cette fin, le rapport indique que l’utilisation de ces mécanismes de flexibilité compte pour une contribution de l’ordre de 108 MtCO2e (2,5 %). Par ailleurs, la directive 2004/101/CE (Commission Européenne, 2004) autorise l’utilisation des crédits-carbone issus des mécanismes de projets (CDM/JI) dans le système communautaire (SCEQE). Ainsi, le MDP contribue à la conformité au Protocole du Kyoto en compensant les émissions de GES des pays industrialisés avec engagements (Annexe B), qui disposent désormais d’autres marges de manœuvre, parmi lesquelles ces mécanismes de flexibilités.

Renforcement des capacités des pays en développement dans les négociations. En tant que mécanisme qui associe les pays du Sud dans la lutte contre les changements climatiques, le MDP a donné une impulsion à ces pays pour une participation active dans les négociations internationales sur le climat. En effet, étant donné que ces activités de projets doivent se réaliser dans les pays en développement, ces derniers doivent adopter une position stratégique dans ces négociations pour défendre leurs intérêts. Les conflits d’intérêts qui se matérialisent par des positions très divergentes des pays du Nord et du Sud dans les négociations sur la politique climatique internationale, peuvent illustrer cette situation. Il suffit de se rappeler, par exemple, de ce que l’on a qualifié d’échec de Copenhague (COP15-CMP5) pour s’en convaincre.

Contribution à l’innovation technologique et au transfert de technologies. Les pays industrialisés auxquels des objectifs contraignants de réduction de leurs émissions de GES ont été assignés doivent faire plus d’efforts dans l’amélioration de leurs politiques de développement pour respecter leurs engagements. Ces politiques impliquent de profonds changements au niveau de leurs procédés industriels dans différentes unités de production et/ou de transformation. Cela suppose un renforcement des capacités de ces pays dans le domaine de recherche-développement (R&D). En outre, ce volet d’innovation technologique doit se retrouver aussi

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dans le contexte de technologies adaptées à utiliser dans la mise en œuvre d’activités de projets du MDP dans le pays en développement pour justifier l’additionnalité technologique. En effet, comme évoquée précédemment (section II.4), l’additionnalité constitue l’un des critères d’éligibilité de toute activité de projet au processus du MDP. Pour rappel, des études confirment ce transfert de technologies dans beaucoup d’activités de projets du MDP (sous-section III.8.3). Par ailleurs, comme ce transfert de technologies implique un transfert des équipements et du savoir-faire (Seres et al., 2009), ce dernier peut aider les pays bénéficiaires à réduire les dépenses réservées au renforcement des capacités de leurs ressources humaines dans ce domaine.

Renforcement de connaissances du potentiel d’activités de projets du MDP dans les PMA. Depuis la mise en œuvre d’activités de projets du MDP, il a été observé que les principaux pays cibles des réductions d’émissions de GES restent les pays émergents des régions d’Asie et d’Amérique latine (tableau 4). Les secteurs d’actions prioritaires sont les secteurs de l’énergie, de l’industrie et de la gestion des déchets qui présentent un potentiel important de réduction (tableau 3). La situation des pays et secteurs sous-représentés en termes d’activités de projets de réduction des émissions de GES dans le cadre du MDP constitue à la fois une faiblesse de ce mécanisme mais aussi un défi à relever, car une telle situation ne traduit pas nécessairement un manque de potentiel dans des activités de projets du MDP pour ces pays et secteurs sous-représentés.

En effet, une étude de la Banque Mondiale (De Gouvello et al., 2008) a révélé le potentiel de plus de 3.240 projets dans 44 pays de l’Afrique subsaharienne (région qui compte plus de PMA), essentiellement dans le secteur de l’énergie, permettant des réductions potentielles d’émissions annuelles de GES de plus de 740 MtCO2e. Dans ce même contexte, une autre étude a été réalisée dans onze PMA d’Afrique27 (Arens et al., 2011), sur les options possibles susceptibles de favoriser l’accès de ces pays au financement carbone dans le cadre des activités de projets du MDP. D’après cette étude, un potentiel de réductions d’émissions de GES de l’ordre de 128,6 MtCO2e/an a été évalué dans les secteurs incluant principalement l’énergie (renouvelables, efficacité), la gestion des déchets, les transports. Les détails sur les résultats de ces études sont développés au sixième chapitre.

Contribution à la politique mondiale d’adaptation aux changements climatiques. Dans le contexte des changements climatiques, le concept d’adaptation fait référence aux initiatives et mesures individuelles ou collectives (entreprises, associations, collectivités…) prises pour réduire la vulnérabilité des systèmes naturels et humains contre les effets réels ou attendus des changements climatiques (GIEC, 2007). C’est dans ce contexte qu’est née l’idée de mettre en place des Fonds destinés à l’adaptation aux changements climatiques, parmi lesquels le Fonds pour l’Adaptation, créé lors de la COP7 tenue en 2001 à Marrakech (décision 10/CP.7). Ce dernier n’est fonctionnel que depuis 2009 et constitue un mécanisme financier du Protocole de Kyoto. Il a pour objectif le financement des projets et programmes

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d’adaptation entrepris dans les pays en développement, Parties au Protocole de Kyoto, et à leur initiative (décision 1/CP.13). Ce Fonds est financé essentiellement par la part du produit des activités de projets du MDP (2 % des URCE issues de toute activité de projet enregistrée au titre du MDP), et dans une moindre mesure par des engagements volontaires des gouvernements et des ONG (O’Sullivan et al., 2011). Avec juin 2012, le solde net des ressources dont le Fonds pour l’Adaptation dispose s’établissait à 285,50 millions de dollars28 (base de données de Climate Funds Update, juin 2012).

Cette somme reste largement insuffisante pour couvrir les besoins en matière d’adaptation des pays en développement. En effet, dans le cadre de l’Accord de Copenhague, il a été proposé des contributions des pays développés destinées à l’adaptation (30 milliards de dollars pour la période 2010-2012 et 100 milliards de dollars par an d’ici 2020) issues de l’engagement collectif de ces pays (décision 2/CP.15). Ces montants proposés indiquent que les besoins en matière d’adaptation restent énormes. Mais il reste à savoir si ces montants seront disponibles en temps voulu sans qu’une décision contraignante pour ces pays ne soit prise. Compte tenu du nombre de crédits-carbone déjà générés par les activités de projets du MDP (décembre 2011) qui sont près de 816 MtCO2e (Fenhann, 2012), la part destinée au Fonds pour l’Adaptation représente un peu plus de 16 MtCO2e.

Si l’on considère les crédits d’émissions attendus pour 2012, soit environ 2,7 milliards de tCO2e (Fenhann, 2012), il y a environ 54 MtCO2e destinées au Fonds pour l’Adaptation. Si l’on suppose un prix moyen compris entre 15 et 20 $/tCO2e, les fonds s’évaluent entre 800 millions et un milliard de dollars en 2012. Ainsi, avec ce potentiel de crédits d’émissions de GES et cette faculté d’alimenter le Fonds pour l’Adaptation, le MDP apporte une petite contribution à la politique mondiale d’adaptation aux changements climatiques. Même si cette contribution est à considérer comme une "goutte d’eau dans un océan", on peut tout de même penser que c’est sur base de l’évaluation des besoins et des faibles capacités des différents Fonds d’adaptation, qu’il a été proposé les contributions susmentionnées.

Contribution à la promotion des politiques de développement au niveau local. Le rôle des pays hôtes dans le processus du MDP consiste, entre autres, à définir des critères objectifs pour l’évaluation de la contribution au développement durable par les activités de projets du MDP dans leur contexte national, par le biais des Autorités Nationales Désignées, et à s’assurer que ces critères sont conformes aux priorités de développement du pays et aux lois nationales existantes (Olivas et al., 2005). La définition de critères objectifs a un effet multiplicateur au niveau de l’élaboration des politiques de développement au niveau du pays dans son ensemble. En effet, il peut y avoir une incitation pour les gouvernements

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Il existe trois autres Fonds dédiés à l’adaptation, intervenus avant le Fonds Vert pour le Climat décidé à Copenhague. Le Fonds spécial pour les changements climatiques (2001) établi en vertu de la CCNUCC pour financer et mettre en œuvre des activités, programmes et mesures relatifs aux changements climatiques. Le Fonds pour les pays les moins avancés (2001) établi également en vertu de la CCNUCC et destiné à répondre aux besoins urgents et immédiats des PMA tout en les aidant à préparer et à mettre en œuvre les programmes d’action nationaux d’adaptation (PANA) . Le Programme pilote pour la résilience climatique (2008) créé en dehors de la CCNUCC et du Protocole de Kyoto afin d’aider les pays en développement à intégrer la résilience aux chocs climatiques dans leur planification du développement. En juin 2012 ces trois Fonds disposaient respectivement 170,65 M$, 368,44 M$ et 807,54 M$ (base de données de Climate Funds Update : 12 juin 2012) ; ce qui fait un total de 1.605,13 M$ pour les quatre sources de financement de l’adaptation.

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soucieux de participer au processus du MDP à élaborer et/ou à mettre à jour certains instruments environnementaux et de planification du développement qui serviront de base pour le choix de ces critères d’évaluation des activités de projets.

C’est ainsi, par exemple, que certains documents peuvent être élaborés et/ou mis à jour. On peut citer entre autres : la stratégie nationale de développement durable, l’Agenda 21 national/local, la stratégie nationale de l’environnement, la stratégie nationale du MDP, la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, la stratégie nationale de planification et d’autres instruments pertinents pour l’environnement et le développement. Par ailleurs, l’élaboration et/ou la mise à jour de ces différents instruments peut aider ces pays non seulement dans le domaine des activités de projets du MDP, mais aussi dans d’autres projets de développement (projets conventionnels) nécessitant l’intervention de ces instruments, même si des activités de projets du MDP ne sont pas mises en œuvre.