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TOULLIER : jusnaturalisme et idéalisme

Inscrit dans la même ligne, Charles-Bonaventure-Marie TOULLIER (1752-1835) maintient, sinon creuse davantage, le même écart conceptuel. S’il cite également le fragment

de HERMOGENIEN qui rapporte tous les droits aux hommes (D. 1, 5, 2)266, et si son

interprétation de ce texte fait pressentir son soutien au discours de droits de l’homme, le doyen de Rennes tranche sans équivoque l’homme de la personne. Il est vrai que l’on lui reconnaît l’originalité d’incorporer la liberté individuelle et la qualité de citoyen dans les droits « particulièrement attachés aux personnes », car il n’est, évidemment, pas d’usage de mettre celles-là à côté des deux exemples plus traditionnels, à savoir la légitimité et le droit de puissance paternelle267. Ces droits-là sont, selon le jurisconsulte, appelés « droits des

personnes ». Sans allusion faite aux droits de l’homme ni à la notion du XXe siècle de droits

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Pourtant, la citation est inexacte, ou bien, il ne s’agit que d’une paraphrase. Tandis que le texte romain donne « cum igitur hominum causa omne ius constitutum », l’on lit dans l’ouvrage de TOULLIER : « Omne ius personarum causâ constitutum est ». Charles-Bonaventure-Marie TOULLIER. Le Droit civil français suivant l’ordre du Code. 5e éd. 21 tomes, t. 2. Paris : Renouard, 1830, p. 132, n° 167. Voir aussi la note 102 ci-dessus.

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Ibid. p. 132-133, n° 167. La première édition de cet ouvrage date de 1811, et les rééditions, moins accessibles à cause de perte ou de la fragilité d’exemplaires, ne subissent que peu de changements de la part de TOULLIER. La pagination reste presque identique malgré les changements de maison d’édition successifs.

de la personnalité268, le plan de TOULLIER fait plutôt penser aux « iura personarum » de

droit romain, auxquels il oppose les « droits des choses ». A partir de cette opposition, il étale toute une série d’arguments fort traditionnels qui s’attaquent précisément aux différences entre « personne » et « homme ». Le caractère traditionnel s’incarne, nous allons le voir, en la multiplicité et la variété des personnes sur lesquelles TOULLIER insiste à maintes reprises.

Cependant, ce professeur de la faculté de Rennes ne remonte pas jusqu’à l’Antiquité. Sa référence principale est constituée par des grandes autorités proches de son époque, parmi lesquelles peut-on citer le nom de Christian WOLFF et d’A. D. d’AUTESERRE (HAUTESERRE ou ALTESERRA, 1602-1682), canoniste toulousain. A la différence des autres professeurs de droit contemporains, Il nous transmet la pensée de l’auteur allemand concernant la notion de personne. La caractéristique principale de cette pensée, c’est son idéalisme à l’égard de notre mot en question, à savoir persona. Cela veut dire qu’il refuse de fonder persona sur le moindre support réel et de réduire l’idée de persona en substance quelconque. Persona est, demeure et ne cesse jamais d’être une idée, comme le sont, disons-nous, toutes les notions juridiques.

Comme tous les autres civilistes de son époque, TOULLIER n’hésite point à écarter l’homme de la personne. « En jurisprudence », dit-il, au sens général du terme, « un homme et une personne ne sont point des termes synonymes ». Il définit successivement les deux termes : « Un homme est tout être humain, soit qu’il soit ou non membre de la société, quel que soit le rang qu’il y tienne, quels que soient son âge, son sexe, etc. ». En revanche, « une personne est un homme considéré suivant le rang qu’il tient dans la société, avec tous les droits que lui donne la place qu’il y remplit, et les devoirs qu’elle lui impose ; ainsi, quand on parle du droit des personnes, l’on ne considère dans l’homme que son état, que le personnage

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qu’il joue dans la société, abstraction faite de l’individu ». Le jurisconsulte raconte ensuite l’étymologie du mot « personne », en en rappelant le sens originel de masque et l’usage technique de faciliter le retentissement de la voix, « vox personabat ». Le masque désigne plus tard le rôle que représente son porteur. C’est, précise TOULLIER, « dans ce sens de personnage ou de rôle que le mot persona est employé en jurisprudence, par opposition au mot homme, homo. Quand on dit une personne, l’on ne considère que l’état de l’homme, que le rôle qu’il joue dans la société, abstraction faite de l’individu ». De là, il parvient à mettre en relation, non pas l’homme et la personne, mais l’état et la personne : « Etat et personne sont donc deux termes corrélatifs »269, ce qui est précisément la conclusion partagée par presque

tous les civilistes majeurs de l’époque, à l’instar de LOCRE et de PROUDHON que nous venons de voir.

TOULLIER évoque une autre caractéristique traditionnellement reconnue au sujet des personnes, à savoir leur variété. A cet effet, il a recours, comme le fait également DELVINCOURT, au chancelier D’AGUESSEAU pour montrer le lieu commun de la magistrature française à l’égard des questions d’état corrélatives, comme l’a dit le jurisconsulte rennais, aux questions de personne270. La variété se démontre par la façon même

d’en parler : l’on ne prend pas soin de systématiser ces questions pourtant fort diverses. Au contraire, l’on se contente d’envisager cette vaste gamme de problèmes en deux positions principales, l’une de droit public et l’autre de droit privé. Ces questions d’état ne consistent qu’à savoir si untel ou untel est capable ou incapable à participer à une opération juridique donnée. Par ailleurs, il faut faire attention au fait que cette distinction ne s’entend pas dans le sens de ce que nous apprennent nos manuels de droit. Il faut, au contraire, penser au sens

269

Ibid. p. 133-134, n° 167.

270

Claude-Etienne DELVINCOURT. Cours de Code Napoléon. 2 tomes, t. 1. Paris : Gueffier, 1813, p. 304. Claude-Etienne DELVINCOURT. Cours de Code Napoléon. 3 tomes, t. 1. Paris : Lebégue, 1819, p. 207. TOULLIER. Droit civil. p. 137-141, n° 173-179.

romain, c’est-à-dire droit privé au sens de droit particulier, tel que TOULLIER l’écrit lui-même. Les exemples qu’il donne ensuite mettent en évidence la signification employée en l’occurrence. « Pour commencer par le droit public », dit le jurisconsulte, « c’est par exemple une question d’état de savoir si un homme est libre ou esclave, citoyen ou étranger ; parce que, s’il est libre ou citoyen, il est capable de rendre service à sa patrie dans toutes les charges publiques ; si au contraire il est esclave ou étranger, il est exclu par l’une ou l’autre de ces qualités, de toutes les fonctions qui regardent le droit public, et de tous les avantages que la loi n’accorde qu’à ceux qui en ont la participation ». La toute première question du livre « des personnes », notamment celle de savoir s’il quelqu’un est français ou étranger, est ainsi abordée, tout comme la première question en littérature classique, celle de savoir si quelqu’un est libre ou esclave : il n’y a aucun doute que ce genre de question d’état ressort au niveau de droit public. En revanche, « il en est de même à l’égard du droit particulier », terme substituant celui de « privé ». Cette dimension est plus restreinte, dit-il, « comme il se réduit uniquement à régler les engagements et les successions, il faut aussi que les qualités qui déterminent l’état particulier aient un rapport certain avec les engagements et les successions, et qu’elles rendent les hommes capables ou incapables de certains engagements en général, et de certaines successions en général, ou même de toutes sortes d’engagements et de successions »271.

Renvoyant avec justesse les questions d’état et de personne au caput romain et non pas à la persona, TOULLIER reprend les termes de PUFENDORF et de WOLFF que nous avons examinés : « Les personnes, en jurisprudence, sont des êtres moraux ou abstraits ». L’auteur s’appuie sur la formule des Institutions de WOLFF : « Homo persona moralis est, quatenus

spectatur tanquam subiectum certarum obligationum atque iurium certorum », qui signifie

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littéralement, nous le savons déjà, que l’homme est personne morale dans la mesure où l’on le considère en tant que sujet de certaines obligations et de certains droits272. Il est très important

de noter que TOULLIER ne se précipite pas, comme l’auraient fait certains d’entre nous, à exagérer le rapport entre homo et persona. Tout au contraire, ce qu’il souligne, c’est plutôt la nature morale et abstraite des personnes. C’est pour la même raison qu’il développe, ensuite, toute une série de distinctions afin d’éviter le moindre malentendu. Il commence par rappeler qu’à Rome, les personnes publiques que jouent les citoyens romains n’ont rien à voir avec les personnes privées que portent les mêmes individus : « Le même individu », dit-il, « peut être une personne dans l’ordre public, et n’en pas être une dans l’ordre privé. Par exemple, à Rome, le fils de famille qui était dans la puissance de son père, n’était point une personne par rapport au droit privé, mais il était une personne dans ses rapports au droit public ». Il ne s’arrête pas là. « Le même individu », continue TOULLIER, « peut être, dans l’ordre public, une personne supérieure à une personne dont il est inférieur dans l’ordre privé. Tel est encore le fils de famille devenu magistrat. Il commande son père dans tout ce qui concerne les fonctions de la magistrature »273. Il a tout à fait raison, et cela est également soutenu par

plusieurs sources littéraires romaines274.

272

Ibid. p. 143, n° 181. Voir ci-dessus p. 86 et s.

273

Ibid.

274

Angel LATORRE. Sobre la capacidad jurídica de Derecho público del « filius familias ». Estudios Jurídicos en homenaje al Profesor Ursicino Alvarez Suárez. Madrid : Universidad Complutense de Madrid, 1978. L’auteur nous rapporte cinq exemples qui témoignent tous la dualité radicale du statut de filius familias. 1) C. FLAMINIO, démagogue, fut éjecté du tribun plébéien par son père (Cic. de inv. 2.17.52, Val. Max. 5.4.5), ce qui correspond à l’opposition faite par DION DE HALICARNASE entre le faible pouvoir paternel en Grèce et la féroce patria potestas à Rome. Ce pouvoir-ci s’exerce même si le fils est magistrat (Dion. Hal. 2, 26) (p. 252-253). 2) G. SERVILIUS, alors tribunus militum consulari potestate en 419 av. J. C., fut contraint par son père de rester à Rome au lieu de se mettre glorieusement devant la troupe (Liv. 4.45.8) (p. 254). 3.) La mort de Spurio CASSIO, un autre consul « démagogue ». MOMMSEN et d’autres se disputaient s’il subit un iudicium publicum ou bien iudicium privatum de son père (Cic. de rep. 2.35.60, l’avis appuyé par MOMMSEN ; Liv. 2.41.10-11; Dion. VIII, 78-79). Les partisans du jugement privé ne s’objectent pas à l’exercice de la patria potestas (p. 255-256). 4.) Le cas de T. Manlio TORCUATO (Cic. de fin., 1.7.24, Liv. ep. 54, Val. Max. 5.8.3), dans lequel l’on constate l’exercice social de la patria potestas de celui-ci sur l’un de ses fils qui a été adopté par D. SILANO (p. 256). 5.) Quinto Fabio MAXIMO, père, proconsul, s’incline devant son fils, consul. Le protocole exigeait que le proconsul descende de son cheval, et c’est ce que fit MAXIMO père (Val. Max. 2.2.4, Aul. Gel. 2.2) (p. 256-257).

La dualité des personnes en droit public et en droit privé, due à sa nature morale et abstraite, amène le jurisconsulte à cette remarque : « Le même individu peut représenter plusieurs personnes. Il peut être magistrat, père, mari, et exercer tous les droits attachés à ces trois différentes personnes dans l’ordre public et dans l’ordre privé ». En revanche, arrive également le scénario où « plusieurs individus peuvent ne constituer qu’une seule personne. Tels sont les corps politiques, appelés en droit universitates, collegia. Chaque commune, par exemple, forme un corps politique, qui n’est considéré que comme une seule personne. Il en est de même de tous les établissements publics »275. Cela veut dire que le nombre de

personnes et le nombre d’individus sont parfaitement indépendants l’un de l’autre. La singularité d’individu n’entraîne pas nécessairement la singularité de personne, et vice versa. Il en est de même en cas de pluralité.

TOULLIER va jusqu’au bout de sa conception de personne en ajoutant, in fine, que « les personnes sont, en jurisprudence, tellement considérées abstraction faite des individus, qu’il y a des personnes qui ne meurent point et qui continuent d’exister, quoique les individus qui les représentaient soient morts ». Le jurisconsulte renforce son propos par plusieurs exemples : Ni le roi, « la première personne de l’Etat », ni le magistrat ne meurt jamais, puisque, nous renvoyant à HAUTESERRE, « dignitas non moritur ». Si celles-là relèvent du droit public, il en est de même dans l’ordre privé, où « la personne du corps politique ne meurt jamais ». « Elle continue », dit-il, « d’exister, quand même il serait réduit à un seul individu, quand même tous les individus qui le composaient d’abord seraient décédés et remplacés par d’autres ; c’est toujours la même personne, jusqu’à ce que le corps soit détruit par l’autorité qui lui avait donné l’existence », ce qui paraphrase une loi romaine, notamment

D. 3, 4, 7, 2 attribué à ULPIEN : « In decurionibus vel aliis universitatibus nihil refert, utrum

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omnes idem maneant an pars maneat vel omnes immutati sint, sed si universitas ad unum redit, magis admittitur posse eum convenire et conveniri, cum ius omnium in unum recciderit et stet nomen universitatis »276. Si les personnes peuvent survivre aux individus qui les représentent, il n’en est pas moins inversement : « La personne peut », dit le doyen, « être morte, quoique l’individu qui la représentait soit vivant. Par exemple, lorsque le mariage était dissous par le divorce, le mari était mort, l’homme était vivant. Dans l’ordre public, toutes les fois qu’une dignité est supprimée, la personne du dignitaire est morte, l’individu est vivant ». Il y figure un exemple non introduit pas dans la première édition de 1812 : « L’empereur est mort, il est mort pour toujours ; Napoléon BONAPARTE est vivant ». En bref, l’écart entre les personnes et les hommes est tel que « l’homme peut exister après la mort de la personne, et la personne après la mort de l’homme »277.

Outre ses remarques historiques et conceptuelles, TOULLIER établit une liste de personnes assez détaillée. Cette liste se découpe en deux parties, l’une de droit public et l’autre de droit privé. Les personnes publiques sont, selon le jurisconsulte, « celles qui exercent une fonction publique, soit qu’elles participent ou non à l’exercice de la puissance publique ». En revanche, « les personnes privées sont celles qui n’exercent aucune fonctions publiques, mais qui ont des droits ou des devoirs particuliers »278. Parmi les personnes

publiques, le professeur de droit énumère celles-ci : « Roi, la famille royale, la Chambre des pairs, la Chambre des députés, la Cour de cassations, les Cours royales, les tribunaux de première instance et les juges de paix, les collèges électoraux, les préfets, sous-préfets, conseils de préfecture, maires, etc., les conseils généraux de département et de commune, l’armée de terre et de mer, l’état militaire, les tribunaux militaires, la Légion d’honneur, les

276

Ibid. p. 144, n° 183.Ce fragment d’ULPIEN se trouve, nous aurons l’occasion de le voir, au centre de la grande polémique dans laquelle l’on demande si la nature de l’universitas est fictive ou réelle.

277

Ibid.

278

citoyens, le clergé, les corps enseignans et les personnes chargées de l’instruction publiques… ». Quant aux personnes privées, elles constituent une liste encore plus longue : ce sont celles visées par une série de distinctions dont quelques-unes ont été rencontrées chez POTHIER. L’on distingue donc les personnes privées en homme et femme par le sexe, en mineur et majeur par l’âge, etc. Outre ces deux critères, TOULLIER en avance cinq de plus, y compris l’état de famille, la puberté, la nationalité, l’état de liberté et d’esclavage et, enfin le dernier qui est « réduit à un vain nom », l’état de noblesse ou de plèbe279.

Fort de cette richesse exceptionnelle, nous pouvons tirer du travail de TOULLIER deux points fondamentaux.

Ce qu’il faut d’emblée souligner, c’est son idéalisme hérité de quelques grands auteurs dont WOLFF par excellence. Il ne s’agit pas de n’importe quel idéalisme, mais de la nature des catégories juridiques, en l’occurrence, de la nature de « personne ». Ce courant idéaliste que représente TOULLIER creuse une fosse si grande entre le réel et l’idéal, de sorte que les usages du mot « personne » sont nettement indépendants des usages du mot « homme ». Sous-entendant la possibilité de leur confusion, le jurisconsulte prend soin de mettre en relief le fait qu’en langage du droit, l’on n’évoque pas de la même façon les deux bons mots. Pour le dire de façon grammaticale, non seulement « personne » et « homme » ne sont pas des termes synonymes, mais ils ne s’accordent pas non plus l’un avec l’autre ni en genre ni en nombre. Il n’y a, chez le doyen TOULLIER, pas de fondement du moindre accord, car le terme « personne » s’emploie de façon circonstancielle et le terme « homme » de façon générique. Il admet ouvertement qu’une personne peut dédoubler une autre personne, s’éteindre à l’issue d’une certaine relation juridique, ou bien ne pas mourir malgré toute vicissitude mondaine. Rien de cela ne vaut pour les « hommes » pris au sens de TOULLIER

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lui-même. Autrement dit, les hommes ne sont ni multipliables, ni immortels, ni mutables en fonction de circonstance. En bref, c’est une notion d’ordre empirique d’homme qui ne doit pas se confondre avec la notion de personne qui est d’ordre idéal.

Cependant et deuxièmement, l’on ne saurait négliger que TOULLIER définit quand même « personne » par « homme ». Les « personnes » sont des « états » de l’homme. Il convient de préciser que ce professeur titulaire est sympathisant de quelques idées révolutionnaires, spécifiquement celle de droits de l’homme. Son texte prouve sans équivoque qu’il souscrit, dans une large mesure, au jusnaturalisme diffusé à son époque. Il adhère à une certaine idée de droit qui est presque inhérent à l’Homme même s’il est en état de nature, où, pour ainsi dire, par hypothèse, la Loi n’existe pas. Bien que sa définition de personne insiste sur l’aspect juridique de l’homme vivant en société, il reconnaît tout de même certains droits à ceux qui ne vivent pas comme membres de société. C’est ce que le doyen de la faculté de Rennes explicite au sujet des « droits absolus de l’homme». Par ce terme-là, dit-il, « j’entends ici ceux qui sont tels dans le sens primitif et le plus étroit, ceux qu’il tient de la nature, ceux dont il jouissait dans son état d’indépendance naturelle, et dont il doit continuer de jouir dans l’état civil, sans que l’on puisse les lui ravir […] Les lois humaines sont donc, à cet égard, purement déclaratoires. Elles peuvent expliquer, développer les droits absolus de l’homme, mais non pas les créer ni les détruire »280. En d’autres termes, l’homme est doté de certains

droits avant qu’il ne soit « personne » et n’ait pas d’état civil en droit civil. Nous tenons, malgré la redondance, au terme « civil », car le jurisconsulte nous a déjà mis en garde contre un éventuel malentendu en soulignant que « ce qu’il importe d’observer ici, c’est que l’état civil, le droit civil, tirent leur nom de la cité, qui ne signifie pas une ville, mais une portion du genre humain gouvernée par les mêmes chefs. C’est ce que les Romains appelaient civitas et

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les Grecs polis »281. La cité, définie comme corps politique, « est appelé par ses membres état,

quand il est passif ; souverain, quand il est actif »282.