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De 1964 à 1971 : République Démocratique du Congo De 1971 à 1997 : République du Zaïre

3 LE VISAGE DE L'ÉGLISE ANGLICANE DU CONGO EN UN SIÈCLE D'ÉVANGÉLISATION: 1896-

39 TITRE ANDE, G., 0p cit., p 99.

francophones n'y ont pas accès. Ils sont handicapés par le facteur de la langue, raison pour laquelle les Églises de l'Afrique centrale sont dépourvues de ministres ayant une éducation adéquate.

D'abord, il y avait un grand nombre de baptêmes dans le milieu atteint par l'Église anglicane. Ils ont découvert dans cette Église ce qui leur demeurait inconnu pendant longtemps et qui correspondait à leur aspiration: l'accent mis sur la lecture biblique, la prédication et la prière, la communion sous les deux espèces, la confession des péchés faite directement à Dieu, et la confession auriculaire à la demande de l'intéressé, etc.

Ensuite, lorsqu'on 1970, l'État avait refusé la personnalité civile à des confessions religieuses dont !'organisation juridique ou les doctrines n'étaient pas bien définies et que celles-ci cherchèrent à adhérer à d'autres confessions ayant déjà leur personnalité civile, l'Église anglicane reçut de nombreux chrétiens venus de telles confessions, notamment dans les provinces administratives du Maniema, du Kasai oriental, du Kasai occidental, du Katanga et même à Kinshasa, en vue de les instruire dans la foi anglicane.

Enfin, avec la liberté recouvrée lors de l'indépendance en 1960, les Églises ont connu également des mouvements de chrétiens allant d'une Église à l'autre; c'est ainsi que l'Église anglicane recevra également des chrétiens d'autres confessions: de l'Église catholique romaine, des Pentecôtistes, et d'autres groupes des Églises réformées.

En conséquence de ces nouvelles adhésions massives à l'Évangile, il convient de signaler deux faits importants. D'une part, il y avait très peu de pasteurs pour un si grand troupeau. Le nombre de chrétiens était disproportionné par rapport à celui des prêtres et des évangélisateurs si bien que l'encadrement pastoral de qualité était presque impossible. À ce problème de pénurie s'ajoutait celui de la qualité des évangélisateurs. Ceux-ci n'étaient pas assez formés pour faire face à ces nouvelles situations, et encore moins pour quitter leur milieu habituel afin d'aller évangéliser d'autres tribus ayant leurs coutumes et moeurs contraires aux préceptes de l'évangéliste. Ces évangélistes n'ayant aucune notion de l'ethnographie vont souvent se heurter à des problèmes d'incompréhension. D'autre part, ces gens venus d'autres confessions oublient difficilement ce qu'ils ont appris du catéchisme, de la théologie ou de la liturgie de leurs Églises de provenance dont la vision n'était souvent pas la même que celle de l'Église d'accueil. L'Église était alors confrontée aux problèmes d'ordre doctrinal, structurel et liturgique. Il aurait fallu des hommes à la hauteur pour convaincre ces gens de changer leur vision des choses et d'adopter la tradition anglicane, grâce à des enseignements assidus et efficaces. Hélas, cela n'était pas possible dans la plupart des cas. Ces chrétiens nouvellement reçus connaîtront donc un changement très lent et parfois difficile. On ne doit pas non plus perdre de vue l'attachement tenace de beaucoup d'Africains à leurs coutumes et traditions, ce qui nécessitait aussi une catéchèse judicieuse pour que l'Église garde son visage

chrétien, sans nécessairement livrer une guerre aveugle à la culture locale. Mais les prédicateurs africains parfois zélés, ont souvent continué l'iconoclasme de l'époque missionnaire contre les croyances traditionnelles et les coutumes, ce qui était loin de gagner les gens au Christ.

3.5.4. L'Église dans la pénurie

Dans son expansion rapide, l'Église anglicane a connu une pénurie dans trois secteurs clés de sa vie: a) les ressources humaines. H y avait, nous l'avons déjà souligné, une insuffisance criante de personnel qualifié face au nombre toujours croissant de chrétiens. En outre, l'Église, qui avait longtemps fonctionné en brousse, atteignait désormais le milieu urbain composé de gens plus instruits; b) les ressources matérielles. L'Église s'est heurtée aussi au problème épineux du manque de terrains pour ses locaux: églises, résidences des serviteurs de Dieu, surtout dans les centres urbains, si bien que parfois le pasteur devait louer ou se faire héberger par un chrétien généreux. H y avait aussi le manque d'objets de première nécessité pour le culte tels que: la Bible, le Livre de la Prière commune, le recueil des chants, etc. sans oublier d'autres besoins qui augmentaient avec !'agrandissement des champs d'évangélisation: les vêtements ecclésiastiques pour le culte, les calices, les divers registres, etc.; c) Les ressources financières. L'Église anglicane s'était trouvé sans aucune source financière pouvant supporter les différentes charges pastorales et admi- nistratives de l'Église en expansion.

Les responsables de l'Église ainsi que les chrétiens donnent le meilleur d'eux-mêmes mais cela est loin de répondre aux besoins de l'Église grandissante. Cette situation de pauvreté a été bien remarquée par le chanoine Bill Norman, Commissaire de la Province de l'Église anglicane du Congo (PEAC) en Grande-Bretagne, lors de la célébration du centenaire de cette Église, le 30 mai

1996 à Boga:

L'Église anglicane du Zaïre est vigoureuse mais très pauvre. Les membres du clergé ne sont pas payés dans le vrai sens du mot. Ils vivent de produits de leur champ ou comme des fabricants de tente. Ils ne s'attendent pas à recevoir des salaires de quelque part, mais l'Église demande de l'aide pour les projets de développement et pour les bourses d'études et pour le salaire de certains membres de son personnel avec spécialité comme les secrétaires, les comptables et les commis- dactylographes.41

3.5.5. La formation au ministère

Une des solutions aux problèmes évoqués ci-dessus était de doter l'Église de cadres suffisamment instruits pour assurer la pastorale urbaine ville et d'autres charges administratives ainsi que pour prendre la relève de l'enseignement théologique et biblique dans les diocèses et la province. Leur

Les hôpitaux et les prisons réclamaient également la présence d'aumôniers. Or l'Église anglicane du Congo continuait à former ses pasteurs dans des écoles bibliques de l'Ouganda, du Kenya et de la Tanzanie. Malheureusement, la langue de formation était le swahili alors que la langue de l'enseignement au Congo est le français, le swahili n'étant parlé qu'à l'Est du pays. Pourtant l'Église est implantée dans neuf provinces congolaises sur onze , et seul le français permet la communication avec les intellectuels sur toute l'étendue du pays.

Pour parer à ces difficultés, Sa Grâce Ndahura Bezaleri, alors évêque du diocèse de Bukavu et archevêque de la province du Burundi, Rwanda et Zaïre, créa en 1981, l'Institut Supérieur Théologique Anglican (ISTHA) pour la formation des futurs cadres de cette province. Il s'agissait d'une initiative très louable et actuellement l'Église du Congo compte déjà une trentaine de gradués issus de cet Institut.

L'Église doit en effet, s'adapter à la politique du moment qui consiste en l'africanisation des cadres. La réussite de cette politique dépendra de ce que les futurs cadres de l'Église recevront un bagage intellectuel suffisant. Ceci les aidera à prendre part à des discussions théologiques ou aux réformes pastorales et liturgiques dans lesquelles les Églises africaines, en quête de l'identité culturelle de la foi en Jésus-Christ, sont engagées plus que jamais. Connaissant mieux les valeurs culturelles des coreligionnaires, ils seront davantage capables de concevoir des messages pouvant toucher réellement le for intérieur des Congolais et assurer une évangélisation en profondeur.

3.5.6. Le bilan d'un centenaire (1896 - 1996)

Tout compte fait, c'est dans les deux dernières décennies de l'année de son centenaire que l'Église anglicane a connu une expansion extraordinaire. Malgré les divers obstacles et pénuries dont elle a souffert, ses réalisations sur le plan de l'évangélisation ont laissé un bon souvenir du ministère d'Apolo. En effet, depuis la première visite d'Apolo, l'Église anglicane du Congo a connu, en 100 ans, une expansion de Boga à travers toutes les parties Est du Congo, jusqu'à atteindre les côtes de l'Océan Atlantique. Partie d'un petit groupe de chrétiens d'Apolo, elle a baptisé plus d'un demi- million de fidèles répartis dans six diocèses, et elle a ouvert plus de 300 paroisses encadrées par 32 archidiaconés. Née dans un petit village en bordure du Congo et de l'Ouganda, il y a 100 ans, l'Église anglicane du Congo a été érigée en Province ecclésiastique autonome en 1992.

présence était également nécessaire comme aumôniers auprès des écoles primaires, secondaires, instituts supérieurs et universitaires du pays.

À l'occasion du centenaire, des milliers de fidèles venus de tous les coins du globe se sont retrouvés à Boga, le 30 mai 1996, pour honorer Apolo, remercier Dieu pour son courage et célébrer

son travail et son enseignement. Et quelle n'était pas leur grande admiration, comme le prouve cette exclamation de Mgr Bruce Stavert, évêque anglican de Québec (Canada), présent aux cérémonies: "Quel hommage est ceci pour Apolo et une mesure de la fidélité au Seigneur de la part de ses disciples"42. Au Congo, l'Église anglicane est partout vivante et dynamique malgré sa pauvreté matérielle et les difficultés qu'elle a dû surmonter. Aujourd'hui, il est peu probable que d'autres obstacles puissent encore contrecarrer ses activités.

En 100 ans, le progrès réalisé est notoire grâce aux efforts concertés des autochtones, des partenaires et des missionnaires, surtout de la CMS (Angleterre, Australie et Irlande), de Mid- Africa Ministry, de l'Église Épiscopale des États-Unis et de l'Église anglicane du Canada. Tous ces partenaires méritent la gratitude de l'Église anglicane du Congo pour les sacrifices consentis et le dévouement pour la cause de l'Évangile.

Certes, il reste encore beaucoup à faire dans de nombreux secteurs où leur apport reste indispensable. Personnellement, nous sommes convaincu qu'au-delà du bilan, l'implantation d'une Église sans dimension culturelle locale ne peut contribuer à l'enracinement efficace de l'Évangile. Ce dernier est alors comme une couche de vernis sur une toile de fond culturel traditionnel, qui remonte sans cesse à la surface quand le christianisme ne satisfait pas, parce qu'il reste étranger ou indifférent à la situation pratique sur le terrain.