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Les groupes armés illégaux ne sont pas démantelés et désarmés dans leur totalité. En Irak, les groupes armés d’opposition sont « de plus en plus sophistiqués » et font de cet État, un espace dangereux. Les actes de violence se multiplient dans chacun des deux États,

notamment par le recours aux attentats suicides ou aux enlèvements835. Le kidnapping est un

moyen de revanche et permet l’obtention de financement par les rançons. Ces actes touchent en particulier les individus travaillant aux côtés des acteurs étrangers, c'est-à-dire les

nationaux luttant aux côtés des forces internationales, ces forces elles-mêmes836, les

organisations internationales et les acteurs privés étrangers. Ils agissent également contre les gouvernements, l’ensemble des institutions et les individus. « These activities pose an increasing threat to the local population, national security forces, international military forces and the international assistance effort. Violence and threats against local officials, religious leaders, teachers and staff and facilities of the education system have continued and intensified »837. Ainsi, la remise des armes, leur destruction et le recyclage des groupes

834 Id., Rapport du P.N.U.D, « Security with a Human Face: Challenges and Responsabilities », National Human Development Report 2004, op. cit., p. 3.

835 Les attentats-suicides se sont multipliés en Afghanistan. Pour l’année 2005, sur 19 attaques, 13 ont été commises en novembre et décembre 2005. De plus, en mars 2006, Sebghatullah Mojadeddi, Président de la chambre haute du pays en fut victime. Le 12 mai 2006 un véhicule de l’U.N.I.C.E.F. qui circulait entre Badghis et Herat a été attaqué, provoquant la mort de deux travailleurs humanitaires. Trois facteurs alimentent cette insécurité, la présence de groupes armés illégaux, le développement des réseaux de trafiquants de drogue et les lacunes de l’administration. Conseil de sécurité, débat public sur la situation en Afghanistan, 14 mars 2006, CS/8660.

836 Pour les actes de violence contre les forces internationales en Irak les plus récents : le 3 juin 2006, l’ambassade de Russie à Bagdad fut attaquée, un employé tué et quatre autres enlevés, selon la déclaration du Président du Conseil de sécurité du 5 juin 2006, SC/8738.

837 Rapport du Secrétaire général des Nations Unies au Conseil de sécurité, « The situation in Afghanistan and its implications for international peace and security », 7 mars 2006, A/60/712 – S/2006/145, § 39.

162 illégaux doivent être organisés rapidement pour éviter l’anéantissement du processus de reconstruction838.

Les Talibans demeurent une menace vis-à-vis du gouvernement afghan. En effet, l’intervention armée a supprimé leur emprise sur l’appareil étatique. Cependant, elle ne les a pas éliminés. Trois facteurs ont permis cette survivance. D’abord, deux formes de soutien : celui des madrasas pakistanaises et des solidarités tribales. Puis, le fait que des troupes afghanes aient été utilisées durant l’opération Liberté immuable. Ceci a sans doute permis la

négociation entre combattants d’un même pays839. Les Talibans ont toujours été actifs depuis

2001. Cependant, cette activité s’intensifie en 2006, notamment dans le sud du pays840.

En outre, le trafic de drogue et la culture du pavot se poursuivent, en Afghanistan. Ce pays est le principal pourvoyeur d’opium dans le monde, approvisionnant 87% du marché. Ceci est lié à l’échec du recyclage des cultivateurs dans des branches légales et à l’absence de politique de développement rural effective. En effet, la culture du pavot et le trafic de drogue

rapportent davantage841. C’est pourquoi la culture du pavot « is a vital short-term economic

strategy in rural areas, but it neither sustainable nor legal »842. La culture et le trafic de

drogues sont liés au milieu de la criminalité, mais également aujourd’hui au milieu terroriste et aux groupes armées illégaux, en raison de l’apport financier qu’ils constituent. C’est pourquoi cette culture est une source interne d’insécurité, mais aussi une menace sur le plan international. Une loi anti-drogue a été votée le 17 décembre 2005, mais l’éradication est

difficile843. En effet, sur le plan local et national, les gouverneurs sont impuissants et certaines

élites sont corrompues844.

Toujours en Afghanistan, et lié au trafic de drogue, dans le sens où ils se sont longtemps soutenus, les seigneurs de guerre sont une source d’insécurité. Ils ont été utilisés, dans un premier temps, par les forces armées étrangères, au commencement de l’opération

« Liberté immuable ». Bien que cette stratégie ait été abandonnée en 2003845, ils continuent à

diriger certains territoires et infiltrer la police locale, car leur intérêt est de faire basculer le rapport de force en leur faveur pour conserver la domination sur un territoire ou en obtenir davantage846.

« Many former warlords have re-armed “demobilized” forces under the guise of local police through funds provided by drug trafficking [...] Provincial leaders still find themselves in an

838 DAILLIER (P.), « Les opérations multinationales consécutives à des conflits armés en vue du rétablissement de la paix », op. cit., p. 400.

839 ROY (O.), « Afghanistan, la difficile reconstruction d’un État », op. cit., p. 43.

840 TISDALL (S.), «Trouble spots threaten perfect storm of global crises - study », The Guardian, 25 mai 2006, www.guardian.co.uk/afghanistan/story/0,,1782478,00.html, consulté le 29 mai 2006.

841 Afghanistan Compact, op. cit., p. 6 et 10.

842 Barton (F.) et Crocker (B.), « In The Balance Measuring Progress in Afghanistan », op. cit., p. 10 et 13. Lire également ROY (O.), « Afghanistan, la difficile reconstruction d’un État », op. cit., p. 51 et 52.

843 Rapport du Secrétaire général des Nations Unies au Conseil de sécurité, « The situation in Afghanistan and its implications for international peace and security », 7 mars 2006, A/60/712 – S/2006/145, § 20, 21, 22, 23. 844 Pour plus d’information sur les relations entre les milieux de la drogue, de la criminalité et du terrorisme, lire MONTANARO-JANKOVSKI (L.), « Les coopérations sécuritaires face à la criminalité transnationale en Asie centrale », A.F.D.I. 2005, pp.357-372.

845 ROY (O.), « Afghanistan, la difficile reconstruction d’un État », op. cit., p. 37.

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uncertain political environment of shifting alliances and extralegal challenges to their authority, making private militias necessary to maintaining power »847.

Cependant, à la différence des Talibans, ils ne contestent ni l’État ni la présence de troupes

étrangères. « Leur combat est en fait une recherche de reconnaissance et d’équilibre »848.

Corrélativement au renforcement de l’État afghan, leur légitimité diminuera, puisque la protection de la population contre les menaces sera assurée par l’État, avec l’aide des acteurs internationaux. Ainsi, par cette perte de légitimité, mais également par leur marginalisation ou leur intégration au sein des organes de l’État, les seigneurs de guerre sont amenés à disparaître. L’organisation « shura-ye nazar », en d’autres termes l’Alliance du Nord du commandant Massoud, est un exemple de cette intégration, avec les Généraux Fahim et Qanouni qui détiennent aujourd’hui des fonctions importantes au sein de l’appareil d’État. Par contre, les hommes de la shura ont pour leur part, deux solutions : soit la marginalisation, soit

le recyclage au sein de la police ou de l’armée afghane849.

Enfin, les tensions entre communautés tant en Irak qu’en Afghanistan850, sont une

dernière source de déstabilisation. En Irak, « Radical elements among the Sunni Community - ex-Baathis and neo-Salafis, perhaps in cooperation with Al Qaeda - are trying to foment a civil war between the two religious communities [...] sectarian strife has reached a new pitch that is likely to spread throughout the region [...]»851. Ces troubles intercommunautaires, se

matérialisent à travers les enlèvements ou les assassinats d’irakiens de tous bords. Ils se sont également manifestés par l’homicide de candidats durant les campagnes électorales, dans les deux États. En Irak, ils se sont intensifiés suite à l’attentat contre le mausolée chiite de

Samarra, le 22 février 2006852, causant de nombreuses violations des droits de l’homme. « La

violence sectaire est devenue la principale menace à la sécurité et à la stabilité de l’Irak »853.

Or, elle porte atteinte au processus de réconciliation nationale.

Le recours à la violence porte atteinte à plusieurs droits de l’homme les plus fondamentaux, tels le droit à la vie, la prohibition de la torture ou la liberté ; mais empêche également la population de participer activement à la prise de décision, par crainte de représailles. Ainsi, elle ne favorise pas le renforcement de l’état de droit.

Paragraphe 2: Les moyens de lutte contre la violence