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Les relations entre l’autorité judiciaire et les autres pouvoirs

Paragraphe 2 : Une séparation horizontale souple des pouvoirs en Irak

B. Les relations entre l’autorité judiciaire et les autres pouvoirs

les pouvoirs législatif et exécutif existent (1). Néanmoins, l’indépendance de l’autorité judiciaire est garantie (2).

1. Les rapports entre ces organes

Trois types de moyens d’action existent : d’abord un moyen de contrôle de l’exécutif sur le pouvoir judiciaire en matière d’approbation de certaines décisions judiciaires (a) ; puis, un moyen d’action du pouvoir judiciaire sur le pouvoir législatif, par l’instauration d’un contrôle de constitutionnalité des lois (b) ; enfin, un moyen de contrôle du pouvoir judiciaire sur le pouvoir exécutif, par l’existence d’une procédure de mise en accusation (c).

a. Pouvoir exécutif et contrôle de certaines décisions judiciaires

Certaines décisions de justice doivent être approuvées par le Président de la

République pour pouvoir être exécutées627. Il s’agit de la condamnation la plus grave qui

625 La procédure législative sous la Constitution de la République d’Irak du 15 octobre 2005, rappelle ici le système juridique des Etats-Unis d’Amérique. En effet, le Président de la République des Etats-Unis dispose également d’un droit de veto. Constitution des Etats-Unis d’Amérique, 17 septembre 1787, article 1, section 7 (2) et (3).

626 Article 73 (7) de la Constitution irakienne. 627 Article 70-H de la Constitution irakienne.

118 puisse être mise en œuvre en Irak : la peine de mort. C’est pourquoi, son application aux cas d’espèces est contrôlée.

b. Le contrôle de constitutionnalité

La Constitution irakienne prévoit deux types de contrôle : le contrôle de

constitutionnalité des lois et des règlements628. Disposant de ces deux contrôles, la Cour

suprême sera amenée à arbitrer les conflits entre les pouvoirs législatif et réglementaire. Le contrôle de constitutionnalité des règlements est un moyen de contrôle sur l’action du pouvoir exécutif. Cependant, les membres du Parlement n’étant pas des autorités de saisine, on peut penser que les autorités de saisine sont ici limitées.

Le contrôle de constitutionnalité des lois adoptées par le Conseil des Représentants est un pouvoir de contrôle attribué à la Cour suprême sur le pouvoir législatif, car il permet de protéger l’intégrité de la Constitution. La volonté des représentants du peuple est donc encadrée. Cela a pour conséquence de protéger les citoyens de l’arbitraire potentiel de leurs représentants. Ce contrôle garantit, en outre, le respect des libertés publiques par l’ensemble des organes de l’État. Celles-ci deviennent alors des libertés fondamentales. Malheureusement, les membres du Conseil des Représentants ne sont pas définis par la Constitution comme autorité de saisine. Or, ceci aurait été un instrument de contrôle entre les mains des minorités parlementaires, sur les lois adoptées par la majorité. Faire des parlementaires une autorité de saisine aurait pu être une solution judicieuse pour renforcer la légitimité des lois. En effet, une loi contestée par une minorité, passée au crible d’un contrôle de constitutionnalité effectif et déclarée conforme, ne peut qu’en sortir renforcée.

De plus, les décisions de la Cour suprême en la matière disposent de l’autorité de la chose jugée, elles sont donc obligatoires, pour tous les pouvoirs. Toutefois, cette autorité de chose jugée n’est-elle pas limitée, sachant que le contrôle de constitutionnalité est un contrôle a posteriori ? La norme contraire aura donc, un temps déployé ses effets.

Pour conclure sur ce contrôle, il garantit la séparation des pouvoirs:

« le Conseil constitutionnel va annuler ces dispositions qui sont en contradiction avec la séparation des pouvoirs. Cette dernière accorde en effet au parlement le vote de la loi et à l’exécutif l’application de la loi. Le parlement ne peut intervenir qu’au niveau des commissions d’enquête en cas de défaillance dans l’application de la loi. Le Conseil constitutionnel constate donc que ces dispositions transgressent la répartition des compétences entre le législatif et l’exécutif »629.

Ce contrôle garantit la séparation des pouvoirs, la démocratie et l’état de droit. Cependant, il n’est pas établi sur le modèle Kelsenien, mais sur le modèle américain, c'est-à-dire, dès qu’un litige se présente.

c. La procédure de mise en accusation comme moyen de contrôle du

pouvoir exécutif

L’article 93(6) donne à la Cour suprême le pouvoir de juger et de condamner pour haute trahison, violation de la Constitution et du serment constitutionnel, le Président de la

628 Article 93 (1) de la Constitution irakienne.

629 BENDOUROU (O.), « Conseils constitutionnels et Etat de droit au Maghreb », in MAHIOU (A.) (dir.), p. 235.

119 République. Elle peut également juger et condamner les ministres, ainsi que le Premier Ministre. On peut penser que les raisons de leurs condamnations sont les mêmes que pour le Président. Il ne s’agit que d’atteintes graves, ce qui garantit la stabilité de l’État.

L’autorité judiciaire garantit la séparation des pouvoirs, puisqu’elle contrôle les autres pouvoirs, ce qui permet la transparence et la démocratie.

2. Une indépendance garantie

L’indépendance du pouvoir judiciaire et des juges est proclamée par les articles 87 et 88 de la Constitution. Toutefois, elle doit être entourée de garanties pour être effective.

Or, l’absence d’arbitraire au sein du pouvoir judiciaire est un moyen de garantir l’indépendance. La prohibition du cumul des fonctions de juge avec l’activité politique, permet d’éviter la corruption de l’autorité judiciaire630.

De plus, le Conseil judiciaire supérieur est un organe qui garantit cette indépendance en tant que superviseur de l’autorité judiciaire. Grâce à son existence, ce pouvoir s’administre de façon autonome, par exemple, par l’élaboration du projet de budget annuel.

Enfin, l’imposition de juges professionnels par la Constitution631 est une garantie

supplémentaire. Leur inamovibilité est également prévue632. Cependant, la Constitution

renvoie à la loi pour les motifs permettant le renvoi d’un juge, ce qui est source d’incertitude. La loi étant modifiable par une autre loi, l’indépendance des juges est susceptible d’être mise en danger. De plus, le statut du juge dépend d’un pouvoir « concurrent », le Parlement. Un second type de risque existe. En effet, l’indépendance du juge vis-à-vis du politique est assurée. Néanmoins, qu’en sera-t-il de l’indépendance du juge vis-à-vis du pouvoir religieux ?

Arrivés au terme de cette section, nous constatons que la Constitution irakienne du 15 octobre 2005, tout en prévoyant une séparation des pouvoirs, établit également de nombreux « checks and balancies ». En effet, la collaboration des pouvoirs est inhérente au régime parlementaire. Toutefois, la Constitution, par son manque de clarté et par l’absence de détails suffisants, risque de transformer ce régime en régime semi-présidentiel. D’abord, l’initiative parlementaire sur les lois est limitée par l’importance probable des projets de lois et par la consécration du droit de veto présidentiel. Cependant, vu le désaccord existant aujourd’hui entre les différents partis politiques présents au Parlement, l’adoption d’une loi sera synonyme de consensus. Or, bloquer une telle loi pourrait avoir pour conséquence la destruction du consensus et, à plus long terme, cela pourrait bloquer l’exercice de la compétence législative. Le droit de veto dont dispose le Conseil présidentiel, et à terme dont bénéficiera le Président de la République, devra donc être utilisé avec prudence. Ainsi, de façon étonnante pour un régime parlementaire, le chef de l’État dispose de nombreuses prérogatives.

Passons désormais à l’étude de la forme juridique de l’État Afghan.

630 Article 98 de la Constitution irakienne. 631 Article 92 (2) de la Constitution irakienne. 632 Article 97 de la Constitution irakienne.

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Section 2 : Le choix de l’unité

L’Afghanistan, malgré l’existence de nombreuses ethnies, a fait le choix de rester un

État unitaire633. Un État unitaire est un, « État comportant un centre unique d’impulsion

politique auquel la population est uniformément soumise sur tout le territoire, les circonscriptions territoriales ne jouissant d’aucune autonomie politique »634.

Nous allons, par conséquent, étudier les conséquences de ce choix, d’une part sur la séparation verticale (§1) puis, sur la séparation horizontale des pouvoirs (§2).

Paragraphe 1 : La séparation verticale des pouvoirs en Afghanistan