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Le sort des abstentions.

Dans le document La copropriété (Page 124-126)

L’assemblée générale

B. Les réunions de l’assemblée générale

14. Le sort des abstentions.

La loi du 30 juin 1994 n’a pas réglé expressément le sort des abstentions, même si la question fut évoquée lors des travaux préparatoires. S’appuyant souvent sur ceux-ci 49, et bien qu’ils n’aient pas toujours été jugés limpides 50,

de nombreux auteurs ont considéré qu’il y avait lieu d’assimiler ces absten- tions aux votes négatifs 51. Les abstentionnistes font alors le jeu des oppo-

sants 52. Si sur 1000 voix 53, 800 sont présentes ou représentées et qu’une

48. On ne confondra pas la décision de l’assemblée de créer un conseil de copropriété qui devrait requérir à l’avenir une majorité des trois quarts et la nomination de chacun des membres du con- seil qui se fait, à suivre l’enseignement de la jurisprudence, à la majorité absolue des voix des copropriétaires présents ou représentés. Sur cette question, voy. O. JAUNIAUX, « Le syndic et le

conseil de gérance », op. cit., p. 201, n° 58 ; P. LECOCQ, « Le syndic et le conseil de gérance :

leur rôle et leurs pouvoirs », op. cit., p. 318, n° 25.

49. Projet de loi modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives à la copropriété, Doc.

parl., Ch. repr., sess. ord. 1990-1991, n° 1756/1-90/91, p. 19 (« Le paragraphe 6 de

l’article 577-6 se borne à rappeler que les décisions de l’assemblée générale se prennent à la majo- rité simple et ordinaire (à savoir les votes exprimés par les copropriétaires, présents ou représen- tés, en ce compris les abstentions) sauf lorsque les statuts ou la loi (c’est-à-dire la présente loi et, en particulier, l’article suivant) exigent ou imposent une majorité qualifiée, voire l’unanimité ») ; Rapport, Doc. parl., Ch. repr., sess. ord. 1992-1993, n° 851/7, p. 25.

50. O. JAUNIAUX, « Le sort des abstentions lors des assemblées générales de copropriété », J.T., 2005,

p. 514 ; E. RIQUIER, op. cit., p. 69, n° 60.

51. A. DE BECKER et L. WEYTS, « L’administration de l’immeuble : l’assemblée générale et le syndic »,

op. cit., p. 226, note 87 (ces auteurs suggèrent toutefois que la question soit réglée dans les statuts) ;

Ph. DE PAGE et I. DE STEFANI, « L’assemblée générale des copropriétaires », op. cit., p. 268, n° 33 (ces auteurs réservent également la possibilité pour les statuts de prévoir une règle dérogatoire) ; Ph. DE PAGE, I. DE STEFANI et L.-Ph. MARCELIS, « L’assemblée générale, questions pratiques », op. cit., p. 237, n° 49 ; M. KADANER et M. PLESSERS, « La loi du 30 juin 1994 modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives à la copropriété », J.T., 1995, p. 402, n° 38.

52. E. Riquier fait observer, à juste titre, que dans le fonctionnement des assemblées générales, on fait rarement la distinction entre votes blancs et abstentions, les abstentionnistes étant souvent invités à cocher la case « abstention » sur le bulletin qui leur est remis (E. RIQUIER, op. cit., p. 70, n° 63).

53. On s’exprime ici en voix plutôt qu’en personnes dès lors que la puissance votale de chaque copropriétaire est fonction des quotités dont il dispose.

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proposition est mise au vote, accueillie favorablement par 375 voix, rejetée par 325 voix, 100 voix s’étant abstenues, ladite proposition, si elle est de celles requérant une majorité absolue, ne sera pas adoptée. On relèvera toutefois certaines voix discordantes et notamment celle d’Olivier Jauniaux, pour qui il serait « opportun de rendre, dans le contexte des assemblées générales de copropriété, aux abstentions leur portée ‘naturelle’ » 54, c’est-à-dire d’en faire

purement et simplement abstraction. On retrouverait ainsi la règle générale applicable aux assemblées délibérantes 55.

Bien qu’il ne jugeât point indispensable une modification législative, O. Jauniaux la souhaita toutefois pour « clarifier le débat » 56. Il suggérait à cet

égard de reprendre une formulation autrefois avancée par le sénateur Goo- vaert dans une proposition de loi devenue caduque : « Les abstentions ne sont pas considérées comme des voix émises » 57.

Ce n’est pourtant pas en ce sens que les auteurs de la proposition envisa- gèrent les choses, à tout le moins dans un premier temps. La première version du projet prévoyait en effet que « les abstentions viennent renforcer la majorité des votes exprimés. En cas d’égalité parmi les votes exprimés, les abstentions sont comptées comme des votes positifs » 58. Cette formulation a toutefois été

jugée regrettable par plusieurs intervenants interrogés lors des travaux prépara- toires, qui firent notamment observer que, par définition, l’abstentionniste adoptait une position neutre, de sorte qu’un amendement fut déposé propo- sant une formulation fort différente 59. Les rédacteurs, qui justifièrent leur

volte-face en expliquant que l’important était que l’on soit fixé sur le sort à réserver aux abstentions, reprirent la formulation du sénateur Goovaert, en l’amplifiant quelque peu : « Les abstentions ne sont pas considérées comme des voix émises pour le calcul de la majorité requise » (proposition d’ajout d’un

54. O. JAUNIAUX, « Le sort des abstentions… », op. cit., p. 515.

55. O. JAUNIAUX, « Le sort des abstentions… », op. cit., p. 516, qui renvoie à A. VAN OEVELEN, « De algemene vergadering van medeëigenaars », in Appartementsmede-eigendom, Kluwer, 1996, p. 130 et à F. DE BAUW, Les assemblées générales dans les sociétés anonymes, Bruxelles, Bruylant, 1996, p. 254, n° 609. Voy. toutefois ce que dit E. Riquier à propos des sociétés commerciales : dans ce contexte, les abstentions seraient ou ne seraient pas prises en compte selon qu’un quorum de majorité est requis ou non (E. RIQUIER, op. cit., p. 71, n° 64).

56. O. JAUNIAUX, « Le sort des abstentions… », op. cit., p. 516.

57. Proposition de loi modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives à la copro- priété, Doc. parl., Sén., sess. ord. 1994-1995, n° 1288-1, spéc. pp. 6 et 10.

58. Proposition de loi visant à moderniser et assurer une meilleure transparence dans le fonctionne- ment des copropriétés, Doc. parl., Ch. repr., sess. ord. 2007-2008, n° 52-1334/001, pp. 16 et 53. 59. Proposition de loi visant à moderniser et assurer une meilleure transparence dans le fonctionnement des copropriétés, Amendements, Doc. parl., Ch. repr., sess. ord. 2008-2009, n° 52-1334/004, p. 14.

alinéa à l’art. 577-6, § 6). C’est cette dernière formulation qui figure dans la version adoptée en juillet 2009 60.

Compte tenu de ce que le texte précise désormais la notion de « voix émises », il nous paraît que cette notion aurait également dû être visée dans les dispositions relatives au quorum de vote. C’est du reste ce que proposait le sénateur Goovaert dans sa proposition précitée, à tout le moins à propos des majorités qualifiées de trois quarts et quatre cinquièmes (« trois quarts des voix émises », etc.).

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