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et propositions de réforme

Dans le document La copropriété (Page 82-85)

38. Il faut être modeste face à une pratique notariale aidée d’avocats spé- cialisés, qui travaillent depuis des décennies à ce type de clause, en veillant à proposer aux parties des dispositions contractuelles qui tiennent compte de la plupart de leurs desideratas et de leurs situations très variables, dans le respect du droit positif.

Les litiges sont par ailleurs finalement assez rares, ou alors la jurispru- dence publiée est-elle la face apparente de l’iceberg et il n’est pas exclu d’ailleurs qu’émergent des contestations d’un nouveau genre, ce qui n’est certainement pas souhaitable…

En effet, les clauses de tontine ont particulièrement besoin de stabilité, de sécurité et de prévisibilité juridique. Elles en ont sans doute d’autant plus besoin qu’elles sont aléatoires et liées à un événement tragique, le décès de l’une des parties, tout en portant sur des biens généralement de grande valeur : les immeubles.

39. Sous le bénéfice des analyses théoriques et pratiques que nous avons faites ci-dessus, je me bornerai aux brefs conseils suivants, qui portent sur la logique patrimoniale des opérations et la bonne rédaction des clauses, et non sur leur traitement en droit des successions ou des donations, et encore moins bien sûr en droit fiscal :

1. il faut être clair dans la rédaction des clauses quant aux droits cédés et quant à la temporalité de l’opération de tontine ou d’accroissement, en distinguant bien la période antérieure au décès de l’un des tontiniers, de la période postérieure 154 ;

2. il faut bien faire apparaître les caractères à titre onéreux et aléatoire de l’opération (ce dernier sera satisfait le plus souvent, en étant inhérent à l’opération même de tontine, mais il est des cas discutables et la vision économique de l’aléa n’a pas totalement disparu 155) ;

154. Pour des commentaires de clauses manquant de clarté, cf. supra, nos 6 à 8.

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3. il conviendra de faire apparaître les possibles choix des parties :

– soit, entre autres, d’aller dans le sens de clauses simples, non limitées dans le temps, si ce n’est peut-être une condition résolutoire non automatique 156 en cas de séparation définitive des parties 157,

– soit d’aller dans le sens d’une limitation dans le temps de la tontine ou de la clause d’accroissement, ce qui paradoxalement accroîtra peut- être la pérennité de la situation d’indivision, entre tontiniers, puisqu’ils ne pourront pas agir normalement sur le pied de l’article 815 du Code civil dans le délai contractuel de vie de la ton- tine 158 159 (et il sera judicieux de prévoir une stipulation interdisant

aux tontiniers de céder leurs droits à un tiers) 160 ; il faudra bien sûr

éviter toute rupture et toute remise en question possible de l’aléa ; l’opération sera aussi alors mieux sécurisée vis-à-vis des créanciers, pour peu bien sûr que la clause ait été rendue opposable aux tiers et qu’il n’y ait pas eu de fraude à leur égard.

40. Enfin, pour conclure, faut-il aller jusqu’à proposer une réforme de l’un ou l’autre aspect du régime de ces clauses ?

Je serais également prudent et modeste face à ce genre de question. J’aurais tendance à envisager les choses avec mesure et à suggérer trois axes de réforme :

1. que l’on allonge peut-être de 5 à 10 ans le délai de base des clauses de convention d’indivision, dans le cadre de l’article 815, alinéa 2, du Code civil outre la possibilité de les renouveler déjà prévue ;

2. de façon plus ambitieuse, que l’on dote enfin la copropriété volontaire d’un régime légal de base, en clarifiant la façon de lui appliquer, ou non, toutes les dispositions de l’article 577-2, du Code civil, et notamment son

156. En ce sens qu’elle devra être invoquée par l’un ou l’autre des tontiniers pour qu’il soit mis fin à la tontine.

157. Cf. supra, n° 30.2.

158. Mise à part la controverse en la matière. Cf. supra, nos 24 à 29.

159. Ce qui posera toutefois la question de la possible prorogation de ce pacte et de la tontine, et

a contratrio de la possibilité pour les tontiniers de ne pas s’y opposer (le bon système, tel que pro-

posé par Y.-H. Leleu, étant donc celui d’une prorogation à défaut d’opposition d’une partie ; cf. étude de cet auteur publiée in Rev. not. belge, 2001, spéc., n° 10, p. 82)), avant de repartir pour une nouvelle période. Sur cette délicate question qui n’est pas traitée de façon approfondie et définitive dans cette étude, cf. supra, n° 23, spéc. 23.4. à 7., et réf. 86 à 96.

160. Prenant en considération une clause en ce sens, cf. Liège, 11 mai 2006, Rev. rég. dr., 2007, pp. 40 et s., spéc. p. 41.

§ 8 qui renvoie à l’article 815 du Code 161 ; il serait sans doute judicieux de

prévoir que cette disposition ne s’y applique pas, ou à tout le moins, que son application peut être exclue par convention des parties, l’article n’étant pas – ou plus – d’ordre public en matière de copropriété volontaire ; 3. de revoir et clarifier, dans un sens restreint car elle déroge au droit com-

mun (principes d’autonomie de la volonté et de liberté contractuelle), la notion de pacte sur succession future découlant de l’article 1130, alinéa 2, du Code civil, ou de mettre à tout le moins à l’abri d’une telle qualification, par une dérogation, les clauses habituelles de tontine et d’accroissement, y compris, bien sûr, et surtout, celles ayant une durée limitée dans le temps sauf prorogation 162.

Mais prudence prudence... car tout élément de réforme mal pesé et démesuré, risquerait de déstabiliser une matière qui semble évoluer, au total, pas si mal que cela en pratique.

161. Toutes les autres dispositions de l’article 577-2, pouvant l’être, ce qui rendrait la réforme assez sim- ple, prenant la forme de l’adjonction d’un nouveau paragraphe 11 dérogeant à l’application de l’article 815.

Copropriété forcée

Dans le document La copropriété (Page 82-85)

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