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La sociologie compréhensive

Cohérente avec la proposition de ‘raison sensible’, nous trouvons la notion de ‘connaissance ordinaire’ de Michel Maffesoli. Cette notion se place à l’antipode des approches basées sur l’abstraction, et près de l’empathie. La pensée ordinaire est une pensée d’accompagnement (2007a). Cet accompagnement ne se réduit pas à la recherche en fonction de la connivence, mais vise à l’élargissement et l’enrichissement des catégories de la pensée moderne, pour leur faciliter l’accès aux domaines du non-rationnel négligés. Cette connaissance se développe à partir d’une observation immergée dans l’organicité de la vie par la considération de tous ses éléments (mutuellement affectant) comme susceptibles d’être recherchés. Donc, désormais le défi serait comment rendre compte de cette organicité.

À cet égard, Michel Maffesoli – inspiré par le travail de Georg Simmel – nous propose le formisme, à partir duquel nous pouvons nous approcher des structures du social en respectant leurs différents éléments et leurs modulations, « formes, dans la mesure où, quels que soient les contenus qu’elles organisent, elles vont entrainer un certain type de relation des individus les uns aux autres » (Watier, 2000 :168). Cependant, le guide de la recherche formiste n’est pas les contenus ou le rapport entre eux, mais la manière dont ceux-ci apparaissent à la surface, comment ils se montrent, comment ils se laissent voir. Cette recherche s’inspire d’une phénoménologie de la vie sociale à partir de laquelle, d’une part « L’origine de toute réalité est subjective, tout ce qui éveille et stimule notre intérêt est réel » (Schutz, 1987 :103) et d’autre part, « La sauvegarde du point de vue subjectif est la seule garantie, mais elle est suffisante, que le monde de la réalité sociale ne sera pas remplacé par un monde fictif et inexistant que l’observateur scientifique aura construit » (Ibid. p. 96). Cette dernière idée, de notre point de vue, ne signifie pas une défense de l’irresponsabilité du chercheur, mais qu’en soulignant la connexion empathique entre chercheur et sujet de recherche, on attend de celui-ci qu’il soit dépourvu des prétentions normatives et qu’il présente alors la ‘réalité’ comme elle est et non comme elle ‘devrait être’.

Le formisme est une lecture du présent, et dans le présent, qui nous permettrait de lier le pluralisme et le relativisme dans le travail intellectuel, car « à l’hétérogénéisation du monde doit correspondre une compréhension systémique au spectre des plus étendus » (Maffesoli, 2007a :25). Ainsi, cette lecture intègrerait la

polyphonie manifeste de la vie sociale où chaque dimension a sa place et son importance, y compris celles dites non rationnelles comme, par exemple les sentiments et les imaginaires, en considérant que chaque élément a du sens dans le collectif auquel il appartient. En conséquence, le formisme nous aiderait à rendre compte des situations ou des espaces partagés où le sens vient de l’expérience d’être ensemble. Fidèle à cette perspective, la sociologie que Michel Maffesoli nous propose, une « sociologie du dedans» (Ibid. p.19) qui s’intéresse aux formes de la socialité, de l’imaginaire et de la vie quotidienne, à partir d’une approche compréhensive.

D’après Maffesoli, « plus qu’une raison a priori, il convient de mettre en œuvre une compréhension a posteriori, s’appuyant sur une description rigoureuse faite de connivence et d’empathie (Einfühlung). Cette dernière, en particulier, est d’une importance capitale. Elle nous fait entrer au cœur même de notre objet d’étude, vibrer de ses émotions, participer à ses effets, comprendre la complexe arabesque des sentiments et des interactions dont il est pétri. Par là même, l’observateur social n’a pas de prétention à l’objectivité absolue, il n’a pas une position surplombante, il n’est pas le simple adjuvant d’un pouvoir quel qu’il soit, il est, tout simplement, partie prenante de l’objet étudié » (Maffesoli, 2005 : 59-60).

À l’intérieur des propositions de Michel Maffesoli nous pouvons trouver les traces de la philosophie et la sociologie sur la compréhension d’auteurs comme Dilthey, Simmel et Weber. Ainsi, d’après le travail de Patrick Watier nous arrivons à une certaine ‘biographie’ de la sociologie compréhensive dont les travaux de Michel Maffesoli font partie. Dans un regard historique de leur développement, « la perspective compréhensive (…) s’intéresse non seulement à l’interprétation des actions, elle intègre aussi des réponses sur la constitution du monde social par les sujets à partir d’un monde pré donné et déjà interprété » (Watier, 2002 :9).

D’abord, la pensée de Wilhelm Dilthey s’est concentrée sur la distinction entre Sciences de la Nature – qui s’intéressent à la nature ou à la physique des phénomènes – et Sciences de l’Esprit – qui s’intéressent à l’activité humaine. D’après lui, les « faits spirituels qui se sont développés historiquement à l’intérieur de l’humanité, et que l’usage courant a nommés sciences de l’homme, de l’histoire, de la société, forment la réalité que nous voudrions non pas régenter, mais tout d’abord comprendre » (Dilthey, 1992 :157) et « Puisque l’objet des sciences de l’esprit est

compris bien avant d’être connu, et cela par la totalité de notre âme, les méthodes des sciences de l’esprit sont très différentes de celles des sciences de la nature » (Ibid. pp. 281-282). De ce fait, Watier nous indique que ces ‘méthodes’ sont liées d’une part aux rapports entre observateur et phénomène, et de l’autre aux observations des relations entre individus ou des résultats de leurs productions intentionnelles. Par ailleurs, selon Dilthey, dans les Sciences de l’esprit il n’existerait pas de séparation entre la pensée et le rapport quotidien au le monde, qui caractériserait les Sciences de la Nature. Donc, le chercheur des Sciences de l’Esprit, en tant qu’individu, participerait à l’exercice compréhensif qu’implique l’existence sociale – la compréhension de ses propres actes et de ceux des autres – et qui, en même temps, est la méthode d’interprétation – la compréhension des compréhensions – de son domaine scientifique. Toutefois, toujours d’après Patrick Watier (2002), dans les travaux de Dilthey il serait possible d’identifier une évolution par rapport à sa notion de compréhension, de ses reconstructions des fondements psychologiques, vers l’interprétation des significations objectives cristallisées.

Pour sa part, le travail de Georg Simmel sur la compréhension serait indissociable du débat sur les moyens de connaissance, et de la question sur le rôle de l’entendement mutuel dans la constitution de la société. Selon Watier, si dans la première étape de sa réflexion, le philosophe et sociologue se concentre sur les processus de compréhension et d’interprétation entre les individus – condition ontologique de l’existence –, dans la deuxième, il traite le rapport entre les hypothèses de la vie quotidienne et la connaissance historique – second niveau d’interprétation – où « la reconstitution des états de conscience d’autrui implique dans tous les cas que nous soyons capables de reproduire ses états de conscience en nous-mêmes. Une telle reproduction est indissolublement liée à la notion de compréhension » (Simmel, 1984 :88).

Donc, en prenant en compte les deux étapes, « La compréhension sociologique n’est pas purement et simplement une méthode d’une discipline, elle est déjà active dans les relations entre individus, et renvoie en amont à la socialisation et aux liaisons sociales que les individus entretiennent » (Watier, 2002 :77). Par ailleurs, la compréhension de l’autre sera en relation avec la typification où se mettent en jeu des expériences passées entre individus comme des outils pour l’interprétation, en laissant de côté la particularité du vécu et en se concentrant dans la réitération. Les

typifications proviennent des attributions réciproques entre individus et sont à la base de leurs liens, qui constituent la réalité sociale. En conséquence, la notion d’altérité sera aussi fondamentale dans les ‘Sciences de l’Esprit’ comme le seraient les causes dans les ‘Sciences de la Nature’.

Finalement, quant à Max Weber, il nous dit que « nous appelons sociologie (…) une science qui se propose de comprendre par interprétation (deutend verstehen) l’activité sociale et par là d’expliquer causalement (ursächlich erklären) son déroulement et ses effets. » (Weber, 1995 :28). Alors, la méthode de la sociologie serait la compréhension dans la mesure où elle serait sensible à la signification des pratiques humaines. Dans ce cas, la compréhension est plus intellectuelle (Morin, 1999), bien une forme d’explication liée à l’intelligibilité des comportements à partir du savoir sur les valeurs, représentations et conditions derrière l’agir des individus. Ainsi, « dans l’activité interprétative le sociologue recourt à une connaissance tacite, pratique, courante, des motifs plausibles, il reconstruit des motifs typiques » (Watier, 2002 : 135), et à partir de ce processus, les ‘Sciences de la Culture’ pourraient élaborer des concepts et déterminer des causalités. Toutefois, elles s’intéressaient à des phénomènes en rapport avec des « relations de sens liées à l’association de consciences » (Ibid. p. 102), à partir desquels elles peuvent arriver à des interprétations, à un savoir sociologique, qui est en accord avec un savoir nomologique, savoir soutenu par l’expérience courante des individus de leur propre comportement et de celui des autres, dans des situations spécifiques. Même quand ce savoir ou cette ‘compréhension ordinaire’ se forme aussi à partir des points de vue, des comparaisons et des mises en relation contextuelles qui impactent la compréhension sociologique (Watier, 2000).

Donc, en replaçant ce développement dans le travail de Michel Maffesoli, la compréhension, plus qu’une méthode sociologique serait la question sur l’existence de la société à travers l’entendement entre ses membres – lié à l’empathie et à la coparticipation. De ce fait, la compréhension serait une condition ontologique et la ‘compréhension sociologique’ une interprétation de deuxième ordre (Watier, 2000). Toutefois, il serait impossible d’arriver à cette interprétation si ce n’est depuis l’intérieur de la société elle-même, depuis le savoir incarné de celui qui participe du social. De sorte que la compréhension sociologique est une relation avec le monde à partir d’une raison sensible.

La sociologie compréhensive ne sépare pas sujet et objet, mais pratique la reconnaissance du sens subjectif. D’ailleurs, elle ne cherche pas d’explications ni lois, mais la description de phénomènes que le chercheur observe et auxquels il participe aussi. Selon Edgard Morin, « l’explication est suffisante pour la compréhension intellectuelle ou objective des choses anonymes ou matérielles, mais est insuffisante pour la compréhension humaine » (Morin, 1999 :47). D’après Maffesoli, l’idée est de mettre une distance avec la sociologie qui cherche à représenter le vécu social, et se concentrer à le présenter tel qu’il est. Cela signifie accepter ses contradictions, ses paradoxes, et tout ce que nous n’arrivons même pas à nommer encore : « C’est bien sûr ce à quoi s’emploie la sociologie compréhensive ou qualitative qui se conçoit comme essentiellement inachevée et provisoire, tant il est vrai qu’on ne peut, en aucun cas, construire un système lorsqu’on est confronté à un monde en perpétuelle mutation sans repères fixes (Maffesoli, 2005 :154-155). Si la connaissance ordinaire est une connaissance d’accompagnement, la sociologie compréhensive semble être une sociologie de l’écoute qui n’attend pas de cohérence dans le temps.

Avoir à l’esprit la compréhension est un élément central pour cette recherche, dans la mesure où ses possibilités reposent sur l’existence d’un autre que je peux comprendre et à travers qui je peux me comprendre à moi-même58, car « sans toi, il

n’y a pas de compréhension, ni de l’autre, ni a fortiori de soi » (Watier, 2000 :100). L’altérité est un sujet très important dans l’œuvre de Maffesoli et sa rencontre est considérée comme le but de toute mobilité, thématique que nous développerons dans notre prochain chapitre. En ce qui nous concerne ici, à partir de la sociologie compréhensive, tout effort pour connaître doit se confronter à la complexité du monde social dont chacun des cadres ou formes est constitué sur la base d’éléments multiples, soit en harmonie soit dans un rapport conflictuel. Penser n’importe quel phénomène social à partir d’une perspective simplificatrice, serait une réduction non seulement des contenus de l’expérience sociale, mais aussi du sujet de l’expérience. Comme Edgar Morin l’a dit, « l’intelligence parcellée, compartimentée, mécaniciste, disjonctive, réductionniste, brise la complexité du monde en fragments distincts, sépare ce qui est uni, rend unidimensionnel ce qui est multidimensionnel» (Morin, 1999 :18).

Par ailleurs, comme nous l’avons déjà énoncé, dans les travaux de Michel !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

58 Par ailleurs, il est intéressant de noter la place assignée par Edgar Morin (1999) à l’incompréhension

Maffesoli nous trouvons un questionnement de la modernité. Particulièrement sur la réduction des liens sociaux aux relations de type économique, sur la surestimation de la rationalité et la linéarité du progrès. Il apparaît que la scène qui s’est construite avec ces tendances a rendu invisible la diversité d’éléments significatifs de la vie sociale, mais aussi les dimensions du sujet qui les déploie et les recrée de façon quotidienne. Pour mieux comprendre sa perspective, il faut avoir à l’esprit la distinction que Maffesoli fait entre l’expérience du social et l’expérience de la socialité (2007a, 2008, 2012).

D’une part, l’expérience du social serait celle qui est définie par les limites du contrat. Le social, représenté dans le rapport entre le sujet et les institutions, est recréé à partir d’un ensemble d’interactions normées avec des conséquences prédéfinies et attendues selon les critères de l’utilité. Le social serait l’expérience de la procédure qui est résolue à l’intérieur des limites de la rationalité. Celle-ci étant ses frontières, le social serait l’expérience caractéristique de la modernité. D’autre part, la socialité est l’expérience de la vie quotidienne et du lien affectif. La socialité serait recréée depuis l’émotion signifiée et partagée avec des résultats incertains, donnant lieu à des attractions et à des refus. La contradiction entre ces deux types d’interaction serait le propre d’une dimension de la vie sociale où les sens ne sont pas en rapport avec les fins, mais avec les affects. Donc, l’expérience de la socialité serait le vécu caractéristique de la postmodernité et l’expérience réprouvée par la modernité, qui en devenant souterraines s’est maintenue toujours en vigueur.

Toutefois, cette distinction est un exercice d’analyse, et non une proposition de ‘formes pures’. Au contraire, il s’agit de penser les fractures, les interstices et les croisements entre ces deux expériences, et d’élaborer une proposition pour les comprendre depuis la Sociologie. Spécialement quand on observe que, malgré les efforts pour nier les aspects non rationnels de la vie courante, ceux-ci retrouvent toujours des passages par où se glisser. La vie sociale semblerait résister à une domination généralisée, les individus vivent plutôt en tension entre les limites imposées et leur transgression (Maffesoli, 2008).

À ce sujet, il est intéressant de mentionner la perspective de Michel Maffesoli sur la pensée de Georg Simmel. Faire référence à cette dernière est pertinent pour cette recherche. D’abord parce qu’elle nous offre – depuis la sociologie

compréhensive – une approche directe, mais non exclusive59, à notre sujet de

recherche60. Ensuite, car comme l’indique Maffesoli (2001), Simmel « a toujours en

vue la totalité de l’homme par opposition au clivage en fonctions que lui impose la vie moderne » (Ibid. p. 5) et de ce fait il nous a donné des outils pour la réflexion sur la réalité actuelle.

Le champ d’observation du Simmel a été la ville, selon sa perspective, lieu par excellence de la manifestation de la rationalisation et de l’objectivation des liens sociaux, à partir de leur détachement des ‘contraintes’ propres de la tradition dans leurs expressions collectives. À cet égard, comme l’indique Maffesoli, « le processus d’urbanisation et plus précisément la métropolisation est celui-là même qui par le

rapprochement dans l’espace finit par éliminer l’union dans le temps » (Ibid. p. 6).

Cependant, l’attention accordée par Simmel aux phénomènes groupaux à petite échelle et leurs interactions dans cette même scène, contribuerait d’une part à la ‘relativisation’ de l’individualisme et à la pensée des réactualisations et des recréations de la socialité. D’autre part, la constatation de l’émergence de petits groupes en fonction des affinités électives, permet de mettre sur la table, la coexistence des conflits et des harmonies au cœur de leur continuité. Concernant ce dernier point, la figure de l’étranger est particulièrement illustratrice.

D’après Simmel (2013), dans un contexte de modernité caractérisé par l’individualisation et la différenciation, la définition de ce qui est un lien proche et de ce qui est un lien éloigné, est affectée. La possibilité de partager l’espace n’est pas garantie de ‘proximité’, en même temps que, la magnitude physique de la distance ne l’est non plus de l’étrangeté. Dans ce cadre, selon Simmel, l’étranger – celui qui « vient un jour et reste le lendemain » (Ibid. p. 663) – approche le lointain. L’étranger interpelle le groupe et sa participation est fondamentale, précisément par son extériorité, pour son manque de lien organique avec celui-ci. Cette ‘position’ tout à !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

59 D’après Simmel (2013), l’étranger est une “forme sociologique” (Ibid. p. 663) et non un individu.

Par rapport au groupe, l’étranger peut être l’immigrant, mais peut aussi être « les pauvres et les divers ‘ennemis de l’intérieur’ » (Loc.cit.).

60 D’abord car elle nous offre des éléments d’intérêt pour réfléchir à la place de l’immigrant dans les

sociétés de destination. Ensuite car sa pensée a eu une influence dans les premiers pas pour la formalisation des études sur la migration, représentés par les travaux de l’École de Chicago ; et après, car elle nous donne des éléments pour penser l’être étranger non comme une ‘condition’, mais comme une « forme d’action réciproque » (Simmel, 2013:663). A partir de cela, d’une part, toute personne peut être un étranger pour quelqu’un et vice versa, et d’autre part, l’étrangeté n’est pas une position attachée au fait du franchissement des frontières extérieures.

fait particulière, serait celle à laquelle Simmel attribue de l’objectivité et de la liberté. Objectivité qui le fait participer de façon intéressée et indifférente en même temps, donnant l’élan pour l’émergence des révélations ; et liberté qui lui permet de vivre et d’agir sans la mesure qu’imposent les attachements propres du lieu de destination. L’étranger est étrange non car il est loin, mais car nous pouvons le rencontrer à tout moment, et à travers cette rencontre identifier et reproduire les limites de l’appartenance. Ainsi, même sans avoir un lien organique, l’étranger serait pour Simmel « un membre organique du groupe » (Ibid. p. 668) dont la position est « un composé de certains degrés de proximité et certains degrés d’éloignement, qui, caractérisant chaque relation par telle ou telle quantité, produisent dans une proportion particulière et une tension mutuelle le rapport formel spécifique avec ‘l’étranger’ » (Loc.cit.). Compte tenu ce qui a été dit, Maffesoli indique : « L’étranger, mais aussi l’étrange dans sa dimension sensible, jouent, pour lui, un rôle indéniable dans les interactions sociales. Ils servent d’intermédiaires avec l’extériorité, et par là, avec les diverses formes de l’altérité. De ce point de vue, ils sont partie intégrantes du groupes lui-même, et le structurent en tant que tel » (Ibid. p 9).

Après cette petite digression sur l’étranger, ce qui nous intéresse est de remarquer que Maffesoli voit en Simmel un exemple de pensée où se montrent bien les tensions entre le social et la socialité. À cet égard, le rôle de l’étranger et son rapport au groupe qui lui définisse comme tel, montrerait la persistance de liens qui se soutiennent dans des référents d’un ordre différent de celui du processus de l’institutionnalisation du social. Cependant, à partir de cela, Maffesoli nous mène un pas plus loin, en explorant les potentialités de la mobilité – incarnée dans la figuration du nomade – au moment de l’irruption d’autres rapports à l’altérité. Ce dernier est un argument que nous développerons dans le chapitre qui suit, cependant, maintenant, ce que nous voudrions souligner c’est l’ouverture de Maffesoli à l’idée de la tension entre l’instituant et l’institué, et de fait à la créativité dans les configurations d’une socialité qui bouge. Cela est cohérent avec la proposition celui-ci où d’une part l’idée