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La question de l’installation

1.3 Vers une sociologie des migrations

1.3.1 Le développement des théories sur les migrations internationales

1.3.1.3 La question de l’installation

Lorsque l’on parle de l’installation des migrants, nous sommes confrontés à des sujets tels que les modèles d’intégration, les pratiques d’établissement, les première et deuxième générations, etc. Ce premier sujet – l’intégration – qui touche la question de l’installation, dépasse largement le domaine de déplacements de population29. Nous avons choisi de présenter ici des théorisations qui le traitent – en

même temps qui le font avec les autres sujets mentionnés – dans le cadre des études !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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D’après Dominique Schnapper (2008), le sujet de l’intégration, au niveau du processus et au niveau des politiques publiques, dépasse largement la problématique des migrations, touchant à l’ensemble de la société. A cet égard « L’intégration de tel ou tel groupe particulier à la société déjà constituée n’est qu’une des dimensions de l’intégration de la société dans son ensemble ou de l’intégration systémique. Les deux phénomènes sont indissociables. On ne peut séparer l’intégration des individus – migrants ou non migrants – à la société, de l’intégration de la société dans son ensemble » (Ibid. paragraphe 10)

de migration : les théories sur l’Assimilation classique ou convergente, l’Assimilation segmentée et le Transnationalisme. Celles-ci obéissent à une tradition étasunienne des études sur l’immigration, d’abord concentrée sur l’immigration européenne et donnant lieu à la proposition de l’assimilation classique, et ensuite concentrée sur l’immigration d’autres origines et contestant ce paradigme. Quant à cette tradition, la sociologue Mirna Safi (2011) signale que l’École de Chicago a été la promotrice d’une perspective assimilationniste qui a dominé plusieurs années les études sur l’immigration dès 1920 et que, même si celle-ci a été mise en question ultérieurement, son influence a touché fortement les idées françaises sur la matière. Cependant, d’après Rea et Tripier (2008), la sociologie européenne a présenté des réserves par rapport à la notion d’assimilation, en faisant écho au devenir particulier de ses mouvements de population – par exemple, le colonialisme et post colonialisme. Ainsi, dans le contexte français, ce serait la notion d’intégration « à laquelle sociologues et politiques s’échinent à donner un contenu depuis que l’assimilation est devenue un gros mot » (Tribalat, 2011 : paragraphe 3). Par conséquent, il semble difficile d’établir un parallèle en définissant deux traditions bien délimitées, et de plus ce ne sera pas notre objectif. Nous voudrions surtout relever les tensions partagées par rapport aux problématiques de l’intégration et de l’appartenance. Deux problématiques qui sont au cœur du développement de la pensée sur l’installation des migrants dans les sociétés d’accueil.

Selon Mirna Safi, les travaux de l’École de Chicago ont relevé que l’intégration est « un processus individuel de convergence des caractéristiques des immigrés vers les caractéristiques moyennes de la société d’accueil » (Ibid. paragraphe 3). Donc, une fois les immigrants arrivés, même si le rapport avec la société d’accueil est marqué par des périodes de conflit, le résultat sera indéfectiblement l’assimilation30. D’après Safi, la contribution de cette école a été de

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30 Pour illustration, d’après le travail de Park et Burgess à propos du « cycle de relations raciales »

(1921), « l’assimilation est un processus d’interpénétration et de fusion dans lequel des personnes et des groupes acquièrent la mémoire, les sentiments et les attitudes d’autres personnes et groupes et, en partageant leurs expériences et leur histoire, sont incorporés avec eux dans une vie culturelle » (Cité in Rea et Tripier 2008, p. 12). La compatibilité de cette notion d’assimilation avec le vécu du conflit serait liée à l’influence de Georg Simmel sur la réflexion de Park. Ainsi, celui-ci a intégré une perspective dans laquelle le conflit, comme toute action réciproque en Simmel, a une fonction socialisante, dont le rôle n’est pas seulement d’assurer la préservation des liens à différentes échelles, mais plus encore, d’être un de ces éléments constitutifs. Selon Simmel (2013) dans l’unité de l’individu et de la société, «la contradiction et le conflit non seulement précèdent cette unité, mais ils sont aussi à l’œuvre à chaque instant de sa vie » (Ibid. p. 266). Ainsi, il est compréhensible que dans le cycle des relations de Park et Burgess, lequel finit par l’étape de l’assimilation, le conflit soit le moment de la « prise en conscience » des concurrents ou rivaux et « une source de rencontres d’intérêts » (Rea et Tripier 2008 :11).

faire face aux modèles idéologiques, d’abord à l’americanization et ensuite melting

pot, à travers « le projet scientifique précis de l’étude de l’assimilation, en forgeant un

arsenal d’outils conceptuels toujours utilisés aujourd’hui : acculturation, assimilation, communauté, ségrégation, etc. » (Ibid. paragraphe 10). Ainsi, même si n’existait pas dans cette école un auteur spécifique de la théorie assimilationniste par rapport à l’intégration31, ses chercheurs ont contribué à la configuration du paradigme classique

basé sur la notion d’intégration « comme un parcours individuel dont la vitesse et le résultat final dépendent des caractéristiques des migrants et de leur durée de séjour » (Safi, 2006 : paragraphe 1) ; et l’assimilation comme un processus naturel et définitif où l’attente est la « convergence uniforme et unilatérale (straight line) des caractéristiques des immigres vers une sorte de caractéristiques moyennes de la société d’accueil » (Safi, 2011 : paragraphe 8).

Concernant le cas français, d’après Catherine Wihtol de Wenden (2011), dans les périodes de l’entre-deux-guerres et des ‘Trente glorieuses’ l’incorporation des étrangers a été marquée par une perspective notamment assimilationniste. Ainsi, ce serait à la fin de cette période que le sujet de l’intégration acquiert de l’importance, au milieu des processus de regroupement familial des immigrants pour lesquels l’installation n’était pas visée32. Ce changement aurait impliqué la mise en jeu d’une

autre conception sur la coexistence des nationaux et des étrangers. Ainsi, par rapport à !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

31 Selon Safi, il s’est passé des années avant qu’un auteur développe une théorie explicitement sur

l’assimilation. Ainsi, en 1964 l’ouvrage Assimilation in American life : the role of race, religion and national origins, du sociologue Milton Norton, a vu le jour. Du point de vue de Safi, les contributions de ce travail analytique pour l’étude des migrations sont importantes à deux titres. D’abord, la distinction entre l’assimilation et l’acculturation. L’assimilation correspondrait à « l’ensemble de la dynamique du devenir des populations minoritaires et se compose de plusieurs autres dimensions : l’intermariage, la dimension structurelle (…), la dimension identitaire, l’absence de discrimination et d’hostilité de la part de la société d’accueil et enfin la participation civique et politique » (Ibid. paragraphe 13). L’acculturation pourrait exister et se maintenir sans que d’autres dimensions de l’assimilation se manifestent. Ensuite, la place donnée à la dimension structurelle dans le processus assimilateur, dans la mesure où elle aurait un impact sur les autres dimensions. Celle-ci participerait à la diminution de la discrimination et l’hostilité, augmenterait la probabilité des mariages mixtes, impliquerait un affaiblissement du ‘sentiment identitaire’ et, en conséquence, renforcerait les liens des immigrés avec les institutions de la société d’accueil. Compte tenu de tous ces éléments, d’après Mirna Safi, ce travail « reste assez intrinsèquement lié au paradigme classique ; le dessein de Gordon était d’ailleurs d’élaborer une formalisation théorique de ce dernier plutôt que l’attaquer. L’élément crucial de ce lien réside dans la conception toujours unilatérale de l’assimilation ; il s’agit d’un ensemble de transformations du groupe minoritaire vers le mainstream » (Ibid. paragraphe 16).

32 Selon Wihtol de Wenden (2011), à l’époque, la fermeture des frontières « a accéléré le mouvement

de regroupement familial amorcé auparavant, amenant femmes et enfants sur le territoire français quand les migrant ont craint de ne plus pouvoir faire des allers retours avec leur pays d’origine comme

la perspective assimilationniste de la période antérieure, cette nouvelle conception « ne requiert plus l’abandon de toutes les caractéristiques culturelles et linguistiques au moment de l’entrée ou de l’installation en France » (Ibid. paragraphe 2). Par ailleurs, selon la sociologue et politologue, si pendant les années 70 voit le jour la notion d’intégration, le début des années 80 se caractérise par une « frénésie législative » où se régule « non seulement l’entrée et le séjour des étrangers – ce qui hypothèque souvent les conditions de l’intégration –, mais aussi le droit de la nationalité, la lutte contre les discriminations, la politique de la ville et la laïcité » (Ibid. paragraphe 3).

Toutefois, selon Rea et Tripier (2008), le paradigme classique de l’assimilation que nous venons d’énoncer ne serait pas absent de certaines propositions en France et se traduirait en un entendement de l’intégration où cette dernière signifie l’incorporation des individus dans une seule communauté d’égaux, au-delà des appartenances individuelles. Cette communauté correspond à la nation régie par l’État, dont les coordonnées de l’intégration de ses membres seraient la séparation de la sphère publique et privée et la prééminence des droits individuels. Dans ce contexte, la coexistence de cultures diverses que suppose la présence d’étrangers est conçue d’une part comme une problématique qui fait partie de la sphère de la vie privée et d’autre part, comme momentanée à l’attente du processus d’acculturation. Par conséquent, à partir d’une telle perspective sur l’intégration, on pourrait comprendre que le grand défi que celle-ci devrait surmonter pour se matérialiser, se trouverait dans les appartenances et les identités communautaires qui peuvent être mobilisées avant l’identité nationale.

Le paradigme classique de l’assimilation a été critiqué des deux côtés de l’Atlantique. Aux Etats-Unis, même si l’effort de l’École de Chicago pour contrebalancer les réductionnismes dans l’étude des migrations est reconnu, il n’est pas surprenant que les critiques à ce paradigme ou plutôt à leur application radicale, se concentrent sur les conséquences d’un regard objectivant et hiérarchisant des cultures, et d’un regard naturalisant et individualisant du devenir des processus migratoires. Ensuite, en considérant aussi des appropriations ultérieures de la pensée de Chicago, les critiques au paradigme traditionnel débutent en 1960 à partir de l’observation du devenir de l’immigration non européenne. D’après Mirna Safi, ces critiques peuvent être divisées entres un approche culturaliste et un structuraliste.

D’une part, l’approche culturaliste expose que la continuité des différences ethniques dans la société américaine obéit à une prise de choix et, par conséquent, que l’assimilation est loin d’être un processus inévitable. Les groupes ethniques ne seraient pas des vestiges des migrations, mais des formes alternatives de lien social en eux-mêmes. Ainsi, par exemple, des travaux comme Beyond the Melting Pot, des sociologues Nathan Glazer et Daniel P. Moynihan (1963), indiqueraient qu’aux Etats- Unis, « les appartenances ethniques sont loin de disparaître, mais elles seraient en plus en perpétuelle création et recréation, même au-delà de la troisième génération. Cette persistance de l’ethnicité s’explique selon eux par les liens familiaux, les intérêts économiques de la communauté et l’organisation politique et sociale de cette dernière » (Safi, 2011 : paragraphe 19). D’autre part, l’approche structuraliste également remet en question l’inéluctabilité de l’assimilation, mais aussi l’individuation du processus. Donc, ses critiques se concentrent sur l’existence des mécanismes structurels qui empêchent ou retardent l’intégration, parmi lesquels : la racialisation, la discrimination directe et/ou indirecte et les rapports de domination dans un cadre de relations interethniques. Un exemple de cette approche serait les travaux de la sociologue Mary Waters sur les immigrants des Caraïbes aux États-Unis (1990,1999). Dans ceux-ci, elle expose que « conscients du désavantage qui pourrait découler de leur identification aux Afro-Américains, les Caribéens de couleur de peau foncée ne cessent de tenter de se démarquer de ce groupe. En vain, car les inégalités socio-économiques et spatiales les en rapprochent souvent. Cette absence de choix de ces populations contraste avec la marge d’instrumentalisation que des immigrés de couleur de peau plus claire ont quant à leur identification ethnique » (Safi, 2011 : paragraphe 21)

En ce qui concerne la France, même si nous ne présentons pas des propositions qui distinguent analytiquement les orientations des critiques au paradigme classique de l’assimilation, nous pouvons noter qu’il existe une demande pour la compréhension de l’intégration des migrants comme un processus de grande complexité, de multiples dimensions et de tensions internes. À partir d’une telle perspective il serait possible, par exemple, de réfléchir sur des problématiques comme celles exposées dans le travail de Dominique Schnapper (2008) où elle indique : « Comparés aux descendants des migrants en Angleterre et en Allemagne, les enfants de migrants en France sont les plus ignorants et les plus détachés de la culture

d’origine de leurs parents, les plus totalement acculturés (…) mais ce sont aussi ceux pour lesquels l’accès au monde du travail est le plus difficile. Leur scolarité est la plus longue et leur niveau de diplôme le plus élevé, mais leur ‘intégration structurelle’, ou ‘intégration sociale’, la plus problématique. De plus, dans la mesure où ils sont désocialisés et ne participent guère à la vie religieuse, ils ne bénéficient pas de la solidarité communautaire» (Ibid. paragraphe 11) et, d’ailleurs, « les liens communautaires, plus ou moins encouragés par la société d’installation au Royaume- Uni et en Allemagne, sont, en tout cas à court terme, plus protecteurs que la politique d’intégration individuelle fondée sur l’école et l’emploi, qui est propre à la tradition française » (Loc.cit.)33. Nous pouvons remarquer également ce qu’énonce Catherine

Wihtol de Wenden (2011) à propos du rapport du Haut Conseil à l’intégration sur les défis de l’intégration à l’école dans l’année 2011. Selon la sociologue et politologue, « rappeler le respect de la laïcité quand l’égalité (ethnique, religieuse, sociale) n’est pas respectée et que la fraternité fait défaut dans bien des épisodes du vivre ensemble risque de lui retirer beaucoup de poids » (Ibid. paragraphe 5). Ainsi, « il conviendrait que l’école se penche sur cette nouvelle fracture qui fait qu’en France, ceux qui sont français ne sont pas toujours tous considérés comme tels et que certains Français (‘de souche’ selon eux) se considèrent plus Français que d’autres, parce que ces derniers sont ‘visibles’, soupçonnées d’être mal intégrés – d’après la couleur de leur peau – et musulmans » (Ibid. paragraphe 6).

Compte tenu de ces questionnements de l’assimilation convergente, il nous semble très pertinent de considérer l’indication de Mirna Safi concernant le positionnement des travaux critiques aux États-Unis. Ainsi, la sociologue expose que la plupart de ces travaux intègrent les deux approches (culturaliste et structuraliste) pour discuter le décalage entre la proposition assimilationniste et la réalité des immigrés. D’après Safi, un grand exemple de cet assemblage serait la théorie de l’Assimilation segmentée. Même si cette théorie est développée par rapport au !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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Même si les travaux de Dominique Schnapper ont été catalogués par certains auteurs comme l’exemple français du paradigme traditionnel d’assimilation (Rea et Tripier, 2008), il nous semble fondamental de mentionner sa conception de l’intégration comme un processus social, car à notre avis elle contribue à une pensée complexe sur l’intégration. Selon Schnapper (2008), l’entendement de l’intégration comme processus social impliquerait d’abord que celle-ci est en relation avec les différentes dimensions de la vie collective, et ensuite, qu’elle ne se caractérise pas par sa cohérence, sa progressivité ni par l’uniformité de ses mesures. L’intégration comme processus ne représenterait pas un état de fait une fois pour toutes, mais des tensions permanentes entre dynamiques d’inclusion et d’exclusion.

contexte étasunien et ses particularités, sa contribution au niveau de la proposition d’un cadre d’observation du devenir des migrants en sociétés d’accueil est largement reconnue et, à notre avis, très significative pour le sujet qui nous intéresse ici, c’est-à- dire, l’installation des migrants. Par ailleurs, dans le cadre des études des deuxièmes générations dans lequel s’inscrit la perspective de l’assimilation segmentée, on peut souligner également des recherches européennes comme l’étude Effectiveness of

National Integration Strategies Towards Second Generation Migrant Youth in a Comparative Perspective (2001), qui – faisant honneur à son contexte de formulation

et d’application, ne se concentre pas sur l’assimilation, mais sur l’« intégration » des enfants des immigrés (Moncusí, 2007)34.

Alors, succinctement la théorie de l’Assimilation segmentée traite «le caractère multidimensionnel du processus d’intégration et (…) la diversité des parcours des migrants » (Safi, 2011 : paragraphe 23) et a été développée par le sociologue Alejandro Portes et ses collaborateurs dans les années 90. Cette proposition part de la constatation des défis actuels que doivent affronter les fils des immigrants aux Etats-Unis – marché segmentée du travail, discrimination, racisme et marginalisation en zones urbaines déprimées – par rapport à leur intégration, et comment ces difficultés définissent le devenir des groupes ethniques (Portes, Fernandez-Kelly et Haller 2006). À cet égard, les ‘deuxième générations’35 ne suivent

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34 Selon Albert Moncusí (2007), cette étude, dont les résultats correspondent à l’année 2001, a défini

que pour rendre compte de l’intégration il faut comprendre qu’elle est un processus qui implique différentes dimensions – structurelle, sociale, culturelle et identificatrice – et qui se passe en accord avec chaque ‘contexte national’ – composé par le système d’éducation, le système de travail, la législation relative à la citoyenneté et les différences entre des groupes qui le forment – et avec les rayons des opportunités qu’il offre aux immigrants et à leurs fils. L’étude a suggéré que chaque contexte national est marqué par une proposition à propos de l’intégration sur la base de trois grands modèles : la France et l’assimilation, l’Allemagne et le concept ethnique de la Nation, et les Pays-Bas et la Grande-Bretagne et le multiculturalisme. Les résultats de cette enquête montrent des exemples d’‘intégration segmentée’ des deuxièmes générations : « L’assimilation présente une expansion majeure de l’éducation, de l’acculturation et de l’identification, mais montre des faiblesses dans la formation professionnelle et dans l’emploi. Le modèle allemand, cependant, fournit des réalisations en matière de formation professionnelle et dans l’emploi mais des faiblesses dans l’éducation, l’intégration légale et l’appartenance. Enfin, dans le multiculturalisme, l’emploi et la formation sont combinés avec une éducation assez réussie, mais restent des structures ethniques spécifiques qui compliquent l’intégration culturelle et l’identité » (Ibid. p. 474).

35 La notion de ‘deuxième génération’ est problématique dans la mesure où elle fait référence à des

personnes nées et/ou ayant grandi dans des lieux qui ont fait partie des trajectoires migratoires de leurs parents, et surtout dans la mesure où elle est utilisée dans le cadre de distinctions qui essayent de perpétuer ou de produire de l’‘étrangeté’ entre des ressortissants. Néanmoins, dans le cadre de la recherche en sciences sociales, « le concept vise à répondre au fait démographique que les immigrants ont des enfants et au fait sociologique qu’ils partagent avec leurs parents des formes de discrimination

une trajectoire ni indéfectible ni linéaire vers l’incorporation à la société où ils sont nés et/ou ils ont grandi ; au contraire leur intégration est étroitement liée à la stratification de cette société. Les ‘deuxième génération’ sont confrontés à une société non-homogène, donc leurs trajectoires pourraient s’orienter vers les différents secteurs de celle-ci, dans un parcours dont l’origine était l’itinéraire de leurs parents36. En

conséquence, « la question fondamentale n’est pas si la seconde génération sera intégrée à la société américaine, mais à quel segment de celle-ci elle sera intégrée » (Ibid. p. 9), car « il y a une grande différence s’ils le font en atteignant le niveau d’une classe moyenne éduquée et prospère, ou s’ils sont unis aux classes plus faibles de la population, les victimes du racisme et appauvris de façon permanente » (Ibid. p. 13).

D’après Portes et d’autres, les possibilités qu’ont les ‘deuxième générations’ pour faire face aux difficultés du contexte de réception sont liées à la place de leurs familles dans la distribution des capitaux économique, social, culturel et symbolique. Cette place aurait alors un effet cumulatif des différentiels de capital qui aboutirait à des résultats adaptatifs divers, où la disposition de capital social fait une grande différence. En prenant compte ce dernier élément, d’après Rumbaut et Portes (2001)37,

l’assimilation pourrait se développer selon l’une des manières suivantes :