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Le profil des migrants

2.2 Cartographie globale et cartographie locale

2.2.1 Le profil des migrants

Quant au profil des migrants, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (IOM) si l’on considère les différents flux migratoires, la plupart des migrants sont des hommes à l’exception du flux Nord-Nord40. Toutefois, il y a des

divergences sur ces données. Par exemple, la Banque Mondiale a identifié dans les flux Sud-Sud une plus grande présence de femmes que des hommes et le Département des Affaires Economiques et Sociales de Nations Unies (DAES-ONU) a identifié la même relation par rapport à des flux Nord-Sud (IOM, 2013). Au-delà du désaccord sur les chiffres, il est déjà connu depuis des années que les flux migratoires font face au processus nommé ‘féminisations des migrations». Ce processus indique une participation accrue, et dans certains cas majoritaire, des femmes dans les flux migratoires. Cependant, cette participation ne signifierait pas seulement qu’il existe davantage de femmes qui migrent, mais aussi que de plus en plus de femmes migrent de manière indépendante ou en exerçant le rôle de ‘chefs de famille’, autrefois réservé aux hommes et qu’elles seraient maintenant les actrices principales des transferts de fonds. Toutefois, il est fondamental de reconnaître à la base que les femmes ont toujours migré et qu’une grande partie de leur invisibilité antérieure et de leur visibilité actuelle tien aux cadres analytiques utilisés, qui ont considéré traditionnellement la migration féminine comme une réponse mécanique à la migration masculine.

En ce qui concerne la ‘féminisation des migrations’, il est évident que le sujet mérite une analyse approfondie et particulière, et nous ne voudrions pas nous arrêter sur les impacts de la participation des femmes et leurs rôles dans les processus migratoires, sans avoir réalisé le travail en profondeur que nous croyons nécessaire pour ne pas reproduire des propositions essentialistes à ce sujet. Toutefois, comme cette discussion est installée dans les études des migrations, il nous semble fondamental d’indiquer, au moins, que la féminisation des migrations est plus qu’un accroissement statistique et qu’un processus d’émancipation des femmes. D’après Saskia Sassen (2003), la ‘féminisation des migrations’ serait liée à la ‘féminisation de

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40 À ce sujet, « (...) de manière générale ‘Nord’ veut dire des pays avec des revenus élevés et ‘Sud’ des

pays avec des revenus faibles et moyens, en accord avec la classification de la Banque Mondiale » (IOM, 2013:36).

la survie’, à la réaffirmation de la division sexuelle du travail et à de nouvelles formes d’exploitation des femmes au niveau global.

Par ailleurs, de même que les analyses sur le sexe des migrants se sont développées, en même temps, la période de la vie où les personnes migrent est devenue une donnée intéressante pour l’étude des migrations. Cet intérêt serait justifié d’une part, en relation à l’impact de la variable générationnelle dans les motivations, le développement et les projections de l’expérience migratoire, et d’autre part, en relation à des problématiques spécifiques liées à l’âge des migrants comme le cas, par exemple, des ‘mineurs non accompagnés’ et la retraite des étrangers dans les pays de destination. Cependant, la sélection d’un groupe d’âge pour les participants d’une enquête sur les migrations peut aussi être liée au choix d’examiner une période historique de celles-ci, comme c’est le cas de cette recherche41.

En ce qui concerne le profil des migrants par rapport à l’âge, les statistiques internationales notent que les migrants qui proviennent du Sud sont plus jeunes que les migrants du Nord. En même temps, le Nord concentrerait la plus grande partie des migrants entre 24 et 49 ans et le Sud aurait la présence la plus importante de personnes âgées (IOM, 2013). Par ailleurs, le pourcentage des migrants âgés de moins de 24 ans est plus grand dans le Sud que dans le Nord (IOM, 2013). Dans la même période, l’Organisation Internationale du Travail relève qu’il existerait 28,2 millions de jeunes migrants dans le monde (OIT, 2014) et les Nations Unies indiquent que, 30 % des migrants de l’année 2013 ont moins de 29 ans (Centro de Noticias de l’ONU, 2014). Des chiffres globaux comme ceux-ci prennent en compte généralement les migrations autonomes et même les processus de réunification. Simultanément, ils considèrent aussi les migrations dites volontaires et involontaires.

Par rapport à cette dernière donnée, des chercheurs comme Jorge Martinez (2000) ont indiqué que la jeunesse, apporterait certaines spécificités aux mouvements migratoires. D’une part, les jeunes sont des personnes vulnérables en raison de la période de la vie dans laquelle ils sont qui se caractérise par un moment des changements internes et de définition du rapport au collectif. D’autre part, car ils représentent une force de rénovation à l’intérieur des sociétés de destination du fait notamment de leur entrée potentielle sur le marché du travail, leur début dans la constitution d’un foyer familial et la finalisation ou l’extension de leur formation !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

éducative. Malheureusement, la cohérence formelle entre la jeunesse et la catégorie de ‘population économiquement active’, contribue à ne voir dans les processus migratoires des jeunes que des déplacements dont les motivations et les conséquences sont du type exclusivement économique.

Un troisième élément qui paraît intéresser les organismes internationaux est les qualifications professionnelles des migrants. À cet égard, l’IOM (2013) indique que les migrants actuels sont principalement des personnes peu ou faiblement qualifiées. Selon son rapport, cette caractérisation serait plus évidente parmi les migrants qui participent aux flux Sud-Sud, car ceux-ci représentent comparativement des coûts avantageux et des distances plus courtes, et donc une plus grande accessibilité. D’autre part, les migrants plus qualifiés au niveau éducatif seraient ceux qui participent aux flux Nord-Nord et Sud-Nord. Quant à ces derniers, le rapport de Rodolfo Cordova (IOM, 2012a) sur la migration depuis l’Amérique latine et les Caraïbes vers et les pays de l’Union Européenne, montre que le flux des personnes hautement qualifiées est lié à l’augmentation des étudiants qui font des études supérieures depuis les cinquante dernières années, aux taux locaux de chômage et à l’employabilité dans des conditions de surqualification. Toutefois, il faut prendre en compte que les migrations de personnes hautement qualifiées font aussi partie des nouvelles tendances des cadres migratoires, tout comme les bourses d’études à l’étranger et la mobilité des travailleurs d’entreprises transnationales.

Au niveau de la recherche, les compétences des migrants sont un élément fondamental pour les études qui proposent un lien entre la migration et le développement, et, par conséquent, estiment que les déplacements peuvent avoir une incidence sur la croissance socio-économique des pays d’émigration et aussi sur la prospérité des migrants eux-mêmes. Par rapport aux migrations qualifiées et leur impact dans ces pays, il existerait deux tendances générales dans ces études. D’une part, la perspective qui se concentre sur les bénéfices que peuvent représenter ces migrations, et qui relèvent leur contribution dans la formation et l’expansion des réseaux sociaux et l’augmentation des fonds internationaux. D’autre part, la perspective qui se concentre sur les pertes qui peuvent résulter de ces déplacements, et qui relèvent les déficits causés par la fuite des cerveaux et des travailleurs compétents dans des secteurs fondamentaux pour la production et la création de savoirs, avec le risque, en plus, de la rupture des liens avec les lieux d’origine.

Prenant en compte ces trois caractéristiques, nous pouvons avancer un profil de l’immigrant au Chili et de l’émigrant du Chili, ce dernier étant notre sujet de recherche. Quant au premier, la recherche de la sociologue Carolina Stefoni (IOM, 2011) montrerait une féminisation croissante et une concentration entre 15 et 44 ans. Par ailleurs, les données indiquent une moyenne de 12,3 ans de scolarisation (Matus, 2014). Quant au deuxième, l’information est insuffisante et peu actualisée. Le gouvernement chilien, à travers l’Instituto Nacional de Estadísticas et le Ministerio Relaciones Internacionales, a organisé un enregistrement volontaire des Chiliens à l’étranger pendant la période 2003-2004. D’après ces données, il y aurait 857 781 personnes, dont 50,3 % de femmes et 49,7 % d’hommes. Concernant les groupes d’âge, les données ne sont pas claires, mais quant aux compétences le rapport indique que 24 % des Chiliens à l’étranger auraient fait des études techniques ou universitaires, 73 % auraient fait des études secondaires (complètes ou incomplètes) et 2,5 % n’auraient aucun type de formation (DICOEX et INE, 2005). Enfin, chez les personnes participant à cette recherche, comme nous l’avons déjà indiqué, 52% sont des femmes et 48% des hommes. Au moment de l’entretien, l’âge moyen était de 31 ans, et 85 % avaient fait des études universitaires complètes42, 9 % des études

universitaires incomplètes43 et 6 % des études techniques. Parmi les participants qui

ont fait des études universitaires complètes, 59 % avaient un master44 et 7 % un

doctorat.