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La Slovénie : un pays où domine avant tout le patrimoine karstique

Critère X (anciennement IV) contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les

Chapitre 3 : La reconnaissance du patrimoine géologique dans les différents pays de l’arc alpin

3.5 La Slovénie : un pays où domine avant tout le patrimoine karstique

Aux carrefours d’unités géotectoniques et biogéographique majeures, ce petit pays de 20.273 km2 est riche d’une biodiversité et d’une géodiversité remarquable. L’histoire complexe de la Slovénie au cours du siècle dernier a conduit à une prise en compte lente mais néanmoins progressive de la protection de l’environnement. La naissance du parc national du Triglav illustre les différents rebondissements de cette évolution. En 1908, sous la monarchie austro-hongroise, le professeur de chimie fondateur de l’observatoire séismique de Ljubljana, Albin Belar (1864-1939), propose une première mise sous protection ; mais le projet n’aboutit pas. En 1920, treize personnalités appartenant à la section spéciale pour la protection de la nature de la société du Muséum de Slovénie soumettent un texte fondateur aux autorités, dans lequel est suggéré la création de parcs destinés à la protection des milieux naturels. En 1924, le premier « parc alpin de conservation » voit ainsi le jour. Sa gestion est attribuée, par un bail de 20 ans, à la section de conservation de la nature de la Société du musée de Ljubljana ainsi qu’au Club Alpin Slovène et à l’administration forestière. A l’échéance du bail, vingt ans plus tard, la seconde guerre mondiale éclate, remettant à plus tard les décisions concernant ce que certains appellent déjà le parc national du Triglav. Il faut ensuite attendre 1961 pour que la République fédérale socialiste de Yougoslavie établisse le décret de création du parc (Gauchon, 2008).

3.5.1 Des lois mais une administration et des financements limités

Une première loi est adoptée le 19 février 1921 par l’autorité régionale de Slovénie du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes : la loi de régulation de la protection des espèces animales et végétales rares ou endémiques à la Slovénie, avec une mention particulière pour la protection du milieu karstique. A cette occasion, la gestion des cavités passe à l’autorité régionale.

En 1945, un texte fondateur légifère sur le patrimoine naturel et culturel et installe dans chaque république fédérale ce qui deviendra les Instituts pour la protection des patrimoines naturels et culturels. Sept instituts seront alors créés. Ils ont pour mission de désigner puis de suivre les sites désignés par la loi.

En 1970, une loi sur la protection de la nature puis en 1981 une loi sur le patrimoine naturel et culturel sont successivement établies (Duval, 2007).

Le 26 juin 1991, la Slovénie se déclare indépendante. Elle adopte sa constitution le 23 décembre 1991. Celle-ci comporte certaines dispositions concernant la protection de l’environnement. L'État est responsable de la préservation de la nature et d'un environnement sain. Tout citoyen est quant à lui tenu de protéger la nature. La propriété privée se voit accorder, outre une fonction sociale et économique, une fonction écologique.

En juin 1993, l’Environmental Protection Act (EPA) est adopté. Ce texte qui comporte 112 articles pose les bases d’une gestion intégrée et durable de l’environnement en Slovénie. Deux instituts sont maintenus dans chaque région, l’un chargé de la protection de la nature et l’autre de la protection de l’environnement. En 1994, la protection de la nature est transférée du Ministère de la Culture à celui de l’Environnement.

En 1999 est adoptée la loi pour la conservation de la nature, qui cite pour la première fois le patrimoine géologique en tant que tel dans son article 4 qui précise les champs de définition des éléments de valeur naturelle (Valuable natural features) :

« (3) Valuable natural features referred to in the preceding paragraph shall be in particular geological phenomena; minerals and fossils and mineral and fossil sites; surface and subsurface karst features; caves; gorges and other geomorphological phenomena; glaciers and glacial forms; springs; waterfalls; rapids; lakes; bogs; brooks and rivers with banks;

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shore; plant and animal species and exceptional specimens and habitats thereof; ecosystems; landscape; and designed landscape”.

Cette loi instaure une protection intégrée du patrimoine tant in situ qu’ex-situ. Ainsi, les minéraux et fossiles sont la propriété de l’Etat mais si leur conservation dans la nature n’est pas garantie, leur prélèvement vers des lieux où leur conservation sera assurée est décidé.

Au niveau national, la protection de l’environnement est assurée par le Ministère de l’Environnement et de la Planification spatiale, dont les 20 employés en 2007 doivent faire appliquer les lois votées par le gouvernement. L’Agence pour l’Environnement (Agencija Republike Slovenije za okolje) a un rôle administratif, de contrôle et de respect des procédures. Elle emploie 17 personnes. L’Institut pour la conservation de la nature (Zavod Republike Slovenije za varstvo narave) collecte les données relatives à l’environnement, programme la mise en place du réseau Natura 2000 et met en place des plans de gestion. 70 personnes y sont employées, dont seulement 6 géologues. Cette énumération montre combien les moyens matériels sont limités, l’accent étant fortement mis sur la protection de la biodiversité.

Dans le cadre du programme PHARE, la Slovénie a reçu entre juillet 1992 et 1996 inclus 91 millions d'écus au titre du soutien du processus de transition économique. Au cours de la période jusqu'à 1997 inclus, 4 millions d'écus du programme PHARE ont été affectés au financement de programmes environnementaux. Depuis 1995, le soutien a revêtu la forme d'une aide technique et logistique, par exemple dans la mise en place du Fonds de développement de l'environnement et du programme d'action concernant l'environnement.

3.5.2 Un patrimoine géologique où le karst domine

L’ensemble des mesures accorde un intérêt tout particulier à la protection du patrimoine karstique. Dès 1903, le chercheur Viljem Putik milite pour la protection des spéléothèmes dont il déplore déjà le pillage. Le mémorandum de 1920 propose un premier inventaire des richesses naturelles du pays, dans lequel sont listées trois régions alpines, neuf réserves naturelles, tous les arbres remarquables ainsi que les espèces vivantes en péril mais surtout l’ensemble des grottes du pays. Au cours du siècle, la liste des sites protégés s’allonge, incluant toujours un nombre important de sites karstiques en raison de leur intérêt géologique mais aussi de la biodiversité qu’ils abritent. En 1999, l’adoption de l’Acte pour la Conservation de la Nature s’accompagne d’un inventaire référencé dans un système d’information géographique. Il recense 6.519 sites dont 32,09 % d’importance nationale et 67,91 % d’importance locale (Tableau 1.7). 8.382 grottes sont aussi répertoriées mais dans un inventaire spécifique.

Type de patrimoine naturel Nbre de site d’importance locale

Nbre de sites d’importance nationale Géomorphologique 928 760 Géomorphologie souterraine 33 188 Géologique 293 393 Hydrologique 1101 722 Botanique 288 426 Zoologique 157 303 Ecosystème 785 413 Arbres 2158 434 Artificiel 101 11

Tableau 1.7 : Répartition typologique des patrimoines naturels (source : Hlad, 2009).

Sur les 9.494 sites naturels répertoriés, 46, 53 % relèvent du patrimoine géologique, sans compter les géosites karstiques. Parmi ceux-ci, 115 monuments géomorphologiques naturels et 102 hydrologiques sont protégés par des dispositions spéciales (Hlad, 2009).

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3.5.3 Bilan

L’histoire complexe de la Slovénie au cours du XXe siècle explique en partie la difficulté de retracer les étapes de la prise en compte du patrimoine naturel puis géologique dans ce pays. L’industrialisation s’étant concentrée, dans le pays, en quelques points névralgiques, le patrimoine naturel est ainsi resté sans avoir à subir une forte pression anthropique et donc sans nécessité de mesures drastiques de protection. Le Parc national du Triglav a longtemps mobilisé les énergies pour sa protection et le patrimoine karstique a été le premier a être inventorié et protégé par la législation slovène.

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