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1-Sisyphe et la notion du retour

Sisyphe dans « il était une fois un vieux couple heureux »

V- 1-Sisyphe et la notion du retour

V-1-1- Sisyphe

Roi de Corinthe, Fils d’Eole, époux de la Pléiade Mérope, Sisyphe1dans la mythologie grecque, est l’aïeul de Bellérophon, le héros corinthien le plus vaillant et le plus fort. L’aïeul n’avait pas la même image que son petit-fils. Sisyphe est le héros le plus rusé de Corinthe ; « On alla même jusqu’à lui

donner pour fils, Ulysse »2, vu la ressemblance frappante entre les deux

figures mythiques. D’autres mythographes réfutent cette paternité.

L’époux de Mérope fut connu dans la mythologie grecque par le châtiment qui lui fut infligé par les dieux. Et si les mythographes ne s’accordent pas sur la descendance de Sisyphe, ils ne le font pas non plus sur l’origine et la cause d’un tel châtiment. Diverses versions ont été développées, essayant chacune d’apporter des explications et de relater les circonstances ayant conduit tel roi à telle punition.

L’une des versions se résume dans l’ambition et l’hypocrisie du roi de Corinthe. Ses deux caractères excessifs le firent condamner à rouler, sur la pente d’une montagne, un énorme rocher qui redescendit, chaque fois, qu’il approchait du sommet.

Une autre version se focalise sur la dévastation de l’Attique3 qui lui a coûté si cher. Il fut tué par Thésée, l’un des plus grands héros grecs de l’Attique, fils d’Æthia et d’Egée, connu par sa force prodigieuse qui ne pouvait lui avoir été conférée que par un dieu, « Poséidon était son père,

selon des traditions mythiques admises 4».

Pour d’autres mythologues, ce fut lui qui dénonça au fleuve-Asopos, « fleuve du Péloponnèse, qui se jette dans la mer de Corinthe. Engendré par

1 Petit Larousse des mythologies du monde, Op. Cit, p.699.

2 Ibid. p.332.

3 L’Attique : est la région qui entoure Athènes.

Chapitre II : Sisyphe dans « il était une fois un vieux couple heureux »

Océan et Téthys, il avait eu deux fils et vingt filles d’une fille du fleuve

Ladon »1 ; Egine, l’une de ses filles, fut enlevée par Zeus. Le roi de Corinthe

monnaya l’information au dieu-fleuve en échange d’une fontaine pour sa citadelle. La fureur du père gonfla ses eaux et dévasta toute la contrée. Zeus foudroya le père indigné, dont les eaux durent, en toute hâte, regagner leur lit.

Fou de rage, Zeus décida de punir le dénonciateur des secrets divins. Il lui envoya « Hadès », (Dans d’autres versions, c’est Thanatos : dieu de la mort qui fut envoyé par Zeus)2 pour lui infliger le châtiment approprié. Rusé de caractère, il put échapper à la paire de menottes avec laquelle Hadès se présente auprès de lui. En faisant croire au dieu des enfers que les menottes ne ferment pas, Sisyphe finit par les lui enfiler. Une deuxième ruse et les erreurs ne se pardonnent pas entre dieux. Celui qui châtia, fut châtié, menotté et emprisonné.

Ainsi, la fureur de Zeus ne put être retenue. Il envoya Arès, dieu de la guerre, afin de délivrer le dieu des ténèbres et capturer l’insolent Sisyphe. Celui-ci se rendit sans lutte. Cependant, avant de mourir, le rusé recommanda à sa femme de ne pas lui rendre d’honneurs funèbres ; une fois dans le royaume de Thanatos, il se plaignit de la négligence de sa femme et demanda juste une permission pour aller lui infliger la punition qu’elle méritait. Le dieu des morts céda devant de telles réclamations. Rendu à la lumière, Sisyphe refusa de revenir au monde des ténèbres.

Encore une ruse et, la vie reprit. Mais la colère des dieux éclata à cause de telles roublardises. L’intervention d’Hermès, messager des dieux et conducteur des âmes aux enfers, fut incontestable. Il dut se saisir du mort récalcitrant. Sa punition fut grave, selon la gravité de ses actes. Il fut condamné à rouler sur la pente d’une montagne un énorme rocher qui retombait chaque fois qu’il s’approchait du sommet.

Dans d’autres versions les mythologues soutiennent que le châtiment infligé à Sisyphe n’est que la conséquence de l’irritation des dieux devant au sacrilège commis : instruire les hommes sur des mystères divins3.

1 Félix Guirand et Joël Schmidt, Op.cit. p. 623.

2 Le messager de la mort, chargé de conduire Sisyphe à la vie des ténèbres, diffère entre les deux dictionnaires cités.

Une dernière version, puisée dans la littérature latino-médiévale1, est celle qui signale la ruse de Sisyphe comme source de son malheur. Les dieux furent furieux de l’esprit rusé et des stratagèmes du roi de Corinthe. La légende évoquait l’histoire du troupeau possédé par ce dernier et qu’enviait le dieu Autolycos . Un constat frappa l’esprit du possesseur des bêtes : le nombre de ses bêtes diminuait tous les jours, alors que celui des bêtes d’Autolycos augmentait chaque jour. Le doute s’infiltra dans le cœur de Sisyphe. Comme à tout doute, il faut une preuve et la ruse ne manquait pas à Sisyphe, au contraire, elle lui est toujours associée, alors il décida de se doter d’une pièce à conviction.

La magouille est l’art de Sisyphe. Il grava, sous le sabot de ses animaux, son monogramme. Comme de coutume, le voleur des bêtes se servit. Mais les traces fournies étaient une toile d’arachnides. Attiré vers la trappe, Autolycos qui habitait non loin de Sisyphe, était suffisamment enchainés de preuves concluantes. Devant la présence des témoins, convoqués pour assister à l’accablement du voleur, l’étable fut inspectée et les animaux volés furent reconnus à leurs sabots gravés. Sisyphe réalisa son ordalie et devint, par la suite, l’amant d’Anticlée, fille d’Autolycos et parvint à fonder Euphyra, connue sous le nom de Corinthe et peuplée d’hommes nés de champignons.

La colère des dieux fut jusqu’alors retenue. Cependant, lorsqu’Egine fut enlevée par Zeus, et que Sisyphe dénonça l’acte commis auprès du père de la fille, ils ne purent s’empêcher de manifester leur colère. Les dieux apprirent que le fleuve Asopos venait à Corinthe avec l’objectif de retrouver sa fille et de se venger de Zeus et que le dénonciateur des dieux avait négocié une source perpétuelle dans la citadelle de Corinthe en échange du secret divulgué. Les magouilles du rusé ne furent Jamais interrompues. Elles déclenchèrent une furie incomparable chez les dieux. Ceux-ci décidèrent d'envoyer le traitre dans le monde des morts et d’en finir avec toute les sortes de ruse et de stratagèmes qu’il ne cessa d’utiliser aux moments de sa conduite aux enfers.

Les versions du mythe de Sisyphe diffèrent l’une de l’autre. Mais si elles divergent sur certains points, elles convergent sur d’autres. La cause du châtiment est évoquée dans une pluralité mythique et narrative. La conduite

1 Œuvre de Virgile, Traduction par M. L’Abbé Des Fontaines, Edition numérisée par Google : http://books. google.fr, consulté, le 06 juin 2012.

Chapitre II : Sisyphe dans « il était une fois un vieux couple heureux »

de Sisyphe aux enfers est variable d’une version à une autre. L’ensemble des mythologues ne s’accordent pas sur l’identité du conducteur du rusé au monde ténébreux. Cependant, un point analogue, entre les multiples versions, est celui du châtiment. Quelle que soit la pluralité des versions et les péripéties narratives de l’histoire du roi de Corinthe, le châtiment est unique : faire rouler éternellement un rocher sur la pente d’une montagne avant d’atteindre le sommet, ce rocher retombe et Sisyphe se retrouve obligé de refaire éternellement la même corvée.

Tous les efforts de Sisyphe ne lui permettent point d’atteindre sa destination ; arriver au sommet et interrompre cette tâche. Seuls les dieux savent qu’il ne pourra jamais réaliser son désir et qu’il demeurera dans une situation d’attente d’un espoir irréalisable. On lui infligea une situation délicate, le retour au point du commencement d’une manière perpétuelle.