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Section 1 La sphère professionnelle

Dans le document Le droit selon la musique (Page 57-66)

Partie 1 Le droit à l’usage de la musique

3. S OUS PARTIE 3 L ES ACTEURS DU DROIT

3.1. Chapitre 1 Les professionnels du droit

3.1.1. Section 1 La sphère professionnelle

En sentinelle du droit, le héraut présente une figure inaugurale et originale. Dans une société ancienne, il constitue l’écho du législateur (Turandot de Puccini, acte I)95, du juge

(Lohengrin de Wagner, acte II96 ou Le Livre des sept sceaux de Schmidt, deuxième partie)97 ou du pouvoir

(Die Bürgschaft de Weill, acte II)98.

Dans une société primitive, un instrument de musique, une trompe de corne, avertit de l’éminence d’un phénomène juridique (le mariage dans le Crépuscule des Dieux de Wagner, acte II, scène 3).

- le législateur

95 Un mandarin rappelle au peuple de Pékin la loi qui régit l’Empire.

96 Le héraut royal annonce le sort réservé aux deux combattants de l’ordalie de la veille : la bannissement pour

l’un, le protectorat du Brabant pour l’autre.

97 Le parthe archer, héraut de la justice, apparaît sur une musique de marche héroïque.

98 Le Crieur public : « A la population de la ville ! Les Grandes Puissances s’étant emparé de ce pays envoient

Le législateur pose la norme. Les cas où la musique accompagne la naissance de la loi ne sont pas rares mais ne disputent pas la comparaison avec les cas où elle est exécutée.

Les divinités sont en général exemptes de toute représentation dans leur activité normative, les lois divines étant le plus fréquemment invoquées une fois établies. Leur nature éternelle ou immémoriale, le mystère auréolant leur création comme leur transmission souvent prophétique sont à la source de cette prétérition.

En musique, le législateur profane revêt, tel Janus, deux visages différents : le législateur unique ou l’organe légiférant.

Dans le premier cas, la personnalité du législateur, que celui-ci agisse seul ou au sein d’une assemblée, est un paramètre susceptible de déterminer ses motivations.

Ainsi lorsqu’une loi (Turandot de Puccini, acte I) est proclamée par un messager99, il existe

de fortes présomptions que le texte normatif réponde à des aspirations propres à son mandant. De même, la participation active d’un membre d’un organe délibérant

(l’assemblée des boyards dans Boris Godounov de Moussorgski, acte IV scène 1) laisse peu de doute sur

ses convictions personnelles100.

Dans le second cas, l’institution législative est appréhendée in globo, sans individualiser ceux qui la composent. Au gré des œuvres, il peut s’agir du sénat romain (Lucio Silla de Mozart, acte II, scènes 12 et 13)101), ou athénien (La Patience de Socrate de

Telemann, acte I) , du Parlement britannique (Henri VIII de Saint-Saëns, acte III), de la diète des

cantons helvétiques (Nicolas de Flue d’Honegger, acte III) ou d’un « viétché » (La Pskovitaine de

Rimski-Korsakov, acte I, second tableau)102. Cet anonymat sied à la nature générale et

impersonnelle de la loi.

99 Un mandarin rappelant au peuple de Pékin la loi de l’Empire.

100 Le prince Chouïski, tancé par les boyards pour sa traîtrise envers le tsar.

101 Lucio Silla demande aux membres du sénat romain de consentir à son mariage avec Guinia, considérant que

leur silence vaut acquiescement.

- le juge

La figure du juge tient une place plus marquée dans le répertoire musical, car la publicité de la justice dépasse communément celle de la loi (que l’on exécute pourtant souvent sans le savoir). Somme toute, en musique comme en droit, la loi et la justice ne sont pas d’identique nature.

En valeur absolue, l’office du juge sacré ne diffère pas fondamentalement de celui du juge profane, dotés chacun du même imperium : le pouvoir supérieur de trancher l’espèce qui lui est soumise selon la loi en vigueur, ou la loi la plus adaptée en cas de conflit de lois (Libuse de Smetana, acte I, Jugement de Libuse)104.

Au-delà, tout est affaire de transcendance : le juge divin (ou d’onction divine) puise dans sa conscience (la sagesse de Salomon, la clémence de Titus) ou ses prescriptions souveraines (Le Jugement dernier) les motivations de son arrêt, souvent sans appel.

Le détenteur d’un pouvoir absolu, tel un roi (Don Carlos de Verdi), un seigneur (Les Noces de

Figaro de Mozart), un proconsul (Pilate) ou le capitaine d’un navire (Billy Budd de Britten)105,

dispose de la même latitude à trancher un litige en équité si ce n’est selon son bon plaisir.

Même cantonné dans le strict exercice de ses fonctions judiciaires, le juge peut statuer en considération de l’idéal qui l’anime.

103 Le sénateur Murena est conduit en tant que tel à juger l’amant de sa fille et à signer son ordre d’exécution. 104 Selon deux coutumes différentes, un héritage revient à l’aîné ou doit être géré conjointement par les deux

héritiers.

juge religieux (le Grand Inquisiteur dans Don Carlos de Verdi, acte IV), pour le juge remédiant à

la dissolution du pouvoir régalien (L’Ouverture Les Francs-Juges de Berlioz)106 par exemple. Le juge du siège est représenté en musique dans sa fonction de conciliation (Die

Bürgschaft de Weill, acte II), d’instruction (Le Calife de Bagdad de Boieldieu)107 et de jugement

(Pierre Le Grand, tsar de Russie de Donizetti, acte I, troisième tableau).

Il est qualifié de juge civil (Le Testament de Tante Caroline de Roussel), pénal (Dalibor de Smetana),

fiscal (Tosca de Puccini). Il peut statuer seul (Un Bal masqué de Verdi, acte I, scène 4) ou au sein

d’une instance collégiale (La Pie Voleuse de Rossini, acte II, scène 9), rien n’empêchant un

magistrat de débattre de l’affaire avec ses collègues avant même l’instruction préalable (Can-Can de Porter)108.

Curieusement, la musique fait peu de cas de magistrats rendant une justice impartiale et sereine. Encore que, en bas de l’échelle, le juge de paix attire la confiance par son humanité (Die Bürgschaft de Weill, actes I et II). La palme revient au juge qui s’est démis de

ses fonctions pour ne pas avoir pu empêcher la condamnation d’un innocent (Nicolas de Flue d’Honegger, acte I).

Enfin, le procureur apparaît sous l’apparence glaciale de l’accusateur public du Tribunal révolutionnaire (André Chénier de Giordano, acte III)109, l’allure défaite du soupirant pris sur le vif (Le Fifre enchanté d’Offenbach)110 ou la figure singulière d’un gardien de phare

(Les Naufrageurs de Smyth, acte III)111, quand il ne pousse pas l’un de ses parents à commettre

une faute par abstention (Félix ou l’enfant trouvé de Monsigny). Une œuvre conte même les

mésaventures d’un ancien comédien qui veut épouser la carrière de procureur fiscal

(L’Ivrogne corrigé de Gluck).

106 Les Francs-juges avaient pour objectif de contrebalancer l’explosion politique de l’Empire allemand au

13ème siècle par une unité juridictionnelle qui rendait justice de manière expéditive (les condamnés étaient généralement pendus).

107 Le Calife de Bagdad est un opéra-comique en un acte où le juge (le cadi) de Bagdad se fait ridiculiser en

voulant éviter le mariage du calife avec sa promise.

108 Dans une affaire pour outrage à la morale publique, le président Marceaux et les juges Forestier et Barrière

débattent entre eux de l’applicabilité d’une loi d’un siècle existent depuis un siècle.

109 Fouquier-Tinville : « La mort ! Il fait signe aux condamnés de se retirer ».

110 Un procureur est l’amant d’une femme dont le mari décide justement d’aller le consulter pour plaider le

séparation.

111 Un gardien de phare, Lawrence, est nommé procureur lors d’un procès improvisé de naufrageurs pris sur le

Le statut de l’avocat prévaut, en musique, sur sa fonction. Toutefois, une place est à réserver au Christ dans son ministère de paraclet (Le Messie de Haendel, partie III, n°50 Soprano 112 et

surtout la cantate Herr Jesu Christ, wahr’ Mensch und Gott de J.-S. Bach113) ou à la Vierge (dans les Stabat Mater

114 et Salve Regina115) en charge de défendre les fidèles au Jour du Jugement

L’avocat intervient somme toute peu à la barre. Il advient même que des procès se déroulent hors sa présence (Billy Budd de Britten, acte I, deuxième tableau), les accusés étant réduits à

plaider leur propre cause (Peter Grimes de Britten, prologue). Le procès le plus chanté de tous les

temps ouvre la voie douloureuse de ces défendeurs sans défense (Passion selon Saint Matthieu de J.-S. Bach, partie I, n°19, récitatif de ténor avec chœur)116.

Pourtant, la plaidoirie est un exercice oratoire qui aurait été propice à l’écriture d’un air brillant (une fois surmontée la difficulté de mettre un texte juridique en musique). En revanche, elle peut être désastreuse : un avocat a si mal défendu les intérêts de son client que le tribunal a aggravé sa peine (La Chauve-souris de J. Strauss, acte I, scène 6).

De la sorte, les défenseurs les plus représentés en musique, souvent improvisés (un page dans Un Bal masqué de Verdi, acte I, scène 4, un libraire dans Grandeur et Décadence de la ville de Mahagonny de Weill,

acte III), apparaissent comme des succédanés d’avocat, sans être maître dans l’art de la

parole et de l’argumentation propre à cette profession.

Plus fréquemment, l’avocat est dépeint dans sa mission de conseil (Le Procès de Von Einem, partie II, sixième tableau) ou en chasse (Porgy and Bess de Gershwin, acte II scène 1117 ou l’Opéra des Gueux de

Gay, acte I) et en passe de gruger un client (Die Advokaten de Schubert).

112 « Christ est celui qui est mort, et qui, de plus est ressuscité, qui est assis à la droite de Dieu et qui intercède

même pour nous ».

113 Récitatif basse : « Le jour où ton serviteur paraîtra devant ton tribunal, où mes pensées m’accuseront, alors,

veuille toi seul, ô Jésus, être mon avocat (…) ».

114 « Puissé-je être défendu par vous, ô Vierge, au jour du jugement ». 115 « Ô vous, notre avocate, tournez vers nous vos yeux compatissants ».

116 « Le juge le conduira devant le tribunal devant lequel il n’aura ni réconfort, ni assistance ». 117 L’avocat noir (à Bess) : « Quand tu t’adresses à la Cour, dis : “vot’ Honneur” ».

Son statut de notable se conjugue avec celle d’homme de confiance de sa clientèle établie

(L’Affaire Makropoulos de Janacek, acte I), d’un proche de la famille (Un Roi écoute de Berio)118voire d’un

figurant encombrant (Les Voitures versées de Boieldieu, acte I)119.

Sans rapport avec sa profession, il campe le client d’un hôtel à la faveur duquel il rencontre sa future épouse (L’Auberge du Cheval blanc de Benatzky, acte I)120 d’un patient purgé pour cause d’indigestion (Le Barbier de Séville de Rossini, acte II, scène 3)121 ou d’un docteur (en droit) venant au secours d’un malade sans être médecin (Le Destin de Janacek, acte III)122.

Force est donc de constater que la fonction de l’avocat en ce qu’elle offre d’essentiel, la faculté donnée à chaque justiciable d’être défendu (l’avocat des plaignants dans Christophe Colomb de

Milhaud, acte I, 6 et 7)123, est négligée par la musique, dont la préférence va au notariat.

- le notaire

Le notaire, désigné parfois sous le vocable antique et de tabellion (Béatrice et Benedict de Berlioz124, acte II, scène 5, Les Brigands d’Offenbach, acte II, les Cloches de Corneville de Planquette, acte III,

l’Omelette de la Follembuche de Delibes) est sans conteste le favori des professionnels du droit

en musique, car il est présent dans de nombreuses œuvres instrumentales ou lyriques.

118 Dans la partie II, Prospero se retrouve dans une salle du trône où il convoque ses esprits, tandis que les

personnages du monde réel, son épouse, son avocat, son docteur et une infirmière s’agitent autour de lui.

119 Un hobereau angevin n’entretient pas ses routes afin d’accueillir chez lui des accidentés de la circulation

susceptibles de lui apporter des nouvelles de Paris. Une nouvelle voiture versée devant le château contient cinq personnes dont un avocat.

120 L’avocat Otto Siedler, qui proteste contre l’attribution de sa chambre habituelle à un autre client. 121 Figaro : « Et je dois aider l’avocat Bernadotte qui a depuis hier des maux d’estomac ».

122 Au conservatoire, un composteur s’effondre, frappé par une crise cardiaque. Le docteur Suda, pourtant

avocat et non médecin de son état, vient à son secours.

123 Dans un procès en postérité de Christophe Colomb, l’avocat de la partie plaignante se manifeste (…). Partie

plaignante et défense commentent l’attitude du roi d’Espagne à l’égard de Christophe Colomb.

124 Le tabellion instrumente un contrat de mariage entre Héro et Claudio, puis le même pour les deux amants

mariage, actes juridiques les plus répandus dans le répertoire musical. Il est un officier ministériel commode à mettre en scène, son intervention se réduisant à évoquer un acte (Françoise de Rimini de Zandonai, acte I)125, cependant qu’il peut l’établir, le lire (Cosi Fan Tutte, acte II, scène 17), le discuter (Le Chevalier à la Rose de R. Strauss, acte II)126, l’augmenter (Don Pasquale de Donizetti, acte II) et le faire signer (Le Barbier de Séville de Paisiello,

acte II) selon la volonté des protagonistes. Il est enfin le scribe officiel des participants

à l’œuvre, qui le convoque (Le Roi l’a dit de Delibes, acte II) 127, l’éconduise (L’Elixir d’amour de

Donizetti, acte II, scène 1)128 et en dispose, dans la grande tradition de la commedia dell’arte

italienne.

Hors les rares occasions où il reçoit en son étude (pour un divorce, Intermezzo de R. Strauss,

acte II, scène 2)129, l’immixtion du notaire dans une scène de la vie privée est emplie de

solennité et de componction (pour un testament, Gianni Schicchi de Puccini). Elle intervient

parfois au climax douloureux d’une œuvre (Lucia de Lamermoor de Donizetti, acte II)130, et participe souvent à son heureux dénouement (Le Barbier de Séville de Rossini, acte II, scène 1 ou Le Barbier de Séville de Paisiello, acte IV) 131.

Le secrétaire d’un notaire est évoqué une seule fois en des termes peu flatteurs (Peines

de cœur d’une chatte anglaise de Henze, acte II, quatrième tableau)132.

- les auxiliaires de justice

125 A Ravenne, le frère de l’héroïne parle avec Ser Toldo Berardengo, le notaire, du mariage de sa jeune sœur,

pour raison d’Etat, avec l’un des trois fils de Malestata da Verrucchio.

126 Fort à propos, le notaire appelle le baron Ochs pour dresser le contrat de mariage dans une pièce voisine. 127 Le notaire vient dresser le double contrat de mariage mais le frère des deux sœurs à marier s’oppose au

mariage.

128 Le notaire est appelé à dresser le contrat de mariage et devra attendre la fin d’un acte particulièrement agité

pour le régulariser.

129 Une épouse vient évoquer son divorce avec son notaire qui loue une chambre à son mari dans sa propre

maison.

130 La conclusion du contrat de mariage intervient au milieu de l’œuvre et signe le basculement de la résignation

à la folie de l’héroïne.

131 La signature subreptice et in extremis du contrat de mariage entre le Comte Almaviva et Rosine empêche le

mariage de Rosine avec son tuteur.

(Arabella de R. Strauss, acte I)133qui, en droit, sont tenus de le solliciter pour faire exécuter une décision de justice. Ce déficit trouve sans doute sa source dans le fait que le siège de créanciers cupides (Christophe Colomb de Milhaud, acte I, 1.)134et menaçants (Doktor Faust de

Busoni, deuxième prologue)135, usant de pouvoirs coercitifs (Monsieur Brusquino ou le fils par hasard

de Rossini)136 ou pillant la résidence même de leur débiteur (L’Amour de Danaé de R. Strauss,

acte I)137 est plus attrayant musicalement que l’exécution froide d’une saisie mobilière.

Il recouvre un visage plus humain dans le cas où il est affectivement le dindon d’une intrigue sentimentale (Un Mari à la porte d’Offenbach)138.

Le greffier est l’acolyte du juge sédentaire (Pierre le Grand, tsar de Russie de Donizetti, acte I,

troisième tableau) ou itinérant (Tosca de Puccini, acte II), en charge parfois de prononcer la

sentence (Les Diables de Loudun de Penderecki, acte III, scène 3).

Le commissaire-priseur judiciaire occupe une place peu flatteuse dans le répertoire musical. Agissant en cas de banqueroute ou de déshérence d’un bien immobilier, il apparaît comme un personnage ronflant (The Rake’s Progress de Stravinsky, acte III, premier

tableau) ou intéressé personnellement à la vente (La Dame Blanche de Boieldieu, actes II et III).

Mais le jeu en vaut la chandelle car les vacations suscitent toutes les surenchères (inflation du prix et retournement de situation).

- les représentants du pouvoir exécutif

133 Au début du premier acte, les factures et relances des créanciers s’amoncellent dans l’entrée de la maison

familiale.

134 Christophe Colomb est assailli par ses créanciers qui conviennent qu’un troisième voyage, aussi désespéré

soit-il, constitue leur seule chance d’être remboursés.

135 Le pacte méphistophélique est précipité en raison de la présence de créanciers et de sbires de l’Eglise enragés

derrière la porte.

136 La séquestration d’un client par un aubergiste pour cause de grivèlerie alimentaire d’un montant de 400

francs.

137 Le roi Pollux ne parvient pas à convaincre ses créanciers que sa fille Danaé épousera bientôt Midas,

l’homme le plus riche au monde qui transforme en or tout ce qu’il touche. Sceptiques, les créanciers pillent tout ce qui reste de la salle du Trône.

138 Un jeune musicien atterrit accidentellement dans la chambre de l’épouse de l’huissier chargé de recouvrer ses

Ceux-ci diligentent une enquête préliminaire (Porgy and Bess de Gershwin, acte I, second

tableau) 139, exécutent un ordre (Dialogues des Carmélites de Poulenc, acte II, scène IV)140, procèdent

à un interrogatoire (Carmen de Bizet, acte I)141 ou à une arrestation (La Fille du Far West de

Puccini, acte III)142. La palette de leur personnalité va du fonctionnaire diligent (Fedora de

Giordano, acte I)143 à l’exempt de police aigri (Lady Macbeth de Mtensk de Chostakovitch, acte III,

septième tableau)144 ou corrompu (Le Nez de Chostakovitch, acte III, huitième tableau)145, le dégradé

de leurs comportements balançant entre ces deux extrêmes.

Les gardiens de la paix (exempts de police, gendarmes, hommes d’armes, gardes), de prison (geôliers) ou des enfers (bourreaux) forment la troïka malaimée d’une procédure criminelle.

L’édile local (maire, podestat, bourgmestre, chef de la Ville, alcade ou président de l’administration rurale (Trois sœurs de Eötvös) allient l’exercice du pouvoir réglementaire

(Théodora de Haendel)146, judiciaire (La Juive d’Halévy, acte 1)147 et exécutif (La Pie Voleuse de

Rossini)148, pour le meilleur (Soltys, Chansons de banquets de Moniuszko)149 et pour le pire (La Nuit

de mai de Rimski-Korsakov)150, serait-il même ridicule (Zar und Zimmermann de Lortzing)151 ou

inflexible (La Nuit de mai de Rimski-Korsakov).

139 Enquête criminelle après à un assassinat où la victime, Crown, a été poignardée puis étranglée. 140 Des commissaires viennent annoncer aux Carmélites l’expulsion de leur couvent.

141 Le commissaire Zuniga enquête sur les conditions dans lesquelles Carmen a blessé au couteau l’une de ses

camarades cigarières.

142 Le shérif Rance a enfin pu arrêter le bandit Ramerrez, voleur mais accusé à tort d’assassinat.

143 Gretch, officier de police impériale chargé d’élucider des coups et blessures portés à un comte, mène toutes

les diligences adéquates.

144 L’oisiveté et une joyeuse corruption règnent dans un commissariat de police où le commissaire est d’autant

plus prompt à aller interrompre la noce de deux assassins que celui-ci n’y a pas été convié.

145 Un gendarme corrompu accepte de rendre son appendice, le nez en perdition, à son propriétaire contre une

importante contribution financière.

146 Le préfet romain d’Antioche ordonne des festivités destinées à célébrer l’anniversaire de l’Empereur,

quiconque se dérobera à ces festivités sera condamné à mort.

147 Le prévôt de la ville de Constance condamne à mort un artisan juif qui travaille un jour chômé.

148 En dépit des protestations de chacun, le Podestat entame une enquête officielle, en rappelant que les voleurs

domestiques sont condamnés à mort.

149 Le maire, « Soltys », prend le parti de l’humour : la main droite marche à contretemps du chant et

mélodiquement, c’est la main gauche qui heurte ses lignes martiales à celle de la voix.

150 L’opposition injustifiée d’un maire à marier son fils n’est surmontée que par l’oukase d’un commissaire

impérial.

Les gouverneurs (voïvodes, préfets, consuls) tirent de leur autonomie la latitude de dispenser le mal (Guillaume Tell de Rossini)152 plus souvent que le bien (La Défense d’aimer ou le

Novice de Palerme de Wagner)153, à l’exception du cas où, missi dominici, ils sont

annonciateurs d’une bonne nouvelle (Fidelio de Beethoven, acte II, scène 8, n°16 Final)154.

Egalement mis à contribution, le percepteur est taxé de tous les maux dans la description de scènes villageoises pleines de vivacité (Bauern Kantate dite Cantate des Paysans de J.-S. Bach, n°5 récitatif de basse)155.

- le juriste

Le juriste es qualités est mentionné à quelques reprises dans le répertoire musical, soit de manière collective – sur un tour positif (La Marche des Etudiants en Droit de

Tchaïkovski)156 ou péjoratif (Les gens de Justice dans la Dame Blanche de Boieldieu, n°14 Final 157 ou

Pietro il Grande, czar delle Russie de Donizetti, acte I, troisième tableau) -, soit sous la forme anodine

d’un étudiant en droit (Doktor Faust de Busoni, deuxième tableau) ou d’un « conseiller de

justice »158 s’adonnant au jeu de cartes (Intermezzo de Strauss, acte II).

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