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Le secteur commerce : spécialité et spécification dans l’économie de Douala

CHAPITRE II : LA VILLE DE DOUALA : INTERACTION ENTRE SYSTEME URBAIN ET POLARISATION DES ENTREPRISES

INTRODUCTION DU CHAPITRE II

I. 1.2.1 - Le secteur industriel : une Spécificité/ spécialisation dans l’économie de Douala

I.1.2.2. Le secteur commerce : spécialité et spécification dans l’économie de Douala

Le secteur commercial est une représentation d'activités économiques difficile à définir. Nous retiendrons pour l'essentiel dans notre thèse qu'il s'agit d'un secteur diffus, de micro-activités économiques que les spécialistes qualifient, pour les uns d'informel, par opposition au secteur structuré (fiscalisé) et, pour les autres de traditionnel, par opposition au secteur moderne de l'économie. Certaines études ont identifié 26 filières de commerce et 1 775 entreprises à Douala159, y compris le commerce de détail. Mais quelle que soit la définition, la réalité que nous voulons décrire revêt des contours perceptibles. Nous pensons que le secteur commercial se définit davantage par ses manifestations et ses causes que par un concept précis. Nous le décrivons ci-après tel qu'il se manifeste à Douala.

1°). Les manifestations du secteur de commerce à Douala

Le secteur de commerce occupe la majorité de la population active estimée à 69 % à Douala, dont une part importante de chômeurs (OSEED, 2006 op.cit). Il se manifeste par l'occupation des espaces publics réservés à d'autres fonctions urbaines (chaussées, trottoirs, jardins publics, etc.).

Le secteur « commerce » est dominé par le commerce de détail qui représente 94,0% des activités. Il concerne principalement les produits agro-alimentaires (fruits et légumes, céréales, tubercules, viande, poissons, autres produits alimentaires et boissons) (56%), puis par ordre d’importance viennent le groupe des vêtements et accessoires (22%) et divers autres produits destinés à la consommation finale des ménages (EESI, 2005).

Certaines entreprises de ce secteur se trouvent en marge des normes, lois et règlements qui régissent les activités économiques ceci à cause du non-respect des règles de jeu. Cette situation donne de constater qu’une bonne partie des entreprises du secteur échappe à la comptabilité nationale, faute même de tenir des livres comptables.

Enfin le secteur de commerce à Douala, présente une autre difficulté : c'est le défaut d'une localisation précise, le cas des tontines, que nous mobilisons dans notre thèse pour indiquer le mobile de la prolifération de ce secteur dans la ville, est la cause d'une évasion importante de

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monnaie au détriment des banques. Car, non seulement il a été établi que les activités de ce secteur dévorent anarchiquement les espaces publics mais, de plus, elles ne suivent aucune règle de localisation quant bien même un plan directeur d'urbanisme existerait définissant la localisation de différentes zones d'activités dans la ville. Cela s'illustre par le fait que certains équipements publics abritent souvent des activités commerçantes qui échappent très souvent à la fiscalité locale.

La liste des caractéristiques du secteur commercial à Douala n’est pas exhaustive. Nous avons voulu la limiter pour évoquer quelques fondements de cette économie diffuse considérée informelle dans la ville de Douala.

2°) Les fondements du secteur commercial informel à Douala

Ils sont nombreux, mais nous nous limitons à n'en citer que les principaux. La prolifération du secteur de commerce informel à Douala a pour principaux fondements:

o la dualité des activités économiques traditionnelles et celles du secteur moderne comme dans beaucoup de villes des pays pauvres (vente de beignets sur le trottoir par rapport à une boulangerie pâtisserie…) ;

o l'aggravation du chômage due à la fermeture des entreprises dans le secteur structuré, ainsi que les compressions dans la fonction publique, déversent des chômeurs dans le secteur des activités non structurées (informelles) surtout, dans le petit commerce ;

o les ménages aux revenus moyens ne font pas confiance à la sécurité du système bancaire, d'où un faible taux de placement de l'épargne ; Ce qui entraîne la prolifération multiforme des tontines financières.

o L'exode rural alimente également sans cesse un flux de personnes dirigées vers le pôle économique de Douala. Cependant, à cause de l'inadaptation entre une immigration toujours forte et des possibilités d'offres de travail très limitées, ces personnes viennent gonfler le rang des chômeurs. Selon les estimations de l'enquête ECAM3, le taux de chômage masculin est de 25,5 % à Douala tandis que celui des femmes avoisine 20,4 % (ECAM3/INS, 2008). Ces chômeurs sont donc nombreux parmi les créateurs des activités commerciales, formant un conglomérat de petits métiers qui absorbe près de 51,5 % de la population active occupée de la ville de Douala, contre une moyenne nationale de 83,8 % 160

o On ne saurait arrêter la liste des principales causes des activités du secteur de commerce surtout informel, à Douala sans citer la croissance démographique naturelle sans précédent de cette ville, dont la population double tous les 20 ans, au taux de croissance moyen de 6 %

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158 par an. Ainsi de 476 000 habitants en 1967, la population de Douala est estimée à 2 Millions d'âmes en 2000 (ECAM3, 2008 op.cit.).

o Enfin, la restructuration et l’efficience de ce secteur dans la ville de Douala est encore latente à cause des contraintes budgétaires du côté de l'administration et partant à la communauté urbaine.

Il conviendrait de noter en outre que les activités dominantes de ce secteur sont les suivantes :

♦ le commerce de détail avec la prolifération des vendeurs à la sauvette (habillement, l’alimentation, etc.) ;

♦ les activités dans l'auto construction (petites et moyennes quincailleries);

♦ la vente des objets d’art ;

♦ l'usure financière (prêt usurier). Etc.

Compte tenu de l'analyse que nous venons de faire, l'importance du secteur de commerce n'est plus à démontrer dans la capitale économique du Cameroun. Les incidences économiques et financières du secteur commercial dans la vie de la municipalité de Douala sont multiples : résorption du chômage (surtout celui des jeunes et des femmes), lutte contre l'oisiveté, le vice et la pauvreté, sources possibles de revenus monétaires pour le budget de la communauté et des communes urbaines d'arrondissement de Douala.

En raison de ce qui précède, la ville de Douala a élaboré, depuis 1990, une politique visant à encadrer et intégrer le secteur commercial dit informel dans l'économie moderne structurée. Dans certains secteurs, cette politique s'intègre dans l'ensemble des mesures prises au niveau national par le gouvernement camerounais.

3°). Les politiques de la communauté urbaine de Douala en faveur du secteur Commercial dit informel

Contrairement à la politique de casse menée dans certaines villes où les vendeurs à la sauvette sont pourchassés, la ville de Douala a adopté en cette matière une politique d'intégration de ce secteur dans l'économie moderne structurée. Ces opérateurs se sont constitués pour la plupart en associations reconnues d'utilité publique dont la plus importante est l'Association des exploitants à la "sauvette" du Cameroun (ANESCAM). Elle rassemble 18.000 membres à Douala.

Les dispositions légales récentes (lois n° 92/006 et 92/455/PM) visent à favoriser l'émergence de Groupement d'initiatives communes (GIC) et des Coopératives d'épargne et de crédit (COOPEC)

autonomes, afin de mobiliser l'épargne populaire des tontines et la drainer vers le secteur bancaire structuré. Un bilan réalisé en 2002 a évalué le nombre de GIC à 2.068 et 1.836 coopératives intervenant dans la Région du Littoral dont 44,4 % pour la ville de Douala (AIMF, 2002)161. L'objectif des GIC et des coopératives est de favoriser l'auto-production et l'auto-prise en charge rationnelle des groupes et l'intégration de leurs activités dans le secteur économique structuré. Ainsi de telles activités pourraient bénéficier non seulement à ces groupes, mais également à toute la collectivité grâce au prélèvement des impôts et taxes.

En plus de cette panoplie de mesures prises à la dimension nationale, la communauté urbaine de Douala (CUD) a mis en œuvre un certain nombre d'actions concrètes visant à favoriser l'encadrement du secteur informel en général et commercial en particulier, et son intégration dans l'économie moderne et au titre desquels on peut retenir :

- l’entière réalisation des études et constructions de quatre marchés sur les 15 à équipements marchands de proximité prévus.

- Un marché spécialisé dans la promotion de l'artisanat et celle des opérateurs qui s'élancent dans la floriculture et la commercialisation de leurs produits.

- La construction et la réalisation par la CUD d’une gare routière, afin de résoudre le problème de la Prolifération de gares routières anarchiques.

- L'édification d'un hôtel des arts et métiers à Douala et où les opérateurs de l'informel pourraient trouver des locaux et ateliers à bas prix.

- Les projets d'aménagement de rues piétonnes commerçantes et touristiques et de la fabrication de boutiques démontables (BOUDES).