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2.1- L’empreinte des dispositifs institutionnels dans la dynamique de localisation des entreprises à Douala181

CHAPITRE II : LA VILLE DE DOUALA : INTERACTION ENTRE SYSTEME URBAIN ET POLARISATION DES ENTREPRISES

INTRODUCTION DU CHAPITRE II

I. 2.1- L’empreinte des dispositifs institutionnels dans la dynamique de localisation des entreprises à Douala181

Douala possède deux grandes zones industrielles (Bonabéri et Bassa) s’étendant sur une superficie de 342 ha, et gérées par la MAGZI. Ces zones logent les unités industrielles opérant dans la ville. La zone industrielle de Bonabéri (Douala IV), créée en 1968, compte actuellement 44 entreprises industrielles sur les 162 firmes qui s’y trouvent situées. La zone de Bassa (Douala III), créée quelques années après celle de Bonabéri, compte actuellement plus d’une quarantaine d’entreprises de fabrication. On distingue aussi dans cette localité deux gros centres de fabrication industrielle : le centre Saint Michel et Ndokotti.

Pendant plusieurs décennies, les unités industrielles qui se créaient dans la ville s’implantaient, majoritairement, soit dans les deux zones mentionnées ci-dessus, soit à la lisière de ces différentes aires. L’activité industrielle à Douala restait alors concentrée dans des portions d’espaces précises des arrondissements de Douala III et IV. Pour la plupart des entreprises, ces sites offraient d’importants avantages comme, des dessertes maritime, ferroviaire, routière et aéroportuaire.

De nos jours, l’on constate que ces sites ne sont plus les seuls lieux de concentration des entreprises industrielles. On en retrouve à Douala II et V. En plus de leur dispersion, elles sont le moteur d’emplois et de réduction de chômage dans la ville. Le tableau 17 ci-dessous, présente la dynamique de localisation des entreprises à Douala selon qu’elles se trouvent dans une Zone industrielle (ZI) ou Hors zone industrielle (HZI).

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Expressions empruntées à J.R. ESSOMBE EDIMO (2007a op.cit.)

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178 Tableau 17 : Répartition des entreprises par arrondissements, taille et lieu d’implantation Arrondissement Taille (effectif des employés) Nombre Z I Nombre HZI Nombre total

Douala I 5-9 0 18 18 10-250 3 53 56 Douala II 5-9 1 10 11 10-250 0 29 29 Douala III 5-9 1 7 8 10-250 3 18 21 Douala IV 5-9 1 7 8 10-250 7 6 13 Douala V 5-9 1 12 13 10-250 2 29 31 Totaux 19 189 208

Source : notre enquête

A partir des données de ce tableau nous constatons que plus de 90% des 208 entreprises enquêtées sont localisées HZI. Pour celles se trouvant en zone industrielle, nous notons une réelle prépondérance dans les arrondissements de Douala III et IV. Les entreprises localisées dans les zones industrielles ont, pour la plupart, des effectifs compris entre 10 et 250 employés. Ce sont de véritables entreprises industrielles.

Le code des investissements tout en définissant le cadre légal des activités au Cameroun, et plus précisément à Douala, fut aussi l’occasion pour les pouvoirs publics de promouvoir la création des entreprises. Ainsi, comme l’observe encore J.R. ESSOMBE EDIMO (1990), la grande entreprise était plus favorisée par le code du 27 juin 1960 (adopté par la loi du 16 janvier 1968) et qui semblait, au contraire pénaliser le développement des autres types d’entreprises dans le pays182. Il est clair que c’est à cette époque que la promotion des unités de production industrielle était essentiellement le fait du capital privé étranger et, seulement, de quelques nationaux et qui de façon générale, étaient des « Self made men » financièrement puissants. Ils avaient fait leur fortune dans les domaines de plantations et exploitations agricoles, de commerce import-export (J.P. WARNIER, 1993).

Une enquête effectuée en 2005 par la CUD dans les zones industrielles de la ville de Douala, montre que celles-ci avaient été davantage marquées, à cette époque, par une logique d’accumulation de ressources, exogènes ou endogènes, sans sélection préalable. Ce qui a conduit, à Bonabéri comme à Bassa, à un processus d’addition instable d’entreprises dans ces aires de production où l’implantation ne se faisait pas en fonction d’objectifs comme par exemple « la remontée des filières industrielles » (OSEED, 2005).

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Priorité accordée au développement des grandes entreprises et autres « éléphants blancs » au Cameroun et en Afrique Centrale

Cette situation à conduit à l’adoption du code de 1984 qui présentait, la particularité de promouvoir un régime propre aux petites et moyennes entreprises (PME). C’est ainsi que dans les années 1980, on a vu apparaître un seconde vague de promoteurs et de créateurs nationaux d’entreprises qui, sur le plan local, entraînait un foisonnement de plus de 45 000 PME à localisations variable dans le pays entre 1987 et 1990 (C. COURLET et R. TINBERGHIEN, 1986). Ce mouvement fut l’œuvre des entrepreneurs nationaux qui sont, le plus souvent, des propriétaires terriens, jeunes diplômés de l’enseignement secondaire ou supérieur, anciens employés du secteur industriel moderne local ou étranger anciens artisans ou forgerons des villages, commerçants ou grands éleveurs de bétails, grands tisserands, etc. (J. R. ESSOMBE EDIMO, 1990, op.cit.).

La plupart de ces promoteurs appartiennent jusqu’à nos jours à des structures et réseaux comme des « tontines », et le financement des unités de production se nourrit largement du secteur financier informel (tableau 18).

Tableau 18 : Répartition des entreprises par lieu d’implantation et rapport avec les institutions informelles

Type d’institutions informelles Nombre total d’entreprises

ZI HZI

Tontines 96 6 42,86 90 42,86

Association des ressortissants du

village 84 3 21,43 81 38,57

Groupement des entrepreneurs 44 5 35,71 39 18,57

Total 224 14 100,00 210 100,00

Source : notre enquête

On observe dans ce tableau que presque toutes des entreprises de Douala entretiennent des relations avec les institutions informelles. La majorité de ces entreprises (plus de 90%) localisées hors zone industrielle côtoient plus les institutions informelles. Ainsi, le graphique 6 ci-dessous montre qu’un peu moins de 43% des entreprises sont en rapport avec les tontines, 37,5 % en rapport avec des associations des ressortissants divers et 19,64% côtoient les groupements des entrepreneurs. Ceci est la preuve d’un dynamisme local entre les acteurs économiques à Douala.

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Graphique 6 : entreprises et relation avec les institutions informelles

Source : notre enquête

Les tontines, par exemple, constituent de puissants réseaux de diffusion d’informations pour les chefs d’entreprises (J. GAUTRAND, 1987 ; J.R. ESSOMBE EDIMO, 1990 op.cit; M. LELART, 1991). Ce qui leur permet de nouer des relations qui peuvent être commerciales, de production, ou d’échanges d’informations sur les affaires (C.COURLET et R. TIBERGHIEN, 1986 op.cit). Notre étude empirique montre qu’en plus des tontines, les associations ainsi que les clubs des entrepreneurs participent à l’éclosion des entreprises à travers la diffusion des informations quant au climat des affaires qu’à la session des entreprises (tableau 19).

Tableau 19 : institutions informelles et informations sur les affaires Type d’institution informelle Nombre d’entreprise membre Information sur le climat des affaires Information sur la session des entreprises Information sur le village Information sur le commerce /la production Tontines 96 33 27 30 6 Association des ressortissants du village 84 14 17 43 10

Club des entrepreneurs 44 15 21 - 8

Total 224 62 65 73 24

Source : notre enquête

De la même manière, une comparaison entre les grandes vagues de créations des entreprises à Douala, permet de relever qu’autant celle des années 1960/70 présentait un caractère « élitiste », autant celle des années 1980 aura été « massive » (tableau 20).

Tableau 20 : Les deux premières grandes vagues de promotion des entreprises au Cameroun et précisément à Douala