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1.1.3.3 Schéma corporel postural

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Afin de maintenir une cohérence perceptive et motrice, notre cerveau a besoin de connaitre les mouvements effectués par notre propre corps. Le phénomène du membre fantôme illustre bien l’existence de représentations internes des éléments du corps, et suggère, in extenso, la présence d’un schéma corporel. Chez les sujets exprimant la présence d’un membre fantôme, le membre soudainement retiré, possède toujours une existence perceptible alors qu’il est physiquement absent. Ainsi, malgré l’absence de signaux somesthésiques provenant du membre disparu, une représentation de ce dernier serait maintenue par le cerveau, générant alors chez le sujet l’illusion que son membre est encore présent. Berthoz (1997)a approfondi cette question et suggéré qu’il n’y aurait non pas un, mais plusieurs schémas corporels, chacun étant adapté à la fonction qu’il remplit. Cette proposition repose sur l’étude de cas conduite par Sirigu et al. (1991). Dans cette étude une patiente atteinte de lésions cérébrales diffuses, n’était plus en capacité de localiser ni les parties de son propre corps, ni celles d’autres personnes, mais était encore en mesure de les nommer. La capacité de ladite patiente à reconnaitre le membre comme le sien et de le nommer, était donc préservée mais elle était incapable de le situer spatialement. En se basant sur ces observations, on peut donc raisonnablement postuler que le cerveau possède des représentations internes propres à chacune des parties du corps. Il est par conséquent possible que le contrôle postural repose sur la contribution d’au moins deux représentations internes du corps. La première concernerait la géométrie globale du corps dans une position donnée (ici la station debout érigée ; nommée schéma corporel postural), et la seconde serait parcellaire et concernerait les différentes parties du corps isolément.

Du point de vue du contrôle postural, la complexité inhérente aux ajustements posturaux ne peut s’appréhender sans envisager une représentation interne de la position des segments les uns par rapport aux autres, de leurs inerties, et des conditions d’appui (Pagano, Garrett, et Turvey 1996 ; Pagano et Carello 1996 ; Turvey et al. 1996 ; Pagano et Turvey 1995 ; Turvey et Carello 1995). Au-delà du phénomène du membre fantôme qui tend à asseoir solidement la présence d’une

représentation interne, des expériences évaluant la posture en microgravité confirment également la présence d’une représentation interne de la configuration du corps lorsque le sujet adopte la position dite posturale. En effet, les auteurs de cette étude montrent qu’après quelques jours d’exposition à la microgravité, lorsque les sujets sont placés les pieds accrochés au sol de la cabine, ils adoptent spontanément une position debout érigée (Gurfinkel et al. 1988 ; Clément et al. 1984).

Dans ces conditions, l’adoption de cette posture n’est possible que si le sujet possède une représentation interne, une mémoire, de la géométrie de son corps lors du maintien postural, en d’autres termes un schéma corporel postural.

Gurfinkel et al. (1988) ont donc établi le concept de schéma corporel postural. Issu de

l’intégration des informations sensorielles, ce dernier constitue une représentation interne, à la fois innée et acquise, de la configuration d’ensemble du corps telle qu’organisée pour le maintien de l’équilibre postural. Selon Massion (1994 ; 1997) le schéma corporel postural repose sur 3 types de représentations internes : une représentation de la géométrie du corps, une représentation de l’orientation du corps par rapport à la verticale, ainsi que des forces appliquées au corps, et notamment des forces d’appui.

Figure 4. Organisation centrale du contrôle postural, inspirée du Modèle proposé par Massion (1994).

En effet, en contribuant au maintien du CdM dans la base de sustentation, la représentation des forces d’appui au sol, principalement sous-tendues par les afférences cutanées plantaires, opère un rôle essentiel pour l’organisation du maintien postural. Une représentation de l’orientation du corps par rapport à la verticale, comme nous l’avons spécifié plus haut, est fondamentale pour permettre à la posture d’observer un positionnement antigravitaire. Enfin, la représentation de la géométrie du corps repose essentiellement sur les afférences proprioceptives musculaires de type Ia, qui renseignent sur la position et la vitesse des segments les uns vis-à-vis des autres (Roll et al.

1998 ; Roll, Velay, et Roll 1991). Nourri par les afférences sensorielles, et plus particulièrement par

les afférences proprioceptives, le schéma corporel postural permet notamment le fonctionnement proactif du contrôle postural.

I.1.1.4. Les deux composantes fonctionnelles de la posture : Orientation et Stabilisation.

Selon Massion (1997)la posture garantit donc deux fonctions : une fonction antigravitaire et une fonction d’interface. La fonction antigravitaire a pour vocation première l’élaboration et le maintien des segments du corps dans une posture en référence opposée à la force de pesanteur. La fonction d’interface, quant à elle, assure la jonction entre le corps et le monde extérieur pour la perception et l’action. Ces fonctions reposent sur deux mécanismes distincts mais en interaction. Le premier contrôlerait la stabilisation et la position des différents segments corporels les uns relativement aux autres, et le second contrôlerait l’orientation et la configuration du corps dans l’espace (Amblard et al. 1985).

La stabilisation met elle-même en jeu deux mécanismes : la production du tonus postural et l’équilibration. Selon Massion (1997) la posture s’organise de façon modulaire. C’est-à-dire que l’organisation du corps durant le maintien de l’équilibre postural peut être envisagé comme une superposition de modules interdépendants, posés les uns au-dessus des autres, et poursuivant l’objectif de maintenir la position verticale (Figure 1). Le maintien de cette position nécessite donc de fournir la raideur articulaire indispensable au maintien de la superposition des segments corporels les uns au-dessus des autres selon un axe antigravitaire. La production de cette raideur repose donc sur le tonus postural, qui en produisant une force opposée à l’effet de la gravité par le biais des muscles extenseurs (muscles antigravitaires), contribue donc à cette fonction. L’équilibration, ou contrôle de l’équilibre, renvoie à la régulation du paramètre de référence. Si l’on s’en réfère aux écris de Massion (1997)il s’agira de la régulation de la position du CdM afin que celle-ci demeure dans la base de sustentation (Massion 1997).

Comme susmentionné dans la partie portant sur la représentation de la verticale (cf. Cadre théorique – Partie I.1.1.3.2), la posture fournit un support stable, en d’autres termes un référentiel servant d’ancrage tant pour la perception de l’environnement que pour l’organisation de l’action. Grâce aux informations transmises par les afférences sensorielles visuelles, vestibulaires, et somesthésiques, elle permet à la fois de déterminer la position du corps et de ses différents segments par rapport à l’environnement, mais également la position des éléments de l’environnement par rapport au corps. L’orientation posturale est donc le positionnement du corps et de ses différents segments (ou modules) par rapport à l’environnement. Cette fonction va jouer un rôle important lors de l’interaction posture mouvement, en permettant notamment d’offrir un référentiel stable lors de la production d’un mouvement volontaire.

I.1.2. Spécificités des contributions sensorielles au contrôle postural I.1.2. Spécificités des contributions sensorielles au contrôle postural I.1.2.1. Contribution du système vestibulaire

En tant que détecteur de l’invariant géophysique qu’est la gravité, l’organe vestibulaire est le principal contributeur à la construction du référentiel géocentré. L’une des fonctions essentielles qui incombe au maintien de l’équilibre postural est sa fonction antigravitaire. On perçoit dès lors l’importance que revêt un organe à même de percevoir la gravité pour produire un comportement consistant à se positionner en opposition vis-à-vis de cette dernière. Le système vestibulaire joue donc un rôle central dans l’ajustement de notre posture (statique) et nos activités motrices (dynamiques), et ce, notamment au travers de la stabilisation du regard et du corps lors du mouvement pour assurer notre équilibre (Assaiante et Amblard 1993 ; Grossman et Leigh 1990).

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