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Intégration multisensorielle : au-delà des disparités, construction d’une cohérence

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I. 1.2.3.3 Contribution du système somesthésique : la pathologie

I.1.3. Intégration multisensorielle : au-delà des disparités, construction d’une cohérence

Outre l’apport spécifique de chaque entrée sensorielle au contrôle postural, l’ensemble des études présentées dans la partie précédente met à jour la capacité du SNC à moduler la contribution de chacune de ces entrées dans la production d’un acte moteur. Cette contribution peut donc fluctuer en réponse à des facteurs opérant sur le court (i.e. perturbation d’une entrée sensorielle) ou long terme (i.e. altération d’une entrée sensorielle induite par la pathologie). Comme nous l’avons mentionné précédemment, les afférences sensorielles véhiculent certes des informations qui leur sont spécifiques mais également des informations de nature redondante et complémentaire. Ainsi, un individu effectuant une rotation de la tête de droite à gauche en sera informé à la fois par le flux visuel, perçu par ses yeux, par l’accélération angulaire, perçue par le système vestibulaire, et par la contraction des muscles de son cou, perçue par les récepteurs proprioceptifs. Toutefois, au regard des différences notables entre chacune de ces modalités sensorielles, tant par la divergence des caractéristiques structurelles et fonctionnelles de leurs récepteurs sensoriels respectifs, que par les propriétés des signaux transmis, il est possible de s’interroger sur la manière dont notre SNC parvient à créer un ensemble, une synthèse, cohérente à partir de composantes sensorielles aussi disparates. En effet, les informations transmises par ces entrées sensorielles divergent dans leurs propriétés à la fois sur le plan spatial, par le système de coordonnées dans lequel elles évoluent (e.g. référentiel euclidien pour les informations vestibulaires, et lié au mouvement pour les informations proprioceptives), et temporel, avec des délais d’influx nerveux différents pour chacun des systèmes.

Une question fondamentale se pose alors : comment à partir de signaux aussi différents notre SNC parvient-il à créer une cohérence perceptive ? Selon Berthoz (1997) l’intégration des informations sensorielles et la construction d’une unité perceptive à partir de celles-ci, suppose l’implication de mécanismes centraux actifs. Ces mécanismes auraient alors pour rôle la levée des ambiguïtés, le rattrapage ou l’anticipation des retards différentiels entre capteurs, l’unification des espaces. Ces mécanismes centraux relatifs à la perception ne se contenteraient donc pas de lire et d’intégrer de façon linéaire les informations reçues, mais fourniraient une interprétation dont la cohérence serait une construction dépendante de facteurs endogènes et des actions envisagées par le sujet (Berthoz 1997). Droulez et Darlot (1989)proposent un modèle de fusion multisensorielle, intéressant pour adresser cette question. En effet, selon ces auteurs le cerveau chercherait à reconstruire des grandeurs pertinentes au regard des comportements. Pour ce faire, le cerveau recouperait ces informations disparates en utilisant la redondance des informations transmises par les différents systèmes sensoriels. Ces auteurs illustrent ce principe au travers de la perception d’une information : la vitesse angulaire de la tête durant une rotation. D’après le modèle proposé par ces auteurs, les rotations de la tête sont estimées au travers de deux processus. Le premier, direct, provient des informations transmises par le système vestibulaire, spécialisées dans la détection des mouvements de la tête. Le second, indirecte, serait la convergence multisensorielle d’autres grandeurs, telles que les contractions des muscles du cou, ou les glissements rétiniens de l’œil dans son orbite. La somme de ces diverses informations convergentes donnerait donc une estimation de la vitesse de rotation de la tête (Droulez et Darlot 1989). Cependant Cornilleau-Pérès et Droulez

(1993), proposent d’aller plus loin qu’une simple estimation d’erreur reposant sur la discongruence

entre les différentes entrées sensorielles. En effet, pour ces auteurs, tant par le bruit véhiculé par les signaux sensoriels, variable en fonction du contexte, que par, la multiplicité des interprétations possibles relatives à un seul et même signal sensoriel, le traitement par le SNC des signaux sensoriels ne peut se faire que par le biais d’une comparaison entre le signal reçu et une estimation interne. Les signaux sensoriels ne seraient pas directement utilisés pour estimer les variables pertinentes mais pour estimer l’écart entre des estimations internes et les variables pertinentes. Deux visions s’opposent donc ici une vision proposant une interaction directe des informations sensorielles proposée par Droulez et Darlot (1989), et une autre postulant que l’intégration des informations

sensorielles ne peut se faire que par le biais de leur comparaison avec une estimation interne proposée par Cornilleau-Pérès et Droulez (1993).

I.1.3.1. Mécanismes de l’intégration multisensorielle : Pondération et repondération sensorielles

Le SNC aurait donc la capacité d’évaluer, de comparer, de trier les informations sensorielles reçues en fonction de leur fiabilité pour finalement les combiner et les synthétiser afin d’en extraire un ensemble cohérent. En ce qu’il nécessite l’implication de rétroaction sensorielle, le contrôle postural dépend de la capacité du SNC à intégrer et synthétiser les différentes informations sensorielles. Les théories divergent néanmoins sur la nature des mécanismes en jeu dans l’intégration des afférences provenant des différents systèmes sensoriels, et plus spécifiquement sur la façon dont ces dernières sont combinées pour être traitées par le SNC. Différents modèles ont été proposés afin de répondre à cette problématique, parmi lesquels : le modèle d’intégration linéaire additive (Peterka 2002 ; Jeka, Oie, et Kiemel 2000 ; Johansson 1998 ; Jeka et al. 1998 ;

Hlavacka, Mergner, et Bolha 1996), le modèle d’intégration non-linéaire (Carver, Kiemel, et Jeka

2006 ; Kiemel et al. 2002 ; Oie, Kiemel, et Jeka 2002 ; van der Kooij et al. 2001 ; 1999 ; Maurer et

al. 2000), ainsi que le modèle de combinaison linéaire pondérée (Deneve et Pouget 2004 ; Ernst et

Bülthoff 2004a ; Körding et Wolpert 2004 ; Battaglia, Jacobs, et Aslin 2003 ; Ernst et Banks 2002

; Zupan, Peterka, et Merfeld 2000).

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