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Une saisonnalité importante dont le degré varie selon le type d’espace

Dans le document et développement durable en France (Page 117-122)

Le tourisme constitue une activité où la saisonnalité est forte : l’enquête Sdt de la DGE (ex-DGCIS) montre que, en 2012, parmi les nuitées des résidents effectuées dans le cadre de leurs voyages pour motifs personnels, près de la moitié sont réalisées en métropole de juillet à septembre, le mois d’août concentrant à lui seul le quart des nuitées totales ! A l’opposé, les trois mois courant de janvier à mars ne représentent ensemble que 14 % du total des nuitées des résidents140.

140 Source : DGE (ex-DGCIS) enquête Sdt, répartition des nuitées selon le mois et la commune de destination, in Memento du tourisme Edition 2013, p. 105.

La saisonnalité est toutefois plus ou moins marquée selon le type d’espace et les profils des touristes qu’ils accueillent, comme le montrent les travaux de l’INSEE sur les vacances des Français, la plus ou moins forte saisonnalité dépendant pour partie des principales activités pratiquées sur place.

Tableau 9 : Répartition des vacances d’été et d’hiver des Français par espace touristique

Mer Ville Campagne Montagne

Autres espaces (y compris

lacs)

Eté*

Part des

séjours en % 45,3 27,3 30,7 17,6 8,5

Part des

nuitées en % 49,6 24,2 29,9 18,8 8,9

Hiver**

Part des

séjours en % 17,6 42,1 34,9 15,6 n. c.

Part des

nuitées en % 26,2 38,6 31,7 21,7 n.c.

Source : SDT Direction du Tourisme /TNS Sofres, données été 2007 et hiver 2006-2007.

*Les totaux sont supérieurs à 100 car plusieurs réponses sont possibles.

**Les totaux sont supérieurs à 100 car un même lieu peut être associé à plusieurs espaces simultanément (Nice est associée à la mer et à la ville par exemple).

Des saisonnalités différentes entre les littoraux et les villes

La prédominance du tourisme littoral, ancienne, se concentre sur les seuls mois d’été, la saisonnalité y étant particulièrement forte. Le littoral a connu dans la seconde moitié du XIXème siècle l’apparition des premières stations balnéaires pour une clientèle favorisée, puis, dans la deuxième moitié du XXème siècle, la transformation d’une grande partie d’entre elles par le développement de centres de vacances et de campings, ainsi que par des aménagements favorisant un tourisme de masse. Il demeure pour une part importante des Français le cadre privilégié des vacances estivales, concentrant dans cette période près de la moitié des nuitées, contre seulement un quart en hiver. Les Français recourent en majorité pour séjourner sur le littoral à l’hébergement marchand (53 % des nuitées), ce qui accroît le retentissement économique des pics de saisonnalité en matière d’hébergement (les résidences secondaires représentent sur le littoral environ un tiers du parc des résidences de tourisme selon le Conseil national du tourisme)141. La dépense par nuitée des résidents en 2007 est de 37,5 € pour les longs séjours et de 66,5 € pour les courts séjours142. L’importance du nautisme (environ un million de navires de plaisance en 2012) et le développement de la croisière, pratiqués surtout à la belle saison, participent de cette forte saisonnalité forte. Attirant une forte proportion des touristes à la période estivale, précisément au moment où ceux-ci sont les plus nombreux, le tourisme littoral est de ce fait

141 Conseil national du tourisme Rapport Le poids économique et social du tourisme, de Michel Messager, Gérard Ruiz et Claude Warnet, (2010) p. 88 et 89.

142 Source : INSEE article « Les déplacements des français », in Le tourisme en France : édition 2008 (mai 2009), p. 129-145.

confronté à un afflux particulièrement marqué de vacanciers, générant sur certains sites des nuisances importantes. Cet aspect sera développé dans le chapitre relatif à l’environnement.

La saisonnalité est aussi fortement marquée en ce qui concerne le tourisme ultra-marin, avec des pics de saisonnalité qui ne correspondent pas nécessairement à ceux des littoraux métropolitains. A titre d’exemple, le tourisme en Guadeloupe et à La Martinique est pour l’essentiel concentré sur la période allant de décembre à avril. Ce décalage de période avec la « belle saison » en Europe et en France constitue, pour nombre de territoires ultra-marins, l’un des éléments de leur attractivité touristique auprès des clientèles métropolitaines et plus généralement européennes143.

La saisonnalité dans les villes est très différente de celle du littoral métropolitain : les périodes où les villes attirent la plus forte part des touristes séjournant en France sont celles où ceux-ci sont les moins nombreux sur l’ensemble du territoire, et inversement. Ainsi, la part des villes dans la fréquentation est, selon l’INSEE, plus forte l’hiver, où elle représente 42,1  % des séjours de vacances des résidents, qu’en été (27,3  %). Ce phénomène tient à plusieurs facteurs : les villes, et notamment les métropoles, attirent de nombreux touristes étrangers et français, avec, pour ces derniers, une surreprésentation des jeunes (15-34 ans) et des retraités (personnes de plus de 65 ans), un peu moins soumis au rythme des vacances scolaires que ne peuvent l’être les familles avec de jeunes enfants. La durée des séjours touristiques est par ailleurs souvent courte en ville, du fait notamment du développement des « city breaks »144, apparus dans les années quatre-vingt, mais dont l’essor a depuis été considérable, ce qui favorise un certain étalement du tourisme dans le temps. A Paris, qui draine toute l’année une part importante des touristes étrangers, le pic de l’été intervient à une période où la capitale s’est largement vidée de ses résidents permanents et d’une partie de ceux qui y travaillent, ce qui limite l’effet de surconcentration. D’après le Conseil national du tourisme, la visite à la famille est le premier motif de visite des Français dans les villes et représente 49 % des nuitées urbaines, devant les visites d’agrément (42 % des nuitées).

53 % des nuitées en villes sont effectuées en hébergement non marchand. L’hébergement marchand en ville est surtout constitué par l’hôtellerie  (53  % des hôtels sont situés en zones urbaines, représentant 71 % des chambres en France métropolitaine145), et une partie importante des hôtels, en particulier dans les métropoles, accueillent aussi une clientèle d’affaires, ce qui leur permet d’améliorer leur remplissage aux périodes où les touristes sont moins présents, d’où le souhait des professionnels du tourisme de mieux connaitre, bien en amont, le calendrier scolaire. Les séjours urbains sont, si l’on excepte la montagne l’hiver, les plus coûteux d’après l’INSEE : 90,4 € à la nuitée pendant un court séjour et 47,7 € pendant un long séjour en 2007. Les professionnels du tourisme souhaitent une plus grande prévisibilité du calendrier scolaire, longtemps à l’avance.

Une répartition plus étale dans le temps du tourisme montagnard et rural Si les stations de montagne françaises, dont le domaine skiable est le plus grand d’Europe, sont connues principalement pour leurs activités liées à la neige, la fréquentation de l’espace montagnard est plus forte en été qu’en hiver146 : selon l’INSEE, en 2007, la montagne représente 17,6 % des séjours de vacances des Français l’été et 15,6 % l’hiver, permettant

143 Rapport d’information sur Le tourisme et l’environnement outre-mer, de Claude Magras, sénateur, 2011, p. 35.

144 City break : bref séjour de visite en ville, le temps d’un week-end ou d’un week-end prolongé pour un tourisme culturel, de shopping et/ou nocturne.

145 CNT Rapport Le poids économique et social du tourisme, op. cit. p. 95.

146 Source : Atout France DSF cités par Somontagne, ANMSM p. 3.

aux stations et aux professionnels du tourisme une utilisation sur une plus longue période d’une partie des équipements, notamment de l’hébergement. Toutefois, du fait du prix des forfaits, lié notamment au coût des remontées mécaniques et de la location du matériel de ski, les dépenses moyennes par touriste sont nettement supérieures l’hiver que l’été (ordre de grandeur de 1 à plus de 2), et le chiffre d’affaires qui en résulte pour les stations est donc plus important l’hiver  : les 10  millions de touristes, dont 2  millions d’étrangers, accueillis l’hiver dans les stations françaises, génèrent un chiffre d’affaires annuel de 7 Md€, soit 15 % du chiffre d’affaires touristique national147. La période hivernale a toutefois connu selon Atout France une baisse des nuitées de 20 % entre 2005 et 2010. Divers facteurs concourent à ce recul, dont, certaines années, le manque d’enneigement, malgré l’utilisation de canons à neige, et, dans un contexte de crise économique, le coût des séjours. Y contribue aussi la diminution du nombre des classes découvertes, particulièrement marquée pour les classes de neige, qui pourrait engendrer à terme, si elle se poursuivait, un vieillissement de l’âge moyen des pratiquants, voire une réduction de leur nombre, car avoir découvert le ski enfant favorise la poursuite de sa pratique à l’âge adulte148. Cette pratique permet aussi de faire découvrir des horizons différents et des activités nouvelles à des enfants venus de milieux sociaux diversifiés.

Représentant 80  % du territoire, la campagne accueille environ un tiers des séjours de vacances des Français (34,9 % en hiver et 30,7 % en été en 2007). La saisonnalité y est moins marquée que sur le littoral ou en ville, car les touristes qui s’y rendent, souvent pour des séjours de courte durée ou de week-end, sont principalement des urbains en visite chez des parents ou amis, ou qui y possèdent une résidence secondaire : selon le Conseil national du tourisme, 66 % des séjours y interviennent ainsi en famille ou chez des amis, et 11 % en résidence secondaire, l’hébergement marchand (hôtel de tourisme, campings, meublés de tourisme) constituant seulement 25  % de l’hébergement à la campagne149. La durée des séjours varie selon la distance parcourue : les résidences secondaires situées à moins de 250  km du domicile de leur propriétaire sont largement utilisées pour des séjours fractionnés ou de week-end, ce qui favorise un meilleur étalement dans le temps de cette forme de tourisme de relative proximité ; au-delà de 250 km, les séjours se font moins fréquents mais plus longs. Les séjours à la campagne sont les moins onéreux, avec une dépense moyenne par nuitée de 48,2 € pour un court séjour et de 37,9 € pour un long séjour en 2007 selon l’INSEE150. La campagne offre de ce fait, dans un contexte de contrainte budgétaire pour nombre de ménages des classes moyennes ou modestes, une solution de repli pour continuer à partir à moindre coût en vacances, une ou plusieurs fois dans l’année.

Des évolutions de la saisonnalité

La saisonnalité a eu tendance à s’atténuer en longue période : selon l’INSEE « en 1979, 69 % des jours de vacances se situaient en juillet ou en août, contre 57 % en 2004 ». Ce plus grand étalement des vacances sur l’année concerne tous les âges. Toutefois, les actifs et notamment les 35-39 ans tendent plus que d’autres catégories d’âge à concentrer leurs congés pendant la période estivale : en 2004, les 35-39 ans ont ainsi pris 64 % de leurs congés en juillet août,

147 Cf. So Montagne, magazine de l’association nationale des maires des stations de montagne, p. 15.

148 Audition de Christine Laymard, directrice générale de l’association des maires des stations de montagne.

149 CNT Rapport Le poids économique et social du tourisme, op. cit. p. 92.

150 INSEE 2009 article « Les déplacements des Français », in Le tourisme en France : édition 2008 op. cit. p. 129-145.

alors que les personnes de plus de 60 ans n’y ont consacré que 40 % de leurs séjours sur l’année151.

Divers facteurs ont contribué à ce plus grand étalement des congés. Les politiques publiques, tout d’abord, avec la mise en place en 1964-1965 de zones géographiques pour les vacances scolaires de février et de Pâques, ce qui a permis sur ces deux périodes un étalement des congés sur un mois au lieu de deux semaines. Joue aussi en ce sens le développement des courts séjours, qu’a pu amplifier dans les années 2000 la réduction du temps de travail. Le vieillissement de la population et l’allongement de la période de retraite ont par ailleurs favorisé un allongement de la saison d’été hors des pics de juillet-août, des retraités faisant le choix de vivre une partie de l’année (double résidence) sur des lieux touristiques ou encore de quitter leur résidence pour des lieux touristiques au moment où ceux-ci sont moins encombrés.

Il serait souhaitable que ce phénomène d’étalement dans le temps du tourisme, même relatif, se poursuive pour atténuer les pics de saisonnalité et les concentrations trop fortes de population. Philippe Violier estimait en audition les marges de progrès limitées concernant l’étalement du tourisme littoral : il notait en effet que la très forte saisonnalité de celui-ci correspond à une pratique dominante en Occident depuis près d’un siècle, qui consiste, pour ceux qui en ont les moyens, à se reposer au bord d’une mer chaude l’été, et qu’il sera difficile de modifier ce comportement. Des marges de progression existent toutefois qu’il serait souhaitable de mieux mobiliser, notamment au mois de mai et de juin, dans les parties du littoral où le climat le permet.

Des initiatives sont d’ores et déjà mises en œuvre en ce sens par des autorités publiques et privées. C’est notamment le cas, au niveau européen, de projets de la Commission européenne, qui visent à étendre le tourisme de basse saison en aidant des personnes défavorisées de 65 ans et plus (projet « Calypso ») ou des personnes de 55 ans et plus (initiative

« Seniors en Europe ») - ces catégories d’âge étant davantage susceptibles de partir hors saison - à prendre leurs vacances dans des régions européennes où la saisonnalité touristique est forte152. M. Richard Soubielle, vice-président du Syndicat national des Agents de voyage (SNAV), notait en audition que l’Espagne avait concrétisé cette idée en mettant en place, dès 2011, le programme « Europe senior Tourism », subventionné par le gouvernement espagnol, pour faire découvrir à prix réduits la péninsule ibérique, pendant la période hivernale, aux personnes de plus de 55 ans résidant dans les pays de l’Union européenne153. Le programme Seniors en vacances (SEV) de l’ANCV, déjà cité, va dans le même sens en France en proposant toute l’année sauf en juillet et août, ce qui favorise un meilleur étalement des départs, à des personnes de 60 ans et plus retraitées ou sans emploi, de partir pour 150 destinations en France et une en Belgique en séjours de groupe, à des tarifs uniques (hors transports).

Un autre exemple est constitué par le développement des Center parcs, du Groupe Pierre & Vacances. Le concept des Center parcs, dont cinq existent en France, consiste à construire dans une forêt en zone rurale (le foncier étant, sur les littoraux plus rare et plus cher) un ensemble touristique associant des capacités d’hébergement à des équipements

151 INSEE 2009 article « Les Vacances des français depuis 40 ans » in Le tourisme en France : édition 2008, p. 36.

152 Communication de la Commission : L’Europe, première destination touristique au monde - un nouveau cadre politique pour le tourisme européen, COM (2010) 352 final, p. 10.

153 Intervention de M. Richard Soubielle lors de la table-ronde du 4 juin 2014.

installés sous une bulle, celle-ci permettant de faire fonctionner toute l’année une piscine à vagues. Ce produit qui répond, d’une certaine manière, à l’aspiration des Européens à pouvoir se reposer auprès d’une eau chaude, mais en zone rurale, favorise ainsi un meilleur étalement du tourisme dans l’année et contribue à limiter l’engorgement des littoraux154.

Une offre touristique marquée par la multiplicité

Dans le document et développement durable en France (Page 117-122)

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