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CHAPITRE 4. Elements de repère pour l’étude du site algébrique-fonctionnel

II. Retour sur le site algébrique-fonctionnel relatif à la classe de Seconde

Si l’on suit le mode d’émergence, de développement des objets mathématiques, en se centrant sur les relations épistémologiquement pertinentes qui les relient, nous pouvons d’abord voir que le traitement algébrique des équations apparaît comme étant consubstantiellement lié à deux concepts principaux, à savoir ceux de nombre et de polynôme qui sont eux-mêmes des objets d’étude. De même, le développement du concept de fonction franchit une étape considérable avec l’extension des ensembles des nombres à l’ensemble des nombres réels. Voici donc les quatre objets principaux du site algébrique-fonctionnel que sont les nombres, les polynômes, les fonctions et les équations.

Le concept de nombre réel, qui reste implicite jusqu’en classe de Seconde apparaît alors comme le chaînon manquant entre l’étude algébrique et fonctionnelle. Nous devons donc étudier de quelle manière il se présente aux élèves à travers l’enseignement dispensé.

Lorsqu’il s’agit de résoudre algébriquement une équation, le concept de polynôme apparaîtra explicitement ou implicitement, même lors qu’il s’agit de factoriser une équation du second degré pour en déterminer les solutions. Mais le concept de polynôme n’est pas un concept isolé et il n’a de sens que lors qu’il est pensé par rapport au symbolisme algébrique dont il dépend. De la même manière, il n’est pas possible de considérer les relations entre le concept de polynôme et de nombre sans que soit établi un rapport au symbolisme et au calcul algébrique. Réciproquement, nous pouvons penser que lorsque le concept de polynôme est absent ou présent d’une manière totalement implicite, ce qui est le cas en classe de Seconde, le sens du travail algébrique devrait être totalement assuré par les expressions et le calcul algébrique.

Mais la charge dévolue au symbolisme algébrique n’est pas limitée au cadre algébrique. L’histoire montre le rôle joué par le symbolisme algébrique dans le développement du concept de fonction et dans l’étude des fonctions particulières. Même si le statut du symbolisme algébrique n’apparaissait pas de façon claire dans la lecture du programme de la classe de Seconde, nous pouvons penser que l’étude des fonctions particulières à ce niveau, en l’occurrence celle des fonctions de référence, ne peut se détacher de leurs expressions algébriques pour être comprises par les élèves en tant que telles et pour les préparer à l’analyse. Nous supposons donc que les expressions algébriques, et à travers elles, le rapport des élèves au symbolisme algébrique dans l’enseignement dispensé qui peut s’en dégager, doivent être étudiés de façon précise pour évaluer les moyens d’étude des élèves et ceci, aussi bien pour le travail algébrique que pour le travail fonctionnel.

Un lien s’établit alors du cadre algébrique vers le cadre fonctionnel à travers des objets/concepts communs à ces deux modes de pensée. À savoir que les premiers objets mathématiques qui relient les équations algébriques au concept de fonction sont les courbes géométriques. Elles trouvent toute leur place dans la résolution des équations au moyen de leur intersection, comme elles ont joué un rôle dans l’émergence de la relation fonctionnelle dans la géométrie de Descartes ou dans l’étude du

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Eléments de repère pour l’étude du site algébrique-fonctionnel

mouvement en unifiant la pensée qualitative et quantitative. Mais ce lien, pour être viable, a besoin d’un second objet qui est la représentation analytique des fonctions, leur conférant le statut de calcul au même titre que les équations algébriques. La représentation graphique des fonctions qui en découle apparaît alors comme objet particulier au service de la résolution des équations et inéquations figurant au programme.

La représentation graphique pourrait fortement contribuer à la conceptualisation des fonctions, en particulier des fonctions polynômes en permettant de voir un ensemble de couples de nombres (x, f(x)), issus d’un programme de calcul, de visualiser le fait qu’à deux valeurs proches de x correspondent 2 valeurs proches de f(x), etc. et par conséquent, assurer le passage entre les cadre numérique, algébrique et fonctionnel. Cependant nous supposons que, tant que cette relation ne fait pas l’objet d’une étude précise, la représentation graphique pourrait demeurer dans l’environnement du travail algébrique des élèves sans forcement mettre en jeu le concept de fonction. En outre, sous la condition précédente, la représentation graphique d’une fonction et son expression algébrique pourraient bien faire apparaître l’usage des variations d’une fonction comme un outil pertinent pour la résolution algébrique des équations et de retour, contribuer efficacement à l’acquisition du concept de fonction, en mettant ainsi en jeu les premiers concepts de l’analyse. Ce qui rendra sans doute le rapport au concept de nombre réel et au concept d’ordre comme deux éléments essentiels de l’analyse. Nous allons le voir ci-dessous. Il faut donc ici noter que, pour évaluer les moyens d’étude des élèves de la classe de Seconde, il convient de s’intéresser au concept de fonction à la fois sous un aspect graphique, de formule algébrique mais surtout de variation puisque celui-ci sert de jalons pour l’introduction à l’analyse en classe de Première.

Voici donc deux autres objets, le graphe/relation et les variations qu’il faut retenir comme principaux pour le site algébrique-fonctionnel, auxquels il faut ajouter le concept d’ordre, comme le concept manquant entre ces deux objets.

Si la résolution d’équations n’était pas toujours évoquée dans le programme de la classe de Seconde avec celle des inéquations, nous aurions pu limiter l’identification des objets principaux du site algébrique-fonctionnel aux sept objets précédents (nombres, équations, relations/graphe, fonctions, variations, ordres). La présence de la résolution d’inéquations dans ce cadre, suppose que l’on s’interroge davantage sur le concept d’ordre et à travers lui, sur celui d’inéquation.

L’histoire nous montre que les inéquations faisaient partie des équations relatives à certains problèmes mais elles n’ont jamais été considérées comme des sujets d’étude à part entière. Elles étaient considérées comme des conditions sur une équation à résoudre. En plus, elles étaient exprimées par le registre verbal (Bagni, 2005). Du point de vue de la théorie mathématique, l’objet inéquation ne correspond donc pas à une théorie mathématique mais se trouve au croisement de divers objets. En particulier, même si leur traitement relève du domaine de l’algèbre, leur fondement se trouve dans le domaine de l’analyse où il apparaît relativement au concept d’ordre (Assude, 2002).

pas empêché les mathématiciens de l’époque de conserver la cardinalité des nombres (entiers) comme la seule propriété les concernant. Cette conception des nombres entiers durera jusqu’à ce que la validité de la démonstration par déduction soit remise en question, ce qui va conduire les mathématiciens de XIXèmesiècle à étudier les entiers comme un ensemble structuré et ordonné avec les axiomes qui les accompagnent43. Ainsi, l’émergence du calcul infinitésimal va conduire les

mathématiciens à concevoir le système R des nombres réels dans un étroit lien avec la limite et la continuité. C’est donc le contexte du calcul infinitésimal qui se trouve à l’origine du système R des nombres réels dont l’axiome que l’ensemble des nombres réels est un corps totalement ordonné en fait partie.

L’objet inéquation ou inégalité qui en découle, en tant que relation dans R ne fait donc pas partie de l’algèbre dans ses fondements mais celle de l’analyse où les notions d’approximation, de limite et de continuité sont les premières.44