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CHAPITRE 1 : CULTURE

1.10. Renforcement culturel

La pérennité de la culture tout au long du temps est due en partie à l’utilisation de renforts qui de leur intérieur sont conçus de manière explicite ou implicite pour que leurs membres les mènent à bien. L’intention est celle de faire face aux forces contra-culturelles qui luttent pour imposer leur propre vision dans une dynamique qui produit des conflits. Ainsi, les cultures recourent au renforcement culturel comme un mécanisme de règlement du comportement de leurs membres. Tandis que certains actes sont stimulés et promus, d’autres sont punis (Kitayama et al, 2004). À travers ce mécanisme, on utilise des patrons culturels spécifiques soit pour évaluer soit pour déprécier les différentes actions, que celles-ci soient dissimulées ou non. De cette manière on a étudié, par exemple, la corrélation entre le bonheur et le bien-être (Kitayama et Marcus, 2004).

Ces renforts sont « énergisants » pour la conduite humaine, ils sont des sortes d’instigateurs qui induisent le comportement des membres d’une même culture. Un renfort est vu comme un stimulant qui induit une réaction hédonistique – positive ou négative – chez les gens. Un renfort positif produit une réaction plaisante à travers la persuasion, et un renfort négatif produit une réaction défavorable, au moyen de mécanismes dissuasifs. Le renfort a deux composants : temps et fréquence (Hamblin et Miller, 1976). Tout cela en pensant maintenir les patrons culturels prédominants qu’on espère voir survivre tout au long du temps.

Ces renforts sont de différentes natures : a) sociaux, basés sur l’influence qu’exerce l’attention des congénère sur le comportement humain ; b) matériels, stimulants tangibles qui sont obtenus comme conséquence des activités de leurs membres ; c) symboliques, stimulants qui sans avoir une valeur intrinsèque en eux-mêmes sont souhaités pour leurs connotations culturelles (Gotzens, 1997).

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Afin d’éviter l’érosion de certains aspects culturels et la rupture des chaînes sociales dans quelques communautés, par exemple, on a appliqué différents programmes de renforcement culturel. Avec eux on a pu récupérer l’histoire et la tradition dans un processus de promouvoir l’apprentissage et l’acceptation de la pluralité et la diversité culturelle (Rodrìguez, 2009). L’inclusion des matières culturelles pour résoudre les problèmes fournit de nouveaux instruments pour reconnaître les différentes visions et les façons de penser.

En ce sens, le renforcement culturel est utilisé pour récupérer des aspects traditionnels et historiques comme un instrument pour promouvoir l’apprentissage et l’acceptation de la pluralité d’une société (Schneller, 1992). On recourt à lui quand on voudra promouvoir la cohésion sociale en utilisant la connaissance traditionnelle à la recherche de l’intégration de ses membres et la valorisation de ses activités. De cette manière on récupère l’histoire locale à travers les traditions orales (Rodriguez et Vergara, 2009).

La forme la plus typique de renforcement culturel est l’utilisation de la valeur donnée aux normes culturelles qui ont servi comme renforts de la conduite humaine (Greenfield, 2002), par l’application de prix et de punitions sociales et individuelles socialement admises et promues par l’ensemble des membres d’une même culture.

1.11. « En résumé »

Une étude compréhensive de la culture nous a conduits à découvrir les complexités existant autour du comportement humain. Il est clair que la conduite des membres d’une culture est déterminée par sa fonction prescriptive par la défense et la promotion des normes admises par tous. En considérant les prix et les punitions pour l’obéissance ou non, l’être humain apprend à vivre en société. Quoique chaque individu prenne sa propre décision, les connotations sociales sont évidentes.

Cette réalité des sociétés contemporaines a permis que l’homme, faisant appel à la culture et à ses différentes expressions, ait pu structurer et perpétuer les institutions sociales avec lesquelles il fait face dans sa vie de tous les jours. Cet héritage social a permis l’établissement de valeurs qui prédominent dans leur comportement individuel et qu’il accepte comme vérités irréfutables. C’est la programmation collective de la pensée qui différencie un groupe humain d’un autre et qui a transmis de génération en génération celle qui ouvre ses espaces pour admettre les expressions individuelles, familiales, religieuses, sociales, morales, sous-culturelles, politiques, économiques, légales, environnementales, d’affaires, de classe sociale et de groupes de référence comme une chose absolument normale, vu le degré d’enracinement que ces manifestations ont au sein de chaque société, de chaque groupe humain.

Face à cette perspective culturelle du comportement de l’homme, le consommateur du magasin est vu dans le cadre de ses propres réalités, avec ses propres circonstances construites à travers des générations complètes, avec sa façon de penser et d’agir, avec sa capacité de se mettre en communication dans le contexte de la réalité immédiate dans laquelle il se développe. C’est la culture de la quotidienneté qui s’impose et non la vision structurelle.

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Pour cela, faire l’étude du consommateur du magasin traditionnel implique d’assumer une attitude différente face à la culture comme élément intégrateur de la pensée et aux actes essentiellement humains. Ici la culture serait considérée au-delà des approches évolutionnistes prédominantes dans le XIXe siècle, construites autour de la sauvagerie, de la barbarie, et la civilisation comme stades du développement humain (Muñoz, 1995 ; il faut laisser de côté des propositions fonctionnalistes de Malinovski (1975) où la culture est vue comme un « organisme » et traitée comme un « objet », et où tout fait social est considéré comme quelque chose d’externe aux individus qui s’y conforment;

il faut s’éloigner des idées du structuralisme de Lévi-Strauss (1976) où, pour reposer la société complète sur un ensemble de structures inconscientes dévoilées par l’anthropologie, aucun des éléments du système ne peut souffrir un changement sans que dans les autres éléments n’interviennent différentes mutations; il faut aussi prendre une distance prudente avec les arguments des écologistes exposés par White (1982), dans lesquels les patrons culturels ne sont pas plus que la réponse d’adaptation des individus à l’environnement et aux problèmes de survie et de reproduction.

Il s’agit plutôt de voir la culture dans la perspective anthropologique comme quelque chose que l’individu porte en lui, comme un abri permanent qui comme un éternel voyageur accompagne son maître partout où il veut se déplacer dans ce monde (Gómez, 1999). De ce point de vue, la culture devra être vue, alors, toujours comme un phénomène collectif, comme le résultat des premières années de coexistence humaine, où l’univers partagé – partiellement ou totalement – avec des gens avec lesquels on vit ou on a vécu, modèle et trace l’apprentissage, la pensée et la conduite sociale. Il est dans cette atmosphère où la culture est apprise, elle est respirée et elle est intériorisée dans l’âme de chaque personne, en contact avec elle.

Pour étudier, analyser et comprendre la complexité du comportement du consommateur du magasin traditionnel colombien, il faut s’appuyer sur la perspective culturelle de Selle (1991). Les patrons de pensée prédominants (valeurs partagées) légitiment et renforcent les patrons de comportement (pratiques sociales). C’est-à-dire, le monde culturellement constitué (Venkatesh, 1995) s’insère dans l’inconscient du Colombien moyen, il donne un sens à ses pratiques de consommation traditionnellement associées aux magasins de quartier.

D’une autre côté, si toutes les manifestations d’une communauté, les réactions des individus qui lui appartiennent et les produits des activités humaines sont déterminés par les coutumes prédominantes dans leur intérieur, il est plausible d’accepter la vision compréhensive de Boas (1930) pour s’donner à l’étude du comportement des consommateurs du magasin de quartier. Quelques études ont découvert (Acevedo, 2005 ; Acevedo et al, 2007) que les comportements de ces consommateurs ont été marqués par les coutumes apprises des générations précédentes.

La culture étant un système dérivé historiquement des conceptions explicites et implicites de la vie qui tendent à être partagées par les membres d’une communauté (Kluckohn et Nelly, 1945), l’étude du comportement du consommateur de magasin doit être faite dans une perspective qui réunit l’histoire avec laquelle il est possible de comprendre son essence, en cherchant une explication des différences entre les différents groupes humains (Nanda, 1980) qui forment la nationalité colombienne.

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La Colombie est un pays divers avec des ancêtres croisés circonstanciellement, dont les preuves sont perçues dans leur structure démographique actuelle et les caractéristiques culturelles spécifiques du pays (Yunis, 2003). Les pratiques commerciales colombiennes sont attachées à son histoire (Colmenares, 1999) depuis le processus de conquête et de colonisation espagnoles et les croisements ethniques postérieurs avec les populations noires provenant de l’Afrique qui, ajoutés à la diversité culturelle de la population indigène (Triana, 1989) ont produit une culture avec de multiples manifestations pas facilement compréhensibles dans le monde des affaires d’aujourd’hui.

Pour cette même raison il est nécessaire de considérer que les comportements appris et les valeurs transmises aux individus agissent sur la société dans laquelle ils vivent et dont ils partagent les expériences (Jain, 2001). Il est clair que la manière par laquelle les Colombiens ont appris des valeurs et des croyances de leurs pères et des adultes s’est répétée au long de leur vie.

C’est seulement à travers ces rapprochements culturels qu’il est possible de comprendre le rôle que joue le magasin colombien comme renforcement culturel du consommateur.

Les patrons commerciaux prédominants en Colombie, associés à la condition de pays en développement dans lequel les aspects sociaux prédominent sur les économiques (Lessassy, 2007 ; Hernández, 1993), peuvent seulement être découverts et théorisés en mettant l’homme comme axe de l’activité sociale dans lequel convergent des aspects matériels et symboliques dans leur existence. Les produits qu’il acquiert dans le magasin et les relations qu’il soutient avec ses voisins et avec l’épicier sont une expression de la tradition et des coutumes prédominantes dans la communauté à laquelle il appartient.

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CHAPITRE 2 : RECHERCHE DES CONSOMMATEURS ET RECHERCHE