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P RECISION DES TERMES DU SUJET : LA NOTION DE COMMANDE PUBLIQUE

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b. L'écho favorable des lois types de la Commission des Nations Unies sur le droit commercial international (CNUDCI)

C. L ES REFORMES DES REGLEMENTATIONS NATIONALES RELATIVES AUX

II. P RECISION DES TERMES DU SUJET : LA NOTION DE COMMANDE PUBLIQUE

Le droit des contrats administratifs en Afrique noire francophone a fait l'objet, à partir des années 2000, d'une série de réformes qui a conduit à l'édiction d'une règlementation nouvelle, porteuse de notions renouvelées et fondées sur des principes et des sources qui le sont tout autant. L'expression commande publique se substitue peu à peu à celle de contrat administratif. Cela n'en fait pas pour autant des synonymes. Dans le

123 J.O, n° 28 du jeudi 10 juillet 2014

124 Décret n° 70-DF-530 du 29 octobre 1970 portant règlementation des marchés publics modifié et complété par le décret n° 75-513 du 5 juillet 1975. Décret n°79-35 du 2 février 1979 portant règlementation des marchés publics, JO de la République Unie du Cameroun, n° 4 du 15 février 1979, p. 127 et s. Décret n° 80-272 du 18 juillet 1980 modifiant et complétant le Décret n°79-35 du 2 février 1979 portant règlementation des marchés publics, JO de la République Unie du Cameroun du 1 er août 1980, p. 1245 et s. Décret n° 81-151 du 13 avril 1981, JO de la république Unie du Cameroun du 1 er mai 1981, p. et s. Décret n° 82-12 du 8 janvier 1982

125 Décret n° 95/101 du 09 juin 1995 portant réglementation des marchés publics, Juridis Info, oct. Nov. Déc.

1995, pp. 18-29

126 Décret n°2004/275 du 24 septembre 2004 portant code des marchés publics, Disponible sur le site de l’agence de régulation des marchés publics www.armp.cm Rubrique règlementation - Décrets.

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langage des organisations internationales, l'expression commande publique est substituée à celle de «passation des marchés» ou «public procurement».

Un «tour du monde»127 du droit des contrats des personnes publiques montre que deux principaux systèmes s'opposent128. Néanmoins, quel que soit celui que l'on prend en compte, «la commande publique» y sert à caractériser des contrats soumis à des procédures de plus en plus encadrées et fondées sur des principes matriciels communs.

Ainsi les contrats de la commande publique sont parmi les contrats des personnes publiques, ceux présentant une certaine unité de leur régime de passation et d'exécution.

Dans le Code des marchés publics et des délégations de service public du Burkina Faso, la Commande publique s'entend de «toutes les formes d'acquisition de biens, services, prestations au profit des collectivités publiques, à savoir notamment le marché public et la délégation de service public»129. Cette définition n'est pas éloignée de celles que l'on trouve en droit français. La différence se trouve dans l'origine de la notion.

L'expression commande publique est apparue en France dans la décision du Conseil constitutionnel du 23 juin 2003130, mais c'est la doctrine qui depuis, essaie de lui donner un contenu131. Alors que dans les Etats d'Afrique francophone au cœur de notre étude,

127 Référence est faite ici à l'ouvrage de Rozen NOGUELLOU et Ulrich STELKENS, (sous la dir. de) Droit compar des contrats publics, Bruxelles, Bruylant, 2010, 1012 p.

128 La première est celle selon laquelle l'administration contractante se trouve dans une «situation d'égalité juridique avec son cocontractant». La conséquence d'une telle approche est qu'elle est «traitée juridiquement comme une personne privée et n'a donc aucune prérogative spécifique «ipso iure» par rapport à son cocontractant. Toutefois, des dérogations peuvent être trouvées à cette règle en vertu d'une loi ou des clauses contractuelles à condition que celles-ci ne soient pas contraires au droit commun. En revanche dans les ordres juridiques inspirés par le droit français, le fait que la finalité du droit des contrats soit l'intérêt général, justifie l'inégalité des parties. Ce qui signifie que l'administration dispose «ipso iure» de prérogatives exorbitantes.

Cette inégalité entre les parties s'illustre surtout dans le cadre de l'exécution. (Rozen NOGUELLOU et Ulrich STELKENS, «Propos introductifs», in Rozen NOGUELLOU et Ulrich STELKENS, (sous la dir. de) Droit compar des contrats publics, op. cit. p. 10 et s. Le droit des contrats administratifs dans les Etats d'Afrique noire francophone relève de cette seconde conception.

129 Décret n°2008-173 /PRES/PM/MEF du 16 avril 2008 portant réglementation générale des marchés publics et des délégations de service public au Burkina Faso JO, n° 18 du 1er mai 2008, modifié par le décret n° 2012-123/PRES/PM/MEF du 02 mars 2012, J.O n° 28 du 12 juillet 2012

130 CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Décision du 26 juin 2003, n° 2003- 473 DC.

131 Grégory KALFLECHE, Des marchs publics la commande publique: l'volution du droit des marchs publics, Thèse de doctorat, Université Paris 2, 2004, 2 vol., 971. François LLORENS, «Typologie des

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l'origine de l'expression se trouve dans des textes. La doctrine rependra cette expression plus tard132.

L'on peut ainsi observer que les autorités du Burkina Faso, ont récemment modifié le décret instituant l'autorité de régulation des marchés publics dans le but de dénommer l'institution Autorité de régulation de la commande publique133. Au Sénégal, «les organes de la commande publique» sont ceux chargés d'organiser la passation des contrats relevant du Code des marchés publics c'est à dire les marchés publics proprement dit et les conventions de délégation de service public. Plus significative encore est l'entrée de l'expression commande publique dans le Code des obligations de l'administration qui est la loi fondamentale en matière de contrats administratifs au Sénégal.

Au delà de cet aspect formel, l'expression commande publique traduit une mutation profonde du droit des contrats administratifs. La notion de commande publique apparaît comme une solution juridique. Ce constat est encore plus pertinent dans les Etats où les textes ne font pas référence à cette notion. Elle permet de réunir tous les contrats administratifs ayant pour objet la commande de prestations quel qu'en soit le bénéficiaire et soumis à un régime encadré et fondé sur des principes communs. Dans sa thèse, le professeur KALFLECHE utilise la notion de commande publique pour qualifier la

«matière des marchés publics»134. Cette dernière regroupe l'ensemble des contrats soumis à des procédures de passation encadrées et par lesquels l'administration se procure des biens.

contrats de la commande publique», Contrats et Marchés publics, Mai 2005, n° 5, pp. 12-25. Jean-Marc PEYRICAL, «L'émergence du droit de la commande publique», Le Moniteur-Contrats publics, 2010, n°100, pp. 29-32. Éric DELACOUR, «Les fondements et les orientations de la réforme de la commande publique Du marché public à l'achat public», Contrats et Marchés publics, mai 2005, n° 5, pp. 4-11.

132 Evelyne MANDESSI BELL, «Du nouveau dans le paysage de la commande publique au Cameroun: les contrats de partenariat s’insèrent dans l’environnement légal camerounais, Village de la justice, 18 août 2008.

Mayacine DIAGNE, «Les nouvelles tendances du droit des contrats administratifs au Sénégal», Revue juridique et politique, 2009, n°1, pp. 102-130, Moustapha NGAÏDÉ, «La loi n° 2006-16 du 30 juin 2006 modifiant le code des obligations de l’administration ou le renouveau du droit des contrats administratifs au Sénégal», op. cit.

133 Décret n° 2014-554/PRES/PM du 27 juin 2014 portant création, attribution, organisation et fonctionnement de l’Autorité de régulation de la commande publique J.O n°40 du 02 octobre 2014.

134 Grégory KALFLECHE, Des marchs publics la commande publique: l'volution du droit des marchs publics, op. cit. p. 12.

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En d'autres termes, au sens où l'utilise cet auteur, la «matière des marchés publics»

dépassent une catégorie contractuelle précise pour couvrir un ensemble de contrats ayant un objectif commun à savoir procurer à l'administration des biens corporels ou des services ou bien la gestion directe ou indirecte des services publics.

Ainsi, dans le sens où elle est entendue dans notre étude, la notion de commande publique doit être clairement distinguée de celle de marché public. Les marchés publics constituent certes, la catégorie la plus importante des contrats de commande publique.

Leurs régimes de passation et d'exécution ont servi de base pour l'élaboration des procédures régissant les autres contrats de commande publique, leurs principes de base ont été étendus aux autres contrats de la commande publique. Mais alors que tous les marchés publics sont des contrats de commande publique, tous les contrats de commande publique ne sont pas des marchés publics.

L'expression commande publique permet de donner un nom générique à des contrats ayant des caractéristiques communes fondées principalement sur leur régime, mais ne répondant pas aux mêmes montages. C'est une notion englobante qui permet de répondre à la diversité des montages contractuels, à la complexité et à l'illisibilité du droit des contrats administratifs et partant, à l'impératif de sécurité juridique qui doit gouverner cette matière135. De plus dans le contexte africain où se rencontrent des textes aux origines diverses la notion de commande publique permet, aux acteurs nationaux et internationaux de parler une langue commune.

Pour l'observateur, que les contrats de délégation de service public et les marchés publics soient soumis aux mêmes règles de publicité et de mise en concurrence, que ces procédures ignorent la règle de l'intuitus personae, que toute la passation d'une délégation de service public se déroule comme si c'est un marché public, pose clairement le problème de l'existence de la catégorie des délégations de service public. Et pourtant, dans les textes la notion de «marché public» est bien distincte de celle «de délégation de service public».

135 Jean-Marc PEYRICAL, «L'émergence du droit de la commande publique», op. cit. p. 29

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A cela s'ajoute l'existence de textes instituant de nouvelles catégories de contrats et renvoyant, pour leur passation, aux procédures du Code des marchés ou les reprenant tout simplement. C'est là que la notion de commande publique révèle son pragmatisme. Tout en respectant cette catégorisation des contrats administratifs utile au fonctionnement des administrations, elle permet de comprendre la quasi unité des régimes. Elle opère ainsi une systématisation des nouvelles procédures contractuelles et des principes qui les fondent.

Des définitions de cette notion juridique136 ont été proposées. Selon le professeur François LLORENS, «les contrats de la commande publique sont ceux par lesquels les personnes publiques cherchent à se procurer un bien ou un service, y compris ce service d'une nature particulière qui consiste à gérer, avec une relative autonomie, une activité ou un équipement»137. Pour sa part, le professeur Grégory KALFLECHE considère qu'«un contrat de la commande publique est un contrat à titre onéreux par lequel une personne morale de droit public ou une personne privée qui est, soit contrôlée par une ou plusieurs personnes publiques, soit qui a en charge des deniers publics, se procure pour elle-même ou pour les usagers du service public dont elle à la responsabilisé des biens corporels ou des services»138.

Ces deux définitions confirment que la notion de commande publique est une notion ouverte, accueillante. Mais elles montrent aussi que l'on est en présence d'une notion réaliste139. Leur approche des contrats de la commande publique fondée sur leur

136 Selon le professeur Laurent RICHER, une notion juridique est une «définition juridique». C'est-à-dire,

«un instrument de qualification: [qui] fournit les éléments qui permettent de décider si un acte ou une situation entre dans une catégorie à laquelle s'applique un régime». Laurent RICHER, «L'article 1er du Code des marchés publics doit-il être révisé?», AJDA 1993, n° spécial, pp. 13-17.

137 François LLORENS, «Typologie des contrats de la commande publique», op. cit. p. 12.

138 Grégory KALFLECHE, Des marchs publics la commande publique: l'volution du droit des marchs publics, op. cit. p. 476. Allant dans le même sens, d'autres auteurs considèrent que la commande publique

«recouvre l’ensemble des processus par lesquels une personne publique procède à des achats de travaux, de fournitures et de services ou organise une prestation pour le compte de tiers» pouvant être les usagers ou la collectivité publique qu’elle gère. Xavier BEZANÇON, Christian CUCCHIARINI, Philippe COSSALTER et Michel DESTOT, Le guide de la commande publique: marchés publics, contrats de partenariat public-privé, délégations de service public, Le Moniteur, 2009, p. 15.

139 Grégory KALFLECHE, Des marchés publics la commande publique: l'évolution du droit des marchés publics, op. cit. p. 477

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objet s'accorde avec celle qui sera retenue dans cette étude. Ce qui amène à définir la commande publique comme:

une notion réunissant l'ensemble des contrats passés par une personne publique ou une personne privée contrôlée par une personne publique ou gestionnaire de deniers publics, ayant pour objet l'achat de prestations ou la gestion d'un service public et soumis à un noyau de règles communes fondées sur les principes matriciels de transparence, de liberté de transparence et d'égalité de traitement.

La notion de commande publique permet de comprendre et de présenter le droit actuel des contrats administratifs.

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